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O

O altitudo !

France, 1907 : O profondeur ! Saint Paul était tellement éberlué des mystères du christianisme, — et on le serait à moins — qu’il s’écriait sans cesse : O altitudo ! Cette exclamation de l’apôtre s’applique proverbialement aux choses incompréhensibles, stupéfiantes, qu’il est impossible à la science et au simple sens commun d’expliquer.

O fortunatos nimium

France, 1907 : (sous-entendu : sua si bona norint). « Ô trop heureux s’ils connaissaient leur bonheur ! » Locution latine tirée des Églogues de Virgile et que l’on applique à ceux qui ne savent pas apprécier la paix, la tranquillité, les liens modestes dont ils jouissent.

O tempora, o mores !

France, 1907 : « Ô temps, ô mœurs ! » Ces paroles indignées, par lesquelles Cicéron commence sa première Catilinaire pour déplorer la perversité des hommes de son temps, ont été répétées à toutes les époques par les gens faisant métier de professer la vertu, ce qui prouve que ceux qui ne la professent pas sont toujours en aussi grand nombre.

O terque quaterque beate !

France, 1907 : « Ô trois et quatre fois heureux ! » Expression de Virgile ne trouvant pas de superlatif suffisant pour exprimer le bonheur.

O’clock (five)

France, 1907 : Cinq heures : le thé de 5 heures. Anglicisme. On sait que les Anglais coupent l’intervalle qui sépare le lunch, ou second déjeuner, du dîner, par un goûter appelé le thé, qui se prend généralement vers 4 ou 5 heures. L’usage du five o’clock, ou mieux de l’afternoon tea, remonte en Angleterre vers le milieu du XVIIIe siècle.

C’est extraordinaire, c’est incroyable, mais c’est est ainsi : la plupart des femmes qui paraissent dépenser trois cent mille francs par an, n’ont pas, en leur petit sac, dix francs pour acheter, elles-mêmes, une touffe de roses, et leur rêve d’avoir demain, à Auteuil, la plus éblouissante des toilettes est troublé par la peur de la marchande juive qui exige des présences au five o’clock des maisons familières, ou du commissionnaire du coin à qui l’on doit quatre courses ! Et la morphine ne fait pas tout oublier.

(Catulle Mendès)

Oak’s

France, 1907 : On appelle ainsi, en terme de courses, un prix spécial pour les pouliches, fondé en Angleterre par lord Derby. Ce nom vient d’une magnifique plantation de chênes, en anglais the Oak’s, qui avoisinait le champ de courses d’Epsom et qui appartenait au susdit lord. L’institution des courses d’Epsom remonte à 1779. L’année suivante, commença sous le nom de Derby la grande course annuelle qui, depuis celte époque, n’a pas eu d’interruption.

Obéliscal

Larchey, 1865 : Merveilleux. — Date du transport de l’obélisque de la place de la Concorde.

Admirable ! pyramidal ! obéliscal !

1845, Almanach de la Polka.

Rigaud, 1881 : Grand, sublime, colossal. Le mot s’est dit à propos de tout ce qui sortait de l’ordinaire. Une œuvre était obéliscale, un homme était obéliscal, en souvenir de l’obélisque de la place de la Concorde.

France, 1907 : Stupéfiant, extraordinaire. Synonyme de pyramidal.

Obélisqual

Delvau, 1866 : adj. Écrasant d’étonnement, « ruisselant d’inouïsme », — dans l’argot des romantiques, amis des superlatifs étranges.

Obélisque

Delvau, 1864 : Le membre viril.

Où q’tu vas ? — J’monte chez Mélanie, pour mettre mon obélisque en pension.

On dit aussi : L’Obélisque de l’Uxor, c’est-à-dire de l’épouse, quand son mari le dresse devant elle.

Ober

Rossignol, 1901 : Argent.

Objet

Delvau, 1864 : La maîtresse, la femme que l’on baise — ou bien l’amant.

Oui, Lindor, je suis à toi
Cher objet de ma flamme,
Je veux vivre sous ta loi.

Le Barbier.

Ce n’est qu’an Lion d’or
Que le plaisir charme la vie :
Sans bruit, sang effort,
On y brave les coups du sort ;
Sitôt que l’archet
Vient exhaler son harmonie,
À trois sous l’cachet
On peut fair’ danser son objet.

Cogniard frères.

Nous irons au bal ce soir et tu me montreras ton objet.

A. Vitu.

Larchey, 1865 : Amante, objet de la flamme amoureuse.

Il apprend que le cher père à cloîtré son objet.

Désaugiers.

Quand on aime, on aime tout de son objet.

Balzac.

Delvau, 1866 : s. m. Maîtresse, — dans l’argot des ouvriers.

Rigaud, 1881 : Femme aimée. Nos pères se servaient beaucoup de ce mot, abréviation de : objet de ma flamme.

Hayard, 1907 : Maîtresse.

France, 1907 : Maîtresse ; argot populaire.

Quand on aime, on aime tout de son objet.

(Balzac)

Obligeant

d’Hautel, 1808 : Les notaires sont des personnes obligeantes. Jeu de mots, parce que les notaires font état de passer des obligations.

Obnubilation

France, 1907 : Éblouissement vague, état ténébreux ; du latin obnubilus. nébuleux. Néologisme médical.

Nous vivons de papier noirci. Pas un étage de maison dans nos villes, pas une chaumine dans nos campagnes où, le matin, avec la soupe ou le café au lait, du citoyen français ne se débrouille de l’obnubilation nocturne en parcourant la feuille familière : et de sa cahute roulante, le berger hèle le porteur du Petit Journal qui passe sur la route en sonnant de sa trompe.

(Émile Bergerat, Journal)

Obscène

Delvau, 1864 : Impudique, indécent, ordurier.

L’autre emmène un jeune homme imberbe, aux traits rougis,
Puis injurie, avec une obscène posture,
Le stupide garçon qui sert en ce logis.

A. Glatigny.

Observasse

Rigaud, 1881 : Observation. Une petite observasse en passant.

France, 1907 : Remarque ; argot populaire.

Obstacle

Delvau, 1864 : Employé dans un sens obscène pour désigner la virginité.

Du vin que l’on buvait alors,
La vertu tenait du miracle,
Puisque Loth, sans beaucoup d’efforts,
Sut triompher d’un double obstacle.

Parny.

Obtenir tout d’une femme

Delvau, 1864 : Coucher avec elle, — les parties, en ce cas, étant le tout.

Il y a une dame de considération dans le monde qui veut faire châtier un jeune homme, pour l’avoir méprisée après avoir tout obtenu d’elle.

La Popelinière.

Obusier

France, 1907 : Le derrière.

À la vue de cet énorme obusier qui lui apparaissait au travers des interstices de la haie, crachant une abondante mitraille, le peintre suspendit son travail et laissa même tomber sa brosse.

(Les Propos du Commandeur)

Ocas (d’)

M.D., 1844 : Id d’hasard.

Occase

Halbert, 1849 : Occasion, rencontre heureuse.

Larchey, 1865 : Occasion.

Deux francs cinquante de bénef, profitez de l’occase.

A. Second.

D’occasion : De mince valeur. — Allusion. — On dit : une vertu, un héros d’occasion.

Ces Desgrieux de carton, ces Lucien de Rubempré d’occasion.

Delvau.

Maria, qui se case, Au mois, Fait sa tête d’occase, Parfois.

Ce couplet, extrait du Prado, de Privat d’Anglemont, 1846, peut se traduire ainsi en langue vulgaire : Maria, à laquelle un amant paie chaque mois son entretien, fait parfois sa tête d’occasion, c’est-à-dire sans avoir de quoi légitimer cet orgueil.

Delvau, 1866 : s. f. Apocope d’Occasion, — dans l’argot des faubouriens.

Rigaud, 1881 : Occasion. Un objet d’occase, un objet qui a servi. — Châsse d’occase, œil de verre.

Hayard, 1907 : Aubaine.

France, 1907 : Occasion ; argot des faubouriens.

Les jeunesses qui ont des guibolles d’acier ont gambillé sur les pavés pendant une ou deux nuits.
Cela ne prouve rien, nom de dieu !
Ceux-là ont profité de l’occase et ils ont bougrement bien fait. Dans la garce de société actuelle, on n’a que les plaisirs qu’on se donne or la vie y est si dégueulasse que quand il se présente un brin de jubilation, on aurait tort de cracher dessus…
Oh mais, faut pas croire que la participation du populo aux fêtes des Jean-foutres prouve qu’il ait ces derniers à la bonne. Le populo est peu éplucheur de sa nature : il ne voit dans les fêtes qu’une occase de plaquer le turbin, de foutre les frusques du dimanche, de tordre le cou à quelques chopines, — bref, de se donner du bon temps.

(La Sociale)

Mère d’occase, prétendue mère ; argot populaire. Œil ou chose d’occase, œil de verre.

Occasion

Halbert, 1849 : Chandelier.

Delvau, 1866 : s. f. Chandelier, — dans l’argot des voleurs.

Rigaud, 1881 : Chandelier, — dans l’ancien argot.

La Rue, 1894 : Chandelier.

France, 1907 : Chandelier ; argot des voleurs.

Occasion (d’)

Delvau, 1866 : De peu de valeur, d’un prix très réduit, — dans l’argot du peuple qui dit cela à propos des choses.

Occire

d’Hautel, 1808 : Tuer, assommer, assassiner, arracher là vie à quelqu’un.
Il est occis. Pour, il est mort, il est tué.

Occiseur

d’Hautel, 1808 : Pour bourreau, assassin, meurtrier.

Occuper de politique (s’)

France, 1907 : Faire du chantage dans les affaires de mœurs.

Les hommes qui se livrent au genre d’escroquerie dit chantage, et qui, dans leur argot, prétendent s’occuper de politique, spéculent sur les habitudes vicieuses de certains individus, pour les attirer, par l’appât de leurs passions secrètes, dans des pièges où ils rançonnent sans peine leur honteuse faiblesse.

(Ambroise Tardieu, Étude médico-légale)

Occuper son numéro

France, 1907 : Argot théâtral.

C’est, dit Gustave Fustier, se tenir invariablement pendant les répétitions et les représentations à la place que le régisseur indique à chaque acteur, au moment où il règle la mise en scène.

Oche

Rigaud, 1881 : Oreille. L’oche me cloche, l’oreille me tinte.

Oches

Hayard, 1907 : Oreilles.

France, 1907 : Oreilles ; corruption de loches.

Ocréa

Larchey, 1865 : Soulier. Les élèves de l’École de Saint-Cyr font seuls cet emprunt au grec.

Le pauvre Saint Cyrien portant des ocréas.

Souvenirs de Saint-Cyr.

Ocréas

Delvau, 1866 : s. m. pl. Souliers, — dans l’argot des Saint-Cyriens, qui se souviennent de leur Virgile et de leur Horace. Ocreatus in nive dormis, a dit ce dernier, qui n’était pas fait pour dormir tout botté sous la neige, comme un soldat, car on sait qu’à la bataille de Philippes il prit la fuite en jetant son bouclier aux orties.

France, 1907 : Souliers ; argot de Saint-Cyr ; c’est-à-dire réceptacle d’ocre. On sait que l’ocre est une terre argileuse colorée par un peroxyde de fer ou par du tritocarbonate de fer, laquelle offre une vague ressemblance avec le résidu appelé plaisamment essence de facteur rural ; à moins que le mot ne vienne du latin ocréa, bottine.

Ocugné

France, 1907 : Qui a la figure et les mains sales, et, selon toute probabilité, le reste.

Oculaire astronomique

Rigaud, 1881 : Carambolage facile à exécuter, les deux billes à toucher étant à côté l’une de l’autre. Les joueurs de billard disent également : « Une paire de lunettes ».

Odalisque

Hayard, 1907 : Prostituée.

Odds

France, 1907 : Terme de courses anglais adopté par les gens du turf pour exprimer les inégalités de rapport qui existent dans un pari, par exemple dix contre six.

Odéonie

France, 1907 : L’Odéon et son voisinage. Les plaisanteries sur la solitude de l’Odéon sont traditionnelles ; on se rappelle celle de Salvador, secrétaire de ce théâtre en 1869. Comme on lui demandait : « Qui donc joue, ce soir, le Misanthrope, à l’Odéon ? » Il répondit simplement : « C’est le caissier. »

Quel triomphe pour un ministre des beaux-arts de décider le beau monde à les ponts, à faire des voyages d’exploration sur la rive gauche et à peupler cette contrée lointaine et déserte que Ganderax a spirituellement baptisée l’Odéonie !

(Francois Coppée)

Odeur

d’Hautel, 1808 : Être en bonne ou mauvaise odeur. Être en bonne ou mauvaise réputation.

Odeur de gousset

France, 1907 : Argent. Cette expression employée au XVIIIe siècle, n’est plus usitée. On disait, du moins dans le peuple, d’une personne riche qu’elle avait l’odeur de gousset rudement forte.

Odi profanum vulgus et arceo

France, 1907 : « Je hais le profane vulgaire et me garde de son approche. » Locution latine tirée des Odes d’Horace.

Odor di femina

France, 1907 : Odeur de la ferme. Italianisme. Henri IV prisait par-dessus tout l’odor di femina, spécialement celle émane des parties secrètes. Tout le monde, ou à peu près, connait l’aventure de cette demi-mondaine qui s’était couverte des plus exquis parfums pour recevoir un riche Anglais :
— « Médème, fit celui-ci indigné, je payai vo très cher pour sentir Le odor di femina et non le odeur qu’on vendait dans les petits bouteilles. » Et prenant son chapeau, il partit.

Il se voit là-bas dans la foule,
Choisissant les couloirs étroits ;
Le satin des dominos coule
Félinement entre ses doigts.
Il vole en zigzag dans les groupes,
Humant l’odor di femina,
Palpant des tailles et des croupes,
Tout ce qu’aux femmes Dieu donna.

(Jacques Rédelsperger)

Off

Fustier, 1889 : Officier.

Il a tout pris, le vieil off, et le lit du major et sa femme.

(A. Delpit : Figaro, février 1887.)

Offenser

d’Hautel, 1808 : Il n’y a que la vérité qui offense. Pour dire, rien n’est plus sensible que de s’entendre reprocher des fautes dont on s’est rendu coupable.

Obsequium amicos, odium veritas parit. Ter.

Office

d’Hautel, 1808 : Il a acheté un office de trépassé. Pour, il est mort.

Officemar

Hayard, 1907 : Officier.

Officier

d’Hautel, 1808 : Officier de la manicle. Filou, fripon, coupeur de bourses.

d’Hautel, 1808 : Il officie bien à table. Pour, c’est un bon convive, un bon vivant, un homme de bon appétit, qui tient un rang distingué à table.

Delvau, 1866 : s. m. Garçon d’office, — dans l’argot des limonadiers.

Rigaud, 1881 : Garçon d’office dans un café. Il fait chauffer le café, prépare les grogs et souvent lave la vaisselle.

Rigaud, 1881 : « Tous les jolis bonbons glacés ou en sucre candi, exposés aux étalages des marchands confiseurs, sont l’ouvrage des officiers. »

(P. Vinçard, les Ouvriers de Paris.)

Rossignol, 1901 : Celui qui rince les verres dans les cafés et restaurants.

France, 1907 : Garçon d’office ; argot des domestiques.

Officier de guérite

Merlin, 1888 : Simple soldat.

France, 1907 : Simple soldat.

Officier de la manicle

France, 1907 : Escroc ; argot des voleurs.

Officier de loge

Delvau, 1866 : s. m. Frère chargé d’un office, — dans l’argot des francs-maçons.

France, 1907 : Frère maçon chargé d’un office dans sa loge.

Officier de tango

France, 1907 : Tricheur au jeu.

Officier de tango, de topo

La Rue, 1894 : Tricheur au jeu, grec.

Officier de topo

Delvau, 1866 : s. m. Homme qui triche au jeu de la bassette, — dans l’argot des joueurs. On dit aussi Officier de tango.

Officier du pont-neuf

France, 1907 : Sobriquet donné aux filous et coupeurs de bourses à l’époque où le Pont-Neuf était couvert de boutiques.

Officier payeur

Merlin, 1888 : Le camarade qui acquitte le montant des dépenses faites au cabaret.

France, 1907 : Camarade qui paye à boire.

Offrande

d’Hautel, 1808 : À chaque saint son offrande. Pour dire, il faut rendre des civilités, des devoirs à tous ceux qui ont du pouvoir ou du crédit dans une affaire, et honorer chacun selon son rang.

Offre de Saint Crépin

France, 1907 : Offre qui n’est jamais realisée.

On qualifie ainsi, dit Champollion-Figeac, les offres que font les personnes habituées à en faire beaucoup et qui n’en réalisent aucune. Ce proverbe particulier à Grenoble doit son origine à un vieux tableau qu’on voyait autrefois dans une chapelle dédiée à saint Crépin et à saint Crépinien, frères martyrs. Celui-ci, un tranchet à la main, coupe des souliers, et saint Crépin en donne une paire à un pauvre qui lui demande l’aumone ; mais, comme ces souliers ne sortent jamais de la main du saint qui les offre, on a fait de là le dicton offre de saint Crépin.

(Nouvelles Recherches sur les patois ou idiomes vulgaires de la France)

Ognon

d’Hautel, 1808 : Pérette à l’ognon. Petite fille babillarde et inconséquente, qui fait la bégueule et la mijaurée.
Il y a de l’ognon. Locution basse et triviale, tirée d’une chanson populaire, pour, il y a quelque chose là dessous ; on trame quelque mauvaise affaire.
Il croît à la façon des ognons. Pour dire que quelqu’un épaissit et ne grandit pas.
Être vêtu comme un ognon. Se dit de quelqu’un qui porte un grand nombre d’habits les uns sur les autres.
Se mettre en rangs d’ognons. Se placer en un rang ou il y a des personnes plus considérables que soi.
Il s’est frotté les yeux avec un ognon. Se dit par ironie d’une personne peu sensible, et qui affecte de verser des larmes pour un évènement qui ne l’intéresse que faiblement.

Delvau, 1866 : s. m. Grosse montre, de forme renflée comme un bulbe, — dans l’argot du peuple, ami des mots-images. On remarquera que, contrairement à l’orthographe officielle, j’ai écrit ognon et non oignon. Pour deux raisons : la première, parce que le peuple prononce ainsi ; la seconde, parce qu’il a raison, oignon venant du latin unio. J’ai même souvent entendu prononcer union.

Ognon (il y a de l’)

Delvau, 1866 : On va se fâcher, on est sur le point de se battre, par conséquent de pleurer. Argot des faubouriens.

Ognons (aux) !

Delvau, 1866 : Exclamation de l’argot des faubouriens, qui l’emploient comme superlatif de bien, de bon et de beau. On dit aussi Aux petites ognons ! et même Aux petites oignes ! Cette expression et celle-ci : Aux petits oiseaux ! sont les descendantes de cette autre : Aux pommes ! qu’explique à merveille une historiette de Tallemant des Réaux.

Ogre

d’Hautel, 1808 : Manger comme un ogre. Pour dire, avec, excès, goulument.

Larchey, 1865 : Agent de remplacement. Allusion à leur trafic de chair humaine. — Ogre : Usurier. — Ogresse : Marchande à la toilette (Vidocq). — Allusion à leur avidité. — Ogre :

Les chiffonniers donnent ce nom à celui qui leur achète le produit de leurs recherches nocturnes, en détail et par hottes, pour les revendre en gros, après un triage minutieux et intelligent. Ordinairement, on ne devient ogre qu’après avoir passé par tous les degrés de l’état de chiffonnier. Il fut un temps, il est vrai, où ce nom était synonyme d’exploiteur et même de receleur. Dans ce but, l’ogre possédait à côté de son établissement d’achat de chiffons un débit de liqueurs qu’il faisait gérer par un affidé ou un compère ; il y recevait clandestinement des malfaiteurs qui apportaient là les produits de leurs rapines.

Castillon.

Delvau, 1866 : s. m. Marchand de chiffons, — dans l’argot des chiffonniers.

Delvau, 1866 : s. m. Agent de remplacement militaire, — dans l’argot des voleurs. Signifie aussi : Usurier, Escompteur.

Rigaud, 1881 : Ouvrier typographe modèle. L’ogre travaille à la journée, il est bon père de famille, bon époux et bon garde national au besoin.

