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Abbaye de Monte-à-Regret

Bras-de-Fer, 1829 : Guillotine.

Vidocq, 1837 : ou de Monte-à-Rebours, s. f. — Nos romanciers modernes, Victor Hugo même, qui, dans le Dernier Jour d’un Condamné, paraît avoir étudié avec quelque soin le langage bigorne, donnent ce nom à la Guillotine, quoiqu’il soit bien plus ancien que la machine inventée par Guillotin, et qu’il ne s’applique qu’à la potence ou à l’échafaud.
Celui qui jadis était condamné à passer tous ses jours à la Trappe ou aux Camaldules, ne voyait pas sans éprouver quelques regrets se refermer sur lui les portes massives de l’abbaye. La potence était pour les voleurs ce que les abbayes étaient pour les gens du monde ; l’espoir n’abandonne qu’au pied de l’échafaud celui qui s’est fait à la vie des prisons et des bagnes ; les portes d’une prison doivent s’ouvrir un jour, on peut s’évader du bagne ; mais lorsque le voleur est arrivé au centre du cercle dont il a parcouru toute la circonférence, il faut qu’il dise adieu à toutes ses espérances, aussi a-t-il nommé la potence l’Abbaye de Monte-à-Regret.

un détenu, 1846 : Échafaud.

Halbert, 1849 : L’échafaud.

Larchey, 1865 : Échafaud (Vidocq). — Double allusion. — Comme une abbaye, l’échafaud vous sépare de ce bas monde, et c’est à regret qu’on en monte les marches.

Delvau, 1866 : s. f. L’échafaud, — dans l’argot des voleurs, qui se font trop facilement moines de cette Abbaye que la Révolution a oublié de raser.

Rigaud, 1881 : L’ancienne guillotine, — dans le langage classique de feu les pères ignobles de l’échafaud. Terrible abbaye sur le seuil de laquelle le condamné se séparait du monde et de sa tête.

La Rue, 1894 : L’échafaud.

Virmaître, 1894 : La guillotine. L’expression peut se passer d’explications : ceux qui y montent le font sûrement à regret (Argot des voleurs).

Rossignol, 1901 : La guillotine. Cette désignation n’a plus raison d’être depuis 1871, époque à laquelle les treize marches pour y monter ont été supprimées.

Hayard, 1907 : L’échafaud.

France, 1907 : La potence ou l’échafaud.

Comme une abbaye l’échafaud sépare de ce monde, et c’est à regret qu’on monte les marches.

(Lorédan Larchey)

Mon père a épousé la veuve, moi je me retire à l’Abbaye de Monte-à-regret.

(Victor Hugo, Le Dernier jour d’un condamné)

Les voleurs appellent encore l’échafaud Abbaye de Saint Pierre, la guillotine étant autrefois placée sur cinq pierres, devant la Roquette.

Abloquir

anon., 1827 / Bras-de-Fer, 1829 : Acheter.

Vidocq, 1837 : v. a. — Acheter à prix d’argent ; se dit aussi pour acquérir.

Clémens, 1840 / Halbert, 1849 : Acheter.

Larchey, 1865 : Acheter en bloc (Vidocq).Bazarder a, au point de vue de la vente, le même sens. — Du vieux mot bloquer : arrêter un marché. V. Lacombe.

Aboyeur

d’Hautel, 1808 : Terme de mépris, nom que l’on donne aux crieurs des rues, et généralement à ces hommes qui n’ont sans cesse à la bouche que des injures et des obscénités. Ce mot servoit aussi, pendant la révolution, à désigner les esprits exaspérés que les chefs de parti mettoient en ayant, pour exciter le peuple à l’insubordination et à la révolte.

Vidocq, 1837 : s. m. — Celui qui dans une prison est chargé d’appeler les prisonniers demandés au parloir.

Delvau, 1866 : s. m. Crieur public ou particulier qui se tient dans les marchés ou à la porte des théâtres forains.

Rigaud, 1881 : Employé chargé, dans une prison, d’appeler les prisonniers au parloir. — Individu qui crie des imprimés dans les rues. — Crieur dans les ventes publiques, dans les bals de barrière, devant la porte de certains bazars. À l’Hôtel Drouot, le célèbre Jean, de grimaçante mémoire, est resté comme le type du parfait aboyeur. — Dans les réunions publiques, les aboyeurs sont ceux qui empêchent par leurs cris l’orateur de parler ou de continuer.

(Le Sublime)

La Rue, 1894 : Crieur dans les bazars, les ventes publiques ou dans les rues. Dans les prisons, le détenu qui appelle les prisonniers.

Virmaître, 1894 : Nom donné dans les prisons à l’auxiliaire chargé d’appeler les détenus à voix haute pour le greffe ou pour l’instruction. Ce nom est également donné aux crieurs qui, dans les ventes publiques, aboient la mise à prix des objets à adjuger (Argot des voleurs).

Rossignol, 1901 : Détenu chargé d’appeler par un acoustique les prisonniers qui sont dans la salle commune du dépôt, pour aller soit au greffe, soit à l’instruction.

France, 1907 : Crieur, qui se tient aux portes des ventes publiques ou privées, ou devant les théâtres forains pour appeler les clients. On nomme également ainsi les journalistes qui aboient constamment dans la presse contre les hommes publics ou les personnalités en vue.

Acheter chat en poche

France, 1907 : Conclure légèrement un marché sans avoir examiné l’objet qu’on achète. Un paysan retors mit un chat dans un sac — poke — mot saxon dont nous avons fait poche, — et le vendit sur le marché comme cochon de lait à un benêt ou un ivrogne qui acheta de confiance et ne s’aperçut de la duperie qu’après la disparition du filou. Acheter le chat pour le lièvre, dit-on encore.

Acheteur

d’Hautel, 1808 : Il y a plus de fous acheteurs que de fous vendeurs. Signifie que les vendeurs ne sont jamais dupes des marchés qu’ils font, parce qu’ils connoissent tous les défauts de leurs marchandises.

Affûter

Delvau, 1866 : v. a. Tromper quelqu’un, le surprendre. Argot des voleurs.

Rigaud, 1881 : Embaucher. — S’affûter, s’habiller. — Affûter ses pincettes, se préparer à sortir.

France, 1907 : Tromper, prendre par ruse. Affûter ses pincettes, marcher ou courir. S’affûter le sifflet, boire.

Faut pas aller chez Paul Niquet
Si fois l’jour, s’affûter le sifflet.

(Chansons de P. Durand)

Affûter ses pincettes

Delvau, 1866 : Courir, ou seulement marcher. Argot des faubouriens.

Hayard, 1907 : Danser.

Agoraphobie

France, 1907 : État maladif de certaines personnes qui ont la terreur du vide ou des espaces et qui tremblent à l’idée de parcourir une place, une rue, un lieu largement ouvert ; du grec agora, marché, place publique, et phobeô, je hais. Le contraire est la claustrophobie.

Air (avoir de l’)

La Rue, 1894 : Marcher avec inquiétude et méfiance.

Aller

d’Hautel, 1808 : Ça ne va pas pire. Réponse joviale que l’on fait à quelqu’un qui demande des nouvelles de votre santé, pour exprimer que l’on ne va pas plus mal que de coutume ; que l’on se porte passablement bien.
Faire aller quelqu’un. Le railler finement et sans qu’il s’en aperçoive ; le faire jaser dans le dessein de le tourner ensuite en ridicule.
Cette locution signifie aussi mener quelqu’un par le bout du nez ; faire un abus révoltant de sa foiblesse et de sa bonne foi.
Aller sur la hauteur. Façon de parler qui exprime, parmi une certaine classe du peuple de Paris, l’action d’aller riboter, prendre ses ébats, se divertir dans les guinguettes qui sont situées hors de la ville.
Tout son bien s’en est allé en eau de boudin, en brouet d’andouilles, à veau l’eau. Ces trois manières de parler ont à-peu-près le même sens et signifient qu’une fortune considérable s’est trouvée dissipée, anéantie, par la mauvaise conduite de celui qui la possédoit.
On dit aussi d’une affaire sur laquelle on comptoit, et qui ne prend pas une tournure favorable, qu’Elle s’en est allée en eau de boudin.
Il va et vient comme trois pois dans une marmite. Phrase burlesque qui exprime assez bien les allées et venues, le mouvement, l’agitation continuelle qu’un homme impatient et brouillon se donne pour des choses qui n’en valent souvent pas la peine.
Ne pas aller de main morte. Signifie frapper de toute sa force ; montrer de la vigueur et de l’énergie dans une affaire.
Un las d’aller. Paresseux, fainéant qui a toutes les peines du monde à travailler ; qui ne sait que faire de sa personne.
Cela va sans dire. Pour cela est clair, évident, incontestable.
Cela va et vient. Manière mercantile de parler, et qui signifie que le gain du commerce n’est pas réglé ; qu’il va tantôt en augmentant, et tantôt en diminuant.
Aller ou le roi va à pied. C’est-à-dire, aux privés, où l’on ne peut envoyer personne à sa place.
Tout y va la paille et le blé. Signifie, il se ruine en de folles dépenses ; il sacrifie toute sa fortune à l’objet de son enthousiasme.
Aller un train de chasse. Marcher avec précipitation ; mener une affaire tambour battant.
Tous chemins vont à Rome. Pour dire qu’il y a plusieurs voies pour parvenir dans un lieu, ou réussir à quelque chose.
Cela n’ira pas comme votre tête. Se dit par réprimande à quelqu’un, pour cela n’ira pas suivant votre désir ; selon que vous l’imaginez.
Cette maison est son pis aller. C’est-à-dire, il s’y emploie quand il ne trouve pas mieux ailleurs ; il y entre et il en sort à volonté.
Aller son petit bon-homme de chemin. Faire droitement sa besogne ; n’entendre finesse en rien ; se conduire avec prudence et probité.
Il y va de cul et de tête comme une corneille qui abat des noix. Se dit par raillerie d’une personne qui travaille avec une activité et une ardeur ridicules, sans faire pour cela beaucoup d’ouvrage.
Cela ne va que d’une fesse. Pour dire qu’une affaire, ou un ouvrage va lentement ; qu’on ne le pousse pas avec la vigueur et l’activité convenables ; qu’il est mal dirigé.
Cela va comme il plaît à Dieu. Manière fine et ironique de faire entendre qu’une affaire est mal menée ; qu’on en néglige absolument la conduite.
Toujours va qui danse. Voy. Danser.
Il va comme on le mène ; il va à tout vent. Se dit d’un homme foible et pusillanime, sans énergie, sans force de caractère, qui n’a d’autre impulsion que celle qu’on lui donne ; qui change continuellement de résolution.
À la presse vont les fous. C’est-à-dire qu’il faut être dénué de sens pour mettre l’enchère sur une chose que beaucoup de personnes veulent acquérir.
Que les plus pressés aillent devant. Se dit par humeur, quand on se trouve en société avec des personnes qui marchent fort vite, et qu’on ne peut pas suivre.
Qu’il aille au diable. Imprécation que l’on se permet dans un mouvement de colère, contre quelqu’un qui importune, et qui équivaut à qu’il aille se promener ; qu’il me laisse tranquille.
Tout va à la débandade. Pour tout est en désordre, dans la plus grande confusion.
Il s’en va midi. Pour dire l’heure de midi approche ; elle n’est pas éloignée.
On se sert souvent, et à tort, du verbe être au lieu du prétérit du verbe aller, et l’on dit : Je fus ou nous fûmes hier au spectacle ; pour J’allai ou nous allâmes, etc.

Aller de (y)

Rigaud, 1881 : Payer. Y aller de ses dix francs. — Y aller d’une, de deux, de trois, payer une bouteille, deux bouteilles, etc. Y aller de sa goutte, de sa larme, pleurer, être ému jusqu’aux larmes. — Y être allé de son voyage, avoir fait une démarche inutile. — Y aller gai-mar, faire quelque chose gaiement.

Aller que d’une fesse (n’)

Delvau, 1866 : Se dit — dans le même argot [du peuple] — de quelqu’un qui n’est pas très bien portant, ou de quelque affaire qui ne marche pas à souhait de celui qui l’a entreprise.
C’est l’ancienne expression, plus noble : N’aller que d’une aile.

France, 1907 : Se dit de quelqu’un qui n’est pas bien portant ou dont les affaires ne marchent pas à souhait.

