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À Chaillot !

Delvau, 1866 : Exclamation populaire, passée dans l’argot des drôlesses de Breda-Street, et par laquelle on se débarrasse de quelqu’un qui gêne.

Acteur (l’)

Delvau, 1864 : L’homme qui joue le rôle d’amoureux dans la comédie à deux personnages dont l’auteur a désiré garder l’anonyme, et qui porte pour titre : La Fouterie.

Lui, un acteur ! dit la dame, qui savait à quoi s’en tenir sur le jeu secret du sire. C’est un cabotin vulgaire, plutôt, qui s’est usé en jouant avec des drôlesses.

(Léon Sermet)

À peine fut cette scène achevée.
Que l’autre acteur par sa prompte arrivée,
Jeta la dame en quelque étonnement.

(La Fontaine)

Affaire de cœur

Delvau, 1864 : Coucherie, — cor étant mis là pour cunnus.

Vous êtes en affaire ? me cria-t-il à travers la porte, pendant que j’accolais ma drôlesse et la suppéditais avec énergie, — Oui, répondis-je en précipitant mes coups, je suis en affaire… de cœur.

(J. Le Vallois)

Attraper quelque chose

Delvau, 1864 : Gagner la chaude-pisse ou la vérole dans un coït malsain, avec une coureuse ou avec une honnête femme.

Que ces drôlesses-là sont souvent de bons greniers à chaudes-pisses ! ce qu’on appelle de véritables attrape-michés.

(Comte De Caylus)

Si j’attrape quéque chose, au moins j’ l’aurai pas volé.

(Lemercier de Neuville)

Avoir du chien

Delvau, 1864 : Se dit d’une femme qui a des grâces provoquantes, qui ne baise pas comme la première venue.

Il faut être sincère, même avec des drôlesses de cette espèce : Julia a du chien, beaucoup de chien.

(Lynol)

Bonjourière

Rigaud, 1881 : La femelle du bonjourier. C’est une drôlesse qui, au bal, à la promenade, incendie une dupe de ses regards, se fait conduire au domicile de la dupe et la dévalise pendant la nuit. Combien de niais, croyant à une bonne fortune, se sont réveillés, le lendemain, allégés de leur montre, de leur argent et quelquefois de leurs vêtements !

Boulevardier

Rigaud, 1881 : Fidèle habitué des boulevards, qui, pour lui, commencent sur le trottoir du grand café de la Paix et finissent à l’angle de la rue du Faubourg-Montmartre. Là est tout le Paris du boulevardier, avec ses cafés, ses restaurants et ses drôlesses. Il dédaigne le trottoir d’en face qu’il abandonne aux provinciaux et aux gens en course.

France, 1907 : Bohême journaliste ou gommeux qu’on rencontre dans les cafés du boulevard.

Brancard

Delvau, 1866 : s. m. Lorette hors d’âge, qui conduit les jeunes drôlesses dans les bons endroits, qui les traîne sur la route du vice. Argot de Breda-Street.

Rigaud, 1881 : Courtière en prostitution.

Rigaud, 1881 : Main, jambe. Serrer le brancard, serrer la main. — Brancard de laine, boiteux.

La Rue, 1894 : Prostituée. V. Biche.

Virmaître, 1894 : Un vieil adage dit que les femmes c’est comme les souliers : quand c’est vieux, ça boit. Toutes ne boivent pas ; il en est qui, trop vieilles pour continuer leur profession, instruisent les jeunes et leur apprennent les secrets du métier. Mot à mot : brancard, aller traîner les apprenties putains sur le trimard (Argot des filles).

France, 1907 : Femme galante hors de service qui initie les jeunes à son ancien métier, les brancarde sur le chemin du vice.

Cabotine

Delvau, 1866 : s. f. Drôlesse qui fait les planches au lieu de faire le trottoir.

Rigaud, 1881 : Actrice qui, sans plus de talent que le cabotin, possède une corde de plus à son arc. Elle se sert du théâtre comme d’un bureau de placement pour ses charmes. — Terme de mépris pour désigner une actrice quelconque dont on a à se plaindre ou qu’on veut blesser.