Rigaud, 1881 : Chiffonnier en gros, négociant en chiffons, — Recéleur. — Escompteur sans vergogne. — Agent de remplacements militaires mis en disponibilité par la promulgation de la loi sur le service obligatoire.

La Rue, 1894 : Chiffonnier en gros. Usurier.

France, 1907 : Recéleur ; chiffonnier en gros ; il dévore les petits.

France, 1907 : On appelait ainsi, du temps de la conscription, les marchands d’hommes qui fournissaient des substituants aux fils de famille.

France, 1907 : « Il est une variété de compositeurs dont les mœurs sont tout à fait différentes : immobiles comme des termes devant leurs casses, ils éloignent jusqu’à l’ombre de la dissipation ; ils vivent de peu ; et leur ardeur pour la besogne leur a fait donner le nom d’ogres par leurs confrères, qui les méprisent. Ils font en sorte d’obtenir des places avantageuses, telles que celles de metteurs en pages, hommes de conscience, correcteurs, protes, etc. »

(Jules Ladimir, Le Compositeur typographe)

Ogresse

Bras-de-Fer, 1829 : Femme qui loue des effets aux filles.

Halbert, 1849 : Tavernière de tapis-franc ou maison galante.

Delvau, 1866 : s. f. Marchande à la toilette, proxénète, — dans l’argot des filles, ses victimes.

Delvau, 1866 : s. f. Maîtresse de tapis-franc, de maison borgne, — dans l’argot des voleurs, qui ont sans doute voulu faire allusion à l’effroyable quantité de chair fraîche qui se consomme là dedans.

Rigaud, 1881 : Cabaretière, propriétaire d’un garni à la nuit et à la corde. — Revendeuse à la toilette, vendeuse et revendeuse de chair humaine plus ou moins fraîche.

La Rue, 1894 : Maîtresse d’hôtel borgne. Cabaretière. Marchande à la toilette. Proxénète.

Virmaître, 1894 : La procureuse ou la proxénète, bouquetière ou marchande à la toilette ; elle donne cent sous aux filles quand elle touche vingt francs, elle leur vend mille francs ce qui vaut cent francs. Mot à mot : l’ogresse les mange toutes crues (Argot des filles).

Virmaître, 1894 : Femme friande de chair fraîche appartenant à son sexe (Argot des filles). V. Accouplées.

Hayard, 1907 : Tenancière de caboulot. Proxénète.

France, 1907 : Tenancière d’un débit de bas étage, maîtresse d’un lupanar, d’un hôtel borgne, marchande à la toilette, proxénète.

France, 1907 : « Femme friande de chair fraîche appartenant à son sexe. » (Ch. Virmaître)

Oh ! La ! La !

Delvau, 1866 : Exclamation ironique et méprisante de l’argot des faubouriens, qui la mettent à toutes sauces.

Oie

d’Hautel, 1808 : Bête comme une oie. Se dit d’une personne sans intelligence, sans pénétration, qui a l’esprit étroit et bouché.

Oie (jeu de la petite)

France, 1907 : Les menus plaisirs de l’amour et de la galanterie, ou, en d’autres termes, les bagatelles de la porte ; à quoi s’amusent entre eux par timidité adolescents et adolescentes, les collégiens avec leur petite cousine ignorante — s’il en est encore — serrements de mains, billets doux, baisers furtifs derrière la porte et autres mignardises, prélude de plus sérieux engagements. « Petite oie, petite joie », dit le proverbe. Le proverbe à tort.

Une fleur donnée, une main serrée dans les petits coins, un baiser effleurant une mèche de cheveux, bref, ce que nos pères appelaient si gentiment : la petite oie.

(Raoul Toché)

Oie (petite)

France, 1907 : Abatis.

Oie du frère Philippe

Delvau, 1866 : s. f. Jeune fille ou jeune femme, — dans l’argot des gens de lettres, qui ont lu les Contes de la Fontaine. L’expression tend à s’introduire dans la circulation générale : à ce titre, j’ai dû lui donner place ici. Pourquoi le peuple, qui a à sa disposition, à propos de la « plus belle moitié du genre humain », tant d’expressions brutales et cyniques, n’emploierait-il pas cette galante périphrase ? Le peuple anglais dit bien depuis longtemps, à propos des demoiselles de petite vertu, les Oies de l’évêque de Winchester (The bishop of Winchester’s geese).

Oie du roi (manger l’)

France, 1907 : Être exposé à rembourser ce que l’on a volé dans les deniers publics. Ce vieux dicton s’exprimait ainsi : « Celui qui a mangé de l’oie du Roy, cent ans après doit en rendre les plumes. » C’est pourquoi les riches bourgeois ou marchands avaient coutume de spécifier dans leurs testaments que leurs enfants n’eussent pas à entrer dans des familles où l’on avait manié les fonds royaux, à cause des confiscations et des exécutions de justice qui arrivaient continuellement et longtemps parfois après la mort du fonctionnaire prévaricateur ou simplement accusé de prévarication.

Oignez vilain, il vous poindra

France, 1907 : Vieux dicton populaire auquel on ajoute : « Poignez vilain, il vous oindra. » Obliger au voyou, c’est s’exposer à recevoir en échange des désagréments et des injures ; rien de plus vrai que ce dicton confirmé chez tous les peuples. Un proverbe du temps de Richard II, roi d’Angleterre, dit : We have no worse enemy than he whom we save from the gallows (Nous n’avons pas de plus grand ennemi que celui que nous avons sauvé de la potence).

Oignon

Larchey, 1865 : Montre (Vidocq). — Allusion de forme. — Aux petits oignons : Très-bien. — On sait combien le peuple aime ce légume. — On dit par abréviation : Aux petits oignes ! — V. Aux pommes. — Il y a de l’oignon : Il y a du grabuge. — Allusion aux pleurs que l’oignon fait verser.

S’prend’ de bec c’est la mode,
Et souvent il y a de l’oignon.

Dupeuty.

Rigaud, 1881 : Montre d’argent épaisse et large.

La Rue, 1894 : Grosse montre démodée. Aux petits oignons, très bien.

Virmaître, 1894 : Montre énorme. Argot du peuple qui dit : ognon.
— Ton ognon marque-t-il l’heure et le linge ? (Argot du peuple).

Hayard, 1907 : Grosse montre.

France, 1907 : Montre épaisse, telle qu’on les faisait autrefois, ce qui leur donnait quelque similitude avec un oignon.

France, 1907 : L’anus, autrement dit le trou de balle ; argot des souteneurs. On dit aussi oignon brûlé.

France, 1907 : Bruit, tapage, grabuge. « Il a de l’oignon » est le refrain d’une chanson populaire fort en vogue sous le consulat et les premières années de l’empire. Cette expression s’emploie aussi pour dire qu’il y a quelque chose de désagréable, que des difficultés vont surgir, métaphore tirée de ce que les vapeurs d’oignons piquent les yeux et arrachent les larmes.
Le comte Jaubert raconte que, l’empereur Napoléon Ier rentrant un jour aux Tuileries de très mauvaise humeur, le suisse dit tout bas à son voisin : « Il paraît qu’il y a de l’oignon. » L’empereur, qui l’avait entendu, se dirigea vers lui et lui dit : « Eh bien ! oui, il y a de l’oignon ! » Le malheureux faillit tomber à la renverse.
On disait autrefois, quand on se jouait de quelqu’un, qu’on lui baillait de l’oignon :

— Par nostre Dame ! on m’a baillé de l’oignon, et si ne m’en doubtoye guères…. Le dyable emporte la gouge… !

(Les Cent Nouvelles nouvelles)

France, 1907 : Argent. « Tu peux l’épouser, elle à de l’oignon. » L’expression est très ancienne ; on la trouve dans les vieux poètes :

Ainsi parloyent les compaignons
Du bon maistre Françoys Villon,
Qui n’avoyent vaillant deux ougnons,
Tentes, tapis ne pavillon.

(Les Repenes franches)

Les Dannois jadis et Saxons
À vous, Anglois, firent grans armes ;
Ils n’y gagneront deux oygnons,
Non obstant leurs grans vuaquarmes.

(Robert Gaguin, Le Passe-temps d’oysiveté)

Oignon (il y a de l’)

Rigaud, 1881 : Ça va mal, les affaires vont se gâter, les coups et les pleurs sont à la tombante.

Oignon (l’)

Virmaître, 1894 : Il s’appelle aussi trou de balle (Argot des souteneurs). V. Figne. N.

Hayard, 1907 : L’anus.

Oignon (vêtu comme un)

France, 1907 : Avoir plusieurs vêtements les uns sur les autres, comme l’oignon qui est enveloppé de plusieurs pelures.

Oignons (aux petits)

France, 1907 : D’une façon excellente. « Je vais vous faire cela aux petits oignons, vous vous en lécherez les babines. »

— Vous savez, elle est cocasse votre chanson et vous l’avez détaillée aux petits oignons !

(Edgar Monteil)

On dit aussi petites oignes :

On ne saurait trop imiter les maîtres, surtout lorsqu’ils vous donnent l’exemple et la manière de cuisiner eux-mêmes la ratatouille de leur gloire et d’en éplucher les pelites oignes. J’ai choisi, d’ailleurs sans fatigue, mes gribouillages les plus récents, soit ceux de la semaine dernière.

(Émile Bergerat, Mon Journal)

Cette expression s’emploie également pour désigner une façon de traiter quelqu’un rudement : « Je vais vous arranger aux petits oignons. »
Marchand d’oignons se connait en ciboules, expression proverbiale signifiant que quand on exerce un métier, on en connaît toutes les parties.

Oignons (chaîne d’)

Rigaud, 1881 : Les dix d’un jeu de cartes, — dans le jargon des ouvriers.

France, 1907 : Dix de cartes.

Oignons (champ d’)

France, 1907 : Cimetière.

Oignons (peler des)

Rigaud, 1881 : Gronder.

France, 1907 : Gronder.

Oignons (rang d’)

France, 1907 : Sur une même ligne. Se mettre en rang d’oignons se dit aussi pour prendre place dans une réunion où l’on n’est pas invité, dans une assemblée à laquelle on n’a pas le droit d’assister.
On fait venir l’expression proverbiale être assis en rang d’oignons d’Artus de la Fontaine Solaro, baron d’Oignon, qui faisant l’office de grand maître des cérémonies aux états de Blois, assignait les places et les rangs des seigneurs et des députés. C’est aller chercher bien loin une explication pourtant bien naturelle. Ne vient-elle pas tout simplement de la manière dont les paysans assemblent leurs oignons avec des liens de paille par rang de grosseur ?

Oignons, Oignes (aux petits)

Rigaud, 1881 : Excellent, supérieur. L’oignon joue un grand rôle dans la casserole du peuple de Paris pour qui le miroton est un plat fondamental et patriotique.

Eh ben, sergent, trouvez-vous que je lui aie arrangé ça aux petits oignons ?

(Alph. Arnault et L. Judicis, Les Cosaques.)

Oiseau

d’Hautel, 1808 : Un oiseau à gros bec. Locution burlesque pour dire un homme, une personne douée de raison ; un goinfre, un gourmand.
C’est aux oiseaux. Locution populaire et triviale qui signifie, c’est très-bon, excellent ; c’est ce qu’il faut, tout ce que l’on peut désirer.
Ainsi, pour exprimer qu’un homme est très-bien fait, qu’une femme est très-belle, on dit qu’Il est aux oiseaux ; qu’elle est aux oiseaux.
Oiseau de Saint-Luc.
Au figuré, un bœuf ; et par extension, un lourdaud, un sot, un ignorant.
Petit à petit, l’oiseau fait son nid. Pour dire, qu’avec le temps, l’économie et le travail, on par vient à s’établir solidement.
Ce n’est pas viande pour vos oiseaux. Pour cela ne vous est pas destiné ; ce n’est pas pour des gens de votre espèce.
Il est comme l’oiseau, sur la branche. Se dit d’un homme qui n’a point de sort assuré ; qui vit aux dépens des autres.
L’oiseau s’est envolé. Se dit d’un prisonnier qui s’est évadé, que l’on n’a pu prendre.
Voilà une belle cage pour un si petit oiseau. Se dit par mépris d’un parvenu qui se loge dans des appartemens bien au-dessus de sa condition.
C’est un bel oiseau. Façon ironique de dire qu’un homme est laid, mal bâti, mal fait, et pour témoigner le grand mépris qu’on fait de sa personne.

Delvau, 1866 : s. m. Original ; homme difficile à vivre, — dans l’argot du peuple, qui n’emploie presque toujours ce mot que dans un sens péjoratif ou ironique. Ainsi il dira, à propos d’un homme qu’on lui vante et qu’il n’aime pas : « Oui, un bel oiseau ! » Ou, à propos d’un homme taré ou suspect : « Quel triste oiseau ! » Ou, à propos d’un homme laid ou ennuyeux : « Le vilain oiseau ! » Ou, à propos d’un homme excentrique : « Drôle d’oiseau ! » Les Anglais disent de même : Queer bird.

Delvau, 1866 : s. m. Auge à plâtre, — dans l’argot des maçons.

Rigaud, 1881 : Individu qui sort on ne sait d’où. — Vilain oiseau, vilain monsieur, triste sire.

Rigaud, 1881 : Auge de maçon.

La Rue, 1894 : Fausse clé. Pince d’effraction.

Virmaître, 1894 : Hélas ! quand il est envolé c’est pour longtemps et les regrets si amers qu’ils soient sont superflus. Heureux encore s’il ne laisse pas un petit dans la cage.
— Elle a perdu son oiseau (Argot du peuple). N.

Hayard, 1907 : Individu.

France, 1907 : Pucelage. « Jeannette a laissé envoler son oiseau. »

France, 1907 : Fausse clef, pince d’effraction ; synonyme de rossignol ; argot des voleurs. Quand la fausse clef fonctionne bien et ouvre, c’est l’oiseau qui chante. Filer l’oiseau, c’est introduire la pince ou la fausse clef.

France, 1907 : Auge à plâtre, à mortier ; argot des maçons. C’est aussi le manœuvre ou goujat qui porte l’auge.

Oiseau (faire l’)

Rigaud, 1881 : Faire la bête, l’ignorant, — dans l’ancien argot.

France, 1907 : Faire l’imbécile, terme poli pour « Faire l’oie » ou « le dindon ».

Oiseau de cage

Delvau, 1866 : s. m. Prisonnier. Les ouvriers anglais disent : Jail bird (oiseau de prison).

Rigaud, 1881 : Prisonnier, — dans l’ancien argot.

France, 1907 : Prisonnier. Les Anglais ont la même expression : oiseau de geôle, « jail bird. »

Oiseau de la mort

France, 1907 : Hibou, chouette, engoulevent.

Oiseau de la passion

France, 1907 : Pie-grièche.

Oiseau de mort ou de malheur

France, 1907 : Le corbeau, et, à cause du noir, le prêtre. Dans les campagnes anglaises et principalement dans l’Essex, les corbeaux, suivant leur nombre, sont de bon ou de mauvais augure. Il n’est pas de countrywoman qui ne connaisse ce dicton :

One’s unlucky,
Two’s lucky,
Three is health
Four is wealth,
Five is sickness,
And six is death.

Un est signe de malheur, deux signe de chance, trois signe de santé, quatre signe de richesse, cinq de maladie et six de mort.
Quelques dictons sur oiseau :

Plus l’oiseau est vieil, moins il veut se défaire de sa plume.
  Mieux vaut être oiselet au bocage
  Que grand oiseau en cage.
Juge l’oiseau à la plume et au chant,
Et au parler l’homme bon ou méchant.

Oiseau de saint Luc

France, 1907 : Le bœuf. On sait que les quatre évangélistes ont chacun leur emblème : saint Marc a le lion, saint Matthieu, l’ange, saint Jean, l’aigle, et saint Luc, le bœuf. Le bœuf passant pour le plus lourd et le plus stupide des animaux, on appelait par dérision les gens stupides et grossiers oiseau de saint Luc, d’autant mieux que le bœuf de l’évangéliste est orné d’une paire d’ailes.
Léger comme l’oiseau de saint Luc, lourd, pesant, stupide comme un bœuf.

Oiseau des îles Marquises

Fustier, 1889 : Absinthe. Rapprochement de couleur.

France, 1907 : Absinthe, dans l’argot des journalistes qui la dénomment ainsi à cause des perroquets verts abondants dans cet archipel. Voir Perroquet.

Oiseau fatal

Rigaud, 1881 : Corbeau, — dans le jargon des voleurs qui, une fois par hasard, se sont inspirés de l’argot académique.

Oiseau qui chante

La Rue, 1894 : Fausse clé qui ouvre. Filer l’oiseau. Introduire la pince-monseigneur sous la porte ou la fausse clé dans la serrure.

Oiseaux (aux)

Larchey, 1865 : Très-bien.

Il est meublé aux oiseaux.

Balzac.

Pour exprimer qu’un homme est très-bien fait, qu’une femme est très-belle, on dit qu’ils sont aux oiseaux.

1808, d’Hautel.

Oiseau : Triste personnage. V. d’Hautel.

Minute ! quel est c’t oiseau-là ?

Léonard, parodie, 1863.

Oiseau fatal : Corbeau (Vidocq). — On sait que le corbeau est pour le peuple un mauvais présage.

Rigaud, 1881 : Parfait, très soigné. Est-ce une allusion, au célèbre couvent des Oiseaux où les demoiselles du meilleur monde, c’est-à-dire du monde le plus riche, reçoivent une éducation soignée ?

France, 1907 : Très bien, excellent.

— Laissez-vous faire, Mam’zelle, je vous arrangerais cela aux oiseaux.

(Les Joyeusetés du régiment)

Oiseaux (aux) !

Delvau, 1866 : Exclamation de l’argot des faubouriens, qui l’emploient comme le superlatif de bien, de beau, de bon. Une femme est aux oiseaux quand elle réunit la sagesse à la beauté. Un mobilier est aux oiseaux quand il réunit l’élégance et la solidité au bon marché, etc., etc. On dit aussi Aux petits oiseaux !

Oiseaux (élevée aux)

France, 1907 : Bien élevée, comme le sont — ou devraient l’être — les jeunes personnes qui sortent de la maison d’éducation religieuse « Les Oiseaux », où sont élevées nombre de jeunes filles appartenant à la noblesse et à la riche bourgeoisie.

— Si jamais on aurait pu imaginer ça d’elle ! Ah ! mon Dieu ! à qui se fier ! Donnez donc de l’éducation à vos enfants pour arriver à ce résultat ! Enceinte ! Une fille élevée aux Oiseau.

(Hetor France)

Oiseaux (se donner des noms d’)

Rigaud, 1881 : Se donner des noms empruntés au vocabulaire de l’amour. Mon loulou, ma petite chatte, mon trésor, mon chien vert, sont des noms d’oiseau. Mon serin n’est pas un nom d’oiseau.

Oiselle

France, 1907 : Fillette, petite ouvrière.

Elle me contait sa vie, la vie simple des petites oiselles de Paris, vivant seules dans de tristes nids glacés par les décembres… Puis… puis, minuit passé, nous nous réchauffions bien gentiment, dans mon petit lit, et nous nous jurions de nous aimer toujours…

(Don Juan)

Oisillon

d’Hautel, 1808 : Diminutif pour petit oiseau.

Oison

d’Hautel, 1808 : Oison bridé. Pour innocent, homme d’une grande simplicité d’esprit.

Oison bridé

France, 1907 : Maladroit, entêté, imbécile. En certaines campagnes, l’on place une plume dans les ouvertures du bec des oisons pour les empêcher d’entrer dans les cultures entourées d’une haie ; et rien de plus comique que d’assister aux efforts de ces volatiles s’entêtant à pénétrer où il leur est impossible de passer.