Aller sur une jambe (ne pas s’en)

Delvau, 1866 : Boire un second verre ou une seconde bouteille, — dans l’argot des ouvriers, qui ont une manière à eux de marcher et de faire marcher les gens.

Allonger

d’Hautel, 1808 : S’allonger sur les planches. Faire injure à Terpsicore ; danser sans grâce et sans légèreté, comme les personnes qui ne sont pas exercées dans cet art.
Quand les veaux s’allongent, le cuir est à bon marché. Comparaison facétieuse que l’on applique aux personnes qui s’étendent d’une manière indécente.
Allonger la courroie. Figurément, étendre les choses au-delà de leur durée ; trainer, à dessein, une affaire en longueur.

Allumer

d’Hautel, 1808 : Allumez la lumière. Phrase très-usitée parmi le peuple, pour Allumez la chandelle.
Allumer quelqu’un. Le regarder avec recherche et d’une manière indiscrète.

Vidocq, 1837 : v. a. — Regarder attentivement.

Clémens, 1840 : Regarder.

Larchey, 1865 : Regarder fixement, éclairer de l’œil pour ainsi dire. — Très ancien. Se trouve avec ce sens dans les romans du treizième siècle. V. Du Cange.

Allume le miston, terme d’argot qui veut dire : Regarde sous le nez de l’individu.

(Almanach des Prisons, 1795)

Allumer : Déterminer l’enthousiasme.

Malvina remplissait la salle de son admiration, elle allumait, pour employer le mot technique.

(Reybaud)

Allumer : Pour un cocher, c’est déterminer l’élan de ses chevaux à coups de fouet.

Allume ! allume !

(H. Monnier)

Allumé : Échauffé par le vin.

Est-il tout a fait pochard ou seulement un peu allumé ?

(Montépin)

Allumeur : Compère chargé de faire de fausses enchères dans une vente.

Dermon a été chaland allumeur dans les ventes au-dessous du cours.

(La Correctionnelle, journal)

Allumeuse, dans le monde de la prostitution, est un synonyme de marcheuse. Dans ces acceptions si diverses, l’analogie est facile à saisir. Qu’il s’applique à un tête-à-tête, à un spectacle, à un attelage, à un repas, ou une vente, allumer garde toujours au figuré les propriétés positives du feu.

Delvau, 1866 : v. a. et n. Voir, regarder, — dans l’argot des voleurs.

Delvau, 1866 : v. a. Provoquer l’admiration ; jeter le trouble dans le cœur d’un homme, comme font certaines femmes avec certains regards. Se dit aussi du boniment que font les saltimbanques et les marchands forains pour exciter la curiosité des badauds. L’expression est vieille.

Delvau, 1866 : v. n. Exciter un cheval à coups de fouet. Argot des cochers.

Rigaud, 1881 : Enthousiasmer, exciter l’admiration, surexciter.

Avec un costume neuf elle allumerait une salle.

(Huysmans, Marthe)

Allumer le pingouin, exciter l’enthousiasme du public, dans le jargon des saltimbanques.

Rigaud, 1881 : Regarder avec soin, observer, — dans le jargon du peuple.

Tais-toi, Pivoine, le républicain nous allume.

(A. Joly, Fouyou au Lazary, Chans.)

Dans l’argot des camelots et des marchands forains, allumer a le sens de surveiller l’acheteur, de veiller à ce qu’il ne chipe rien. — Allumer le pante. — Allumer le miston. On disait au XVIIIe siècle éclairer dans le même sens ; c’est le aliquem specidari de Cicéron.

Rigaud, 1881 : Stimuler un cheval à coups de fouet.

Le pauvre gars apparut, tout piètre encore, et se hissa péniblement dans la voiture. Après lui, madame y monta, puis, en route, allume !

(L. Cladel, Ompdrailles, Le Tombeau-des-lutteurs)

La Rue, 1894 : Regarder avec soin. Enthousiasmer. Allumer le pingouin, exciter la curiosité ou l’enthousiasme des badauds, dans le jargon des saltimbanques. Signifie aussi écouter.

Virmaître, 1894 : Faire de l’œil à un passant. Chauffer une salle de théâtre ou une réunion publique pour faire éclater l’enthousiasme et assurer le succès. Frapper ses animaux à coups de fouet pour les exciter. Compères chargés dans les salles de ventes d’allumer les acheteurs (Argot du peuple).

Rossignol, 1901 : Regarder.

Allume la tronche de la môme qui radine.

Allumer veut aussi dire payer ; celui qui solde une dépense allume. Chez les artistes, allumer veut dire regarder dans la salle s’il y aura pour la sortie un monsieur galant.

Les allumeuses ne sont pas toujours celles qui éteignent.

France, 1907 : Veiller, être aux aguets, ouvrir l’œil, dans l’argot des voleurs :

Si le Squelette avait eu tantôt une largue comme moi pour allumer, il n’aurait pas été moucher le surin dans l’avaloir du grinche.

(Eug. Sue, Les Mystères de Paris)

Un jeune mais cynique vagabond est assis sur le banc des accusés, à la police correctionnelle.
Le président. — Prévenu, que faisiez-vous au moment de votre arrestation ?
Le prévenu. — J’avais l’œil au grain.
Le président. — Vous dites ?
Le prévenu. — J’allumais.
Le président. — Veuillez vous exprimer dans un langage clair, et surtout plus convenable.
Le prévenu. — Je ne connais que celui-là, moi. Je parle la langue de mes aïeux !

anon., 1907 : Regarder. Allume tes chasses : ouvre tes yeux.

Allumette ronde (attraper une)

Rigaud, 1881 : Ressentir les premiers effets de l’ivresse ; une des nombreuses métaphores pour désigner la manière d’être d’un homme soûl. À des degrés divers, on dit : Avoir sa cocarde, avoir son plumet, être dans les vignes, dans les brindezingues, avoir son compte, son affaire, sa pointe, un coup de soleil, un coup de jus, un coup de sirop, être tout chose, éméché, parti, lancé, paf, pochard, soûlot, soulard, gavé, poivre, poivrot, raide comme balle, raide comme la justice. Voici, d’après M. Denis Poulot (le Sublime), les marches de l’échelle alcoolique, dans l’argot des ouvriers mécaniciens : 1o Attraper une allumette ronde : il est tout chose ; 2o Avoir son allumette-de marchand de vin : il est bavard et expansif ; 3o Prendre son allumette de campagne, ce bois de chanvre soufré des deux bouts : il envoie des postillons et donne la chanson bachique ; 4o Il a son poteau kilométrique : son aiguille est affolée, mais il retrouvera son chemin ; 5o Enfin le poteau télégraphique, le pinacle : soulographie complète, les roues patinent, pas moyen de démarrer ; le bourdonnement occasionné par le vent dans les faïences est cause du choix.

Allumeuse

Delvau, 1866 : s. f. Marcheuse, dans l’argot des filles.

Rigaud, 1881 : Femme payée par l’administration d’un bal public pour danser et avoir l’air de beaucoup s’amuser. — Femme dont le métier consiste à attirer l’attention des hommes, à faire de l’œil, sur la voie publique, dans les théâtres, en chemin de fer et ailleurs. Elle cherche à allumer sa victime, à l’incendier de son regard.

La Rue, 1894 : Femme payée pour donner l’entrain dans un bal ou pour attirer les hommes.

France, 1907 : Femme chargée par les dames des maisons de prostitution de recruter des clients.

Nous trouvons justement à la porte de l’hôtel une gitana aux yeux flamboyants qui guettait notre sortie. Bien qu’elle fut maigre comme une bonne jument du Haymour, elle était encore assez jeune et passable pour battre pour son compte les buissons de Cythère ; mais, veuve et chargée de famille, elle ne travaillait que pour autrui.
Retirant de son doigt une bague, comme dans les vieux romans espagnols, elle nous la présenta, non pour nous l’offrir de la part d’une señora prise subitement du mal d’amour, mais pour nous la vendre.
Ce commerce de l’unique bijou qu’elle possédat ne servait qu’à en couvrir un autre, car, continuant à tenir sa bague du bout des doigts, elle nous raconta confidentiellement qu’elle connaissait deux señoritas muy hermosas et muy jovenes (très belles et très jeunes) qui raffolaient des seigneurs français.
C’était une allumeuse.

(Hector France, Sac au dos à travers l’Espagne)

Ambulante

Rigaud, 1881 : Fille publique. Allusion aux marches et contremarches auxquelles ces demoiselles se livrent, avant de se livrer au public. Le mot remonte au siècle dernier.

Une belle soirée qu’elles étaient assises au pied d’un arbre, et interrogeaient les passants, s’ils voulaient s’amuser (c’est le terme technique avec lequel ces ambulantes expriment sous une image honnête l’acte de leur métier le plus malhonnête).

(Anecdotes sur la comtesse du Barry, 1776)

Virmaître, 1894 : Fille qui va de cafés en cafés, tantôt à Montmartre tantôt à Grenelle. C’est généralement une fille rangée qui n’a pas de souteneur. Elle passe dans son quartier pour une laborieuse ouvrière qui va travailler au loin. Elle ne ramène jamais chez elle (Argot du peuple). N.

France, 1907 : Voleuse qui va de maison en maison offrir de menus objets de vente.

Andouille mal ficelée

Virmaître, 1894 : Individu déguingandé. à la démarche traînante. Se dit surtout de quelqu’un mal habillé, ayant des allures ridicules. On dit aussi : mal fagoté (Argot du peuple).

Anquilleuse, ou voleuse à la mitaine

Rigaud, 1881 : Voleuse à la détourne qui s’attaque aux magasins de nouveautés. Habile à faire tomber un coupon d’étoffe, elle se sert de ses pieds, chaussés de bas en forme de mitaine, pour cacher la marchandise entre ses jambes, quilles, ce qui ne l’empêche ni de marcher, ni même de courir, quand elle sent la police à ses trousses.

Antif

Delvau, 1866 : s. m. Marche, — dans l’argot des voleurs. Battre l’antif. Marcher. Signifie aussi Tromper, dissimuler.

La Rue, 1894 : Chemin, marche.

France, 1907 : Marche ; argot des voleurs. Battre l’antif, marcher. Antif, dit Lorédan Larchey, est un vieux mot qui signifie antique et se rencontre souvent dans les textes du moyen âge uni à celui de chemin. Un chemin antif était un chemin ancien, c’est-à-dire frayé.

Antif ou antiffle

Virmaître, 1894 : Marcher.
— Que fait la môme ?
— Elle bat l’antif pour dégoter un miché (Argot des souteneurs).

Antife

Halbert, 1849 : Marche.

Antiffe

anon., 1827 : Marche.

Raban et Saint-Hilaire, 1829 : Marcher. Batter l’antiffe, marcher vite.

Bras-de-Fer, 1829 : Marche.

Delvau, 1866 : s. f. Église, — dans le même argot [des voleurs]. On dit aussi Antiffle et Antonne.

Virmaître, 1894 : Église (Argot des voleurs). V. Antonne.

Antiffer

France, 1907 : Marcher.

Arlequin

d’Hautel, 1808 : Un habit d’arlequin. On appelle ainsi et par mépris, un enfant né d’un commerce illicite ; une composition de toutes sortes de pièces qui n’ont aucun rapport entr’elles ; un habit racommodé de morceaux de diverses couleurs.

Larchey, 1865 : Rogatons achetés aux restaurants et servis dans les gargotes de dernier ordre.

C’est une bijoutière ou marchande d’arlequins. Je ne sais pas trop l’origine du mot bijoutier ; mais l’arlequin vient de ce que ces plats sont composés de pièces et de morceaux assemblés au hasard, absolument comme l’habit du citoyen de Bergame. Ces morceaux de viande sont très copieux, et cependant ils se vendent un sou indistinctement. Le seau vaut trois francs. On y trouve de tout, depuis le poulet truffé et le gibier jusqu’au bœuf aux choux.

(Privat d’Anglemont)

Delvau, 1866 : s. m. Plat à l’usage des pauvres, et qui, composé de la desserte des tables des riches, offre une grande variété d’aliments réunis, depuis le morceau de nougat jusqu’à la tête de maquereau. C’est une sorte de carte d’échantillons culinaires.

