Larchey, 1865 : Douceur, légèreté (fluidus). — C’est un mot de langue romane. V. Roquefort.
Tu as dans le style on ne saurait dire quel moelleux, quelle grâce, quel flou.
L. Reybaud.
Pris quelquefois adjectivement.
Delvau, 1866 : s. m. Variété de morbidesse, de douceur de touche, de coloris vaporeux, — dans l’argot des artistes. J’aurais volontiers été tenté de croire ce mot moderne et qu’il n’était qu’une onomatopée de l’œil et de l’oreille, si je n’avais pas lu dans François Villon :
Item je donne à Jean Lelou.
Homme de bien et bon marchant,
Pour ce qu’il est linget et flou,
Un beau petit chiennet couchant.
Flou, c’est flo, et flo, c’est faible.
Faire flou. Dessiner ou peindre sans arrêter suffisamment les contours, en laissant flotter autour des objets une sorte de brume agréable. Se dit aussi à propos de la sculpture ; car Puget ne craignait pas de faire flou.
La Rue, 1894 : Rien. Faire le flou, ne rien trouver.
France, 1907 : Rien. Faire le flou, chercher vainement.
France, 1907 : Mou, moelleux, vaporeux ; du latin fluidus, l’u se prononçant en latin ou. Vieux mot qu’on trouve dans le testament de François Villon :
Item je donne à Jean Lelou,
Homme de bien et bon marchant,
Pour ce qu’il est linget et flou,
Un beau petit chiennet couchant.
Faire flou, dans l’argot des peintres et des sculpteurs, c’est faire mollement, avoir des contours flottants ou indécis.
— Cette jambe me revient assez, je n’en ai guère connu que deux d’aussi parfaites ; mais comme c’est flou dans l’ensemble ! Elle doit bien être un peu farceuse, la chaste épouse qui vous a posé ça ?
(Clovis Hugues)
Un peintre, si réaliste qu’il soit et quand même il ne serait pas plus ému devant un visage que devant une carotte, à toujours cependant sa façon particulière, spéciale, personnelle, de voir et de sentir la nature. Sans parler des couleurs, qui, à coup sûr, sont différentes pour les yeux de chacun de nous, la forme, non plus, n’est jamais identiquement la même pour tous. Celui-ci voit sec et dur ; celui-là, « flou » et enveloppé. Ajoutons que la part est grande, chez tous les artistes, de la manière, du parti pris, du procédé, de l’habitude, — et chez quelques-uns, chez les plus grands, chez les meilleurs, — de l’idéal. On pourrait presque dire qu’un artiste, quels que soient sa conscience et son amour de la vérité, ne fait jamais que le portrait de son rêve.
(François Coppée)