Olibrius (faire l’)

France, 1907 : Faire le méchant, se poser en homme terrible et n’être que ridicule. C’est un souvenir du rôle effrayant que l’on faisait jouer dans quelques mystères, notamment dans celui de Sainte Reine, à Anicius Olibrius, époux de Placidie, fille de Valentinien III, et qui fut gouverneur des Gaules vers 472, sous Léon III. Suivant la légende, devenu amoureux de sainte Reine et ne pouvant arriver à ses fins, il la fit mettre à mort, sous prétexte qu’elle refusait de sacrifier aux dieux. On la suspendit à un chevalet, on la fouetta de verges et on lui déchira les chairs avec des griffes de fer. « Et, raconte Anatole France, qui redit cette légende semblable à toutes les légendes de saints et de martyrs, le sang coula du corps de la vierge comme d’une source pure. » Les assistants pleuraient et Olibrius, pour ne pas voir ce sang, se couvrit le visage de son manteau. Le martyre de sainte Reine, d’autres disent sainte Marguerite, fut le sujet de grand nombre de mystères et de chansons où Olibrius était représenté comme un fanfaron, un glorieux, un faux brave, un occiseur d’innocents.
Dans l’Étourdi Molière fait dire à Mascarille :

Courage, mon garçon, tout heur nous accompagne,
Mettons flamberge au vent et bravoure en campagne ;
Faisons l’olibrius, l’occiseur d’innocents.

On trouve dans un conte de Bonaventure Desperriers : « Mon mary, passez votre colère, et au lieu de faire ainsy l’olibrius, remerciez maître Itace. »
L’histoire cite un autre Olibrius, sénateur romain, proclamé empereur par surprise en 462 et que son incapacité fit, après trois mois, descendre du trône ; mais, comme l’a fort biem remarqué Ed. Thierry, « quand un nom se répand parmi les bonnes gens, ce n’est pas de l’histoire qu’il vient, c’est du théâtre ». C’est donc plutôt du gouverneur des Gaules que de l’empereur éphémère que nous vient le dicton.

Olim

Delvau, 1866 : s. m. Suranné, académicien, — dans l’argot des romantiques, qui cherchaient et trouvaient les injures les plus corsées pour en contaminer la gloire de leurs adversaires naturels, les classiques. Celle-ci appartient à T. Gautier, qui, heureusement pour lui et pour nous, a fait Émaux et Camées.

Olive de savetier

Rigaud, 1881 : Navet.

France, 1907 : Navet ; argot populaire.

Olives

France, 1907 : Testicules. Changer ses olives d’eau, uriner.

Olives (changer l’eau des)

Rigaud, 1881 : Uriner.

Olives d’eau (changer ses)

La Rue, 1894 : Uriner.

Olivet

Halbert, 1849 : Oignon.

Delvau, 1866 : s. m. Ognon, — dans l’argot des voleurs.

France, 1907 : Oignon ; argot des voleurs.

Olivettes

d’Hautel, 1808 : Faire danser les olivettes à quelqu’un. Pour dire le maltraiter, le battre à coup de verges ou de fouet.
Cette locution vient d’une danse ainsi appelée en Provence, et qui s’exécute après la récolte des olives.

Olivier de savetier

Delvau, 1866 : s. m. Navet, — dans l’argot des faubouriens, qui font sans doute allusion à l’huile qu’on extrait de la navette, un Brassica napus aussi, mais oleifera.

Virmaître, 1894 : Navet. Comme ils sont économes pour la plupart, ils se servent de l’huile de navette qui se vend bon marché pour assaisonner leur salade. C’est exactement la même chose que pour les pommes de terre ; on dit des oranges de limousins (Argot du peuple).

Olla podrida

Delvau, 1866 : s. f. Représentation à bénéfice, où l’on fait entrer de tout, du chant et de la danse, du drame et du vaudeville, de l’opéra-comique et de la tragédie. Pot-pourri, Argot des coulisses.

Olympien

France, 1907 : Membre d’une société secrète qui comptait de nombreux adhérents dans l’armée et qui s’organisa dans les premiers temps de l’empire, c’est-à-dire vers 1805, pour combattre le régime impérial. Le symbole consistait en un bras armé d’un poignard sortant de la nue et, au-dessous, le buste renversé de César. Cette société comptait près de deux ans d’existence sans que le gouvernement parût s’en inquiéter. En 1806, un commissaire général de police à Boulogne fut le premier qui signala les Olympiens à Fouché, qui le remercia de son zèle en lui disant que depuis longtenrps il avait l’œil sur eux ; qu’ils n’étaient que des idéologues dont l’empereur ne se souciait nullement. Cependant il manda l’un des principaux chefs de la police secrète et le lança sur la piste des Olympiens.

— L’on m’écrit de Boulogne, lui dit-il, qu’il vient de se former dans l’armée une espèce de société sous le titre d’Oympiens : on ne me fait pas connaître le but de l’association, mais on m’annonce qu’elle a des ramifications très étendues. Peut-être se rattache-t-elle aux conciliabules qui se tiennent chez Bernadotte ou chez la Staël. Je sais bien ce qui se passe ici : Garat, qui me croit son ami, et qui a la bonhomie de supposer que je suis encore patriote, ni plus ni moins qu’en 94, me raconte tout.

Ombre

d’Hautel, 1808 : Mettre quelqu’un à l’ombre. Le mettre en prison, le renfermer ; signifie aussi l’en voyer dans l’autre monde.
Il a peur de son ombre. Se dit d’un poltron, d’un homme qu’un bruit de feuille fait trembler.

France, 1907 : Prison. « Mettre à l’ombre. »

Elle sera condamnée dans le gerbement… et graciée pour révélation après un an d’ombre.

(Balzac)

Ombre (à l’)

Delvau, 1866 : En prison, — dans l’argot du peuple. S’emploie aussi quelquefois dans un sens plus sinistre, celui de : Au cimetière, et, dans ce cas, mettre quelqu’un à l’ombre, c’est le tuer.

La Rue, 1894 : En prison. Mettre à l’ombre signifie aussi tuer.

Ombre (foutre à l’, faire passer à l’)

Rigaud, 1881 : Tuer. Mettre à l’ombre, emprisonner. — Être à l’ombre, être en prison.

Je vous dis, moi, qu’on s’ taise, ou je vous colloque à l’ombre.

(H. Monnier, Scènes populaires.)

Ombre (mettre à l’)

Larchey, 1865 : Tuer.

Ici Vautrin se leva, se mit en garde et fit le mouvement d’un maître d’armes qui se fend. — Et à l’ombre ! ajouta-t-il.

Balzac.

À l’ombre : En prison. — Le soleil n’y donne guère — V. Brûler.

Quand on aura mis à l’ombre tous les Jean-foutres.

1793, Hébert.

Ombres

France, 1907 : Revue annuelle jouée vers le mois de février par les élèves de l’École polytechnique dans le grand amphithéâtre de l’École.

… Les silhouettes des officiers, des professeurs et de tout le personnel, tracées par les plus habiles crayons de la promotion, défilent en ombres chinoises devant les élèves, pendant qu’on met dans la bouche des personnages des discours comiques pleins de verve et d’esprit gaulois. L’origine en remonte à l’année 1818… L’autorité, les professeurs et l’administration assistent le plus souvent à la séance et prennent part à la gaieté générale.

(Albert Lévy et G. Pinet)

Ombres chinoises

Delvau, 1866 : s. f. pl. Revue de l’année, jouée à la façon de Séraphin, par les élèves de l’École polytechnique, le jeudi qui précède Noël, et dans laquelle on n’épargne pas plus le sel aux professeurs, et même au général commandant l’École, qu’Aristophane ne l’épargnait à Socrate dans ses Nuées.

Ombreuses

France, 1907 : Moustaches ; elles ombragent les lèvres. Voir Hirondelles.

Omelette

Larchey, 1865 : Mystification militaire en usage à Saint-Cyr.

Voici en quoi consiste le supplice de l’omelette : Au milieu de votre sommeil quatre vigoureux anciens saisissent votre lit et le retournent comme une omelette.

R. de la Barre.

L’omelette de sac consiste à bouleverser le havre-sac de celui qu’on veut ennuyer.

Delvau, 1866 : s. f. Mystification militaire qui consiste à retourner sens dessus dessous le lit d’un camarade endormi. Omelette du sac. Autre plaisanterie de même farine qui consiste à mettre en désordre tous les objets rangés dans un havre-sac, — ce qui est une façon comme l’autre de casser les œufs et de les brouiller.

France, 1907 : Plaisanterie d’un goût douteux que les anciens font aux conscrits dans les régiments et les écoles militaires et qui consiste à prendre le lit d’un camarade endormi et à le retourner sens dessus dessous.
À l’École polytechnique, c’est le bouleversement complet d’une chambre.

Au milieu du casert, semblable à une immense poêle, tous les meubles ont été renversés ; les lits enchevêtrés les uns dans les autres, les matelas, draps, couvertures, jetés pêle-mêle, tous les ustensiles de toilette, les cuvettes, brisés en mille pièces, les sacs à linge, les boîtes à claque, les bottes, les uniformes en fouillis inextricables, forment une omelette d’un genre tout particulier, sur laquelle toute l’eau de la fontaine a été répandue : telle est l’aimable farce que les anciens se plaisent à faire aux conscrits dans la première semaine de leur arrivée.

(Albert Lévy et G. Pinet, L’Argot de l’X)

L’omelette du sac est une plaisanterie de même farine consistant à bouleverser tous les effets d’un sac. On en fait ou faisait autant des diverses pièces des armes quelques instants avant l’exercice.

Les omelettes donnèrent plus vite le secret du fusil et de son mécanisme que les meilleurs instructeurs ; on se pressa, on lit mal d’abord, mieux, puis bien, et, pour me servir d’une expression de l’École, en se volatilisant.

(E. Billaudel, Les Hommes d’épée)

Omettre

France, 1907 : Tuer ; argot des voleurs. On disait autrefois envoyer dans le royaume d’oubli.

Omne tulit punctum qui miscuit utile dulci

France, 1907 : « Celui-là emporte le point qui mêle l’utile à l’agréable. » Locution latine tirée de l’Art poétique d’Horace.

Omne vivum ex ovo

France, 1907 : « Tout être vivant sort d’un œuf (d’un germe). » Aphorisme biologique latin émis par le célèbre médecin anglais William Harvey.

Omnia mecum porto

France, 1907 : « Je porte tous mes biens avec moi. » Locution latine faisant allusion à la réponse du philosophe Bias, l’un des sept sages de la Grèce, qui, fuyant avec ses concitoyens sa ville menacée par les Perses et n’emportant aucune richesse avec lui, répliqua à ceux qui s’en étonnaient que son savoir lui suffisait. De nos jours, il n’irait pas loin avec ce seul bagage.

Omnia vincit amor

France, 1907 : « L’amour triomphe de tout. » Locution latine tirée des Bucoliques de Virgile.

Omnibus

Larchey, 1865 : Prostituée, femme se donnant à tous.

On y remarque aussi quelques femmes jeunes encore, pauvres beautés omnibus.

La Maison du Lapin blanc, typ. Appert.

Omnibus de coni : Corbillard (Vidocq). — Mot à mot : voiture de mort. — Omnibus rappelle que tous doivent faire un jour le voyage.

Delvau, 1866 : s. m. Verre de vin de la contenance d’un demi-setier, la mesure ordinaire de tout buveur.

Delvau, 1866 : s. m. Résidu des liquides répandus sur le comptoir d’un marchand de vin, et servi par ce dernier aux pratiques peu difficiles, amies des arlequins.

Delvau, 1866 : s. m. Garçon supplémentaire pour les jours de fête, — dans l’argot des garçons de café.

Delvau, 1866 : s. m. Femme banale, — dans l’argot du peuple, pour qui cette Dona Sol au ruisseau lucet omnibus.

Rigaud, 1881 : Verre de vin, verre d’eau-de-vie, de la capacité d’un demi-setier. On lit encore à la devanture de quelques débits de vin, extra-muros : « Ici l’on prend l’omnibus. » Rinçures de verres, résidu de vin répandu sur le comptoir et débité aux consommateurs assez ivres pour ne plus y regarder de près.

Rigaud, 1881 : Loges d’avant-scène au théâtre de l’Opéra.

Excepté la loge de l’Empereur et la loge voisine réservée pour le service de Sa Majesté, excepté les deux loges qui sont en face et les deux avant-scènes du rez-de-chaussée, au côté droit, toutes les loges d’avant-scène jusqu’au troisième rang non compris, sont occupées par des hommes et organisées en omnibus ainsi qu’on dit à l’Opéra et à Londres.

(N. Roqueplan.)

Rigaud, 1881 : Garçon d’extra, dans un restaurant, dans un café.

Rigaud, 1881 : Femme qui a autant et plus de droit à ce sobriquet que les voitures de ce nom.

Rigaud, 1881 : Batteurs de pavé.

C’est-à-dire des gens que l’on rencontre sur tous les points de Paris comme les véhicules dont ils portent le nom, mais qui diffèrent de ceux-ci en ce qu’ils n’ont ni couleur, ni enseigne, ni lanterne pour indiquer où ils vont et d’où ils viennent.

(Paul Mahalin.)

Fustier, 1889 : Les employés des télégraphes à Paris appellent ainsi les cartes-télégrammes fermées qui sont expédiées par les tubes.

Le temps qu’ils (les télégraphistes) distribuent les courses aux facteurs, les cartes et les omnibus à tuber attendent aussi.

(Cri du Peuple, août 1885.)

Ces cartes-télégrammes sont aussi nommées petit-bleu à cause de la couleur du papier sur lequel elles sont rédigées.

La Rue, 1894 : Verre de vin ordinaire. Garçon d’extra. Gouttures du comptoir d’un marchand de vin. Prostituée.

Virmaître, 1894 : Femme à tous. On dit aussi : wagons et omnibusardes. Fréquemment, ces omnibus là donnent une correspondance pour l’hôpital du Midi (Argot du peuple).

Rossignol, 1901 : Lorsque l’omnibus d’une fille publique est embourbé, elle ne peut travailler.

Rossignol, 1901 : Garçon de café payé par les autres garçons pour les aider dans les moments de presse.

Hayard, 1907 : Prostituée.

France, 1907 : Verre de la capacité d’un demi-setier.

France, 1907 : Superflu de liquides tombé sur le comptoir de zinc d’un marchand de vin recueilli dans un récipient et revendu aux clients.

France, 1907 : Prostituée.

France, 1907 : Garçon d’extra que prennent les cafetiers, cabaretiers, restaurateurs aux jours de fête.

France, 1907 : Batteur de pavé : individu qui erre par les rues, sans moyen apparent d’existence.

Omnibus, des gens que l’on rencontre sur tous les points de Paris, comme les véhicules dont ils portent le nom, mais qui différent de ceux-ci en ce qu’ils n’ont ni couleur, ni enseigne, ni lanterne pour indiquer où ils vont et d’où ils viennent.

(Paul Mahalin)

Omnibus (attendre l’)

Rigaud, 1881 : Attendre qu’on vous verse à boire, — dans le jargon du peuple. — Faites passer la négresse, voilà une heure que nous attendons l’omnibus, par ici.

France, 1907 : Attendre qu’on remplisse votre verre ; argot des voleurs.

Omnibus à coni

Virmaître, 1894 : Voiture qui emporte le guillotiné du lieu d’exécution au cimetière (Argot des voleurs).

Omnibus à Crôni

Hayard, 1907 : Corbillard.

Omnibus à pègres

France, 1907 : Voiture de la prefecture de police, autrement dit panier à salade.

Omnibus de coni

Delvau, 1866 : s. m. Corbillard, — dans l’argot des voleurs.

Rigaud, 1881 : Corbillard, c’est-à-dire omnibus de la mort.

La Rue, 1894 : Corbillard. La mort.

France, 1907 : Corbillard.

Omnibusard

Rigaud, 1881 : Mendiant qui exploite la charité publique en omnibus. Voici le procédé : Tantôt c’est un enfant, tantôt un vieillard qui, en hiver, la chair au vent, tout dépoitraillé, vient s’asseoir près du conducteur. Il sort péniblement, sou à sou, trente centimes, les tourne, les retourne, pousse un soupir, laisse échapper une larme et grelotte. Les âmes charitables s’émeuvent, chacun donne quelque menue monnaie. L’omnibusard recueille ainsi quinze, vingt, quelquefois trente sous, grelotte, tousse, crache, pleure d’attendrissement, fait arrêter la voiture et va, une station plus loin, recommencer le même manège, après avoir toutefois pris de nouvelles forces chez le marchand de vin.

France, 1907 : Mendiant qui exerce sa profession dans les omnibus, en prétendant avoir perdu son porte-monnaie et cherchant ainsi à exciter la pitié des voyageurs.

Omnicochemar à la colle

France, 1907 : Cocher d’omnibus, parce qu’il semble collé sur son siège ; argot des voleurs. On dit aussi gaule d’omnicroche.

Omnicroche

Rigaud, 1881 : Omnibus, — dans le jargon des voleurs. — Faire l’omnicroche, monter dans un omnibus avec l’intention d’explorer les poches des voisins. — Gaule d’omnicroche, échalas d’omnicroche, conducteur d’omnibus. — Omnicrochemar à la colle, cocher d’omnibus ; à la colle, parce qu’il semble collé sur son siège. Les voleurs qui ont, comme Lacenaire, fait un peu leurs classes, disent : Omnicochemar.

France, 1907 : Omnibus. Faire l’omnicroche, voler dans les omnibus.

Omnijuge

France, 1907 : Personne outrecuidante qui dévide de tout. Provincialisme ; vieux mot.

Omnis homo mendax

France, 1907 : « Tout homme est menteur. » Locution latine tirée des Psaumes de saint Matthieu.

Omnium

Fustier, 1889 : Argot du turf. Course réservée aux chevaux de toute provenance âgés de trois ans et au-dessus. L’omnium se court au bois de Boulogne, à la réunion d’automne.

France, 1907 : Nom donné, dans l’argot des courses, au grand handicap d’automne. Les engagements pour cette épreuve importante se font dès le printemps, et pendant toute la saison d’été on discute les chances des chevaux qui s’y trouvent engagés.
L’inconvénient de ces engagements faits de si bonne heure dans la saison sportive, avant que le classement des chevaux soit établi selon leur réelle valeur, a pour conséquence fâcheuse de réduire extrêmement les chances, car il se trouve toujours des animaux favorisée par les poids que le handicapeur ne peut établir, a aussi longue échéance, avec la même sûreté qu’il pourrait le faire quelques semaines plus tard.
Les chevaux de toute provenances âgés de trois ans et au-dessus peuvent prendre part à l’Omnium.

Omnium consensu

France, 1907 : « Du consentement de tous. » Locution latine.

On

d’Hautel, 1808 : Se moquer du qu’en dira-t-on. Braver l’opinion publique ; mépriser tout ce que l’on peut dire sur votre conduite.

On apprend à hurler avec les loups

France, 1907 : Le dicton a deux significations : 1o On prend fatalement les habitudes et les mœurs des gens avec lesquels on vit, on subit malgré soi l’influence du milieu. 2o On apprend à se servir contre les êtres malfaisants de leurs propres armes.
Racine emploie ce dicton dans ce dernier sens à la première scène de sa comédie des Plaideurs :

Un juge, l’an passé, me prit à son service,
Il m’avait fait venir d’Amiens pour être suisse.
Tous ces Normands voulaient se divertir de nous :
On apprend à hurler, dit l’autre, avec les loups.
Tous Picard que j’étais, j’étais un bon apôtre…

On connaît les saints, on les honore (comme)

France, 1907 : On traite les gens selon leurs mérites, ou plutôt leur manque de mérite, car ce dicton ne s’emploie qu’ironiquement. Le peuple emploie à tort le mot adorer. On n’adore pas un saint, on ne fait que l’honorer, et c’est déjà beaucoup, surtout si l’on a affaire à un saint pouilleux comme Labre.

On est un sot

France, 1907 : Proverbe. Les gens qui n’ont pas la pudeur des mots disent, au lieu de sot, un mot également en trois lettres rimant avec on.

On, dit le Dr Grégoire, est le bouc émissaire, le bouclier de la médisance. « On m’a dit cri ou affirmé… » Ah ! il bon dos ce pauvre on.

(Turlutaines)

Dans la Comtesse d’Orgueil, pièce de Th. Corneille, se trouve ceci :

Anselme : Et partout sa vertu lui donne tant de lustre
Que sur ce qu’on en dit…
Le marquis : Monsieur on est un sot.

On ne peut avoir en même temps femme et bénéfice

France, 1907 : Pour se rendre compte de cette expression proverbiale, il faut savoir que certains bénéfices étaient autrefois attribués aux gradués de l’Université tant qu’ils restaient célibataires. Ce vieil usage a encore cours dans les universités anglaises. Les Italiens disent dans le même sens : « On ne peut avoir sa femme ivre et sa barrique pleine. »

On ne sait s’il est chair ou poisson

France, 1907 : Se dit d’un homme sans caractère, d’opinion indécise, qui, par faiblesse ou stupidité, est toujours de l’avis du dernier qui parle, de sorte qu’on ne sait jamais ce qu’il pense, ni ce qu’il a dans le ventre, si enfin il est chair ou poisson.