Rigaud, 1881 : Épaves de victuailles recueillies pêle-mêle dans les restaurants, dans les grandes maisons, et débitées aux pauvres gens. La variante est : Bijou.

En effet, c’est une chose affreuse que les arlequins… une chose affreuse, puisqu’elle a empoisonné deux hommes, la semaine dernière, l’un en vingt-quatre heures.

(Le Titi, du 17 janv. 1879)

Ça un arlequin, la petit’ mère ! vous vous foutez de moi… c’est tout au plus du dégueulis.

La Rue, 1894 : Reste de victuailles des maisons bourgeoises et des restaurants.

Rossignol, 1901 : Rogatons divers ramassés dans les restaurants et vendus dans les marchés aux malheureux ; arlequin, parce que du poisson peut être mêlé avec du lapin ou autres victuailles.

France, 1907 : Assemblage de restes achetés dans les restaurants par les gargotiers de dernier ordre et provenant de la desserte des tables. On y trouve de tout, dit P. d’Anglemont, depuis le poulet truffé et le gibier jusqu’au bœuf aux choux.

Autrefois chez Paul Niquet
Fumait un vaste baquet
Sur la devanture,
Pour un ou deux sous, je croix,
On y plongeait les deux doigts,
Deux, à l’aventure,
Les mets les plus différents
Étaient là, mêlés, errants,
Sans couleur, sans forme,
Et l’on pêchait, sans fouiller,
Aussi bien un vieux soulier
Qu’une truffe énorme.

(Richepin, La Chanson des Gueux)

Arlequins

Vidocq, 1837 : s. m. — Morceaux de viande de diverses sortes, provenant de la desserte des bonnes tables et des restaurateurs, qui se vendent à un prix modéré dans plusieurs marchés de Paris. Ce mot est passé dans la langue populaire.

Virmaître, 1894 : Détritus de toutes sortes de mets que les cuisiniers des restaurants vendent à des marchandes des Halles. Ces débris sont triés avec soin, et elles en font des assiettes assorties que les malheureux achètent un ou deux sous. Cette expression vient de l’habit d’Arlequin, qui est composé d’étoffes de différentes couleurs (Argot du peuple).

Hayard, 1907 : Débris d’aliments mélangés.

anon., 1907 : Mélange d’aliments.

Arpenter

d’Hautel, 1808 : Se hâter ; marcher avec une grande vitesse ; ce que l’on appelle figurément, courir la poste.

Arpenteur

d’Hautel, 1808 : Pour dire un habile piéton ; un homme qui marche à pas de géant ; qui va comme un Basque.

Arpionner

France, 1907 : Marcher. Voir Arpions.

Un jour, il en a assez d’arpionner les grandes routes, de manger du cheval crevé dans les cantines, de boire d’ignobles mixtures qui le grisent sans le désaltérer, de porter des vêtements qui fondent à la pluie et se racornissent au soleil, de vivre seul et sans le sou, guetté par le lit d’hôpital et la fosse commune.

(Lucien Descaves, Le Chemineau)

Arracher un pavé

Rigaud, 1881 : Se livrer au travail d’Onan, — dans le jargon des voyous.

Virmaître, 1894 : V. Rouscailler.

Rossignol, 1901 : J’avais un vieil ami de 70 ans qui me disait : Mon cher Rossignol, quand je pouvais, je n’avais pas le temps ; maintenant que j’ai le temps, je ne peux plus.

France, 1907 : Monter sur l’autel de Vénus, acte qui pour certaines gens est aussi dur que d’arracher un pavé de la rue.

Deux minutes après, elle roulait dans ma voiture. Ah ! qu’il est doux parfois d’arracher un pavé…

(Pompon, Gil Blas)

Depuis le commencement de la langue on a usé de nombreuses périphrases dont voici les plus décentes : Accorder sa flûte, administrer une douche, aforer le tonnel, aller à la charge, aller aux armes, apaiser sa braise, avoir contentement ; faire bataille, bonne chère, dia hur haut, du bon compagnon, fête, la belle joie, la bonne chose, la chose pourquoi, la chosette, la culbute, la grenouille, la pauvreté, l’amoureux tripot, le déduit, le devoir, le heurte-bélin, le petit verminage, le saut de Michelet, ses besognettes, ses choux gras, une aubade de nuit, une grosse dépense, une libation à l’amour, une politesse, une sottise, un tronçon de bon ouvrage, un tronçon de chère-lie, virade ; fournir la carrière, franchir le saut, frétin frétailler, goûter les ébats ; jouer au reversis, aux cailles, aux quilles, des basses marches ; laisser aller le chat au fromage ; mettre à mal, en œuvre ; se mettre à la juchée, négocier, officier ; passer le pas, les détroits ; payer la bienvenue, son écot ; planter le cresson, le mai ; prendre pâture, passe-temps, provende, soulaz, une poignée ; régaler, rompre une lance, roussiner, sabouler, savonner, soutenir un entretien, tenir en chartre, thermométriser, travailler à la vigne, vendanger, etc… etc.

Arriviste

France, 1907 : Jeune ambitieux sans scrupule qui veut arriver à tout prix, dût-il marcher sur le corps de son père.

Ah ! le joli mot : Arriviste ! Il peint un temps, il caractérise une époque. J’envie M. Alcanter de Brahm qui l’a trouvé. La lettre A de la nouvelle édition du Dictionnaire est achevée ; je le regrette : j’aurais combattu pour l’entrée officielle de ce mot nouveau dans la langue. L’Arriviste, c’est le mot-type. Sarcey parlait avec acharnement de la scène à faire : la comédie à faire, la comédie moderne, c’est l’Arriviste.

(J. Claretie)

Atout

d’Hautel, 1808 : Terme burlesque ; qui équivaut à mornifle, taloche, horion.
Il a reçu un fameux atout. Pour dire il a été rossé, équipé d’une belle manière.

Vidocq, 1837 : s. m. — Estomac.

un détenu, 1846 : Estomac.

Larchey, 1865 : Coup grave.

Voilà mon dernier atout… Vous m’avez donné le coup de la mort.

(Balzac)

Expression de joueurs de cartes, qui ont appliqué aux accidents de la vie le nom de l’ennemi que craignent leurs combinaisons. Atout : Courage (Vidocq).

Je ne me plains pas. Tu es un cadet qui a de l’atout.

(E. Sue)

Même allusion ; seulement elle est retournée. L’homme a ici l’atout dans le jeu de sa vie au lieu de l’avoir contre lui.
Atouser : Encourager (Vidocq). — C’est-à-dire donner de l’atout.

Delvau, 1866 : s. m. Aplomb, acquis, assurance, — dans l’argot du peuple qui sait par expérience que les gens de cœur marchent volontiers le front haut, comme défiant les lâches.

Delvau, 1866 : s. m. Argent, monnaie, — dans l’argot des faubouriens. Signifie aussi capacités, talents.

Delvau, 1866 : s. m. Coup plus ou moins grave que l’on reçoit en jouant — maladroitement — des poings avec quelqu’un.

Delvau, 1866 : s. m. Courage, — parce que souvent au jeu de cartes, l’atout c’est du cœur.

Delvau, 1866 : s. m. Estomac, — dans l’argot des voleurs.

Rigaud, 1881 : Contusion ; coup de poing. Retourner atout, donner une gifle.

Rigaud, 1881 : Courage. — Avoir de l’atout, avoir du courage.

La Rue, 1894 : Courage. Coup. Estomac.

Virmaître, 1894 : Avoir du courage. Avoir des atouts dans son jeu. Un zouave rencontre son capitaine accompagné de sa femme, il leur lance au nez un pet à tout casser en criant : Atout. Le capitaine, se retournant, lui envoie un magistral coup de pied dans le cul en disant : Je coupe. Le soldat répond : Ah ! je ne savais pas que vous aviez la dame seconde ! Recevoir un atout : être sérieusement blessé. C’est sans doute d’atout que, par corruption, on a fait attiger (Argot du peuple). N.

Hayard, 1907 : Courage, audace, coup.

France, 1907 : Argent ; argot des faubouriens.

France, 1907 : Courage, aplomb, assurance : Quand on a les atouts dans son jeu, on va hardiment.

Tu m’as donné la bonne mesure, tu es un cadet qui a de l’atout.

(Eugène Sue)

Signifie aussi coup : recevoir des atouts, et, dans l’argot des voleurs, estomac.

Aveugle

d’Hautel, 1808 : Changer son cheval borgne contre un aveugle. Échanger une chose défectueuse contre une autre plus défectueuse encore ; faire un sot marché.
Il crie comme un aveugle qui a perdu son bâton. Se dit d’un criard, d’un homme violent et emporté qui jette feu et flamme pour la moindre chose. Il seroit, sans doute, mieux de dire : Il est embarrassé comme un aveugle qui, etc., mais l’usage a sanctifié la première locution.
Au pays des aveugles, les borgnes sont rois. Signifie que parmi les gens ignares et incapables, ceux qui le sont moins, passent pour des génies ; ou que ceux qui ont quelques défauts physiques, ne laissent pas de briller dans les lieux où se trouvent des personnes qui en ont de plus remarquables.
Pour faire un bon ménage, il faut que l’homme soit sourd et la femme aveugle. C’est-à-dire qu’il faut que la femme ferme les yeux sur les défauts de son mari : et le mari les oreilles aux criailleries de sa femme.
Un aveugle y mordroit. Pour dire qu’une chose est facile à apercevoir.

Avril

d’Hautel, 1808 : Poisson d’avril. Attrape que l’on fait à quelqu’un le premier de ce mois.
Donner un poisson d’avril à quelqu’un. L’engager dans des démarches inutiles, à dessein de se moquer de lui.
Poissons d’avril. Sobriquet insultant que l’on donne aux hommes qui font l’infâme métier de prostitution.

Balader

Vidocq, 1837 : v. a. — Choisir, chercher. Dans le langage populaire ce mot signifie marcher sans but, flâner.

un détenu, 1846 : Promener, flâner.

Delvau, 1866 : v. a. Choisir, chercher. Argot des voleurs.

Rigaud, 1881 : Choisir, chercher, — dans le jargon des voleurs.

Rossignol, 1901 : Promener.

Où vas-tu ? — Tu vois, je vais me balader.

Balader (se)

Larchey, 1865 : Flâner. — Diminutif du vieux mot baler : se divertir, se remuer. V. Roquefort.

Je suis venu me balader sur le trottoir où j’attends Millie.

(Monselet)

Balader : Choisir, chercher (Vidocq). — Même racine. Le choix comporte toujours un déplacement. Baladeuse : Coureuse.

Elle t’a trahi sans te trahir. C’est une baladeuse, et voilà tout.

(Nerval)

Delvau, 1866 : v. réfl. Marcher sans but ; flâner ; et, par extension s’en aller de quelque part, s’enfuir.

Boutmy, 1883 : v. pr. Flâner, se promener sans but déterminé.

Balader, se balader

Rigaud, 1881 : Marcher, se promener. Ce mot avait, il y a quelques années, le sens de ne rien faire, se croiser les bras. Autrefois on appelait baladinages les danses du peuple.

Balancer

Ansiaume, 1821 : Abattre.

Il faut balancer la lourde pour arriver à la malouse.

Bras-de-Fer, 1829 : Remuer.

Vidocq, 1837 : v. a. — Jeter.

Clémens, 1840 : Jeter, refuser.

M.D., 1844 : Jeter.

M.D., 1844 : Renvoyer.

un détenu, 1846 : Chasser, renvoyer d’un emploi.

Larchey, 1865 : Jeter au loin. On sait que l’action de balancer imprime plus de force à une projection. V. Litrer. Balancer, envoyer à la balançoire : Congédier, renvoyer.

Elle m’a traité de mufle. — Alors il faut la balancer.

(Monselet)

Je l’envoie à la balançoire.

(id.)

On dit aussi exbalancer :

Je vais les payer et les exbalancer à la porte.

(Vidal, 1833)

Balancer son chiffon rouge : Parler, remuer la langue. — Balancer sa canne : Devenir voleur. — C’est-à-dire jeter la canne de l’homme qui marche dans l’unique but de se promener. — Balancer ses halènes : Cesser de voler, jeter ses outils de voleur. — Balancer une lazagne : Adresser une lettre. — Balancer ses chasses : Regarder à droite et à gauche. Balancement :

Le conducteur appelle son renvoi de l’administration un balancement.