Il (le marquis de Caux) l’insultait (la marquise de Caux, la Patti)… Ainsi il a dit plusieurs fois : Maudit soit le jour où j’ai épousé une cabotine comme toi !

(Liberté du 6 août 1877, Compte rendu du procès Caux-Patti.)

France, 1907 : Mauvaise actrice, ou actrice appartenant à une troupe ambulante.

Quelques petites cabotines se font des confidences et se racontent leur premier faux pas.
— Moi, ç’a été avec mon cousin…
— Moi avec un acteur…
— Oh ! moi, dit la plus ingénue, ça a été avec deux militaires !

(Écho de Paris)

Carcan à crinoline

Delvau, 1864 : Nom que les voyous donnent aux drôlesses du quartier Breda, qui font de l’embarras avec leurs crinolines à vaste envergure sous lesquelles il y a souvent des maigreurs désastreuses.

C’est pas un de ces carcans à crinoline.

(Charles Monselet)

Cascadeuse

Delvau, 1864 : Drôlesse du quartier Breda, qui se joue de l’amour et des amoureux.

Ne t’y fie pas : c’est uns cascadeuse.

(Charles Monselet)

Delvau, 1866 : s. f. Fille ou femme qui, — dans l’argot des faubouriens, — laisse continuellement la clé sur la porte de son cœur, où peuvent entrer indifféremment le coiffeur et l’artiste, le caprice et le protecteur.

Rigaud, 1881 : Femme qui court les lieux où l’on s’amuse. — Farceuse qui de la cascade n’a que la chute.

France, 1907 : Jeune personne qui a jeté son bonnet par-dessus les moulins.
Le mot est aussi employé adjectivement. On dit une toilette cascadeuse.

On voit passer la femme honnête
Qui marche en portant haut la tête,
Sur l’Boul’vard ;
On voit des p’tits jeun’s gens godiches,
Des gens pauvres et des gens riches,
On voit des gomineux, des gomineuses
Avec leurs toilettes cascadeuses,
Et l’on voit plus d’une vieille cocotte
Qui bientôt portera la hotte
Sur l’boul’vard.

(Aristide Bruant)

Chantage

un détenu, 1846 : Vol par pédérastie.

Larchey, 1865 : Extorsion d’argent sous menace de révélations scandaleuses.

Le chantage, c’est la bourse ou l’honneur…

(Balzac)

Delvau, 1866 : s. m. Industrie qui consiste à soutirer de l’argent à des personnes riches et vicieuses, en les menaçant de divulguer leurs turpitudes ; ou seulement à des artistes dramatiques qui jouent plus ou moins bien, en les menaçant de les éreinter dans le journal dont on dispose.

Rigaud, 1881 : Mise en demeure d’avoir à donner de l’argent sous peine de révélation.

Le chantage est un vol pratiqué non plus à l’aide du poignard ou du pistolet, mais d’une terreur morale, que l’on met sur la gorge de la victime qui se laisse ainsi dépouiller sans résistance.

(A. Karr, les Guêpes, 1845)

L’inventeur du chantage est Farétin, un très grand homme d’Italie, qui imposait les rois, comme de nos jours tel journal impose tels acteurs.

(Balzac, Un grand homme de province à Paris)

France, 1907 : Extorsion d’argent sous menaces de révélations qui peuvent perdre la réputation où l’honneur. Au lieu d’être la bourse ou la vie, c’est, comme disait Balzac, la bourse où l’honneur. Le chantage a existé de tout temps et partout, mais c’est surtout en Angleterre, en raison de l’hypocrisie des mœurs, qu’il a été et est encore le plus florissant. Reculant devant un scandale qui, même l’innocence prouvée, les eût perdus dans l’estime publique, où leur eût occasionné au moins de nombreux désagréments, des gens des plus honorables se sont laissé exploiter par d’affreux gredins.