On pave !

Delvau, 1866 : Phrase de l’argot des bohèmes, signifiant : « Il ne faut pas passer dans cette rue, dans ce quartier, à cause des créanciers qu’on pourrait y rencontrer. »

Boutmy, 1883 : Exclamation pittoresque qui exprime l’effroi d’un débiteur amené par hasard à passer dans une rue où se trouve un loup. Le typo débiteur fait alors un circuit plus ou moins long pour éviter la rue où l’on pave.

La Rue, 1894 : Exclamation signifiant qu’on n’ose passer dans une rue dans la crainte de rencontrer un créancier.

France, 1907 : « Exclamation pittoresque qui exprime l’effroi d’un débiteur amené par hasard à passer dans la rue où se trouve un loup. Le typo débiteur fait alors un circuit plus ou moins long pour éviter la rue où l’on pave. »

(Eugène Boutmy, L’Argot des typographes)

On perd son temps et sa lessive à laver la tête d’un âne

France, 1907 : C’est peine perdue que d’instruire un sot et d’endoctriner un rustique.

Onanisme

Delvau, 1864 : Masturbation — qui était, comme on sait, le vice d’Onan.

Judas, dit l’Écriture Sainte,
De sa postérité jalousé,
À Thamar, qu’il veut voir enceinte,
Donne ses trois fils pour époux.
Mer s’épuise, Sela s’échine ;
Homme impuissant et sans pitié,
Onan, auprès de sa moitié,
Chaque nuit se branle la pine.
Il est certains ribauds dont les pines glacées
Par un coup de poignet veulent être excitées,
On voit devant un con leur verge se baisser,
Et sous leur propre main aussitôt se dresser.
Pour vous justifier, n’offrez pas à vies yeux
De l’impudique Onan l’exemple vicieux…

(L’Art priapique.)

Once

d’Hautel, 1808 : Il ne pèse pas deux onces. Se dit ironiquement d’un homme querelleur et méchant, pour faire entendre qu’il n’est pas bien fort.
Faire une once de bon sens. Passer quelques heures agréables ; se divertir ; rire à gorge déployée.
Il n’a pas une once de sens commun. Se dit d’un homme qui n’a ni jugement, ni pénétration, ni esprit.

Onchets (partie d’)

France, 1907 : Duel ; argot militaire. Onchet est la corruption d’once, oncette, sorte de chat-tigre d’Afrique. Faire une partie d’onchets, c’est s’égratigner, se donner des coups de griffes, le sabre ou l’épée remplaçant la patte du fauve.

Oncle

d’Hautel, 1808 : Des contes à Robert mon oncle. Des contes en l’air, des bourdes, des gausses.

Larchey, 1865 : Où prendras-tu de l’argent ? dit elle. — Chez mon oncle, répondit Raoul. — Florine connaissait l’oncle de Raoul. Ce mot symbolisait l’usure, comme dans la langue populaire ma tante signifie le prêt sur gage.

Balzac.

Delvau, 1866 : s. m. Usurier, — dans l’argot des fils de famille, qui ont voulu marier leur tante à quelqu’un.

Delvau, 1866 : s. m. Guichetier, — dans le même argot [des voleurs].

Rigaud, 1881 : Concierge de prison. Sous les verrous, les voleurs, qui ont de l’imagination, s’assimilent aux objets mis en gage. La prison pour eux est comme un Mont-de-Piété, tante, où ils sont accrochés. Celui qui garde la porte de ma tante, devient le mari de ma tante « mon oncle ». Au XVIIe siècle « oncle » désignait un usurier. — Avoir un oncle sur la planche, être héritier d’un oncle. — Manger son oncle, manger l’héritage laissé par son oncle. — Rubis sur l’oncle, calembour par à peu près pour dire qu’il ne reste plus rien de l’héritage avunculaire.

La Rue, 1894 : Guichetier. Usurier.

Virmaître, 1894 : Le guichetier qui garde la première porte d’entrée d’une prison. Je ne vois pas trop pourquoi on l’appelle mon oncle car il n’a guère de tendresse pour les visiteurs, à moins que ce ne soit un à peu près. Quand on va au clou, mon oncle prend soin dos objets déposés (Argot des prisons).

Hayard, 1907 : Guichetier de prison.

France, 1907 : Usurier. « Ce mot, dit Balzac, symbolise l’usure, comme dans la langue populaire ma tante signifie le prêt sur gage. » Il est a noter que les Anglais emploient le même mot pour désigner le prêteur sur gages. Dans l’argot des voleurs, oncle est synonyme de joaillier ; onclesse, femme du joaillier.
Disons en passant que notre institution le Mont-de-Piété n’a aucun rapport avec une montagne, Mont vient de l’italien monte, qui signitie amas, masse, pile de fonds et, par extension, banque, c’est-à-dire, en ce cas, banque de piété, monte di pieta. Le premier mont-de-piété établi à Paris date de 1777. Mais, dès 1468, on établit à Rome des établissements de prêts sur gage pour combattre les prêts usuraires et les honteuses extorsions des juifs. Ils furent appelés monti di pieta. Il existe également en Italie nombre d’endroits où l’on fait des avances de grains et qu’on appelle monti di grano.

France, 1907 : Guichetier.

Oncle du prêt (mon)

Rigaud, 1881 : Mont-de-Piété, — dans le jargon des ouvriers qui sont fatigués d’appeler « ma tante, ma tante Dumont » cet établissement philanthropique à onze pour cent.

Onclesse

Rigaud, 1881 : Concierge femelle d’une prison, — dans l’argot des voleurs, qui appellent le concierge mâle « leur oncle ».

Ondée de Xantippe

France, 1907 : Aspersion d’urine. Réminiscence de la femme de Socrate dont le caractère intraitable et l’humeur irascible en ont fait le type de la mégère. Un jour que Socrate sortait sans mot dire de chez lui pour éviter ses invectives, elle lui lança sur la tête le contenu d’un vase de nuit. Le philosophe reçut l’ondée… en philosophe, se contentant de dire : « La pluie suit presque toujours les coups de tonnerre. » Dans certaines villes du Midi où la propreté laisse à désirer, les passants attardés sont exposés à recevoir les ondées de Xantippe, heureux quand elles ne contiennent que du liquide.

Ondoyeuse

France, 1907 : Cuvette ; argot des voleurs.

Ondulée

France, 1907 : Fille ou femme de mœurs plus que légères.

Une femme mariée, dans un bon monde, qui passe une notable partie de ses journées à tromper son benoit époux avec des messieurs de poil divers, n’est pas, ce me semble, une personne irréprochable. Est-ce cependant une ondulée, pour me servir du mot à la mode ? Non, si elle ne s’affiche pas en se dépoitraillant jusqu’au nombril, si elle n’est pas cotée et ne mesure pas à a longueur d’une bourse la durée de ses amours.

(Albert Dubrugeaud)

Qu’ont-elles fait du brunissoir,
De l’aiguille, ces ondulées
Qu’on voit passer dans les allées
Du Bois, en coupé, vers le soir ?

(Catulle Mendès)

Ongle

d’Hautel, 1808 : Rogner les ongles à quelqu’un. Lui retrancher de ses revenus, lui diminuer son pouvoir, son emploi, son autorité.
On lui a donné sur les ongles. Pour, on l’a vivement réprimandé ; on lui a fait de grands reproches.
À l’ongle on connoît le lion. Pour dire que l’on juge du talent d’une personne par les moindres productions.

Ongle croche

Delvau, 1866 : s. m. Avare et même voleur, — dans l’argot du peuple, qui suppose avec raison que ce qui est bon à garder pour l’un est bon à prendre pour l’autre. Avoir les ongles croches. Avoir des dispositions pour la tromperie — et même pour la filouterie.

Ongles croches (les avoir)

Virmaître, 1894 : Ce sont généralement les Normands qui ont cette spécialité, car on dit très souvent d’un grippe-sous que l’on pourrait le jeter au plafond qu’il ne le tomberait pas. Avoir les ongles croches est synonyme de poser zéro et de retenir tout (Argot du peuple).

Ongles croches ou crochus

France, 1907 : On dit d’un avare ou d’un voleur qu’il a les ongles crochus ; métaphore qui s’explique d’elle-même.

Ongles en deuil

Delvau, 1866 : s. m. pl. Ongles noirs, malpropres.

France, 1907 : Ongles sales. Quand on ne se nettoie pas les ongles, ils se couvrent d’une bordure noire.

Ongles en l’air (se tirer les)

France, 1907 : Sortir indemne d’une mauvaise affaire.

L’axiome : À chacun selon ses œuvres, n’a malheureusement rien à voir dans la jurisprudence, et il n’est pas rare de voir, pour des délits identiques, le pauvre diable condamné alors que les gros bonnets se tirent d’affaire, comme dit la populace, les ongles en l’air.
Décidément, Montesquieu avait raison : les lois sont des filets qui arrêtent seulement les petits poissons et laissent passer les autres. Autrement dit, les balances de dame Thémis sont trop souvent de simples balançoires.

(Henri Second)

Onguent

d’Hautel, 1808 : C’est de l’onguent miton mitaine. Se dit d’un remède sans efficacité, qui ne fait ni bien ni mal.
Je vous conseille d’avoir de l’onguent pour la brûlure. Se dit à un méchant homme, pour lui faire entendre qu’il ne peut aller qu’en enfer.
Dans les petites boîtes les bons onguents. Manière honnête et joviale de flatter les personnes de petite stature.
Il n’y a point d’onguent qui la puisse guérir. Se dit d’une personne désolée, désespérée, ou qui a un mal incurable.

Delvau, 1866 : s. m. Argent, — dans l’argot des voleurs, qui savent que l’on guérit tout, ou presque tout, avec cela.

Rigaud, 1881 : Argent, — dans l’ancien argot.

France, 1907 : Argent. Il sert à graisser la patte. Vieil argot.

Oniomanie

France, 1907 : Il y a des personnes, dit le Cosmos, qui ne peuvent s’empêcher d’acheter tout ce qui les tente : l’un, amateur de vieux livres, dépense pour eux le plus clair de ses revenus ; tel autre aimera les bibelots. Telle femme encombrera ses tiroirs de fourrures ou de dentelles. Lorsque le besoin d’acheter devient absolument impérieux, c’est souvent un premier symptôme de folie, et ce genre de délire se nomme l’oniomanie. Ce néologisme est formé du latin noionem, chose unique, et de manie.

Onze gendarme (du)

France, 1907 : Pointure de gants d’excessive largeur.

Ses vastes mains aux doigts écartés, chaussées de gants presque blancs dont la pointure ne devait point être inférieure ce que l’on appelle familièrement du onze gendarme…

(Le Mot d’Ordre)

Onze heures

France, 1907 : Heure intempestive.
On disait autrefois en parlant d’un pique-assiette on écornifleur qui arrivait bien avant l’heure du diner pour se faire inviter : « Il vient chercher midi où il n’y a qu’onze heures », allusion à l’ancien usage de dîner à midi.

Onze heures (bouillon d’)

France, 1907 : Bouillon empoisonné, drogue qui achève le moribond.

C’est de l’Hôtel-Dieu qu’est partie la légende du bouillon d’onze heures. Un malade amené un soir, vers 5 heures, fut couché puis, suivant l’usage, l’interne de service, escorté d’un infirmier, vint pour le questionner et donner les prescriptions urgentes. Le malade, imbu des préjugés qu’on a ordinairement contre l’hôpital, attendait anxieux : il repassait dans sa mémoire toutes les histoires lugubres qu’on débite à tort et à travers ; il se disait : « La salle est pleine, j’arrive le dernier, on va sans doute, pour se débarrasser de moi, me faire mourir. » Il répondit en tremblant aux questions de l’interne. Celui-ci, voyant un homme plein de vie, plus malade du cerveau que du corps, ordonna un bouillon, et ajouta : « Vous donnerez le bouillon d’onze heures. » Dans la nuit, le malade mourut subitement. Depuis cette époque, le bouillon d’onze heures est légendaire dans les hôpitaux, et l’on emploie cette expression pour dire que l’on se débarrasse des gens à volonté.

(Ch. Virmaître, Paris oublié)

Op’

France, 1907 : Abréviation d’Opéra, dans la bouche des petits crevés qui craignent de se fatiguer en prononçant des mots en entier.

Le premier bal de l’Op’, ou, pour mieux parler, le premier bal masqué de l’Opéra est le commencement de l’ère des plaisirs.

(Gil Blas)

Opérateur

Rigaud, 1881 : Bourreau.

France, 1907 : Charlatan, dentiste ambulant, marchand d’orviétan.

France, 1907 : Bourreau ; argot des voleurs.

Opérer

d’Hautel, 1808 : Vous avez bien opéré. Se dit par ironie à ceux qui ont gâté un ouvrage, ou ruine une affaire.

Rigaud, 1881 : Guillotiner, — dans le jargon des prisons.

France, 1907 : Guillotiner ; argot des voleurs.

Ophtalmo

France, 1907 : À l’œil ; argot de l’École polytechnique.

Du mot grec qui signifie œil, on a tiré, par un féroce calembour, le terme ophthalmo, appelé à remplacer l’expression parisienne « à l’œil », c’est-à-dire sans payer. « Avec les fournisseurs du Bleau, on s’arrange aisément ophtalmo. »

(Albert Lévy et G. Pinet)

Opiner

d’Hautel, 1808 : Opiner du bonnet. Être de l’avis des autres, sans rien ajouter ni diminuer à leur opinion, ce qui se marque par un simple mouvement de la tête, ou seulement en ôtant son bonnet, suivant l’usage des juges.

Opiner du bonnet

France, 1907 : Acquiescer sans mot dire. Cette locution vient de l’ancien usage des assemblées de soulever son bonnet en signe d’assentiment à une résolution prononcée. Dans les établissements religieux où des questions étaient débattues, les anciens opinaient de vive voix, tandis que les novices ne pouvaient approuver qu’en soulevant leur bonnet ou calotte. Les Athéniens opinaient de la main, c’est-à-dire levaient la main dans les assemblées publiques en signe d’acquiescement. Les sénateurs de Rome se plaçaient, pour manifester leur vote, du côté de la personne dont ils partageaient l’opinion.

Opineur hésitant

Delvau, 1866 : s. m. Juré, — dans l’argot des voyous, piliers de Cour d’assises.

France, 1907 : Juré ; argot populaire.

Opiumiste

Rigaud, 1881 : Buveur d’opium ; partisan de l’abrutissement par l’opium.

La Chine se divise en deux parties bien distinctes : Les opiumistes et les anti-opiumistes.

(La Liberté, du 26 août 1877.)

Opportunisme

Rigaud, 1881 : Politique expectante d’un groupe de républicains qui, sans rien sacrifier… que les principes des autres, attendent patiemment l’occasion favorable pour faire prévaloir leurs idées, et trouvent qu’il est toujours opportun d’occuper une excellente place, et au besoin plusieurs places.

France, 1907 : Ligne de conduite politique consistant à profiter de l’opportunité qui se présente, de quelque côté qu’elle vienne. Alphonse Karr, à la naissance de ce parti, l’a défini en une phrase concise et d’une saisissante vérité : « L’opportunisme, c’est Marat jouant Tartuffe. »

Le pays a l’opportunisme comme un individu a certaines maladies que je ne veux nommer ; et notez bien que depuis quinze ans, tous ces scandales, les décorations, le Panama, et plus récemment l’anarchie, ne sont que les accidents secondaires ou tertiaires de la même maladie honteuse, l’opportunisme !

(Maurice Donnay, 1892)

Ah ! la République, si elle savait son métier… de République ! Si une bonne fois, une fois pour toutes, elle se dégageait d’un coup d’épaule de tous ces vieux fils élimés et pourris de la routine, de la tradition, de l’ordre établi, des usages anciens, et de la révérence historique, dont l’opportunisme lui ficelle les bras et les jambes, si elle osait oser, agir, marcher et vivre ! Que de forces perdues s’éparpillent autour d’elle !

(Émile Bergerat)

L’électeur. — Mon cher député, nos amis se plaignent de votre conduite.
— Comment cela ?
— Oui, vous tournez au radicalisme.
— Oh ! en ce moment, c’est faire acte d’opportunisme.

(Rouge et Noir)

Opportuniste

Rigaud, 1881 : Réactionnaire de l’avenir ; Orléaniste honteux. Républicain qui, en attendant le moment opportun où il pourra voir triompher sa cause, sait se contenter d’une bonne place. Les opportunistes, dont M. Gambetta est le chef, ont pour adversaires les intransigeants, républicains trop pressés.

France, 1907 : Au banquet des places et des honneurs fortuné convive, ou simplement postulant à l’assiette au beurre — disent les anti-opportunistes qui n’ont d’autre désir que de prendre les mêmes places au susdit banquet.

Les hideux opportunistes donnaient, dans les balthazars officiels, le baiser de Judas à l’alliance russe, tandis qu’ils travaillaient sournoisement à la rendre impossible.
Ce qui distingue les opportunistes des autres échantillons de l’espèce humaine, c’est qu’ils ne s’intéressent ni à la patrie, ni à la République, ni à la défense des frontières, ni à la paix, ni à la guerre, ni au bonheur du peuple, ni à son malheur. Ils ne s’occupent que d’eux-mêmes, ne connaissent qu’eux-mêmes et ne voient qu’eux-mêmes.

(Henri Rochefort)

Je ne connais pas de plus répugnant, de plus ignoble parti que le parti dit opportuniste.
Il n’en est aucun. d’ ailleurs, qui soit honni, méprisé davantage par les vrais républicains.
Pourquoi ?
Parce que l’opportunisme n’est ni la République, ni la Monarchie, parce que c’est un parti hybride, où il n’y a ni doctrines, ni principes, ni programmes, ni pudeur, un parti politique où, sans le moindre souci de la dignité, de l’honneur, on emprunte à l’heure et à la course, comme on prend un fiacre, les doctrines, les principes et les programmes des autres.

(L’Autorité, août 1889)

Opus supere rogationes

France, 1907 : Par-dessus le marché.

Or

d’Hautel, 1808 : C’est une pluie d’or. Se dit des pluies qui tombent au commencement du printemps après quelques jours de sécheresse, et qui fertilisent les campagnes.
La pluie d’or. On appelle ainsi ce maudit métal auquel rien, ou du moins presque rien ne résiste en ce monde.
C’est de l’or en barre. Pour exprimer que les effets ou la promesse de quelqu’un valent de l’argent comptant.
Il vaut son pesant d’or. Se dit d’un homme distingué par ses connoissances et ses talens ; et d’un subalterne précieux par son zèle, son activité, et son assiduité à remplir ses devoirs.
Il parle d’or. Se dit de quelqu’un qui, par un raisonnement juste et des paroles pleines de sens, satisfait ceux à qui il parle.
Tout ce qui reluit n’est pas or. Signifie qu’il ne faut pas se fier aux apparences ; que les choses qui paroissent les meilleures ne sont souvent rien moins que bonnes.
Un marché d’or ; une affaire d’or. Pour dire très-avantageux ; très-lucrative.
Il a coûté plus d’or qu’il n’est gros. Se dit d’un homme dont la jeunesse a été très-coûteuse ; à qui on n’a rien négligé pour donner une brillante éducation.
On dit aussi d’un dissipateur, qu’il a mangé plus d’or qu’il n’est gros.
Juste comme l’or.
Se dit d’un poids fort égal.

Or de Cornouaille

France, 1907 : Nom donné par dérision à l’étain, l’une des productions de l’Angleterre.

Certes ne le ferois
Pour l’or de Cornouaille.

(Fabliaux)

Or de Toulouse

France, 1907 : Fortune mal acquise qui ne profite pas. Vieille locution datant de l’invasion romaine, où Toulouse fut complètement pillée par les soldats de César, qui, suivant la légende, ne profitèrent pas de leur butin, car ils périrent presque tous soit dans les combats, soit par la maladie

Or est qui or vaut

France, 1907 : On apprécie et estime les gens d’après les avantages que l’on peut en tirer.

Or-dur

Delvau, 1866 : s. m. Cuivre, — dans l’argot des faubouriens, qui aiment à équivoquer. Ça, de l’or ? disent-ils ; de l’ordure (or-dur) oui !