(Hilpert)

Balançoire : mensonge, conte en l’air.

Non, monsieur ! je n’avais pas fait un accroc. — C’est une balançoire.

(P. de Kock)

Delvau, 1866 : v. a. Donner congé à quelqu’un, renvoyer un employé, un domestique, — dans l’argot du peuple, qui ne se doute pas qu’il emploie là, et presque dans son sens originel, un des plus vieux mots de notre langue.
On dit aussi Envoyer à la balançoire.

Rigaud, 1881 : Jeter au loin, renvoyer, envoyer promener.

Quand votre femme vous ennuie… Toc ! on la balance.

(E. Grangé et Lambert-Thiboust. La Mariée du Mardi-Gras)

Rossignol, 1901 : Voir balanstiquer.

France, 1907 : Balancer quelqu’un, le renvoyer, lui donner son congé. Se dit aussi pour se moquer de lui, le berner.

Mais surtout tu te garderas
De l’amour d’un étudiant.
Toujours d’avance tu exigeras
Qu’il fasse tinter son argent,
Sinon tu le balanceras…
On ne vit pas de l’air du temps.

(Règles de la chasse aux hommes)

Balayer les planches

Rigaud, 1881 : Jouer dans une pièce qui sert de lever de rideau, — dans le jargon des comédiens.

Ayez donc du talent… pour balayer les planches.

(Ed. Brisebarre et Eug. Nus, La Route de Brest, acte IV, scène 1)

France, 1907 : Chanter le premier dans un concert, argot des coulisses ; — le trottoir, marcher en laissant traîner sa robe.

Ballant

Rigaud, 1881 : Bras, — dans le jargon des barrières. Les voyous marchent les bras ballants ; d’où le surnom.

Baller

d’Hautel, 1808 : Ce verbe dans le vieux langage signifioit danser ; courir les bals. Il n’est guère maintenant usité que de la manière suivante :
Aller les bras ballans. Pour dire marcher indolemment et en laissant aller ses bras suivant le mouvement de son corps.

Banban

Larchey, 1865 : Personne de petite taille aux membres noués. — Allusion au dandinement particulier de la marche.

J’entrai chez Dinah, jolie petite brune un peu banban.

(Mogador)

Delvau, 1866 : s. des deux g. Boiteux, bancal, — dans l’argot des bourgeois, qui emploient principalement cette onomatopée à propos d’une femme.

Rigaud, 1881 : Boiteux, boiteuse. Le banban, la banban.

France, 1907 : Onomatopée qui désigne une personne chétive, bancale ou boiteuse ; abréviation redoublée de bancroche.

Baquet de science

Delvau, 1866 : s. m. Baquet où le cordonnier met sa poix et les autres ingrédients de son métier. Argot du peuple.

Rigaud, 1881 : Baquet dont se servent les cordonniers, les forgerons.

Si tu ne veux pas marcher mieux que ça, je te f… dans le baquet de science.

(Le Sublime)

France, 1907 : Baquet où trempent les cuirs du cordonnier, dont on a fait ensuite goguenot.

Baraque

d’Hautel, 1808 : Cahutte, masure, maison en mauvais état et de nulle valeur. Au figuré, terme de dénigrement ; atelier, boutique, maison où les ouvriers sont mal payés, et les domestiques mal nourris.

Delvau, 1866 : s. f. Maison où les maîtres font attention au service, — dans l’argot des domestiques. Journal où l’on est sévère pour la copie, — dans l’argot des aspirants journalistes.

Rigaud, 1881 : Chevron, — dans le jargon du régiment. Par abréviation de baraquement, campement. — Un vieux pied de banc à trois baraques.

Rigaud, 1881 : Pupitre d’écolier.

Sa baraque, en étude, ressemble à ces sacs-bazars qui donnaient tant d’originalité à nos zouaves de l’expédition de Crimée.

(Les Institutions de Paris, 1808)

Rigaud, 1881 : Terme de mépris pour désigner une maison, un magasin, un établissement. Baraque, le magasin dont le patron paye mal ses commis ; baraque, l’administration qui surmène ses employés ; baraque, la maison où les domestiques ne peuvent pas voler à leur aise.

Merlin, 1888 : Chevron ; peut-être en raison de sa forme de V renversé, imitant un toit.

Fustier, 1889 : Sorte de jeu en vogue il y a quelque temps, et dans lequel les filous avaient la partie belle.

Le jeu de la baraque se compose d’une planchette de cuivre casée à l’angle d’un billard et percée de 25 petites cuvettes numérotées de 1 à 25. Vous faites une poule à 2, à 5 ou à 20 francs et, si vous avez la chance, pardon ! l’adresse de pousser votre bille dans la cuvette cotée le plus haut, c’est vous qui touchez les enjeux. Le baraqueur ne prélève que 10 p. 100 sur le montant de chaque poule. C’est pour rien ! Toutefois ce petit impôt me paraît plus dur que le zéro de la roulette.

(Paris-Journal, 1882)

Virmaître, 1894 : Maison construite en plâtre, en torchis, provisoirement. Maison où la patronne va par méfiance au marché avec sa bonne. Maison où l’on enferme le vin et les liqueurs. Maison où l’on chipote sur tout, où l’on rogne même la nourriture.
— Tenez, voilà mon tablier, je n’en veux plus de votre baraque, j’en ai plein le dos (Argot du peuple).

France, 1907 : Nom donné par les domestiques à la maison de leurs maîtres. Chevron que les soldats portaient autrefois sur la manche gauche et qui indiquait un certain temps accompli sous les drapeaux. La première baraque après sept ans de service ; la deuxième après onze ans, et la troisième après quinze. Sorte de jeu qui se compose d’une planchette de cuivre à l’angle d’un billard et percée de 25 cuvettes numérotées.

Barre (compter à la, tenir sa comptabilité à la)

Rigaud, 1881 : Ce genre de comptabilité, encore en usage chez quelques marchands de vins, consiste à marquer chaque objet de consommation au moyen d’une barre faite à la craie sur une ardoise. Au noble jeu de tourniquet, l’ardoise marche un train d’enfer, et quelquefois, dans sa précipitation, le marchand de vin aligne quelques barres de plus.

Bas-bleu

Delvau, 1866 : s. m. Femme de lettres, — dans l’argot des hommes de lettres, qui ont emprunté ce mot (blue stocking) à nos voisins d’outre-Manche.
Alphonse Esquiros (Revue des Deux Mondes, avril 1860) donne comme origine à cette expression le club littéraire de lady Montague, où venait assidûment un certain M. Stillingfleet, remarquable par ses bas bleus. D’un autre côté, M. Barbey d’Aurevilly (Nain jaune du 6 février 1886) en attribue la paternité à Addison. Or, le club de lady Montague ne date que de 1780, et Addison était mort en 1719. Auquel entendre ?

France, 1907 : Nom donné aux femmes de lettres, traduction littérale de l’anglais Blue stocking. Alphonse Esquiros raconte que cette expression prit naissance dans le club littéraire de la célèbre lady Montague qui vivait au commencement du XVIIIe siècle. Dans sa résidence de Twickenham, près de Londres, elle réunit toutes les célébrités littéraires du temps, Pope, Addison, Steele, Young, etc., et dans le nombre se trouva un certain Stillingfleet, auteur ignoré aujourd’hui, qui avait l’habitude de porter des bas bleus. Quantité de femmes de lettres ou aspirant à le devenir fréquentaient le salon de lady Montague, et le public railleur appela ces réunions le club des Bas bleus, nom qui fut bientôt donné à chacune des habituées.
D’après Barbey d’Aurevilly, ce serait Addison qui aurait baptisé le club.
Mills, dans son History of Chivalry, raconte d’autre part qu’il se forma à Venise, en 1400, une société littéraire sous le nom de Société du Bas (Società della Calza) et dont tous les membres devaient, comme signe distinctif, chausser des bas bleus. Cette société fut connue plus tard en Angleterre, et c’est sans doute à elle qu’Addison fit allusion en baptisant de ce nom celle de Lady Montague. Quoi qu’il en soit, la provenance est bien anglaise, et c’est en Angleterre que pullule, plus qu’en aucun pays du monde, cette variété excentrique de la race humaine.
Dans tous les temps et dans toutes les nations, les femmes savantes ont excité les railleries, et, les hommes s’étant attribué l’universelle toute-puissance, nombreux sont les proverbes à l’adresse de celles qui essayent de se tailler une part de la masculine souveraineté.
Nos pères surtout se sont égayés à ce sujet :

La femme qui parle latin,
Enfant qui est nourri de vin,
Soleil qui luisarne au matin,
Ne viennent pas à bonne fin.
C’est une chose qui moult me déplait,
Quand poule parle et coq se tait.

(Jean de Meun)

« Femme qui parle comme homme, geline qui chante comme coq, ne sont bonnes à tenir. »

Ne souffre à ta femme pour rien
De mettre son pied sur le tien,
Car lendemain la pute beste
Le vouloit mettre sur ta teste.

(G. Meurier, Trésor des sentences)

Qui n’a qu’une muse pour femme faict des enfans perennels.

(Adages français, XVIe siècle)

Napoléon Ier qui ne se piquait pas de galanterie et qui avait des idées particulières sur les femmes au point de vue de leur rôle social, avait coutume de dire :
« Une femme a assez fait quand elle a allaité son fils, ravaudé les chaussettes de son mari et fait bouillir son pot-au-feu. »
Aussi aimait-il peu les bas-bleus ; les femmes s’occupant de littérature lui paraissaient des monstres.
À une soirée des Tuileries, Mme de Staël demandait à l’empereur :
— Quelles femmes préférez-vous, sire ?
— Celles qui ont beaucoup d’enfants, répondit brutalement Napoléon.
Oui, mais elles ruinent leur mari.
En aucun pays du monde on aime les bas-bleus, que ce soit en France, en Chine ou au Japon.
Lorsque la poule chante, dit un proverbe japonais, la maison marche à sa ruine. Je suppose que chanter signifie, en ce cas, écrire des poèmes.
Si vous êtes coq, disent les Persans, chantez ; si vous êtes poule, pondez.
Et les Russes : Ça ne va jamais bien quand la poule chante.
Les Chinois : Une femme bruyante et une poule qui chante ne sont bonnes ni pour les Dieux ni pour les hommes.
Terminons par ce verset tiré du Talmud, et saluons, car c’est le meilleur :

Dieu n’a pas tiré la femme de la tête de l’homme, afin qu’elle le régisse ; ni de ses pieds afin qu’elle soit son esclave ; mais de son côté, afin qu’elle soit plus près du cœur.

Mais le dernier mot et le plus féroce sur les bas-bleus a été dit par Barbey d’Aurevilly, dans la Revue critique :

Ces bas-bleus ne le sont plus jusqu’aux jarretières. Ils le sont par-dessus la tête ! Leurs bas sont devenus une gaine. Les femmes maintenant sont bleues de partout et de pied en cap ; égales de l’homme, férocement égales, et toutes prêtes à dévorer l’homme demain… Vomissantes gargouilles de déclarations bêtes ou atroces, elles sont bleues jusqu’aux lèvres, qu’elles sont bleues comme de vieilles négresses !

Albert Cim a écrit un volume très documenté sur les bas-bleus.

Basque

d’Hautel, 1808 : Marcher comme un basque. Marcher comme un fou ; courir comme un écervelé,

Battre l’antif

Delvau, 1866 : v. n. Marcher, — dans l’argot des voleurs modernes. C’est le : Battre l’estrade des voleurs d’autrefois. Signifie aussi Espionner.

La Rue, 1894 : Marcher, s’enfuir.

Battre l’antiffe, battre l’estrade

anon., 1827 / Halbert, 1849 : Marcher.

Battre la breloque

Virmaître, 1894 : Les tapins, au régiment, battent la breloque pour annoncer l’heure de la soupe. Une pendule détraquée qui marche comme les montres marseillaises, lesquelles abattent l’heure en quarante cinq minutes, bat la breloque. Avoir le coco fêlé, ne plus savoir ce que l’on fait, avoir des moments d’absence, c’est battre la breloque. On dit également : battre la campagne (Argot du peuple).

France, 1907 : Ne pas savoir ce que l’on fait ; perdre la tête ; aller comme une pendule détraquée.

Battre le briquet

Delvau, 1866 : v. a. Cogner les jambes l’une contre l’autre en marchant. Argot du peuple.