De sorte qu’avec le système de chantage, qui est ici des plus prospères, outre qu’il n’est pas de Police Court (tribunal correctionnel) où l’on ne puisse se procurer autant de faux témoins qu’on en désire à raison de deux à cinq shillings par tête, la réputation, la fortune, la liberté, l’avenir du citoyen le plus honorable se trouvent à la merci des deux premières petites drôlesses venues.

(Hector France, Préface de Au Pays des brouillards)

Cette lâche industrie du chantage s’adresse surtout aux faibles, aux timides. aux innocents. Elle a ceci de terrible qu’elle bénéficie neuf fois sur dix de l’impunité, les victimes ayant un intérêt plus grand à payer en silence qu’à porter plainte, le châtiment des coupables ayant pour répercussion l’écrasement, la honte, la disqualification, la déchéance et la ruine des victimes.

(Ed. Lepelletier, Les Secrets de Paris)

Chrétien (lait)

Larchey, 1865 : Lait baptisé, étendu d’eau.

Une douzaine de drôlesses déguisées en laitières vendent du lait trois fois chrétien.

(Privat d’Anglemont)

Cocodès

Larchey, 1865 : Jeune dandy ridicule. — Diminutif de coco pris en mauvaise part.

Ohé ! ce cocodès a-t-il l’air daim !

(L. de Neuville)

Une physiologie des Cocodès a paru en 1864.

Delvau, 1866 : s. m. Imbécile riche qui emploie ses loisirs à se ruiner pour des drôlesses qui se moquent de lui.
On pourrait croire ce mot de la même date que cocotte : il n’en est rien, — car voilà une vingtaine d’années que l’acteur Osmont la mis en circulation.

France, 1907 : Dandy ridicule qui dépense sottement la fortune que son père ou ses ancêtres lui ont laissée, ce qui rétablit l’équilibre social, en quoi le cocodès a du bon. Ce fut un acteur du nom d’Osmard qui inventa ce mot et le mit en circulation. Il le tira, sans doute, de coco, homme sans consistance, digne de mépris, dans l’argot bourgeois. Cocodès a pour féminin et digne compagne : cocodette. Ses synonymes sont nombreux : petit crevé, gommeux, poisseux, gâteux, boudiné, grelotteux, etc. ; ils peuvent être confondus sous la désignation générale de crétins.

… Les corodès et les petits crevés de l’époque, successeurs des daims, des lions et des gants jaunes qui représentaient alors la classe des élégants, n’étaient que d’affreux bonshommes étiolés, flétris, barbouillés de fard, parfumés, grasseyant et ridicules, dont le costume, pour épatant qu’il fût aux yeux de ces fantoches, n’en était pas moins laid, burlesque et contraire à tout sentiment de correction.

(Octave Uzanne, La Femme et la Mode)

Le cocodès apparut sur l’asphalte parisien vers 1863. Il portait un faux col droit très haut, englobant parfois le menton. Il semblait être né avec un carreau dans l’œil.
Le petit crevé date de 1869. Son nom qui semblerait si bien provenir de l’état d’épuisement où l’ont mis les excès, paraît cependant venir de la mode de la chemise à petits crevés que portait habituellement un élégant de cette époque. Il portait la raie au milieu et deux petites coques plaquées au cosmétique sur le front.
Le gommeux. On prétend que c’est l’ancien petit crevé, qui obséda tellement ses amis du récit de ses campagnes que ceux-ci le comparèrent à la gomme qui colle et dont on ne peut se dépêtrer. C’est à ce sentiment des désagréments de la gomme et de tout ce qui est gluant qu’on doit une variété de l’espèce des gommeux appelée :
Le poisseux. Il a vécu ce que vivent les roses. Puis, comme, en souvenir de la guerre, il avait conservé la capote militaire, qui sur son dos civil paraissait un vêtement d’hôpital lui donnant l’air infirme et maladif, il devint :
Le gâteux, et son manteau, qui descendait jusqu’à la cheville, fut appelé gâteuse, Le pantalon s’élargissait par le bas et tombait de telle sorte sur la chaussure qu’il donnait au pied toute la grâce du pied de l’éléphant. Cet animal avait par sa coiffure une supériorité incontestable sur le gâteux, dont les chapeaux minuscules atteignaient le comble du ridicule sur un corps grossi démesurément par les vêtements. Tout à coup la chrysalide sort de son cocon gâteux, et apparait :
Le boudiné, emprisonné dans des vêtements trop étroits, trop courts et atteignant les dernières limites du collant. Vrai boudin ambulant, menaçant sans cesse de faire craquer son enveloppe. Une variété de boudin, peut-être de seconde qualité, reçoit un nom particulier :
Le petit gras, auquel succéda le vibrion, qui s’effaça à son tour devant :
Le grelotteux. Cet être grelottait sous la bise, grâce aux vêtements étriqués du boudiné.