Oraison jaculatoire

France, 1907 : Émission de semence.

Le révérend père, après son oraison jaculatoire matinale en communion avec sa servante, sortait bravement de son lit douillet et courait à la froide chapelle entonner de moins joyeuses oraisons.

(Les Propos du Commandeur)

Oraison jaculatoire (faire l’)

Delvau, 1864 : Darder son aiguillon et lancer son sperme dans le con d’une femme, pendant qu’elle fait sa prière — sur le dos.

Maman, vois-les donc tous deux.
Avec quelle ardeur ils prient !
Regarde comme ils s’écrient : Mon amour !, je vois… les cieux ! —
Ils font, la chose est notoire,
Comme un acte méritoire,
L’oraison jaculatoire
Qu’en mon temps j’ai faite aussi.

Léger.

Orange

Larchey, 1865 : La pomme de terre est aussitôt saluée par l’argot d’orange à cochons.

Balzac.

Orange à cochon

Rigaud, 1881 : Pomme de terre. La variante est : Orange de Limousin.

Orange à cochons

Delvau, 1866 : s. f. Pomme de terre, — dans l’argot des voleurs, qui apprennent ainsi aux gens honnêtes et ignorants qu’avant Parmentier le savoureux tubercule dont nous sommes si friands aujourd’hui, pauvres et riches, était abandonné comme nourriture aux descendants du compagnon de saint Antoine. Le peuple dit Orange de Limousin.

Oranger

Delvau, 1866 : s. m. La gorge, — dans l’argot de Breda-Street. M. Prudhomme, dans un accès de galanterie, s’étant oublié jusqu’à comparer le buste d’une belle femme au classique « jardin des Hespérides », et les fruits du jardin des Hespérides étant des pommes d’or, c’est-à-dire des oranges, on devait forcément en arriver à prendre toute poitrine féminine pour un oranger.

Oranger de savetier

Delvau, 1866 : s. m. Le basilic, — dans l’argot des faubouriens, qui connaissent l’odeur exquise de l’ocymum, bien faite pour neutraliser celle des cuirs amoncelés dans les échoppes de cordonnier. On le dit aussi du réséda.

Rigaud, 1881 : Basilic.

Virmaître, 1894 : Pied de sarriette, que les savetiers placent dans leur échoppe à côté d’eux (Argot du peuple).

France, 1907 : Réséda ou basilic.

Oranges

France, 1907 : Les seins d’une jeune fille ou d’une femme, quand ils sont petits et durs. On dit aussi des oranges sur l’étagère.

Les sœurs Souris, dont l’aînée avait été surnommée la Reine des Amazones, en égard à certaine opération chirurgicale qui lui avait enlevé une des oranges de son étagère.

(Paul Mahalin)

La marchande braille à la ronde,
Son visage dur et grognon
Ne fait pas songer à Mignon,
Mais sa gorge est petite et ronde :
Elle a des luisants de métal
Et je laisserais, ô mégère,
Les oranges de ton étal
Pour celles de ton étagère !

(Rimes bruxelloises)

France, 1907 : Coups de poing. « Payer des oranges », donner des coups de poing.

Oranges à cochon

France, 1907 : Pommes de terre. On les donnait en effet autrefois aux cochons, et ce préjugé était tel que les paysans seraient plutôt morts de faim que de goûter à ce tubercule, interdit par les prêtres.

Par les villes, par les hameaux,
Après la parole bénite,
Pendant deux cents ans les pourceaux
Mangeaient seuls la pomme maudite.
Si bien qu’on vit les paysans
Brouter l’hiver l’herbe gelée,
Tandis qu’au milieu de leurs champs
Restait la pomme ensorcelée.

(Charles Jodet)

On dit aussi oranges de Limousin.

Oranges sur l’étagère

Rigaud, 1881 : Belle prestance de la gorge.

Oranges sur l’étagère (avoir des)

La Rue, 1894 : Avoir une belle gorge.

Oranges sur la cheminée (avoir des)

Delvau, 1866 : Avoir une gorge convenablement garnie, — dans l’argot de Breda-Street.

Orateur

Fustier, 1889 : Argot des francs-maçons. L’un des officiers d’une loge. Il y joue un rôle analogue à celui du ministère public dans les tribunaux.

Orbatteur

France, 1907 : Batteur d’or : vieux mot.

Nuls changeurs, orfèvres, orbateurs, ne autres, ne soit si hardi de faire ne ouvrer, ne faire orbaterie, vaisselle ne vaisseaux d’argent.

(Ordonnances royales)

Orbe

France, 1907 : Nom vulgaire du diodon et de l’éphippus, poissons des mers tropicales.

Orbesvoies

France, 1907 : Ouvertures, arcades, fenêtres peintes, destinées à continuer, par la décoration, de véritables fenêtres ou arcades et leur servant de pendant. Vieux mot, supprimé à tort puisque nous n’avons rien pour le remplacer, si ce n’est l’expression mur orbe.

Orbite

France, 1907 : Œil. « Se calfeutrer l’orbite », fermer un œil ; argot populaire.

Ordinaire

Delvau, 1866 : s. m. Soupe et bœuf, — dans l’argot des ouvriers.

Rigaud, 1881 : La soupe et le bœuf, dans les gargots. Le prix de l’ordinaire varie entre 30 et 40 centimes.

Virmaître, 1894 : La soupe et le bœuf que les ouvriers mangent le matin. Comme presque toute l’année c’est la nourriture ordinaire, de là, le nom (Argot du peuple).

Virmaître, 1894 : Homme habitué à venir à heure et à jour fixe chez une fille. C’est un protecteur intermittent (Argot des filles).

Ordinaire bourgeois (l’)

Delvau, 1864 : Le nombre de coups, ordinairement très restreint, qu’un bourgeois tire avec sa femme, — la régularité de la vie empêche les extravagances du vit.

Il ne cessa de dire :
L’ordinaire bourgeois
Est de trois :
Jugez quel pauvre sire !

Collé.

Ordinaires

Delvau, 1864 : Les menstrues des femmes, qui devraient venir ordinairement tous les mois.

Le con, en entendant cela.
Se mit tant en colère
Que cela tout lui supprima
D’abord, les ordinaires.

(Parnasse satyrique.)

Delvau, 1866 : s. f. pl. Les menses de la femme, — dans l’argot des bourgeois.

Rigaud, 1881 : Menstrues.

France, 1907 : Menstrues.

J’éprouvais près de la belle Julie une résistance à laquelle je ne m’attendais pas. Elle me gifla, me griffa, me mordit. Enfin, de guerre lasse, je la lâchai, croyant à une vertu farouche. Nous nous séparâmes furieux… Je sus depuis qu’elle avait ses ordinaires.

(Les Propos du Commandeur)

Ordon

France, 1907 : Terme de métallurgie. Ensemble des pièces de charpente qui soutient les marteaux dans les forges de bois.

Ordonnance (papier qui n’est pas d’)

Merlin, 1888 : Billet de banque. Rare avis dans les casernes !

Ordonne (Madame j’)

France, 1907 : Femme impérieuse, qui aime à commander, qui veut que tout le monde plie devant elle, mari, enfants, domestiques.

Quand s’lèv’ Madame J’ordonne
Demand’ son chocolat :
Dépêchez-vous, la bonne,
Surtout n’en buvez pas.

(Rémy, Victoire la cuisinière)

Ordonner

d’Hautel, 1808 : C’est un monsieur j’ordonne. Sobriquet que l’on donne à un tatillon, à un jeune homme fier et altier, qui commande ses subalternes avec hauteur et emportement, qui veut être obéi à la parole.

Ordre (copier l’)

Merlin, 1888 : Un loustic, armé de son balai et désigné pour la corvée de quartier, s’apprête à aller copier l’ordre. On dit aussi : signer le rapport.

France, 1907 : Faire une corvée fatigante ; argot militaire.

Un loustic, armé de son balai et désigné pour la corvée de quartier, s’apprête à aller copier l’ordre.

(Léon Merlin, La Langue verte du troupier)

On dit aussi signer le rapport.

Ordre moralien

France, 1907 : Appellation ironique appliquée au parti conservateur après la dissolution de la Chambre par le maréchal Mac Mahon.

Ordremoralien

Rigaud, 1881 : Conservateur. Partisan de l’ordre moral que les adversaires politiques des républicains opposent à la démagogie. Journal ordremoralien, feuille ordremoralienne.

Ordure

Rigaud, 1881 : Femme sale au moral, femme sale au moral et au physique.

Ordures

Delvau, 1864 : Obscénités dites ou faites comme se plaisent à en dire ou en faire les honnêtes gens — qui sont ordinairement plus impudiques que les libertins.

Les femm’ n’aim’ pas les ordures,
Ni les couplets de chansons
Polissons.

Collé.

Il fait nuit. Mots confus, romances ordurières.
Se croisent sous le toit du logis ténébreux.

A. Glatigny.

Ordures (boîte aux)

France, 1907 : Pantalon.

France, 1907 : Colonne spéciale dans certains journaux politiques réservé aux citations et aux coupures prises dans les feuilles du parti politique opposé, et dont le sens se trouve le plus souvent dénaturé par une perfide mutilation.

Ordures (faire ses)

Rigaud, 1881 : Prendre les trottoirs, la voie publique, les parquets des appartements pour des lieux d’aisances, quand on a le privilège d’être chien ou chat.

Ore rotundo

France, 1907 : D’une bouche arrondie, vulgairement la bouche en cœur. Locution latine servant à ridiculiser les orateurs qui débitent des phrases emphatiques au populaire qui les admire.

Orée

France, 1907 : Lisiére d’un champ ou d’un bois ; on dit aussi orière, ourière ; du latin ora, bord.

Oreillard

Larchey, 1865 : Âne (Vidocq). — Allusion d’oreilles.

Delvau, 1866 : s. m. Baudet, — dans le même argot [des faubouriens].

Rigaud, 1881 : Âne.

Hayard, 1907 : Baudet, âne.

France, 1907 : Âne ; argot populaire. C’est le surnom injurieux que les ennemis de l’empire donnaient au fils de Napoléon III.

Oreille

d’Hautel, 1808 : Cela n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd. Pour dire qu’on a vivement relevé une parole piquante, qu’on y a riposté sur-le-champ.
Je suis sourd d’un oreille et n’entends pas de l’autre. Pour dire à quelqu’un que l’on ne consentira pas à ce qu’il demande, qu’on ne peut condescendre à ses désirs, que ses souhaits sont indiscrets.
Il n’entend pas de cette oreille-là. Se dit par ironie d’un homme avare, intéressé, qui a de la peine à payer ses dettes.
Les murs ont des oreilles. Voyez Muraille.
Cela lui entre par une oreille et lui sort par l’autre. Se dit d’un homme qui ne fait aucune attention à ce qu’on lui adresse ; qui méprise toutes les représentations qu’on lui fait.
Faire la sourde oreille. Faire semblant de ne pas entendre ce qu’on dit, n’y point avoir égard.
Corner aux oreilles de quelqu’un. Vouloir lui parler continuellement d’une affaire, vouloir le persuader, le forcer à vous entendre.
Frotter les oreilles à quelqu’un, ou lui donner sur les oreilles. Pour le corriger, le battre.
Les oreilles lui cornent. Se dit à quelqu’un qui croit entendre un bruit réel ; ou qui entend tout de travers.
Baisser l’oreille. Être humilié, mortifié ; être déchu d’une bonne condition.
Il a eu sur les oreilles. Se dit de quelqu’un qui a essuyé quelque perte ou quelque grande maladie.
Avoir la puce à l’oreille. Être inquiet, tourmenté, comme le sont les jaloux ; être occupé de quelque chose qui ôte le sommeil.
Secouer les oreilles. Signe négatif, pour faire entendre que l’on ne consent pas à ce qu’on exige de vous ; qu’on ne tient nul compte de quelque chose ; qu’on s’en moque.
Il sera bien heureux, s’il en rapporte ses oreilles. Pour dire qu’un homme qui s’est exposé à un grand péril, sera bien heureux s’il en revient sain et sauf.
Du vin d’une oreille. Pour dire excellent.
Du vin de deux oreilles. Pour dire détestable, parce qu’on secoue les deux oreilles en signe d’improbation.
Il lui a fait une oreille. Se dit par raillerie de quelqu’un que l’on soupçonne avoir coopéré à la naissance d’un enfant.
Être crotté jusqu’aux oreilles. Être fort mal dans ses affaires.
Gratter l’oreille à quelqu’un. Le cajoler, le flatter, pour en obtenir ce que l’on désire.
On dit aussi d’un homme inquiet et soucieux, qui n’a pas de mémoire, qu’il se gratte l’oreille.
Il est toujours pendu à ses oreilles.
Pour dire il le suit continuellement.
Se faire tirer l’oreille. Faire quelque chose de mauvaise grace ; se faire prier long-temps pour les moindres choses.
L’argent lui fait ouvrir les oreilles. Pour le rend attentif à quelque chose qu’il ne vouloit pas entendre ; le fait consentir à une proposition à laquelle il étoit sourd auparavant.
Lever l’oreille. Être orgueilleux de ses succès ; être fier de son bonheur.

France, 1907 : Nom de plusieurs champignons à chapeau adhérent par le côté, qui poussent soit sur le tronc, soit au pied des arbres dont il portent le nom, ou sur le bois en décomposition, au pied de quelque plante : oreille d’aloyard (de peuplier blanc), oreille de suie (de sureau), oreille d’ours, oreille de chardon, que les Provençaux et les Languedociens mangent à l’huile asaisonnée d’ail, de poivre et de sel : oreille de Judas.

Oreille (se faire tirer l’)

France, 1907 : Se faire prier ; consentir de mauvaise grâce à une démarche, à un acte, une obligation. Cette expression n’était autrefois nullement une métaphore, on tirait autrefois l’oreille des témoins pour leur rappeler la mémoire. Un article d’une loi romaine, dit Ch. Nisard, consacrait cette coutume bizarre. « Si tu veux, y est-il dit, qu’il se rende à ton appel, atteste-le ; s’il ne s’y rend pas, prends-le par l’oreille. » La loi ripuaire et une infinité d’autres chez les nations établies au-delà et en deçà du Rhin ont reçu des Romains cette même coutume, et l’ont maintenue en l’exagérant. Ainsi, on ne tirait pas seulement l’oreille aux démons, on leur tirait les cheveux et on leur donnait des claques par-dessus le marché.

Respecter de l’épousée
Les ineffables pudeurs,
Et te mettre à la croisée
Pour modérer les ardeurs ;
C’est une erreur sans pareille.
L’innocence, de nos jours,
Se fait peu tirer l’oreille
Quand il s’agit des amours.

(Gavroche)

Oreille à l’enfant (avoir fait une)

Rigaud, 1881 : Avoir fait, en collaboration, avec un ou plusieurs ce qu’il faut pour se croire le père d’un enfant.

France, 1907 : Se dit d’un homme qui a partagé avec un ou plusieurs autres les faveurs d’une femme devenue ensuite mère et qui, par conséquent, peut revendiquer une partie de la paternité de l’enfant.
Faire des enfants par l’oreille. Façon de procréer racontée aux enfants par les parents et à laquelle, au-dessus de six ans, les petites filles ne croient plus. On connait ce couplet des Raretés de Lamotte-Houdard :

Une fille de quinze ans,
D’Agnès la pareille,
Qui croit que les enfants
Se font par l’oreille…

Cette expression bizarre vient sans doute d’un vieux noël populaire où il est dit que la Vierge conçut par l’oreille, d’où cette épigramme :

Sitôt qu’eut parlé Gabriel,
La Vierge conçut l’Éternel
Par une divine merveille,
L’Archange ainsi le lui prédit.
Et de là peut-être a-t-on dit
Faire des enfants par l’oreille.

On lit dans un vieux chant d’église :

Gaude, Virgo, Mater Christi,
Quæ per aurem concepisti.

« Réjouis-toi, Vierge, mère du Christ, qui a conçu par l’oreille. »

Oreille fendue

Rossignol, 1901 : Un fonctionnaire ou magistrat que l’on met en demeure de faire valoir ses droits à la retraite, a l’oreille fendue.

Oreilles (dormir sur les deux)

France, 1907 : Dormir profondément et avec confiance, à l’inverse des animaux qui ont toujours une oreille tendue pendant leur sommeil pour y recevoir les bruits annonçant l’approche de quelque danger.
Quelques étymologistes, Ch. Ferrand entre autres, affirment que deux oreilles est une corruption de deux oreillers ; je le croirais volontiers, car je ne vois guère le moyen de dormir sur les deux oreilles à la fois.
D’un autre côté, M. L. Martel, dans son Recueil des Proverbes français, donne l’explication suivante :

Cette expression est une mauvaise traduction d’un proverbe latin correspondant : in utramvis aurem dormire, « dormir sur celle des deux oreilles que l’on veut », c’est-à-dire, dormir aussi bien couché sur le côte gauche que sur le côté droit, et les Romains appliquaient l’expression à un homme débarrassé de toute crainte, de tout souci. Le français n’ayant pas de mot pour rendre, sous une forme brève, l’adjectif qui signifie en latin : n’importe lequel des deux, l’a traduit par les deux, ce qui présente une impossibilité physique et un sens absurde.

Nous sommes du même avis.

Oreilles de chien

France, 1907 : Un des sobriquets donnés aux petits jeunes gens appartenant à la jeunesse, dite dorée, du Directoire.

Au commencement de l’an III, quand les patriotes furent écrases et qu’il n’y eut plus qu’à piétiner sur les vaincus, les crevés sortirent de leurs trous et promenèrent dans les sections leurs faces blêmies par la débauche et la peur, cette peur implacable du lâche et du corrompu ; ils se joignirent aux petits émigrés cachés chez les filles, aux élégants de contrebande travestis en aristocrates sous le sobriquet de jeunesse dorée… et toute cette canaille élégante régna sur Paris, au nom de la modération et du bâton plombé, assommant les patriotes quand ils étaient vingt contre un, et fouettant leurs femmes, aux applaudissements des nymphes… Dès cette époque, et bien avant déjà, la petite coterie s’était renforcée de l’élément plébéien dans une forte proportion ; car les petits du bourgeois ont toujours aimé jouer au gentilhomme. Cette coalition forma ce bataillon de singes qu’on a tour à tour nommés : muscadins, jeunes gens, jeunesse dorées, cadenettes, peignes retroussés, incroyables, merveilleux, oreilles de chien, et, sous le Directoire, pourris (ce mot-ci est bien aussi pittoresque que les nôtres).

(Louis Combes, Curiosités révolutionnaires)

Oreilles de chien (cheveux en)

France, 1907 : Cheveux qui tombent de chaque côté du visage, coiffure à la mode sous le Directoire. Ceux qui la portaient furent baptisés de ce nom.

Dans sa jeunesse, Napoléon était fort maigre, avait le teint olivâtre, la figure longue, les yeux couverts, portait les cheveux coupés en oreilles de chien, enfin tout l’ensemble de sa physionomie n’était rien moins qu’agréable.

(Anecdotes sur la cour et la famille de Napoléon Bonaparte, Londres, 1818)

Oreilles me tintent (les)

France, 1907 : On parle de moi. Il arrive que l’on entend parfois dans l’oreille un son extérieur, un petit bruit semblable à une cloche. La superstition populaire attribue ce bruit à des propos tenus sur votre compte par des personnes éloignées, superstition venue en droite ligne des Romains. Si c’est l’oreille droite qui tinte, les propres sont favorables ; ils sont le contraire si c’est la gauche. Une autre croyance populaire venue également des Romains est qu’un mouvement rapide et involontaire de l’œil droit annonce la vue prochaine d’une personne chère.

Oremus, prends tes puces

France, 1907 : Dicton les départements de l’Est signifiant qu’après les prières du soir, il est temps d’aller se coucher, les puces étant les compagnes ordinaires des villageois, d’habitude fort malpropres.