Rigaud, 1881 : Heurter la lettre au composteur avant de l’y laisser tomber, — argot des typographes. (Boutmy.)

Rigaud, 1881 : Marcher les genoux en dedans.

Boutmy, 1883 : v. Heurter la lettre au composteur avant de l’y laisser tomber. MM. les compositeurs ne sont pas exempts de tics dans l’accomplissement de leur tâche. Il en est de très préjudiciables à la rapidité du travail et conséquemment au gain qui en résulte. Quelques compositeurs mettent en mouvement tous leurs membres, tandis que le bras droit seul doit agir ; d’autres s’y reprennent à deux fois pour saisir la lettre ; d’autres piétinent ; mais le défaut le plus commun est de battre le briquet.

Virmaître, 1894 : Frotter en marchant les deux jambes de son pantalon l’une contre l’autre (Argot du peuple).

Rossignol, 1901 : Frotter les genoux ou talons en marchant est battre le briquet.

Beauce, beauceresse

France, 1907 : Revendeur, revendeuse du Marché du Temple.

Bécane

Rigaud, 1881 : Machine à vapeur. Locomotive, — dans le jargon des ouvriers du fer.

La Rue, 1894 : Machine. Locomotive. Bicycle.

Virmaître, 1894 : Mauvaise machine à vapeur rafistolée par les Auvergnats de la rue de Lappe, qui marche comme une montre réparée par un charron (Argot du peuple). V. Seringue.

Rossignol, 1901 : Bicyclette.

Hayard, 1907 : Machine.

France, 1907 : Machine à vapeur.

Beuglant

Larchey, 1865 : Café chantant.

Nous allâmes au beuglant, c’est-à-dire au café chantant… Vous devez juger par le nom donné à cet établissement que les chants des artistes sont fort peu mélodieux.

(Les Étudiants, 1860)

Rigaud, 1881 : Café-concert. Le premier café-concert auquel on a infligé ce surnom fut le café des Folies-Dauphine, fréquenté par les étudiants.

Nous voici au café beuglant, ainsi nommé dans le quartier parce que, dans le principe, les artistes beuglaient leurs chansons.

(Marc Constantin, Hist. des cafés-concerts)

La Rue, 1894 : Café-concert de dernier ordre. Beuglante, chanteuse de café-concert.

Virmaître, 1894 : Café chantant où les spectateurs chantent en chœur avec les artistes. Les deux plus célèbres furent le Beuglant de la rue Contrescarpe et le Divan japonais de Jehan Sarrazin (Argot du peuple).

Rossignol, 1901 : Concert où il y a de mauvais artistes et où les spectateurs chantent avec eux.

Hayard, 1907 : Café-concert.

France, 1907 : Café chantant du dernier ordre.

Une place lui fut offerte dans l’orchestre d’un café chantant du Gros-Caillou, un de ces Alcazars de dernier ordre que l’ouvrier parisien qualifie de beuglants ou de bouibouis.

(Albert Cim, La Petite Fée)

Jadis l’homme seul travaillait. N’ayant ni le café, ni l’assommoir, ni les « beuglants », ni l’hôtel garni, ni le restaurant à faux bon marché, il était forcé de se constituer un intérieur, et se mariait. La femme le soignait, l’habillait, le nourrissait, élevait les enfants. Ceci n’existe presque plus. L’ouvrier agricole a toujours besoin d’une ménagère. Mais l’ouvrier des villes s’en passe, vit au jour le jour, et l’isolement où, de son côté, la femme est tenue, lui livre des filles en assez grand nombre pour tromper au moins son besoin d’aimer.

(Colombine, Gil Blas)

Bullier, les beuglants, les soupers de la rôtisseuse ne les tentaient pas. Ils aimaient bien mieux rester chez Malmus, parler patois, boulotter entre le café, l’école et la table d’hôte.

(A. Daudet, Numa Roumestan)

Certes, il y a loin de nos beuglants à ces Music-halls anglais où, au hasard de l’actualité, on sert tout chaud au public le couplet du jour.

(Séverine)

anon., 1907 : Café-concert.

Bibine

Delvau, 1866 : s. m. Cabaret de barrière, — dans l’argot des chiffonniers.

Rigaud, 1881 : Bière, — dans le jargon des voyous.

Rigaud, 1881 : Cabaret. Espèce de taverne où vont manger et boire les pauvres diables qui n’ont que trois ou quatre sous à dépenser par jour. Bibine signifie débine.

On en compte plusieurs sur la rive gauche, aux environs de la place Maubert… Il est des bibines aristocratiques. Rue de Bièvre, à la Taverne anglaise : la canette y coûte 10 centimes.

(Imbert, À travers Paris inconnu)

Rigaud, 1881 : Sœur de charité, — dans le jargon des voleurs.

La Rue, 1894 : Sœur de charité. Bière de basse qualité. Mauvais petit cabaret.

Virmaître, 1894 : Assommoir de bas étage, où tous les liquides les plus étranges, connue jadis à la bibine du Lapin blanc chez le père Mauras, sont servis aux consommateurs (Argot du peuple). V. Assommoir.

Rossignol, 1901 : Un liquide de mauvaise qualité ou pas frais, c’est de la bibine.

Hayard, 1907 : Assommoir, mauvaise bière.

France, 1907 : Cabaret de bas étage ; du latin bibere, boire, espagnol beber. On trouve dans Un Joli monde, de l’ancien chef de la sûreté, G. Macé, une intéressante description de bibine.

Ces gens-là mangent peu, l’acool les nourrit ; mais quand la fin les talonne par trop, ils vont dans un restaurant à bon marché. Chaque quartier a les siens. L’un des plus curieux est celui de la Moc-aux-beaux, situé rue de Bièvre, à côté de la place Maubert. L’entrée se trouve au bout d’un long couloir, précédant une cour boueuse et sombre. Sur une porte, garnie de petites vitres recouvertes d’un rideau transparent aux couleurs indécises, au tissu rongé par le temps, on lit le mot Bibine. La porte poussée, on se trouve dans l’unique pièce servant de cuisine et de salle à manger. Bien que vaste, cette salle, au plafond bas, a plutôt l’aspect d’une cave, que d’un restaurant. Une quinzaine de tables permettent de recevoir à la fois un assez grand nombre d’affamés.
Outre les ivrognes du quartier, cette gargote est fréquentée par des mendiants, manchots, aveugles, culs-de-jatte, tondeurs de chiens, ramasseurs de bouts de cigares, ouvreur de portières, et les joueurs de serinette aux sons nasillards et sans force qui n’empêcheraient plus Fualdès d’être assassiné.
Là, point de filles de débauche, ni de voleurs ; aussi ne s’y passe-t-il jamais rien d’anormal.
Depuis le potage jusqu’au dessert, tous les mets sont à dix centimes. La nourriture est saine et la boisson potable. Naturellement on paie comptant. Le restaurateur ne s’enrichit pas ; mais il gagne sa vie, et cela lui suffit.

Bibine signifie aussi sœur de charité, ou petite bière dans certains département de l’Est.

Biche (ça)

Rigaud, 1881 : Ça va bien, ça marche, en parlant d’un travail, d’un commerce, d’une affaire ; mot à mot : ça va comme vont les jambes d’une biche. Quand deux personnes ne sont pas bien ensemble, on dit : ça ne biche pas.

La Rue, 1894 : Cela va bien.

Hayard, 1907 : Ça va !

Bidoche

un détenu, 1846 / Halbert, 1849 : Viande.

Delvau, 1866 : s. f. Viande, — dans l’argot des faubouriens. Portion de bidoche. Morceau de bœuf bouilli.

Rigaud, 1881 : Viande, — dans le jargon du peuple. — Morceau de bœuf bouilli, l’ordinaire du soldat, — dans le jargon des troupiers. Il faut joliment tirer sur la bidoche, pour la démolir.

Merlin, 1888 : Portion de viande.

La Rue, 1894 : Mauvaise viande. Pièce d’un centime.

Virmaître, 1894 : Viande. Cette expression est connue depuis 1830. Le nom de la mère Bidoche avait été donné à la marchande de soupe qui tenait le restaurant des Pieds humides à l’ancien marché des Innocents, aux Halles. Le mot est resté dans le peuple, qui dit aussi quand la bidoche est trop dure : c’est de la carne (Argot du peuple).

Rossignol, 1901 / Hayard, 1907 : Viande.

France, 1907 : Voir Bidache.

anon., 1907 : Viande.

Bidonnier

Rossignol, 1901 : Truc importé à Paris par des Lyonnais, qui est maintenant blanchi (connu) ; il n’y en a plus que deux pu trois qui se livrent à ce commerce. Le bidonnier achète trois coupons de 1,10 m de mauvais drap de couleur différente ne valant pas plus de 2 fr. 50 le mètre. Il plie les trois coupons de façon à les intercaler les uns dans les autres, il en parait six du côté apparent ; le derrière est enveloppe dans sa grande blouse bleue, cela constitue le bidon. Il offre sa marchandise pour le prix de 25 francs aux consommateurs à la porte des débits. On le plaisante sur lé prix, c’est ce qu’il cherche, et tout en ayant l’air de se fâcher il répond :

Pourquoi marchander ? vous n’avez pas le sou, je parie que si je vous laisse le paquet pour 12 francs, vous ne le prendrez pas.

Le consommateur se pique d’amour-propre, le marché est conclu, il paye, la marchandise lui est ensuite livrée, c’est alors qu’il s’aperçoit ne pas avoir acheté six coupons, mais trois qui ne valent pas le prix de la façon de trois pantalons ; il est volé, mais il n’y a pas escroquerie, le bidonnier lui a parlé du paquet et non du nombre des coupons.

Hayard, 1907 : Qui vend du bidon.

Bigre

d’Hautel, 1808 : Mot incivil qui en déguise un beaucoup plus grossier encore ; il se prend toujours en mauvaise part, et ne se dit que d’un homme rusé, subtil, adroit et méchant qui sait se retirer des affaires les plus embrouillées.
Le bigre, le petit bigre, sait bien tirer son épingle du jeu.
C’est un mauvais bigre.
Pour dire c’est un homme noir et méchant.
Un bigre à poil. Homme qui ne se laisse pas marcher sur les pieds ; un luron qui n’entend pas raillerie.
Ce mot est aussi quelquefois interjectif, et marque la surprise, l’inquiétude et l’étonnement.
Bigre comme il y va !

Biture

Larchey, 1865 : Excès de boisson. — Du vieux mot boiture : goinfrerie. V. Roquefort.

N’aspirons-nous le grand air que pour l’ineffable joie d’engloutir impunément du piqueton jusqu’au gobichonnage majeur, jusqu’à prendre une biture ?

(Luchet)

Delvau, 1866 : s. f. Réfection copieuse, — dans l’argot des faubouriens.

Rigaud, 1881 : Béatitude bachique, nourriture copieuse. — Se flanquer, s’administrer une biture soignée.

Rossignol, 1901 : Être ivre à ne plus pouvoir marcher est avoir une biture.

Hayard, 1907 : Ivresse.

France, 1907 : Repas copieux, fortement arrosé de boisson. Se coller une biture carabinée.

Le seul plaisir un peu pittoresque qu’on se donne en pays étrangers, c’est une bosse avec les Anglais. Une bosse ou une biture, c’est-à-dire une orgie, est de rigueur en certaines circonstances.

(G. de La Landelle, Les Gens de mer)

Bleau

Rossignol, 1901 : Prix. Acheter une chose bon bleau c’est l’acheter bon marché.

Bloc

Larchey, 1865 : Prison. — Du vieux mot bloc : barrière. V. Roquefort.

Prenez trois hommes et menez cette fille au bloc.

(V. Hugo)

Bloquer : Consigner.

Colonel, c’est que je suis bloque. — Je vous débloque.

(J. Arago, 1838)

Delvau, 1866 : s. m. La salle de police. Argot des soldats. Être au bloc. Être consigné. Signifie aussi Prison.

Rigaud, 1881 : Prison, salle de police, — dans le jargon des troupiers.

Encore deux jours de bloc pour cette chienne de théorie.

(Randon, Croquis militaires)

Pourquoi es-tu au bloc, mon pauvre vieux ?

(Vte Richard, Les Femmes des autres)

Mettre, fourrer au bloc, consigner.