(Courrier de Vaugelas)

Cocodette

Delvau, 1866 : s. f. Drôlesse, — la femelle du cocodès, — comme la chatte est la femelle de la souris.

France, 1907 : Créature ridicule, bonne à rien qu’à s’attifer.

La cocodette est un type féminin du second Empire, comme la merveilleuse le fut du Directoire, et la lionne, de la monarchie de Juillet. Semblable à la courtisane par son faste et ses allures, elle en diffère par la régularité de sa position sociale. Son existence est une pose incessante.

(Lorédan Larchey)

Le vingt pour cent de la galette
Aboul’-le à la cocodette.

(Hogier-Grison)

En une même génération spontanée, naquirent la cocotte et la cocodette ; celle-là, hétaïre vénale, qui remplissait Paris et autres villes de joie du fracas de ses excentricités et de ses costumes aveuglants de mauvais goût ; celle-ci, au contraire, mondaine blasée, lassée, curieuse de surmenage et de bruit, qui, affectant les allures des Phrynés modernes, s’empressait d’arborer le chignon désordonné, la chevelure artificielle, carotte on queue de vache, le fard, le clinquant des parures, le jargon et l’allure canaille des Cythères parisiennes. Entre la fille de marbre, la biche en renom et la cocodette, la différence était mince : l’une luttant pour la vie, l’autre ne combattait que contre l’ennui et le vide d’une existence morne, déséquilibrée et sans autre but plus nettement défini que le plaisir.
Cocottes et cocodettes inauguraient un règne d’inélégance, de camelote, d’abâtardissement moral, et de mauvais ton.

(Octave Uzanne, La Femme et la Mode)

Croupion

Delvau, 1864 : Nom qu’on donne aux fesses.

Quel superbe croupion elle a, cette drôlesse !

(J. Le Vallois)

Décravater ses propos

France, 1907 : Avoir une conversation libre qui faut rougir et, en même temps, pâmer les petites pensionnaires du Sacré-Cœur et choque les vieilles drôlesses.

Demi-cachemire

Delvau, 1866 : s. m. Fille ou femme qui est encore dans les limbes de la richesse et de la galanterie, et qui attend quelque protection secourable pour briller au premier rang des drôlesses. Au XVIIIe siècle, en appelait ça Demi-castor. Les mots changent, mais les vices restent.

France, 1907 : Se disait, au temps où les châles des Indes étaient à la mode, des filles qui commençaient à se lancer dans la galanterie.

Drôlesse

d’Hautel, 1808 : Terme insultant et de mépris, qui équivaut à coureuse, femme dévergondée, de mauvaise vie.

Delvau, 1864 : Fille ou femme de mœurs plus que légères — qui souvent n’est pas drôle du tout, à moins qu’on ne considère comme drôleries les chansons ordurières qu’elle chante au dessert.

Mais tout n’est pas rose et billets de mille francs dans l’existence phosphorescente, fulgurante, abracadabrante de ces adorables drôlesses, qui portent leurs vingt ans sans le moindre corset.

(A. Delvau)

Delvau, 1866 : s. f. Habitante de Breda-Street, ou de toute autre Cythère, — dans l’argot des bourgeois, qui ont la bonté de les trouver drôles quand elles ne sont que dévergondées.