Ores et déjà (d’)

France, 1907 : Dès cette heure et dès maintenant. Vieille expression encore usitée dans nombre de campagnes. Ores, vieux mot, de l’italien ora, heure, et employé dans le sens de : à cette heure, à présent. La grammaire de Palsgrave cite ce mot dans sa forme simple : « Puis que ton vueil est ores en balance » — Puisque ta volonté est à cette heure indécise.
Plus tard on mit l’article devant ores : « Laissez des ores le mult parler » — Laissez dès maintenant les longs discours. Finalement on écrivit d’ores.
Il en est de même de qui avait aussi la signification de maintenant et s’écrivait des jà.
Désormais s’écrivait également en trois mots des or mais ; la même observation se fait pour dorénavant : d’ores en avant. Molière, dans le Malade imaginaire, fait dire à Thomas Diafoirus : « Et comme les naturalistes remarquent que la fleur nommée héliotrope tourne sans cesse vers l’astre du jour, aussi mon cœur d’ores-en-avant tournera-t-il toujours vers les astres resplendissants de vos yeux adorables. »

Orfèvre

Rigaud, 1881 : Marchand qui fait valoir sa marchandise, personne qui vante ses qualités, — dans le jargon des vieux habitués de la Comédie-Française.

Orfèvre, monsieur Josse (vous êtes)

France, 1907 : C’est ainsi qu’on répond aux gens qui vous donnent des avis, non pour vous obliger, mais pour servir leurs propres intérêts. Le dicton est tiré de l’Amour médecin de Molière, où un orfèvre nommé Josse cherche à persuader un bourgeois nommé Sganarelle, dont la fille est malade d’amour, qu’une belle garniture de diamants, de rubis on d’émeraudes la guérira. Sganarelle comprend que le conseil n’est pas désintéressé et répond : « Vous êtes orfèvre, Monsieur Josse, et votre conseil sent son homme qui a envie de se défaire de sa marchandise. »

Organe

France, 1907 : Faim ; vieil argot.

Organeau

Delvau, 1866 : s. m. Anneau de fer placé au milieu de la chaîne qui joint entre eux les forçats suspects.

France, 1907 : Anneau de fer placé au milieu de la chaîne qui accouple les forçats dangereux.

Orge

d’Hautel, 1808 : Grossier comme du pain d’orge. Se dit d’un homme brutal, sans éducation, rustre, lourdaud.
Faire ses orges. Faire bien ses affaires ; et en mauvaise part, faire des gains illicites.

Orge (à Lagny combien vaut l’)

France, 1907 : Lagny est une petite ville de l’ancienne province de l’Île-de-France, dans le département de Seine-et-Marne, et voici, d’après Le Roux de Lincy, ce qui a donné lieu à cet ironique dicton : « En 1544, les moines de l’abbaye et les habitants se révoltèrent contre les troupes du roi, qui y envoya le capitaine Lorges pour les soumettre ; mais ils se défendirent courageusement. Lorges, indigné de leur résistance, pressa vivement les attaques, donna assaut sur assaut, et parvint à s’emparer de la ville. Le soir même, il invita toutes les dames à une fête qu’il donna, au milieu de laquelle il fit fermer toutes les portes, et dans un instant tous les hommes capables de porter les armes furent massacrés, et toutes les femmes, sans distinction, livrées à la brutalité des soldats. Cette action produisit bientôt une nouvelle génération qui repeupla la ville ; aussi les habitants actuels ne peuvent-ils souffrir qu’on leur rappelle leur origine : c’est ce qui fait qu’on ne peut y demander sur le marché : Combien vaut l’orge, sans avoir la main dans le sac, sinon ils croient qu’on veut faire allusion au capitaine Lorges. »

Orges (faire ses)

France, 1907 : Faire son profit ; réaliser de beaux bénéfices ; synonyme de faire son beurre.

Un coupeur de bourse éffronté,
Dans le temps de la foire, en prison arrêté,
À son juge disait : « Ah ! Vous ne sauriez croire
Combien vous me faites de tort
De me tenir en cage, où je me déplais fort,
Lorsque je faisais bien mes orges à la foire.

(Baraton)

Orgue

Clémens, 1840 : Moi.

Delvau, 1866 : Pronom personnel de l’argot des voleurs. Mon orgue, moi. Ton orgue, toi. Son orgue, lui. Leur orgue, eux.

Rigaud, 1881 : Homme, — dans le jargon des voleurs. — Manger sur l’orgue, dénoncer un complice.

La Rue, 1894 : Homme. Mon, ton, son orgue, moi, toi, lui ; leur orgue, eux.

Virmaître, 1894 : Homme. Mon orgue, moi. Ton orgue, toi. Son orgue, lui. Leur orgue, eux. (Argot des voleurs).

Rossignol, 1901 : Mon orgue, moi ; son orgue, lui.

Hayard, 1907 : Homme. Ce mot est aussi un pronom : Mon orgue : moi ; ton orgue : toi ; son orgue : lui ; etc.

France, 1907 : Homme, dupe ; argot des voleurs. Mon orgue, ton orgue, son orgue, moi, toi, lui.

Orgue (jouer de l’)

Rigaud, 1881 : Ronfler.

Virmaître, 1894 : Ronfler. Il ronfle comme un tuyau d’orgue. Il ronfle comme une toupie d’Allemagne. Allusion au ronflement sonore que fait la toupie en tournant sur elle-même (Argot du peuple).

France, 1907 : Ronfler.

Orgue (l’)

France, 1907 : Lui. D’après Lorédan Larchey, l’orgue serait une déformation de lorgue, déformation de lui par la terminaison argotique orgue.

Orgue (manger sur l’)

France, 1907 : Dénoncer ses complices. On dit aussi jaspiner de l’orgue.

Orgue (mon, ton, son)

Rigaud, 1881 : Moi, toi, lui, — dans le même jargon. — Tu ne peux pas le faire avec mon orgue, tu n’es pas de force à te mesurer avec moi.

Orgueil

d’Hautel, 1808 : Ce n’est pas par orgueil, mais bien par nécessité. Se dit quand on remplace un habit très-usé par un habit neuf.

Orgueilleux de Tours

France, 1907 : Ce vieux dicton qui date du XIIIe siècle s’appliquait non aux habitants de la ville, mais aux différents ordres mendiants qui y pullulaient à cette époque et qu’à cause de leur vanité on appelait les povres orgueilleux de Tours. Dans une pièce de vers du XVIe siècle, intitulée les Souhaits du monde, un de ces pauvres orgueilleux s’exprime ainsi :

En vérité, pour tout mon beau souhait,
Je souhaite bribes en ma besace,
À déjeûner avoir un œuf mollet ;
À disner humer la souppe grasses ;
Un grant godet en lieu d’une grande tasse
Plein de vin blanc au retour de matines,
Et dans non lit deux douillettes tétines.

Orgues

Delvau, 1866 : s. f. pl. Affaires, — dans le même argot [des voleurs].

Rigaud, 1881 : Affaires, — dans le jargon des voleurs.

Orient

Rigaud, 1881 : Or, — dans le jargon des voleurs.

France, 1907 : Or ; argot des voleurs. Une bogue d’orient, une montre d’or.

Pécille l’orient avec ta fourchette.

(Winter, forçat de Toulon, 1829)

En faisant mes gambades,
Un grand messière franc,
Voulant faire parade.
Sone un bogue d’orient.

(Mémoires de Canler)

Orientaliste

Delvau, 1866 : s. m. Homme parlant le pur argot, — qui est du sanscrit et du chinois pour les gens qui n’ont appris que les langues occidentales.

France, 1907 : Individu ferré sur l’arcot. Le vieil argot a été en effet emporté d’Orient par les tribus nomades des gypsies ou bohémiens.

Original

d’Hautel, 1808 : C’est un original sans copie. Se dit d’un homme qui a des idées ridicules, qui agit d’une manière extravagante.

Delvau, 1866 : s. m. Homme qui ne fait rien comme personne. Argot des bourgeois. On dit aussi Original sans copie.

Orine

France, 1907 : Espèce, origine. Mettre en orine, fournir les éléments d’une chose.
« Je l’ai mis en orine de bonnes salades », pour : Je lui ai donné des graines de bonnes espèces qu’il n’avait pas. Du latin origo.

(Glossaire du Centre)

Oripeaux

d’Hautel, 1808 : Prétintailles, faux brillans, frivolités, bagatelles ; et généralement tout ce qui constitue les ornemens des femmes.

Orléans

Larchey, 1865 : Vinaigre (id.). — Orléans est la patrie du vinaigre.

Delvau, 1866 : s. m. Vinaigre.

Rigaud, 1881 : Vinaigre ; pour vinaigre d’Orléans.

France, 1907 : Vinaigre. Allusion à la célébrité de cette ville pour ce produit.

Orléans (camus d’)

France, 1907 : On a appelé les Orléanais non seulement camus, mais aussi bossus, guépins et chiens.
Nous n’avons pu trouver l’origine du premier sobriquet. Bossu n’est qu’un jeu de mot sur Beauce, dont Orléans était la capitale. Quant à guépin, il vient de guêpe à cause de l’esprit caustique et railleur attribué aux Orléanais. Bonaventure Desperriers dit en parlant d’une dame d’Orléans : « Une dame gentille et honnête, encore qu’elle fust guespine. » On lit anssi dans les Mémoires de la Ligue : « Le naturel des guespins, j’en prends Orléans pour exemple, est d’être hagard, noiseux et mutin. » Peut-être, comme dit Le Roux de Lincy, c’est cette réputation de moquerie qui aurait valu aux Orléanais le surnom de bossus.
Quant à celui de chiens, voici ce qu’en dit dom Peluche dans un numéro du Mercure (mai 1735) :

C’est à Mathieu Paris que nous devons recourir pour trouver ce que nous cherchons. Cet écrivain, qui mourut en 1259, marque dans la vie de Henri III, roi d’Angleterre, qu’en l’an 1251, pendant la captivité du roi saint Louis, les pastoureaux, étant arrivés à Orléans, prirent querelle avec quelques écoliers. Une rixe s’engage et plusieurs personnes furent tuées et notamment du clergé, ce que les Orléanais souffrirent non seulement, mais ce qu’ils semblèrent approuver : pourquoi, ajoute Mathieu Paris, ils méritèrent d’être appelés chiens.

On traitait aussi les Orléanais de luniers ou lunatiques, ainsi qu’il appert dans ce vieux dicton : « Il est de l’abbaye des luniers d’Orléans. » Les Orléanaises, devenues aujourd’hui fort dévotes, avaient autrefois une réputation des plus équivoques, s’il faut s’en rapporter aux adages du XVIe siècle :

Qui n’a couché à Orléans ne scait que c’est de femme.
À Orléans la broche est rompue et la femme a emporté la clef.

Elles pouvaient d’ailleurs être aussi dévotes qu’aujourd’hui sans que cela enlevât en rien leur renom d’amoureuses, car suivant l’antique dicton :

Femme folle à la messe
Est molle à la fesse.

Orléans (glose d’)

France, 1907 : C’est la glose d’Orléans, elle est plus difficile que le texte. Ce dicton, qui est fort ancien, a excité nombre de commentaires. D’après Le Maire, auteur d’un livre sur les antiquités d’Orléans, il viendrait de l’esprit railleur des Orléanais, dont la manie était d’ajouter par des amplifications aux faits qu’ils rapportaient, détruisant ainsi le texte par la glose :

On dit volontiers que la glose
D’Orléans se destruit par le texte.

Orme (attendre sous l’)

France, 1907 : Attendez-moi sous l’orme, vous m’attendrez longtemps. Cette expression vient sans nul doute des promenades ou mails des villes et bourgades de province que l’on plantait généralement d’ormes. Ces mails servaient le soir, comme tous les endroits ombreux et solitaires, de lieux de rendez-vous ; mais quand une fille ou une femme voulait se défaire d’un amoureux trop pressant, elle l’envoyait l’attendre sous l’orme.
D’après certains étymologistes, ce serait une allusion à l’ancien usage des juges de tenir leurs assises en plein air, devant le manoir seigneurial, à l’ombre d’un des ormes dont étaient formées la plupart des avenues. Comme il est probable que l’on manquait souvent aux assignations, l’on finit par dire à ceux qui vous donnaient des rendez-vous auxquels on avait l’intention de manquer : « Attendez-moi sous l’orme… »
Les deux opinions sont fort acceptables.

Orner le front

Hayard, 1907 : Cocufier.

Ornichon

anon., 1827 : Poulet.

Raban et Saint-Hilaire, 1829 : Poulet.

Bras-de-Fer, 1829 : Poulet.

Halbert, 1849 : Poulet.

Delvau, 1866 : s. m. Poulet.

Virmaître, 1894 : Oie, volaille. Les voleurs qui ont la spécialité de dévaliser les poulaillers dans les campagnes se nomment des nettoyeurs d’ornichons (Argot des voleurs). V. Angluce.

Hayard, 1907 : Volaille : oie, poule, canard…

France, 1907 : Poulet. Vieil argot du temps de Cartouche. Nettoyeur d’ornichons, maraudeur qui dévalise les poulaillers.

Ornie

anon., 1827 : Poule.

Raban et Saint-Hilaire, 1829 : Poule.

Bras-de-Fer, 1829 : Poule.

Halbert, 1849 : Poule.

Larchey, 1865 : Poule (id.). — Du grec ornis.Ornichon : Poulet. — Ornion : Chapon. — Ornie de balle : Poule d’Inde.

Delvau, 1866 : s. f. Poule, — dans l’argot des voleurs, pour qui cette volaille est l’oiseau par excellence (όρνις), au propre et au figuré, à manger et à plumer.

Rigaud, 1881 : Poule. — Ornichon, poulet. — Ornie de balle, dinde. Ornion, chapon. — Ornière, poulailler.

France, 1907 : Poule ; du grec ornis. Égrailler l’ornie, attraper une poule au moyen d’un hameçon. Vieil argot du temps de Cartouche.

Ornie de balle

anon., 1827 : Poule d’Inde.

Bras-de-Fer, 1829 : Poule d’Inde.

Halbert, 1849 : Poule d’Inde.

Delvau, 1866 : s. f. Dinde, — « à cause de la balle d’avoine dans laquelle elle est forcée de chercher sa nourriture, le grain étant réservé aux autres habitants de la basse-cour. »

Virmaître, 1894 : Dindon. (Argot des voleurs).

France, 1907 : Dinde, appelée ainsi à cause de la balle d’avoine dans laquelle elle cherche sa nourriture, le grain étant réservé aux autres volatiles.

Ornie, pic en terre

La Rue, 1894 : Poule. Ornichon, poulet, Ornion, chapon. Ornie de balle, dinde. Ornière, poulailler.

Ornière

Delvau, 1866 : s. f. Poulailler.

France, 1907 : Poulailler.

Ornion

anon., 1827 : Chapon.

Bras-de-Fer, 1829 : Chapon.

Halbert, 1849 : Chapon.

Delvau, 1866 : s. m. Chapon.

France, 1907 : Chapon.

Orphelin

Bras-de-Fer, 1829 : Orfèvre.

Clémens, 1840 : Horloger, bijoutier, orfèvre.

Larchey, 1865 : Orfèvre (Vidocq). — Corruption du même mot. Les orphelins de muraille sont des factionnaires. v. ce mot. — L’abandon de leurs auteurs leur a fait donner ce nom. — Orphelins.

C’est sous ce nom que l’on veut dire en argot : une bande de voleurs.

A. Durantin.

Delvau, 1866 : s. m. Orfèvre, — dans l’argot des voleurs.

Rigaud, 1881 : Orfèvre.

Rigaud, 1881 : Bout de cigare, bout de cigarette réduite à sa dernière expression.

La Rue, 1894 : Orfèvre Horloger. Bout de cigare. Mise (au jeu) abandonnée ou oubliée sur le tapis.

Virmaître, 1894 : Verre de vin à moitié bu que le buveur abandonne sur le comptoir du mastroquet. Quand un consommateur boit seul sans trinquer, il étouffe un orphelin. Dans les bars, il ne manque pas de Saint-Vincent-de-Paul pour les recueillir (Argot du peuple).

Virmaître, 1894 : Bout de cigare ou de cigarette que le fumeur abandonne dédaigneusement. Ils sont aussitôt recueillis par le ramasseur de mégots qui leur fait un sort (Argot du peuple).

Rossignol, 1901 : Voir mégot.

Hayard, 1907 : Bout de cigare ou bout de cigarette ; mégot.

Hayard, 1907 : Bandit.

France, 1907 : Individu sans profession, généralement voleur ; vieil argot.

France, 1907 : Horloger, orfèvre.

France, 1907 : Dans l’argot des joueurs, ce sont les pièces laissées sur le tapis vert et que personne ne réclame. Le fait arrive assez fréquemment sur les tables de roulette. Des joueurs, pontant sur plusieurs chances à la fois, oublient quelquefois où ils ont ponté. La mise reste sur le tapis et le ramasseur d’orphelins s’en empare.

La plupart des décavés attendent patiemment le retour de la fortune. Ils savent qu’un coup heureux suffit et n’abandonnent jamais l’espoir. Ils suivent le précepte espagnol : « Lorsque tu n’as plus d’argent, ne t’éloigne pas de la maison de jeu » et fréquentent assidûment les salles. Le hasard est émaillé de joyeuses surprises. C’est un ami qui survient à point pour vous prêter le louis sauveur ; un orphelin égaré que pieusement on recueille ; une pièce perdue ramassée sous un banc.

(Hector France, Monaco)

On dit aussi orphelin sans refuge.

France, 1907 : Bout de cigare.

Orphelin de muraille

Delvau, 1866 : s. m. Résultat solide de la digestion, — dans l’argot des faubouriens.

Rigaud, 1881 : Carte de visite… de digestion déposée le long d’un mur.

Virmaître, 1894 : Les étrons qui s’alignent le long des murs isolés. Pourquoi orphelins ? Ils sont parfois en nombreuse société et beaucoup ne peuvent être pris pour des vagabonds étant munis de papiers (Argot du peuple).

France, 1907 : Étron.

Orpheline de Lacenaire

Rigaud, 1881 : Prostituée qui arpente le boulevard, dans le jargon des gens de lettres.

France, 1907 : Nom donné autrefois aux prostituées du boulevard, à l’époque du procès de ce célèbre assassin qui, comme Pranzini, fut fort aimé du beau sexe.

Orphelins

anon., 1827 : Ceux qui vont de compagnie.

Raban et Saint-Hilaire, 1829 : Bande de voleurs.

Bras-de-Fer, 1829 : Ceux qui vont de compagnie.

Halbert, 1849 : Gens sans aveu, ceux qui vont de compagnie.

Delvau, 1866 : s. m. pl. Bande de camarades, ou plutôt de complices, — dans l’argot des voleurs.

Rigaud, 1881 : Bande, association de malfaiteurs.

La Rue, 1894 : Bande de voleurs.

Orphie

Halbert, 1849 : Oiseau.

Delvau, 1866 : s. f. Oiseau chanteur (Orphicus). Même argot [des voleurs].

France, 1907 : Oiseau ; argot des voleurs.

Orreries

France, 1907 : Bijoux.

— Assez jaspiné, assez « pissé de l’œil », comme ils disent au faubourg… Au lieu de toujours débagouliner la même rengainée, viens un peu m’aider à retourner cette vieille, là-bas. C’est une richarde, je suis sûr qu’elle est couverte d’orreries.

(Hector France, Les Mystères du monde)

Orteil (chelinguer de l’)

Larchey, 1865 : Sentir mauvais des pieds.

Ortie

d’Hautel, 1808 : Jeter le froc aux orties. Renoncer à une profession quelconque.

Orval

Halbert, 1849 : Porée.

France, 1907 : Porée ; vieil argot.

Os

d’Hautel, 1808 : Il est rongé jusqu’aux os. Se dit d’un homme rempli de vermines, ou qui a quelque maladie honteuse et secrète qui le mine.
Donner un os à ronger à quelqu’un. Lui susciter une mauvaise querelle ; ou l’embarrasser dans une mauvaise affaire ; l’amuser, détourner son attention.
Les os sont pour les absens. Voyez absent.
Elle n’a que la peau sur les os. Se dit d’une personne fort maigre.
Il ne fera pas de vieux os. Pour, son existence ne sera pas longue, il mourra bientôt.
Jeter un os à la gueule de quelqu’un. Voyez chien.
Il n’y a pas de viande sans os. Dicton des bouchers de Paris, quand leurs pratiques se plaignent du trop grand poids des os qu’ils donnent, et qui signifie qu’il faut que tout passe ensemble.

Larchey, 1865 : « Dans la langue populaire parisienne, on appelle os le numéraire. » — Mornand. — « Il faut cependant que je lui donne de l’os. » — Lynol. — Pourquoi ne dirait-on pas au figuré, de l’os, comme on dit du nerf, pour désigner aussi l’argent ?