Merlin, 1888 : Salle de police, prison. On dit : mettre, et mieux f… au bloc, à la boîte, ou clou, etc.

La Rue, 1894 : Marché. Prison.

France, 1907 : Prison ; argot populaire.

On parle de progrès, d’humanité, de sentiments altruistes, on invoque comme une des plus précieuses conquêtes de 89 la liberté individuelle. Voilà le cas qu’ils en font, les gredins que ton vote imbécile vient de rehausser au pouvoir ! Défense d’avoir faim, défense d’être sans travail et sans logis, sinon au bloc !…

(Jean Grave, La Révolte)

Mais si — prodigieux progrès !
Un beau matin Thémis s’emballe
Et, pour servir nos intérêts,
Renvoie à l’argousin la balle ;
Si, pour son amabilité,
Sa douceur, son humeur amène,
Au bloc à son tour on l’emmène,
J’en suis rudement épaté.

(Blédort)

Bloc (faire un)

France, 1907 : Faire un marché.

Blot

Larchey, 1865 : Bon marché (Vidocq). — Corruption de Bloc. Les marchés d’objets en bloc sont, on le sait, les plus avantageux.

Delvau, 1866 : s. m. Prix d’une chose, — dans l’argot des faubouriens. C’est mon blot ! Cela me convient.

Rigaud, 1881 : Chose, affaire qui convient. « Ça fait mon blot », ça fait mon affaire. C’est simplement le mot lot augmenté d’un B.

L’as-tu enfin le sénat de tes rêves ?… Voyons, cette fois-ci, ça fait-il ton blot ?

(Le Titi, 1879)

La Rue, 1894 : Prix. À bas blot, à bas prix.

Hayard, 1907 : Prix, affaire.

France, 1907 : Affaire. Ça fait mon blot, ça fait mon affaire. Prix. — À bas blot, à bas prix.

— Ben oui !… Ben oui !… J’ai pris une seconde femme… C’est pus le même blot ! Ah ! la mâtine !… Ah ! la garce ! Il lui faut du mâle… C’est pire qu’une chatte, qu’une chienne, qu’un moigneau !… Moi, j’ai d’l’âge, vous comprenez ben… et pis j’ai jamais été porté là-dessus… Mais il lui faut, à elle, n’importe comment !…

(Octave Mirabeau)

Blot, bon blot

Vidocq, 1837 : s. m. — Bon prix, bon marché.

Bœuf

d’Hautel, 1808 : Mettre la charrue devant les bœufs. Mettre devant ce qui doit être derrière.
Lourd comme un bœuf. Se dit d’un butord, d’un homme qui marche pesamment.
Saigner comme un bœuf. Pour dire, abondamment.
C’est la pièce de bœuf. Se dit d’une chose dont on fait un usage continuel, ou d’une personne que l’on a coutume de voir journellement et à des heures marquées.
Bœuf saignant, mouton bélant, porc pourri ; tout ne vaut rien s’il n’est bien cuit. Pour marquer le degré de cuisson qui convient à chacune de ces viandes.
Je ne lui ai dit ni œuf ni bœuf. Pour, je ne lui ai dit ni oui ni non ; je ne lui ai adressé aucune injure.
On dit des gens grossiers, sots et stupides ; qu’Ils sont de la paroisse Saint-Pierre-aux-Bœufs, patron des grosses bêtes.
Le bœuf ne doit pas aller avant le char. Pour dire que chacun, selon sa condition, doit se tenir à sa place.
Dieu donne le bœuf et non pas la corne. Signifie que Dieu donne les moyens et les grâces ; mais qu’elles demeurent sans efficacité lorsqu’on ne s’aide pas soi-même par un travail ardent et assidu.

Larchey, 1865 : Monstrueux. — Mot à mot : aussi énorme qu’un bœuf.

Regarde donc la débutante. Quel trac bœuf ! Elle va se trouver mal.

(Ces Petites Dames)

Se mettre dans le bœuf : Tomber dans une situation misérable. Allusion au bouilli qui représente le rôti des indigents. On lit dans une mazarinade de 1649 :

Auprès de la Bastille, Monsieur d’Elbeuf, Dans sa pauvre famille, Mange du bœuf, Tandis que Guénégaud Est à gogo.

Delvau, 1866 : adj. Énorme, extraordinaire, — dans l’argot des faubouriens. Avoir un aplomb bœuf. Avoir beaucoup d’aplomb.

Delvau, 1866 : s. m. Second ouvrier, celui à qui l’on fait faire la besogne la plus pénible. Argot des cordonniers.

Rigaud, 1881 : Énorme, colossal. — Un succès bœuf, un aplomb bœuf ; n’est guère employé qu’avec ces deux mots.

Rigaud, 1881 : Mauvaise humeur, emportement, colère. Dans le jargon des typographes, ce mot est synonyme de chèvre. — Prendre un bœuf, gober son bœuf, avoir son bœuf, se mettre en colère, être en colère.

Rigaud, 1881 : Roi d’un jeu de cartes.

Rigaud, 1881 : Second ouvrier cordonnier. — Ouvrier tailleur qui fait les grosses pièces. — Petit bœuf, ouvrier qui commence une pièce, qui l’ébauche.

Boutmy, 1883 : s. m. Colère, mécontentement ; synonyme de chèvre. V. ce mot. Ajoutons cependant que le bœuf est un degré de mécontentement plus accentué que la chèvre. Le bœuf est une chèvre à sa plus haute puissance. Gober, avoir son bœuf, être très contrarié, se mettre en colère.

Boutmy, 1883 : s. m. Composition de quatre ou cinq lignes qu’un compagnon fait gratuitement pour son camarade momentanément absent. S’emploie presque exclusivement dans les journaux. On disait autrefois tocage.

Fustier, 1889 : Joli, agréable. C’est rien bœuf ! dit le peuple.

La Rue, 1894 : Mauvaise humeur. Prendre un bœuf, se mettre en colère.

France, 1907 : Roi du jeu de cartes, appelé ainsi parce qu’il est le plus gros et le plus puissant du jeu. Avoir son bœuf, être en colère ; être le bœuf, être la dupe dans une affaire ; se mettre dans le bœuf, tomber dans une situation critique, allusion au bœuf bouilli ordinaire des ouvriers et des petits bourgeois. On appelle bœuf un apprenti tailleur en passe de devenir ouvrier et les seconds ouvriers cordonniers.

Boiteux

d’Hautel, 1808 : Il marche comme un boiteux. C’est-à-dire lentement et avec peine.
Il ne faut pas clocher devant les boiteux. Signifie qu’il ne faut pas se moquer des imperfections naturelles devant les personnes qui en sont affligées, car il peut en survenir de semblables au moment où l’on y pense le moins.

Bonsoir

d’Hautel, 1808 : Bonsoir la compagnie. Se dit en riant de quelque chose qui vient à cesser subitement, ou qui échappe tout-à-coup des mains.
Bonsoir, n’en parlons plus. Pour c’est fini ; qu’il n’en soit plus question. Se dit lorsque quelqu’un rompt un marché, ou qu’il se désiste d’une affaire.

Bouffeur de kilomètres

Rigaud, 1881 : Sobriquet du chasseur de Vincennes, le plus intrépide marcheur de l’infanterie française. Il bouffe, il avale les kilomètres.

Bougie

Vidocq, 1837 : s. f. — Canne.

Larchey, 1865 : Canne (Vidocq). — Allusion de forme. — Bougie grasse : Chandelle. — Ironique.

Delvau, 1866 : s. f. Canne d’aveugle parce qu’elle sert à l’éclairer. Même argot [des faubouriens].

Rigaud, 1881 : Bâton d’aveugle. Il lui sert de bougie, il guide sa marche. — Bougie grasse, chandelle, — dans le jargon des chiffonniers.

Fustier, 1889 : Argent.

France, 1907 : Argent ; métonymie du verbe éclairer, payer. Canne d’aveugle, parce qu’elle lui sert en effet de bougie pour se guider. Bougie grasse, chandelle.

Boulotter

un détenu, 1846 : Aller lentement. Exemple : Les affaires boulottent.

Halbert, 1849 : Manger.

Larchey, 1865 : Vivre à l’aise. Mot à mot : rouler sans peine dans la vie. — Diminutif de bouler.

Ils boulottaient l’existence, sans chagrin de la veille, sans souci du lendemain.

(De Lynol)

Boulotter : Assister (Vidocq).

Delvau, 1866 : v. a. Manger. Argot du peuple.

Delvau, 1866 : v. n. Aller doucement, faire de petites affaires. Argot du peuple.

Rigaud, 1881 : Manger. — boulotter de l’argent, manger de l’argent.

Rigaud, 1881 : N’aller ni bien ni mal, marcher doucement, en parlant de la santé, des affaires. — Ça boulotte.

Boutmy, 1883 : v. intr. Manger. Aller boulotter, c’est aller prendre son repas. Cette expression est commune à d’autres argots.

La Rue, 1894 : Manger. Boulottage, mangeaille.

Virmaître, 1894 : Faire ses petites allaires. Quant ça va bien on dit : ça boulotte à la douce, comme le marchand de cerises. On sait que ce dernier pour annoncer sa marchandise crie :
— À la douce, à la douce (Argot du peuple).

Virmaître, 1894 : Manger (Argot du peuple).

Rossignol, 1901 : Manger ; on dit aussi lorsque ça va bien : ça boulotte.

France, 1907 : S’emploie aussi, dans l’argot des voleurs, pour aider un camarade.

France, 1907 : Vivre à l’aise sans trop se faire de bile, aller doucement, réaliser de petits bénéfices. Boulotter l’existence, vivre tranquillement, être eu bonne santé.

Ils boulottaient l’existence sans chagrin de la veille, sans souci du lendemain.

(Lynol)

Se dit aussi pour manger :

Quand y a plus rien à boulotter,
On va là où qu’on vous invite.

(Ch. Saint-Heant)

Boulotter de la galette, dépenser de l’argent.

Et tout le monde se disperse, vivement, excepté les trois compères et le môme, qui rentrent d’un pas tranquille dans Paris pour y fricoter l’argent des imbéciles, y boulotter la galette des sinves.

(Richepin)

Bourlingueur

Rigaud, 1881 : Patron, contre-maître, qui met sans cesse le marché en main à l’ouvrier.

France, 1907 : Patron grincheux, ayant toujours la menace à la bouche.

Bourrelet

d’Hautel, 1808 : Espèce de bonnet dont les contours sont bourrés de crin, à dessein de préserver les enfans dans leurs chutes.
On dit par raillerie d’un bomme simple et fort innocent, qu’il marche tout seul sans Bourrelet.

Boursicotier

Rigaud, 1881 : Individu qui tripote à la Bourse sur les fonds publics.

Virmaître, 1894 : Agioteur qui boursicote des valeurs qui n’en ont pas. Tripoteur, qui vend et achète des résidus au marché des pieds humides à tous les négociants qui, voulant faire une jolie faillite, achètent des valeurs tombées pour justifier de grosses pertes vis-à-vis du syndic (Argot des boursiers).

Braque

Delvau, 1866 : s. m. Original, homme à moitié fou, qui court de-ci, de-là, comme un chien de chasse, — dans l’argot des bourgeois, qui n’aiment pas les excentriques, et veulent qu’à leur exemple on marche à pas comptés et d’un air compassé. On dit aussi Grand Braque, — même à propos d’un homme de taille moyenne.

Brèmes

Virmaître, 1894 : Les cartes (Argot des filles).

France, 1907 : Cartes à jouer.

Que donc que tu veux faire, toi ? S’il y avait des brèmes, on pourrait flancher.

(Vidocq)

Ce salon se nommait le « Marché » ; les souteneurs l’appelaient la « Halle aux veaux ». C’était là que les filles débattaient le prix de leurs charmes et que les maquilleurs de brêmes venaient racoler des clients.

(Ch. Virmaître, Paris oublié)

Maquiller la brème, travailler la carte. Faire les trois brèmes, tenir un jeu de bonneteau composé de trois cartes. Brème de paquelins, carte géographique.

Brigeton

Delvau, 1866 : s. m. Pain, — dans l’argot des faubouriens.

France, 1907 : Pain ; autre forme de bricheton.

— C’est un coup qui a déjà été fait et qui a parfaitement marché, répondait Nib. Mais tout dépend d’un cheveu… il faut d’abord que la petite ait bien reçu le brigeton fourré que lui a envoyé la Sardine… des fois, on a pu se méfier et le visiter…

(Edmond Lepelletier, Les Secrets de Paris)

Brutal

d’Hautel, 1808 : Le brutal. Nom burlesque que l’on donne à une pièce de canon.
As-tu entendu ronfler le brutal. Pour as-tu entendu ronfler ou tirer le canon.

Ansiaume, 1821 : Canon.

Entends-tu le brutal qui annonce que nous cavalons ?

Larchey, 1865 : Canon. — Allusion au bruit de son tir.

As-tu entendu ronfler le brutal ?

(d’Hautel, 1808)

Une détonation sourde se fit entendre. — Tiens, dit Pierre, voilà déjà le brutal qui chante.

(Ricard)

Delvau, 1866 : s. m. Canon, — dans l’argot du peuple, qui a quelquefois à se plaindre de cet ultima ratio regum.

Rigaud, 1881 : Canon, — dans le jargon des troupiers.

Panel : Le canon ! — Duriveau, (avec joie) : Le brutal !… c’est donc vrai que l’Empereur marche sur Troyes ?

(Alph. Arnault et L. Judicis, Les Cosaques, 1853)

Merlin, 1888 : Canon.

La Rue, 1894 : Canon. Locomotive.

France, 1907 : Le canon.

Les chasseurs à pied s’éparpillent dans la plaine, voilant d’une banderole de fumée d’argent la troupe qu’ils couvrent. Cela veut dire que le brutal n’est pas loin et qu’il va gronder.

(E. Billaudel, Les Hommes d’épée)

Se dit aussi d’une locomotive.

Butte

d’Hautel, 1808 : La mère la butte. Nom. Badin, gaillard et familier que l’on donne à une femme enceinte dont la grossesse est avancée.

Ansiaume, 1821 : Massacre.

Je ne veux plus travailler à l’escap, çà ne conduit qu’à la butte.

un détenu, 1846 : Échafaud.

Larchey, 1865 : Guillotine. Mot à mot, c’est l’action de tomber à la renverse, de butter, c’est la dernière culbute.

Tu n’es qu’un lâche. Avec toi, on va tout droit à la butte.

(Canler)

France, 1907 : La guillotine. Monter à la butte.
Cette expression ne peut plus s’employer, puisque les échafauds sont de plain-pied au lieu d’avoir quinze marches comme autrefois.

Butte (la)

anon., 1827 : Guillotine.

La Rue, 1894 : La guillotine.

Rossignol, 1901 : Guillotine. Ce mot existait pour designer la guillotine lorsqu’elle était montée sur une plate-forme où l’on avait accès en gravissant treize marches. Les nouvelles guillotines ont été construites de plain-pied, pour remplacer celles brûlées par la Commune, en 1871, par le premier aide actuel qui était précédemment exécuteur en Corse.

Hayard, 1907 : L’échafaud.

Butte (monter à la)

Virmaître, 1894 : Quand l’échafaud avait treize marches, cette expression était juste, aujourd’hui qu’il est de plein-pied, elle n’a plus de raison d’être (Argot des voleurs).

Caco

France, 1907 : Expression d’encouragement qu’on adresse aux enfants lorsqu’ils s’essayent à marcher.

Cagnotte

Larchey, 1865 : « Espèce de tirelire d’osier recevant les rétributions des joueurs. »

(Montépin)

Delvau, 1866 : s. f. Rétribution tacitement convenue qu’on place sous le chandelier de la demoiselle de la maison. Argot des joueurs du demi-monde.

France, 1907 : Argent prélevé sur les joueurs pour couvrir les frais du jeu.

Et on lui explique complaisamment de quelle façon on entendait faire marcher le cercle ; comment on y attirerait les joueurs, comment on les pousserait à se ruiner, et comment la cagnotte s’engraisserait à leurs dépens.

(Hogier-Grison, Le Monde où l’on triche)

— La cagnotte !… Voilà le plus clair du baccara… Oh ! la belle et bonne nourrice qu’une cagnotte !… Elle produit ici, petit cercle, partie moyenne, de dix-huit cents à quatre mille francs par soirée… Chez les frères Benoit, c’est le double, le triple… et encore, comme les directeurs trouvent que ce rendement n’est pas suffisant, les croupiers ont la consigne de l’augmenter le plus qu’ils peuvent.

(E. Lepelletier)

Faire une cagnotte, mettre en réserve les gains ou une partie des gains pour une dépense commune.

Cahin-caha

Delvau, 1866 : adv. Avec peine, de mauvaise grâce, — dans l’argot du peuple, fidèle à l’étymologie : qua hinc, qua hac.

France, 1907 : Aller difficilement, avec peine. Marcher cahin-caha. Se dit aussi des choses qu’on fait malgré soi à plusieurs reprises et de mauvaise grâce. Du latin qua hinc, qua hac, qui a même signification.

Caisse

d’Hautel, 1808 : Bourrer sa caisse. Signifie se remplir le ventre, manger à regorger.
Bander la caisse. C’est-à-dire, s’en aller.
Battre la caisse. Courir après l’argent, faire des démarches pour s’en procurer.

Callibistri

Delvau, 1864 : Le membre viril, ou la nature de la femme.

Montrant mon callibistri à tout le monde, qui n’était pas petit sans doute.

(Rabelais)

Je crois que les callibistris des femmes de ce pays sont à meilleur marché que les pierres.

(Rabelais)

Canard

d’Hautel, 1808 : Boire de l’eau comme un canard ou comme une Cane. Pour dire boire beaucoup d’eau et coup sur coup, ce qui arrive assez ordinairement à ceux qui ont fait une grande débauche de vin.
Bête comme un canard.
Donner des canards à quelqu’un.
Pour lui en faire accroire ; le tromper.

M.D., 1844 : Fausse nouvelle.

Halbert, 1849 : Nouvelle mensongère.

Larchey, 1865 : Fausse nouvelle.

Ces sortes de machines de guerre sont d’un emploi journalier à la Bourse, et on les a, par euphémisme, nommés canards.

(Mornand)

Larchey, 1865 : Imprimé banal crié dans la rue comme nouvelle importante. V. Canardier. autrefois, on disait vendre ou donner un canard par moitié pour mentir, en faire accroire. — dès 1612, dans le ballet du courtisan et des matrones, M. Fr. Michel a trouvé « Parguieu vous serez mis en cage, vous estes un bailleur de canars. » — On trouve « donner des canards : tromper » dans le Dict. de d’Hautel, 1808.

Larchey, 1865 : Récit mensonger inséré dans un journal.

Nous appelons un canard, répondit Hector, un fait qui a l’air d’être vrai, mais qu’on invente pour relever les Faits-Paris quand ils sont pâles.

(Balzac)

Larchey, 1865 : Sobriquet amical donné aux maris fidèles. Le canard aime à marcher de compagnie.

Or, le canard de madame Pochard, s’était son mari !

(Ricard)

Delvau, 1866 : s. m. Chien barbet, — dans l’argot du peuple, qui sait que ces chiens-là vont à l’eau comme de simples palmipèdes, water-dogs.

Delvau, 1866 : s. m. Fausse note, — dans l’argot des musiciens. On dit aussi Couac.

Delvau, 1866 : s. m. Imprimé crié dans les rues, — et par extension, Fausse nouvelle. Argot des journalistes.

Delvau, 1866 : s. m. Journal sérieux ou bouffon, politique ou littéraire, — dans l’argot des typographes, qui savent mieux que les abonnés la valeur des blagues qu’ils composent.

Delvau, 1866 : s. m. Mari fidèle et soumis, — dans l’argot des bourgeoises.

Delvau, 1866 : s. m. Morceau de sucre trempé dans le café, que le bourgeois donne à sa femme ou à son enfant, — s’ils ont été bien sages.

Rigaud, 1881 : Cheval, — dans le jargon des cochers. J’ai un bon canard, bourgeois, nous marcherons vite. Ainsi nommé parce que la plupart du temps, à Paris, à l’exemple du canard, le cheval patauge dans la boue.

Rigaud, 1881 : Mauvaise gravure sur bois, — dans le jargon des graveurs sur bois.

Rigaud, 1881 : Méchant petit journal, imprimé sans valeur.

Ne s’avisa-t-il pas de rimer toutes ses opinions en vers libres, et de les faire imprimer en façon de canard ?

(Ed. et J. de Goncourt)

Rigaud, 1881 : Mensonge, fausse nouvelle. — Au dix-septième siècle, donner des canards à quelqu’un avait le sens de lui enfaire accroire, lui en imposer. (Ch. Nisard, Parisianismes)

Rigaud, 1881 : Morceau de sucre trempé dans du café. Comme le canard, il plonge pour reparaître aussitôt. Rien qu’un canard, un petit canard. On donne aussi ce nom à un morceau de sucre trempé dans du cognac.

Boutmy, 1883 : s. m. Nom familier par lequel on désigne les journaux quotidiens, et quelquefois les autres publications périodiques. Le Journal officiel est un canard, le Moniteur universel est un canard, tout aussi bien que le Journal des tailleurs et que le Moniteur de la cordonnerie ou le Bulletin des halles et marchés.

La Rue, 1894 : Journal. Fausse nouvelle inventée pour relever les Faits-Paris. Imprimé banal crié dans la rue.

Virmaître, 1894 : Mauvais journal. Quand un journal est mal rédigé, mal imprimé, pas même bon pour certain usage, car le papier se déchire, c’est un canard (Argot du peuple et des journalistes).

Virmaître, 1894 : Nouvelle fausse ou exagérée. Ce système est employé par certains journaux aux abois. On pourrait en citer cinquante exemples depuis les écrevisses mises par un mauvais plaisant dans un bénitier de l’église Notre-Dame-de-Lorette et qui retournèrent à la Seine en descendant par les ruisseaux de la rue Drouot ; jusqu’au fameux canard belge. Un huissier à l’aide d’une ficelle pécha vingt canards qui s’enfilèrent successivement, comme Trufaldin dans les Folies Espagnoles de Pignault Lebrun, il fut enlevé dans les airs, mais la ficelle se cassa et il tomba dans un étang ou il se noya. Ce canard fit le tour du monde arrangé ou plutôt dérangé par chacun, il y a à peine quelques années qu’il était reproduit par un journal, mais la fin était moins tragique, l’huissier était sauvé par un membre de la Société des Sauveteurs à qui on décernait une médaille de 1re classe. Pour sauver un huissier on aurait dû lui fourrer dix ans de prison (Argot du peuple).

Virmaître, 1894 : Terme de mépris employé dans les ateliers vis-à-vis d’un mauvais camarade.
— Bec salé, c’est un sale canard (Argot du peuple). N.

Hayard, 1907 : Journal, fausse nouvelle.

France, 1907 : Fausse nouvelle insérée dans un journal pour relever les Faits Divers lorsqu’ils sont pâles. Les filous et les tripoteurs de la Bourse se servent de canards pour faire la hausse ou la baisse. Cette expression est assez ancienne, car, dans le Dictionnaire Comique de Philibert Joseph Le Roux (1735), on trouve à côté du mot l’explication suivante : « En faire accroire à quelqu’un, en imposer, donner des menteries, des colles, des cassades, ne pas tenir ce qu’on avait promis, tromper son attente. »
De là à appeler canard le journal qui ment et, par suite, tous les journaux, il n’y avait qu’un pas ; il a été franchi.
Nous allons lancer un canard, c’est-à-dire, nous allons faire un journal.

France, 1907 : Gravure sur bois.

Terme de mépris employé dans les ateliers vis-à-vis d’un mauvais camarade. Argot populaire.

(Ch. Virmaître)

Chien barbet, argot populaire, à cause du plaisir qu’ont ces chiens de se jeter à l’eau. Bouillon de canard, eau.
Fausse note ; argot des musiciens.
Petit morceau de sucre trempé dans le café ou l’eau-de-vie que l’on donne aux enfants.

Pendant la communion.
Bébé, regardant avec attention le prêtre en aube distribuant les hosties, se décide à tirer maman par la robe.
Maman — Quoi donc ?
Bébé — Je voudrais aller comme tout le monde près du monsieur en chemise.
Maman — Pourquoi faire ?
Bébé — Pour qu’il me donne aussi un canard.