Delvau, 1866 : s. m. Argent, or, monnaie, — dans l’argot des faubouriens. Avoir l’os. Être riche.

La Rue, 1894 : Argent, monnaie. Avoir de l’os ou avoir l’os signifie aussi courage, énergie, force, moelle.

Virmaître, 1894 : Argent, or ou monnaie.
— J’ai de l’os à moelle dans ma poche (plusieurs pièces de cent sous) (Argot du peuple).

France, 1907 : Argent. Ce terme vient évidemment des maisons de jeu où la mise des joueurs est représentée par des jetons en os. « Je n’ai plus d’os », c’est-à-dire je n’ai plus de jetons, et par conséquent d’argent.

— Y ne manque pas d’aplomb, ce vieux, de vouloir essayer d’enjôler les filles : plus de cheveux, plus de dents, une sale trombine… Si encore il avait de l’os !

(René de Nancy)

L’soir on rencontr’ plus d’un’ fripouille
Extra muros
Qui vous assomme et vous dépouille
De votr’ pauvre os…
C’est pas la pein’ d’app’ler du monde
D’vos cris plaintifs :
Y a qu’l’écho qui nous réponde
Sur Les fortifs.

(Victor Meusy)

Os (à bon chien n’échet bon)

France, 1907 : Dicton plein d’amertume et qui malheureusement est trop souvent vrai, car il se rencontre chez tous les peuples. « Toutes les règles peuvent varier, dit Sydney Smith, mis celle-ci est la seule que vous trouverez sans exception, dans ce monde, la rétribution ou la récompense est toujours en raison inverse des devoirs accomplis. » Luck in all, chance dans tout, disent les Anglais. Et ils ajoutent :

The more rogue the more luck.
The devil’s children have the devil’s luck.

« Plus on est coquin, plus on a de chance. Les enfants du diable ont la chance du diable. »
Le plus mauvais cochon attrape le meilleur grain (al mas rum puerco la mejor bellota), disent les Espagnols.
C’est la transformation du vieil adage latin : Fortuna favet fatuis, « la fortune est favorable aux sots ». Les Allemands disent : « La fortune et les femmes aiment les fous » (Glück und Weiber haben die Narren lieb).

Os (avoir de l’)

Hayard, 1907 : Avoir de l’argent.

Os (de l’)

Rigaud, 1881 : De l’argent.

Os (jamais belle chair ne fut près des)

France, 1907 : Femme trop maigre n’est jamais belle.

Os (point de viande sans)

France, 1907 : Il n’y a point de joie sans mélange, de satisfaction complète, d’avantage sans déduction. Cette locution provient de ce que les bouchers donnent toujours des os avec la viande qu’on leur achète.

Os à moelle

Rigaud, 1881 : Nez. — Faire juter l’os à moelle, se moucher avec le mouchoir de ses cinq doigts. Les voyous disent aussi : « faire dégorger son ulcère. »

Merlin, 1888 : Grande flûte traversière.

Fustier, 1889 : Lorgnette.

France, 1907 : Nez ; se dit aussi du membre viril. Faire juter l’os à moelle, se servir de ses doigts comme de mouchoir de poche ; se masturber.

France, 1907 : Lorgnette. Allusion au membre viril.

Os de boudin

France, 1907 : Rien, chose qui n’existe pas, la composition des boudins excluant l’emploi des os ; patois du Centre.
S’en aller en os de boudin, tomber à rien. On dit ailleurs, dans le même sens, s’en aller en eau de boudin.

Os de l’avocat

France, 1907 : Os de l’éclanche de mouton qui contient beaucoup de moelle. On l’appelait ainsi à cause de la réputation de gourmands et de pigne-assiette qu’avaient autrefois les avocats, ainsi qu’en témoigne ce dicton :

Les avocats
Sont des lèche-plats.

Cette expression vient peut-être aussi de ce qu’ils tiraient toute la moelle des procès.

Os de mouton

La Rue, 1894 : Arme dite coup de poing.

France, 1907 : Sorte de coup de poing américain

Os du maître clerc

France, 1907 : Prolongement de l’os du gigot. Cette expression est vieillie comme la précédente.

Osanore, osselet

Rigaud, 1881 : Dent. — Jouer des osanores, manger.

Osanores

France, 1907 : Dents. Argot des dentistes passé dans le peuple. Les osanores sont, à proprement parler, des dents artificielles fixées dans des râteliers sans or. Le mot est forme d’os et or, séparés par le préfixe grec an, sans ; littéralement, os sans or.

Oseille

Rigaud, 1881 : Argent, — dans le jargon des voleurs. C’est le mot os doté de la terminaison eille.

Les frangins auraient plutôt acheté quatre exemplaires, au lieu d’un, afin de remettre de l’oseille dans ton porte-monnaie !

(Le petit Badinguet, 1878.)

La Rue, 1894 : Argent.

Virmaître, 1894 : Argent (Argot du peuple). V. Aubert.

Virmaître, 1894 : La faire à l’oseille. Jouer un tour désagréable à quelqu’un. A. D. Il attribue ce mot à un cabotin habitué d’une petite gargote de la rue de Malte où mangeaient les artistes des théâtres du boulevard et du Temple. Selon lui, ce mot date de 1861 environ. Comme cette locution : la faire à l’oseille est très répandue, il est bon de rétablir son origine. Le petit père Vinet, mort il y a deux ans dans un taudis de la rue de Tourtille, à Belleville, était vers 1840 un chansonnier en vogue. Il avait été sauvage au Caveau des Aveugles, au Palais-Royal, avant le père Blondelet ; il mangeait dans la gargote citée par Delvau. La gargote était non rue de Malte, mais rue de la Tour. Un après-déjeuner, il composa une chanson intitulée : Vous me la faites à l’oseille. Bouvard, l’homme à la vessie la chantait encore en 1848, place de la Bastille. Voici un couplet de cette chanson :

Comme papa j’suis resté garçon
Pour bonne j’ai pris Gervaise.
Elle est maîtresse à la maison
Je la trouve mauvaise
De la cave au grenier
La danse du panier
Que c’est une merveille.
Elle mange à son goût
Mes meilleurs ragoûts.
Vous me la faites à l’oseille.


Comme on le voit, il y a plus de cinquante ans que l’on connaît cette expression (Argot du peuple). N.

Rossignol, 1901 : Argent.

Hayard, 1907 : Argent.

France, 1907 : Argent. Il fond dans la main comme l’oseille dans la casserole.

Mais, nom de Dieu ! mince d’purée !
C’est dégoûtant c’que nous cachons :
Des nentill’s, des pois en purée
Et d’l’eau grass’ comme à des cochons,
Vrai, j’m’enfil’rais ben un’ bouteille ;
À présent qu’t’es sorti d’là-bas,
Envoy’-moi donc un peu d’oseille,
À Mazas.

(Aristide Bruant)

Oseille (avoir mangé de l’)

Rigaud, 1881 : Être de mauvaise humeur, montrer de l’aigreur ; allusion à l’acidité de l’oseille.

France, 1907 : Être de mauvaise humeur.

Oseille (la faire à l’)

Virmaître, 1894 : Réussir un bon vol qui a été bien nourri. Sûrement c’est la faire à l’oseille à celui qui a été dévalisé. Les voleurs sont quelquefois facétieux (Argot des voleurs).

France, 1907 : Se moquer de quelqu’un ; le duper. « Vous me la faites à l’oseille. »

L’expression, dit Delvau, sort d’une petite gargote de cabotins de la rue de Malte, derrière le boulevard du Temple. La maîtresse de cette gargote servait souvent à ses habitués des œufs à l’oseille, où il y avait souvent plus d’oseille que d’œufs. Un jour, elle servit une omelette — sans œufs. — « Ah ! cette fois, tu nous la fais trop à l’oseille », s’écria un cabotin. Le mot circula dans l’établissement, puis dans le quartier ; il est aujourd’hui dans la circulation générale.

Oseille (la fourre à l’)

Hayard, 1907 : Essayer de tromper.

Oseille (scène de l’)

Rigaud, 1881 : Scène où l’on exhibe le bataillon des femmes décolletées, dans une féerie ou autre pièce de même moralité. Oseille est là comme variante de persil. On a dit scène de l’oseille comme on aurait dit scène du persil, c’est-à-dire scène de la retape. (V. ces mots.)

Oseille (scènes de l’)

France, 1907 : Scènes où les figurantes font leur apparition en costume suggestif, c’est-à-dire avec le moins de costume possible. On sait que l’oseille crue fait venir l’eau à la bouche, c’est sans doute une allusion à cette particularité salivaire.

Osier

d’Hautel, 1808 : Pliant comme l’osier. Homme bas et souple, prêt à s’humilier aux moindres occasions.

Osse

France, 1907 : Cheville de fer qui traverse le bout du moyeu pour empêcher la roue de sortir.

Osselet

La Rue, 1894 : Dents.

Osselets

Delvau, 1866 : s. m. Les dents, — dans l’argot des voleurs.

Virmaître, 1894 : Les cinq doigts. Les gamins jouent un jeu qui se nomme osselet avec des os de pied de mouton (Argot du peuple). V. Apôtres.

Rossignol, 1901 : Voir abatis.

France, 1907 : Dents.

Osselets (les)

Hayard, 1907 : Les doigts.

Ossian

France, 1907 : Bonnet de coton ; argot de l’École polytechnique, du nom d’un ancien directeur des études, Ossian Bonnet.

L’ossian sert ordinairement à essuyer les rasoirs ; mais son utilité principale est de servir de cagoule à ceux qui se déguisent et de masque excellent à ceux qui, le soir, veulent faire du tapage dans les corridors… Percé de deux trous à la hauteur des yeux et d’un autre pour la bouche, enfoncé jusqu’au cou, l’ossian rend absolument méconnaissable.

(Albert Lévy et G. Pinet)

Ost

d’Hautel, 1808 : Armée. Si l’ost savoit ce que fait l’ost, l’ost battroit l’ost. Vieux proverbe qui signifie que si un général savoit l’état, les desseins, les démarches de son ennemi, il lui seroit facile d’en venir à bout, de le vaincre.

Ostau

France, 1907 : Voir Hostau.

Osto

d’Hautel, 1808 : Mot baroque qui signifie maison, ménage, son chez soi.
Aller à l’osto ; revenir à l’osto. Pour aller à la maison, retourner chez soi.

Rossignol, 1901 : Salle de police.

Hayard, 1907 : Prison.

Ostot

un détenu, 1846 : Asile, maison, chambre, demeure.

Ostrogoth

d’Hautel, 1808 : Mot injurieux qui signifie sot, ignorant, imbécile ; homme qui ignore les coutumes et les bienséances que l’on pratique en société.

Delvau, 1866 : (on prononce Ostrogo) s. m. Importun ; niais, — dans l’argot du peuple.

Otage

Rigaud, 1881 : Prêtre, ecclésiastique, par allusion aux otages de la Commune, — dans le jargon des voyous et des voleurs.

Ôte-toi de là que je m’y mette

France, 1907 : Dicton qui est le fond de presque toutes les convictions politiques.

En tout cas, les ennemis que je me suis faits comme ceux que je puis me faire encore reconnaîtront que je ne les ai jamais attaqués dans un but de concurrence même loyale, ou dans un sentiment de rivalité basse. Au lien de dire à celui que j’essayais de renverser : « Ôte-toi de là que je m’y mette », j’ai toute ma vie pratiqué cette autre maxime : « Ôte-toi de là que je ne m’y mette pas »

(Rochefort, Les Aventures de ma vie)

Ôter le petit chapeau

Delvau, 1864 : Décalotter un homme en le branlant. — L’expression est moderne et imagée. Je ne saurais résister a la démangeaison que j’ai de citer l’anecdote qui y a trait. Un vieux monsieur croit apprendre a une ingénue la manœuvre de la masturbation.

Ôte le petit chapeau, lui dit-il ; remets le petit chapeau ; ôte le petit chapeau ; remets, etc.
Après le Capitole et la roche Tarpéienne, l’ingénue s’écrie :
Il fallait donc me dire tout de suite de vous branler !

Otium cum dignitate

France, 1907 : « Repos avec dignité », c’est-à-dire repos noblement gagné. C’est une louange de Cicéron à l’adresse de ceux qui se livrent à la culture des lettres. S’il appelle cela un repos, merci ! On dit, dans le sens contraire : Otium sine dignitate. C’est le repos des jouisseurs et des ploutocrates.

Otolondrer

Rigaud, 1881 : Ennuyer. Otolondreur, importun.

Ottetto

France, 1907 : Composition musicale en huit parties. Italianisme, d’otto, huit.

Où la chèvre est attachée, il faut qu’elle broute

France, 1907 : Il faut se résigner à son sort. Ce dicton, inventé par les satisfaits à l’usage des déshérités, est de vieille date. C’est la pensée qu’exprimait Horace en ce distique :

Melius fit patientia
Quid id corrigere est nefas.

« La résignation fait supporter ce qu’on ne peut améliorer. » Toutes les religions recommandent la patience et la résignation aux misérables en leur promettant un bien-être futur pour les dédommager de leurs maux présents. Ils crèvent ainsi à la peine dans l’espoir des célestes récompenses. Cette philosophie aurait sans doute du bon s’il n’y avait pas de remède aux misères, mais il est prouvé, au contraire, qu’il y en a un bien simple : une juste répartition des richesses sociales, la libre disposition pour chacun des instruments de travail, l’abolition de toute tyrannie et de toute pression gouvernementale. Dans ce dicton l’on compare le non satisfait à une chèvres attachée dans un pré et qui ne peut brouter au-delà de la corde qui la retient. Ainsi le prolétaire est retenu dans le cercle où il se débat par le collier de misère qui l’empêche d’en sortir, mais ceux qui le dirigent le consolent en affirmant qu’après la pluie vient le beau temps, et qu’à force de mal aller tout ira bien.

Ouater

Delvau, 1866 : v. a. et n. Dessiner ou peindre avec trop de morbidesse et de flou, — dans l’argot des artistes, qui prétendent qu’en peignant ou en dessinant ainsi, on ne peut faire que des bonshommes en coton.

Rigaud, 1881 : Ne pas accuser les contours en dessinant, peindre flou, — dans le jargon des peintres.

France, 1907 : Peindre on dessiner avec morbidesse, ne pas tracer fermement ses lignes. Argot des peintres.

Oubli

d’Hautel, 1808 : Mettre quelqu’un, ou quelque chose au rang des oublis. N’y plus penser, en perdre totalement la mémoire ; le mettre avec les choses de peu d’importance, et auxquelles on se propose de ne faire aucune attention.

Oublier

d’Hautel, 1808 : Cet homme n’oublie rien pour dormir. Pour dire, qu’il se souvient fort bien de tout ce qui touche à ses intérêts.
Il est mis au rang des péchés oubliés. Pour dire, qu’on n’en parle plus ; qu’on n’y songe plus.

Oublieux

France, 1907 : Marchand d’oublies, oublieur. On les appelait au moyen âge oblayers. Les statuts de ce métier montrent que, de 1397 à 1406, il y en avait à Paris vingt-neuf qui pouvaient faire chacun par jour mille oublies de différente espèces. Ils les débitaient dans les rues, dit Léon de Laborde, et les jouaient aux dés sur le coffret qui les contenait. Nous avons dans les marchands de macarons et de plaisir les dernières lueurs de cet usage. Les oblayers étendaient leur spécialité à toute la pâtisserie en général. Ajoutons que cette friandise fort appréciée des enfants était connue des Grecs et des Romains. Ces derniers l’appelaient panis obelius.

Soldats, fils de famille, apprentis, artisans,
Fraters, coleporteurs, vieillards, adolescens,
Oublieux, portefaix, décroteurs, revendeuses,
Serruriers, porteurs d’eau, frotteurs et ravaudeuses,
Sans compter mes cadets que j’avois débauchés,
Tous ces gens sur mon livre à l’instant sont couchés.

(Nicolas R. de Grandval, Le Vice puni)

Oui-en-plume

France, 1907 : Dans l’argot des typographes, c’est la réponse à une plaisanterie ou une histoire à laquelle on ne croit pas.

Oui, en plume

Rigaud, 1881 : Tu plaisantes, — dans le jargon des typographes.

Oui, en plume !

Delvau, 1866 : Expression de l’argot des typographes qui équivaut à cette autre plus claire : « Tu blagues ! »

Oui, Garibaldi !

Delvau, 1866 : Expression de dénégation méprisante qui a succédé, dans l’argot du peuple, depuis les événements d’Italie, à cette autre si connue : Oui ! mon œil ! On a dit aussi Oui ! les lanciers !

Ouiche

Larchey, 1865 : Oui, pris dans un sens ironique.

Croyez vous qu’il viendra me chercher ? — Ah bien ! ouiche !

About.

Ouiche !

Delvau, 1866 : adv. Oui, — dans l’argot du peuple, qui emploie ce mot ironiquement. C’est le ouais des paysans.

Ouicou

France, 1907 : Boisson américaine composée de grosses cassaves rompues, de patates, de bananes, le tout fermenté dans l’eau et arrosé de sirop de canne. « Cette liqueur ressemble à la bière, sa couleur est rougeâtre et sa saveur est forte ; l’ouicou mêlé à l’eau rafraîchit ; pur, il est enivrant. Les sauvages le font très fort. »

(A. F. Aulagnier)

Ouïes

d’Hautel, 1808 : Il a les ouïes pâles. Se dit d’un homme qui a le visage blême, à qui il reste sur la physionomie des traces de maladie.

Ouin

d’Hautel, 1808 : Ah ouin ! Espèce d’interjection qui sert à contredire ce qu’une personne raconte ; ou pour marquer que l’on ne fait aucun cas des remontrances que quelqu’un vous adresse.

Ouistiti (envoyer un)

France, 1907 : Rompre avec une maîtresse. Cette expression n’a été que passagère.

Lorsqu’une liaison commence à le fatiguer, il envoie un de ses ouistitis P. P. C. Une façon à lui de faire la grimace à ce qu’il n’aime plus… Au grand club on ne dit plus lâcher une maîtresse mais lui envoyer son ouistiti.

(Alphonse Daudet)

Ourcine (l’)

Delvau, 1864 : Hôpital spécial pour les écloppées et les blessées de Cythère, C’est le Midi des femmes.

Ourdie

d’Hautel, 1808 : À toile ourdie, Dieu envoie le fil. Pour dire, que la providence envoie les forces et les moyens d’achever l’ouvrage que l’on a commencé.

Ourler le bec

Virmaître, 1894 : Besogne terminée. Quand un ouvrier graveur met sa signature au bas de sa planche ou de son bois, le bec est ourlé (Argot d’atelier).

Ourler le beq

Delvau, 1866 : v. a. Terminer sa besogne, — dans l’argot des graveurs sur bois.

Ours

d’Hautel, 1808 : On appelle ainsi, d’après Richelet, un imprimeur à la presse, à cause de la rusticité, de la grossièreté que l’on impute à la plupart de ces ouvriers.
Un ours mal léché. Homme sauvage, mal propre, difforme et mal bâti.
Il a monté sur l’ours. Se dit d’un enfant hardi et courageux, à qui rien ne fait peur.
Velu comme un ours. Se dit d’un homme qui a beaucoup de poil à l’estomac.
Fait comme un meneur d’ours. Mal vêtu, mal tourné.
Vendre la peau de l’ours avant qu’il soit pris. Se flatter trop légèrement d’un succès favorable dans une entreprise difficile et hasardeuse.

Larchey, 1865 : Homme d’humeur brusque et sauvage.
Ours : « Ancien compagnon pressier que, dans leur argot typographique, les ouvriers chargés d’assembler les lettres appellent un Ours. Le mouvement de va-et-vient qui ressemble assez à celui d’un ours en cage, par lequel les pressiers se portent de l’encrier à la presse, leur a valu sans doute ce sobriquet. » — Balzac. — Richelet et d’Hautel ont donné ce mot.
Ours : Salle de police.

Je fus passer deux jours dans un lieu ténébreux qu’on appelle l’Ours.

Souvenirs de Saint-Cyr.