(Gil Blas)

Caneter

France, 1907 : Marcher d’une façon lasse, en appuyant sur l’une et l’autre hanche, à la façon des canes.

Magdelon, je suis bien malade,
J’ai les yeux caves et battus,
La face terreuse et maussade,
Les genoux maigres et pointus ;
Ceux qui me voient par la rue
Jaune comme une vieille morue,
Caneter en avant fourbu,
Estiment que c’est la vérole
Qui me fait aller en bricole
Et m’enivre sans avoir bu.

(Cyrano de Bergerac, Le Pauvre malade)

Carapater

Rossignol, 1901 : Marcher, se dépêcher.

Hayard, 1907 : Fuir, se sauver.

France, 1907 : Marcher, courir.

J’ai dix ans, quoi ! Ça vous épate ?
Ben ! c’est comm’ ça, na ! J’suis voyou,
Et dans mon Paris j’carapate
Comme un asticot dans un mou…

(Jean Richepin)

Se carapater, se sauver.

J’empoigne un gardien par sa tunique et je le prie de me dire le nom des fuyards…
— C’est Colo et Mathurin, me répondit-il.
Je n’avais pas besoin d’en entendre davantage, Mathurin, je ne le connais pas ; Colo, je le connaissais, puisque j’étais venue à Toulon pour l’aider à se carapater. Le vieux marquis me regardait ; il ne savait pas si c’était du lard ou du cochon.

(Marc Mario et Louis Launay, Vidocq)

Carotter

d’Hautel, 1808 : Jouer petit jeu ; n’être point hardi au jeu.

Larchey, 1865 : Ne vivre que de légumes. Vivre mesquinement.

Il se dépouillait de tout… Il sera très heureux de vivre avec Dumay en carottant au Havre.

(Balzac)

Larchey, 1865 : Obtenir de l’argent en tirant une carotte :

Allons, va au marché, maman, et ne me carotte pas.

Delvau, 1866 : v. a. Se servir de carottes pour obtenir de l’argent de son père, de son patron, ou de toute personne charitable. Carotter l’existence. Vivre misérablement. Carotter le service. Se dispenser du service militaire, ou autre, en demandant des congés indéfinis, sous des prétextes plus ou moins ingénieux.

Delvau, 1866 : v. n. Jouer mesquinement, ne pas oser risquer de grands coups ni de grosses sommes.

Rigaud, 1881 : Se contenter d’un léger bénéfice en exposant peu. — Carotter à la Bourse, dans les affaires. — Jouer très serré, jouer petit jeu, — dans le jargon des joueurs.

France, 1907 : Faire des dupes.

La plus hardie de ces ribaudes parait avoir été la dame des Armoises ; elle arriva à s’établir convenablement, carotta de droite et de gauche, non sans habileté, et fit souche de nombreux marmots.
Telle est la Jeanne d’Arc dont M. Lesigne prétend faire présent à la France : — reste à savoir si elle en voudra !

(Jacqueline, Gil Blas)

Carotter l’existence, mener une vie misérable. Carotter à la Bourse, spéculer sur une petite échelle.

Cascadeuse

Delvau, 1864 : Drôlesse du quartier Breda, qui se joue de l’amour et des amoureux.

Ne t’y fie pas : c’est uns cascadeuse.

(Charles Monselet)

Delvau, 1866 : s. f. Fille ou femme qui, — dans l’argot des faubouriens, — laisse continuellement la clé sur la porte de son cœur, où peuvent entrer indifféremment le coiffeur et l’artiste, le caprice et le protecteur.

Rigaud, 1881 : Femme qui court les lieux où l’on s’amuse. — Farceuse qui de la cascade n’a que la chute.

France, 1907 : Jeune personne qui a jeté son bonnet par-dessus les moulins.
Le mot est aussi employé adjectivement. On dit une toilette cascadeuse.

On voit passer la femme honnête
Qui marche en portant haut la tête,
Sur l’Boul’vard ;
On voit des p’tits jeun’s gens godiches,
Des gens pauvres et des gens riches,
On voit des gomineux, des gomineuses
Avec leurs toilettes cascadeuses,
Et l’on voit plus d’une vieille cocotte
Qui bientôt portera la hotte
Sur l’boul’vard.

(Aristide Bruant)

Casquette du Père Bugeaud

France, 1907 : Chanson militaire en Algérie, dont on a fait une marche au pas accéléré.

As-tu vu
La casquette,
La casquette !
As-tu vu
La casquette du père Bugeaud !

Casseur de portes

Halbert, 1849 : Voleur avec effraction.

Delvau, 1866 : s. m. Voleur avec effraction, — dans l’argot des voyous.

France, 1907 : Voleur avec effraction. Ils marchent ordinairement par bandes de trois, se glissent dans les maisons, s’assurent qu’il n’y a personne dans on logis, et, tandis que l’un d’eux fait le guet, les deux autres forcent la porte.

Censurer

d’Hautel, 1808 : Pour dire mettre des condition usuraires à un marché ; abuser de la bourse, de la fortune d’un ami ; faire supporter toutes les charges d’une affaire à quelqu’un ; faire le métier d’usurier.

Cerise

d’Hautel, 1808 : Ça va à la douce, comme les marchands de cerises. Réponse usitée parmi le peuple lorsqu’une personne demande à une autre des nouvelles de sa santé, de ses affaires ; pour dire que l’on se porte cahin caha, et que l’on conduit tout doucement sa barque ; par allusion avec les paysans qui viennent vendre leurs cerises à la ville et qui crient par les rues, À la douce, cerise à la douce.
On dit d’un mauvais cheval que c’est une rosse, un marchand de cerises.

Larchey, 1865 : Cheval aussi mauvais que les bidets qui portent des cerises au marché. — Un mauvais cavalier monte aussi en marchand de cerises (d’Hautel).

Fustier, 1889 : Ouvrier maçon des environs de Paris (Littré).

Messieurs, ce n’est pas là une appellation insultante ; nous appelons marchands de cerises, les ouvriers de la banlieue de Paris, ceux qui nous environnent.

(Nadaud, Journal officiel)

Cerisier

Fustier, 1889 : Petits chevaux de louage, ainsi nommés parce qu’ils portent ordinairement les cerises de Montmorency aux marchés de Paris.

Sterny sur un cerisier, Sterny en compagnie d’une grosse dame à âne.

(Soulié : Le Lion amoureux.)

Les Cerisiers de Montmorency sont les petits chevaux pacifiques qu’on loue pour se promener dans les environs ; autrefois, ils transportaient des cerises ; de là leur nom.

(Rappel, 1874. V. Littré)

Chacal

Delvau, 1866 : s. m. Zouave, — dans l’argot des soldats d’Afrique, par allusion au cri que poussent es zouzous en allant au feu.

Rigaud, 1881 : « Est un petit nom d’amitié que le maréchal Bugeaud donnait aux zouaves dans ses moments de bonne humeur, et que nous avons gardé, entre nous, comme, signe de ralliement. » (A. Arnault, Les Zouaves, acte 1)

France, 1907 : Zouave. Les régiments de zouaves étaient, dès le début, composés en grande partie d’Arabes, dont l’habitude est de pousser des clameurs sauvages en chargeant l’ennemi. Leurs cris imitaient celui du chacal, d’où leur nom.

Pan, pan, l’arbi,
Les chacals sont par ici.

(Marche des zouaves)

Chalouper

Delvau, 1866 : v. n. Danser le chahut.

Rigaud, 1881 : Marcher en balançant les épaules.

Quant à Henri de Car… tête de dogue aussi sur des épaules trapues et un corps chaloupant !…

(M. Rude, Tout Paris au café)

France, 1907 : Danser la chaloupe.

Chandelle

d’Hautel, 1808 : Trente-six, chandelles et le nez dessus, il n’y verroit pas plus clair. Se dit par exagération d’un homme sans intelligence, sans perspicacité, pour lequel les choses les plus claires et les plus simples deviennent obscures et embrouillées.
Il a passé comme une chandelle. Pour exprimer qu’une personne est morte sans crises, qu’elle a terminé doucement sa carrière ; ou qu’un malade a expiré au moment où l’on s’y attendoit le moins.
Ses cheveux frisent comme des chandelles. Se dit figurément d’une personne dont les cheveux sont plats, roides, et ne bouclent pas naturellement.
C’est un bon enfant qui ne mange pas de chandelle. Locution basse et triviale, pour faire entendre qu’un homme n’a pas l’humeur facile ; qu’il n’est pas aisé à mener ; qu’il ne se laisse pas marcher sur le pied.
Ses yeux brillent comme des chandelles. C’est-à-dire sont vifs, sémillans, pleins de feu.
Donner une chandelle à Dieu et une autre au diable. Ménager les deux partis, profiter de la mésintelligence qui règne entre plusieurs personnes.
À chaque Saint sa chandelle. Signifie qu’il faut faire des présens à chacun de ceux dont on peut avoir besoin dans une affaire.
Le jeu ne vaut pas la chandelle. Pour dire qu’une chose ne vaut pas la dépense, les frais qu’elle occasionne.
Il doit une belle chandelle au bon Dieu. Se dit de celui qui a échappé à un péril imminent, qui est revenu d’une dangereuse maladie.
On lui a fait voir mille chandelles. Se dit de quelqu’un à qui l’on a causé un grand éblouissement en le frappant rudement proche les yeux.
Cacher la chandelle sous le boisseau. Dissimuler ses opinions ; cacher son savoir faire.
Il a toujours deux chandelles qui lui pendent au nez. Se dit d’un enfant morveux ; d’un homme malpropre qui n’ayant pas soin de se moucher a continuellement des roupies au nez.
La chandelle se brûle. Se dit pour avertir quel qu’un qui perd inutilement un temps précieux.
La chandelle s’éteint. Manière figurée de dire qu’un homme approche du terme de sa carrière, qu’il s’en va mourant.
La chandelle qui va devant éclaire mieux que celle qui va derrière. Se dit de ces égoïstes : qui ne font aucun bien pendant leur vie, et se contentent seulement de faire espérer quelque chose après leur mort.
Il est bariolé comme la chandelle des rois. Voyez Barioler.

Ansiaume, 1821 : Mousquet, fusil.

Les griviers s’ont ébobis à grands coups de leurs chandelles.

Delvau, 1864 : Le membre viril, qui fond et coule trop souvent — au feu du vagin de la femme.

Voici maître curé qui vient pour allumer sa chandelle, ou pour mieux dire l’éteindre.

(Les Cent Nouvelles nouvelles)

De femmes qui montrent leurs seins,
Leurs tétins, leurs poitrines froides,
On doit présumer que tels saincts
Ne demandent que chandelles roides.

(G Coquillart)

Delvau, 1866 : s. f. Mucosité qui forme stalactite au-dessous u nez, — dans le même argot [des faubouriens].

Delvau, 1866 : s. f. Soldat en faction. Même argot [des faubouriens]. Être entre quatre chandelles. Être conduit au poste entre quatre fusiliers.

Rigaud, 1881 : Baïonnette. — Se ballader entre quatre chandelles, marcher entre quatre soldats qui vous mènent au poste.

Rigaud, 1881 : Litre de vin, bouteille. Elle est chargée d’allumer l’ivrogne.

Rigaud, 1881 : Mucosité nasale trop indépendante embrouillée avec le mouchoir. Souffler sa chandelle, se moucher avec les doigts, après reniflement.

La Rue, 1894 : Agent de police. Bouteille.

France, 1907 : Bouteille de vin. Faire fondre une chandelle, boire une bouteille de vin.

France, 1907 : Factionnaire. Soldat qui conduit quelqu’un au poste. « Être mené entre deux ou quatre chandelles. »

Le poste était à deux pas. Les soldats accoururent.
Pour la deuxième fois de la journée, voici Jean-Louis et Lapierre placés entre deux rangées de ces chandelles de Maubeuge, dont la mèche sent la poudre à canon.

(Marc Mario et Louis Launay, Vidocq)

Se dit aussi de l’agent de police.

France, 1907 : Le membre viril.

Allez donc, on vous appelle,
Votre ami tient la chandelle
Dont il veut vous éclairer.

(Gavette)

On dit éteindre sa chandelle, image parlante.

France, 1907 : Mucosité que les enfants laissent sortir de leur nez.


Argot classique, le livreTelegram

Dictionnaire d’argot classique