Ours : « Tout le monde se souvient de cette farce désopilante appelée l’Ours et le Pacha. Le père Brunet représentait le pacha blasé qui veut qu’on l’amuse ; Odry jouait le montreur de bêtes, répétant à tout propos « Prenez mon ours ! » Ces trois mots obtinrent une telle vogue au théâtre, que les directeurs à l’aspect d’un auteur qui tenait un manuscrit, lui disaient de loin : Vous voulez m’amuser, vous m’apportez votre ours. — C’est une pièce charmante faite pour votre théâtre, répondait l’auteur. — C’est bien ce que je pensais, prenez mon ours ! — Depuis ce temps, l’ours est un vaudeville où un mélodrame qui a vieilli dans les cartons. » — J. Duflot.
Envoyer à l’ours : Envoyer promener. — Mot à mot : envoyer voir l’ours du Jardin des Plantes, où se rendent d’ordinaire beaucoup de flâneurs.
Ourson : Bonnet à poil d’ours.

J’allais me coiffer de l’ourson dévolu aux voltigeurs.

L. Reybaud.

Delvau, 1866 : s. m. Vaudeville, drame ou comédie qui brille par l’absence d’intérêt, de style, d’esprit et d’imagination, et qu’un directeur de théâtre bien avisé ne joue que lorsqu’il ne peut pas faire autrement, — comme autrefois, aux cirques de Rome on ne faisait combattre les ours que lorsqu’il n’y avait ni lions, ni tigres, ni éléphants. On le dit aussi d’un mauvais article ou d’un livre médiocre.

Delvau, 1866 : s. m. Ouvrier imprimeur, — dans l’argot des typographes.

Delvau, 1866 : s. m. La salle de police, — dans l’argot des soldats.

Rigaud, 1881 : Salle de police.

Allons, prenez vos draps et grimpez à l’ours. Vivement.

(Vte Richard, Les Femmes des autres.)

Rigaud, 1881 : Ouvrier pressier dans une imprimerie. — Oie, — dans le jargon des ouvriers.

Rigaud, 1881 : Bavardage insupportable, — dans le jargon des typographes. — Poser un ours, débiter à un camarade des bavardages insipides, lui faire des contes à dormir debout.

Rigaud, 1881 : Article de journal qui a été offert sans succès dans plus de vingt journaux, roman refusé par tous les éditeurs, pièce de théâtre repoussée de tous les théâtres. — On dit d’un vieil ours « qu’il a de la barbe ». — Égayer l’ours, siffler une pièce.

Boutmy, 1883 : s. m. Imprimeur ou pressier. Ce Séchard était un ancien compagnon pressier que dans leur argot typographique, les ouvriers chargés d’assembler les lettres appellent un ours. (Balzac) Cette expression a vieilli. V. Singe.

Boutmy, 1883 : s. m. Bavardage ennuyeux. Poser un ours, ennuyer par son bavardage insipide. Se dit d’un compagnon peu disposé au travail, qui vient en déranger un autre sans que celui-ci puisse s’en débarrasser. Une barbe commençante se manifeste souvent de cette manière. Ce mot est récent dans ce sens.

La Rue, 1894 : Oie. Salle de police. Mauvais manuscrit de roman ou de pièce de théâtre repoussé de partout. Bavardage ennuyeux.

Virmaître, 1894 : Mauvais livre qui reste pour compte à l’éditeur. Mauvais manuscrit de pièce qui dort dans les cartons du directeur. En un mot, tout ce qui ne vaut rien, qui est raté, est un ours (Argot du peuple).

Virmaître, 1894 : Homme sombre, triste. Dans les ateliers, on dit d’un ouvrier qui fuit ses camarades : c’est un ours. En réalité, ours mal léché est synonyme de mufle (Argot du peuple).

France, 1907 : Salle de police ; argot militaire.

France, 1907 : Pressier ; argot des typographes.

Le mouvement de va-et-vient qui ressemble assez à celui d’un ours en cage, par lequel les pressiers se portent de l’encrier à la presse, leur a sans doute valu ce sobriquet.

(Balzac)

France, 1907 : Pièce de théâtre ou roman qui a vieilli dans les tiroirs d’un auteur et dont il cherche le placement. Parfois le directeur prend l’ours, n’ayant rien d’autre sous la main, comme aux cirques de Rome, dit Alfred Delvau, on ne faisait combattre les ours que lorsqu’il n’y avait ni lions, ni tigres, ni éléphants. D’où l’on appelle marchand ou meneur d’ours tout auteur qui va de journal en journal ou de théâtre en théâtre offrir ses élucubrations et demander qu’on prenne son ours.
Joachim Duflot donne ainsi l’origine de cette expression :

Tout le monde se souvient de cette farce désopilante appelée l’Ours et le Pacha, que le théâtre des Variétés joua cinq cents fois au moins. Le père Brunet représentait le pacha blasé qui veut qu’on l’amuse ; Odry jouait de montreur de bêtes, répétant à tout propros : « Prenez mon ours ! Mon ours danse la gavotte, il pince de la guitare, prenez mon ours. » Ces trois mots obtinrent une telle vogue au théâtre, que les directeurs, à l’aspect d’un auteur qui tenait un manuscrit, lui disaient de loin :
— Vous voulez on amuser, vous m’apportez votre ours.
— C’est une pièce charmante, faite pour votre théâtre, répondait l’auteur.
— C’est bien ce que je pensais, prenez mon ours.

France, 1907 : Bavardage lourd et ennuyeux.

Ours (aller aux)

un détenu, 1846 : Envoyer promener, ne vouloir pas écouter.

Rigaud, 1881 : Aller flâner au Jardin-des-Plantes, — dans le jargon des collégiens. C’est-à-dire aller voir les ours du Jardin-des-Plantes.

Ours (en poser un)

Virmaître, 1894 : Quitter sa casse pour raser un copain ; la séance se prolongeant, les camarades crient :
— Mince d’ours (Argot d’imprimerie).

Ours (envoyer à l’)

Rigaud, 1881 : Renvoyer, envoyer au diable. Autrefois, lorsque quelqu’un importunait, on lui disait d’aller voir l’ours Martin, on l’envoyait très loin.

France, 1907 : Éconduire brutalement quelqu’un.

Ours (l’)

Merlin, 1888 : La salle de police, — la prison. L’oiseau pour la cage !…

Ours (les)

Merlin, 1888 : Ouvriers d’administration.

Ours (poser un)

Hayard, 1907 : Bavarder longuement.

Ours (sentir l’)

France, 1907 : Sentir mauvais. « Fleurer bien plus fort, mais non pas mieux que roses », dit poétiquement Régnier dans ses satires, ce que le peuple exprime prosaïquement par « tuer les mouches à quinze pas ».

Ourser

Delvau, 1864 : Faire l’acte vénérien. Ce n’est pas du dernier galant, mais c’est fréquemment employé — par les goujats.

À la Courtille, où le beau sexe abonde,
J’étais allé dans l’intention d’ourser.

Dumoulin.

Monter chez une fille en lui disant : Oursons !
Est une expression commune, saugrenue,
Propre aux palefreniers…

L. Protat.

Virmaître, 1894 : Il est très difficile d’expliquer le sens brutal de ce mol autrement que comme ceci : Mari qui remplit ses devoirs conjugaux comme un ours (Argot du peuple). N.

Rossignol, 1901 : Voir rouscailler.

Oursier

Hayard, 1907 : Qui aime à causer souvent.

Ourson

Delvau, 1864 : La toison qui protégé la nature de la femme, et qui est souvent hérissée comme un petit ours blanc ou noir.

Thomas est un monsieur sans gêne :
Malgré mon r’fus, il va son train ;
Dans mon ourson couleur d’ébène,
Sans façon il glisse la main.

Laujon.

Delvau, 1866 : s. m. Bonnet de grenadier, — dans l’argot des gardes nationaux.

Rigaud, 1881 : Ancien bonnet à poil de l’ancienne garde nationale.

France, 1907 : Mot que les grenadiers de la garde nationale donnaient à leur bonnet à poil.

Oùs’qu’est mon fusil ?

Rigaud, 1881 : Expression employée par le peuple lorsque quelqu’un vient de dire une grosse bêtise, de tenir un propos extravagant, insensé. Mot à mot : Où est mon fusil, pour que je te tue ? tu es trop bête pour vivre.

Oùs’que tu demeures ?

Rigaud, 1881 : Réponse à une proposition exorbitante ou jugée telle. — Tu fumes de bons cigares, tu devrais bien m’en faire cadeau d’une boîte. — Ous’que tu demeures ? — C’est-à-dire par ironie et sous-entendu : Je les ferai porter à domicile.

Oùs’que vous allez sans parapluie ?

Rigaud, 1881 : Expression populaire dont les équivalentes sont : D’où venez-vous, que vous êtes si bête ? Vous n’êtes donc au courant de rien ? — Demandez par exemple, en plein mois de juin, à une marchande de la Halle si elle a des épinards, vous aurez beaucoup de chance pour qu’elle vous réponde :

Oùs’que vous allez comme ça sans parapluie ?

Ouste !

Fustier, 1889 : Synonyme de zut !

Dis-lui : Ouste pour l’Allemagne !

(De Goncourt : La Faustin.)

Oustot

Clémens, 1840 : Hôpital, on le dit aussi, pour chez soi.

La Rue, 1894 : Hôpital. Logis.

Outil

d’Hautel, 1808 : Voilà un bel outil. Se dit en parlant d’une personne ou d’une chose que l’on méprise.
Méchant ouvrier ne sauroit trouver de bons outils. Ou, du moins, ne sait pas les employer.

Delvau, 1864 : Le membre viril — avec lequel on travaille les femmes.

Le jeune homme puceau
L’appelle son affaire,
L’ouvrier son outil.

L. Protat.

Les dieux après nous avoir fait
Les outils de la fouterie,
Seraient dignes de moquerie,
S’ils nous en défendaient l’effet.

Mora.

C’est fait, hélas, du pauvre outil.
Mon Dieu, il était si gentil,
Et si gentiment encrestè !

(Ancien Théâtre français)

Lise couchée au retour de l’église,
Disait à Jean : Mon dieu, le bel outil

Grécourt.

Un jour Robin vint Margot empoigner,
En lui montrant l’outil de son ouvrage.

Cl. Marot.

Fustier, 1889 : Maladroit, gauche. Argot du peuple. « Fais donc attention, outil ! » est une de ces phrases qu’on entend journellement dans la rue et à l’atelier.

L’autre, sûr de l’impunité, répondra : Va donc, eh ! outil !

(Figaro, nov. 1885.)

Virmaître, 1894 : Vieille femme. Objet de rebut qui ne peut servir à aucun usage. Terme de mépris fréquemment employé :
— Sale outil (Argot du peuple).

Rossignol, 1901 : Individu bon à rien. Une femme est un outil de besoin.

Hayard, 1907 : Terme de mépris, personne nulle.

France, 1907 : Membre viril.

France, 1907 : « Maladroit, gauche ; argot du peuple. « Fais donc attention, outil ! » est une de ces phrases qu’en entend journellement dans la rue et à l’atelier. » (Gustave Fustier)

Outil de besoin

Halbert, 1849 : La prostituée nomme ainsi un mauvais souteneur.

Delvau, 1866 : s. m. Souteneur de carton, — dans l’argot des filles.

Virmaître, 1894 : Femme ou fille. Elles ne deviennent outil que par l’habitude de la cohabitation. Un souteneur qui n’a pas de poigne pour défendre sa marmite est également un outil de besoin… jusqu’à temps qu’elle en trouve un autre (Argot du peuple).

France, 1907 : Souteneur ; argot des filles.

Outil ou autel de besoin

La Rue, 1894 : Prostituée.

Outils

Larchey, 1865 : Instruments de voleur. V. Vague.
Outil de besoin : Mauvais souteneur (Bailly).

Delvau, 1866 : s. m. pl. Ustensiles de table, en général, — dans l’argot des francs-maçons.

Rigaud, 1881 : Instruments à l’usage des voleurs.

France, 1907 : Ustensiles de table ; argot des francs-maçons.

Outsider

France, 1907 : Terme de courses désignant un cheval placé en dehors de ceux qui ont le plus de chances de gagner de gagner le prix. Littéralement : en-dehors, Anglicisme.

Outu

Delvau, 1866 : adj. Ruiné, perdu, atteint de la maladie mortelle, — dans l’argot des bourgeois désireux de ménager la chèvre de la décence et le chou de la vérité. Il y a longtemps qu’ils parlent ainsi, frisant la gaillardise et défrisant l’orthographe. On trouve dans les Contes d’Eutrapel : « Et bien, dit-elle, soit ! Ce qui est faict est faict, il n’y a point de remède, qui est outu est outu (quelques docteurs disent qu’elle adjoucta une F). »

Ouvert

d’Hautel, 1808 : Un briseur de porte ouverte. Un fanfaron, un faquin, un hâbleur qui se vante des choses qu’il n’a jamais faites.
Tenir table ouverte. Recevoir et donner à manger à tous ceux qui se présentent.

Ouverture divine (l’)

Delvau, 1864 : La nature de la femme, dont la complète occlusion amènerait la fin du monde.

Ah ! divine ouverture !
Ravissante nature !
Qu’il est petit !…

Marc-Constantin.

Ouvrage

d’Hautel, 1808 : Il cherche de l’ouvrage, et prie Dieu de n’en pas trouver. Se dit d’un paresseux, d’un homme fainéant et oisif, qui, quoiqu’ayant besoin de travailler, passe la plus grande partie du temps à ne rien faire.
Un ouvrage de patience. C’est-à-dire très-vétilleux, qui offre de grandes difficultés, qui demande beaucoup de soins et de temps.
Un joli ouvrier. Épithète gracieuse que les ouvriers donnent entr’eux à un jeune homme qui travaille avec goût et propreté, et qui promet de faire un parfait ouvrier.
À l’œuvre on connoît l’ouvrier. Voy. Œuvre.

Delvau, 1864 : La besogne de la fille, — le temps qu’elle consacré, moyennant finance, aux plaisirs de l’homme.

J’te laisse ta nuit, j’ vas m’ coucher, travaille… — Du froid qui fait ! Merci ! j’ voudrais t’y voir, tu rirais… Pus souvent que j’vas en avoir, à l’heure qu’il est, d’l’ouvrage !

Henry Monnier.

Larchey, 1865 : Vol. — Ouvrier : Voleur (Vidocq).

Delvau, 1866 : s. m. Vol, — dans l’argot des prisons.

Delvau, 1866 : s. m. L’engrais humain, à l’état liquide, — dans l’argot des faubouriens. Tomber dans l’ouvrage. Se laisser choir dans la fosse commune d’une maison.

Rigaud, 1881 : Vol, — dans le jargon des voleurs. — Fonds de commerce de porteur d’eau. L’ouvrage comprend les ustensiles nécessaires à la profession, tels que cheval, voiture, seaux, bricole, tonneaux, etc.

Rigaud, 1881 : Curage des fosses d’aisances. — Tomber dans l’ouvrage, tomber dans la fosse d’aisances, — en terme de vidangeur.

La Rue, 1894 : Vol. Excréments humains.

France, 1907 : Excréments humains : synonyme de marchandise. Argot des faubouriens.

Ouvrier

Delvau, 1866 : s. m. Voleur, — dans le même argot [des prisons].

Rossignol, 1901 : Voleur à la tire. Le forain qui désignera un autre forain comme fouillant dans les poches, dira c’est un ouvrier. Un camelot qui fait la postiche, s’il aperçoit un ouvrier explorant les poches de ceux qui l’entourent il dira, tout en faisant son boniment : « Moi seul ai l’autorisation de travailler à cette place » ; l’ouvrier a compris et se retire.

France, 1907 : Voleur ; argot de la pègre.

Il me dit qu’il venait de travailler en cambrouze avec des ouvriers qui venaient de tomber malades (d’être arrêtés).

(Mémoires de Vidocq)

Ouvrier de nature (l’)

Delvau, 1864 : Le membre viril, qui ne boude jamais devant une besogne amoureuse, dimanches et fêtes, à minuit comme à midi.

Je suis pour te faire court
Bon ouvrier scieur de planche
Qui travaille, nuit et jour,
D’un outil qui point ne tranche.

(Chansons folastres.)

Ombragée au-dessous du nombril d’un poil large et épais, du milieu duquel on voit sortir un bel ouvrier de nature, fort bandé, qui à bon droit mérite d’être appelé membre.

Mililot.

Quand La Ferté eut cuvé son vin, elle voulut le lendemain matin le faire retourner à l’ouvrage.

(La France galante).

Ouvrier, ouvrière

Rigaud, 1881 : Voleur, voleuse.

Ouvrière

Rigaud, 1881 : C’est encore le nom sous lequel les souteneurs désignent leurs maîtresses, quand ils ne les appellent pas leurs marmites.

France, 1907 : Prostituée ; argot des souteneurs.

Ouvrir l’œil et le bon

Rigaud, 1881 : Surveiller avec soin ; faire bien attention à ne pas être trompé. On disait jadis : Avoir l’œil au bois.

France, 1907 : Voir Œil américain.

Ouvrir la bouche comme un ministre à son premier sermon

France, 1907 : Ce dicton, encore en usage dans les pays protestants, signifie rester coi, bouche bée, ne plus savoir que dire. On sait que les ministres ou pasteurs de la religion réformée étaient élus par les fidèles, sans qu’il fût nécessaire d’avoir fait des études préparatoires. Aussi nombres d’entre eux se trouvaient souvent embarrassés à leur premier sermon et même au second et restaient bouche béante. D’autres fois ils déclamaient a grands cris comme tous les énergumènes qui crient d’autant plus fort que leur cervelle est plus vide. C’est dans ce dernier sens que cette expression parait être employée dans le Moyen de parvenir de Béroalde de Verville :

Ainsi baillant, ouvrant la bouche grande comme un ministre qui dit son premier sermon, il fit tant de désordre et se trémoussant, que les quatre jambes lui entrèrent dans le plancher.

Ouvrir sa soupape

Virmaître, 1894 : Péter bruyamment. Allusion à la soupape de la chaudière qui se soulève pour laisser échapper la vapeur quand la pression est trop haute. On crie à celui qui s’oublie aussi fort :
— Ferme ta soupape, ça pue (Argot du peuple). N.

Ouvrir sa tabatière

Larchey, 1865 : Vesser.

Delvau, 1866 : v. a. Crepitare sournoisement, sans bruit, mais non sans inconvénient, — dans l’argot du peuple, qui, en parlant de cet inconvénient, ajoute : Drôle de prise !

Virmaître, 1894 : Péter. Par allusion à l’odeur, on dit : Quelle rude prise ! On en prend plus avec son nez qu’avec une pelle (Argot du peuple). N.

France, 1907 : Laisser échapper un vent, ce que les gens polis appellent s’oublier.

Ouvrir ses draps

Delvau, 1864 : Ouvrir ses cuisses, se faire baiser.

Qui faites tant les resserrées,
Quand on veut ouvrir vos genoux.

Tabarin.

Du beau Quartier plus d’un’ bell’ dame
Qui pour un cach’mire ouv’ ses draps.

E. Debraux.

Ouvrir son robinet

France, 1907 : Commencer à parler. Se dit d’une personne à l’intarissable bagout, dont les paroles coulent de la bouche comme l’eau d’une fontaine.

— Bon, la voilà qui ouvre son robinet ! Nous n’avons pas fini, nous allons entendre l’assistance ronfler !

(Les propos du Commandeur)

Ovale

Halbert, 1849 : Huile.

Delvau, 1864 : Le con, qui en effet a cette forme, — si l’on y met un peu de bonne volonté.

Entre deux colonnes d’un albâtre lisse et arrondies, est situé cet ovale charmant, protégé par une petite éminence et une jolie motte.

(Veillées du couvent.)

Dès qu’il passa par un certain ovale,
À l’instant même à sa mère on cria :
Soyez tranquille, allez, c’est bien un mâle :
Dieu ! quelle tête il a !

E. Debraux.

La grande Jeanne de l’échiquier d’Alençon l’appelait son ovale.

Noël du Fail.

France, 1907 : Huile. Argot des voleurs ; allusion à la forme de l’olive.

Oyselets de Chyppre

France, 1907 : Boules parfumées faites en forme d’oiseaux, dont on faisait autrefois grand usage et qu’on crevait pour en répandre une poudre parfumée. « Le goût des parfums avait transformé en bijoux de prix les boîtes destinées à contenir les oyselets de Chyppre, et on leur donnait toute espèce de forme, et plus particulièrement celle d’une cage. » (Léon de Laborde)


Argot classique, le livreTelegram

Dictionnaire d’argot classique