Delvau, 1866 : s. f. Maîtresse, concubine, — dans l’implacable argot des bourgeoises, jalouses de l’empire que ces créatures prennent sur leurs maris, avec leur fortune.

France, 1907 : Nom que des femmes vertueuses, ou supposées telles, donnent généralement à celles qui ne le sont pas. Mais à quoi tient la vertu des femmes : une affaire de tempérament, ou encore, comme l’a écrit La Rochefoucauld, l’amour de leur réputation et de leur repos.
Léon Rossignol, dans les Lettres d’un mauvais jeune honme à sa Nini, définit ainsi la drôlesse :
« C’est une femme qui quitte un beau soir l’atelier de son père, ou la loge de sa tante, et qu’on retrouve quinze jours après à Mabille ou dans les avant-scènes des Variétés, couverte de velours, de soie, de bijoux et de dentelles, que son déshonneur a payé trop largement. Elle adorait hier le pot-au-feu et le pain bis de la famille, elle les devorait, — l’honnêteté lui servait d’absinthe. Aujourd’hui, elle grignote du bout des dents les pains viennois et les perdreaux truffés des restaurants en vogue, et insulte les garçons. Elle sent le vice, elle se maquille, elle dégoûte. »

Salomon, repu de mollesses,
Étudiant les tourtereaux,
Avait juste autant de drôlesses
Que Leonidas de héros !

(Victor Hugo, Chansons des rues et des bois)

La Victoire est une drôlesse ;
Cette vivandière au flanc nu
Rit de se voir mener en laisse
Par le premier goujat venu.

(Ibid.)

Rien n’est plus rigolo que les petites filles,
À Paris. Observez leurs mines, c’est divin,
À dix, douze ans, ce sont déjà de fort gentilles
Drôlesses qui vous ont du vice comme à vingt.

(André Gill, La Muse à Bibi)

Elle est couverte d’ardoise

Delvau, 1864 : Sous-entendu : Les crapauds ne montent pas dessus. Se dit d’une femme trop belle ou trop bégueule pour qu’il n’y ait pas folie à vouloir la grimper comme une simple drôlesse.

En tenir

Delvau, 1864 : Bander pour une femme et avoir envie de la baiser ; être amoureuse d’un homme et chercher toutes les occasions de se faire baiser par lui.

Elle en tient pour toi, décidément, cette drôlesse.

(Cublize)

Épateuse

Delvau, 1866 : s. f. Drôlesse qui fait des effets de crinoline exagérés sur le boulevard, pour faire croire aux passants, — ce qui n’existe pas.

Esbrouffeuse

Delvau, 1866 : s. f. Drôlesse qui éclabousse d’autres drôlesses, ses rivales, par son luxe insolent, par ses toilettes tapageuses, par le nombre et la qualité de ses amants.

Face

d’Hautel, 1808 : Pour dire visage.
Une face réjouie. Une face enluminée. Pour dire un visage riant, enjoué et aimable. Une figure rubiconde, tels qu’on en voit aux fils de Noé.
Face d’homme fait vertu. C’est-à-dire que la présence d’un homme important et bien famé, influe beaucoup dans une affaire.

Raban et Saint-Hilaire, 1829 : Monnaie. J’ai des faces, je ne manque pas d’argent.

Larchey, 1865 : Écu à l’effigie (face) royale.

Je n’ai plus de faces. La drôlesse me chasse.

(Decourcelle)

Delvau, 1866 : s. f. Pièce de cinq centimes, — dans l’argot des faubouriens, qui peuvent ainsi contempler à peu de frais la figure du monarque régnant.

Virmaître, 1894 : Argent. Allusion à l’effigie des pièces de monnaie.
— As-tu des faces, nous irons voir jouer la misloque (Argot des voleurs).

France, 1907 : Monnaie, plus spécialement sou.

Je ne donnerais pas une face de ta sorbonne.

(Balzac)

Avoir des faces, avoir de l’argent.

Fruit vert

France, 1907 : Fillette à peine nubile et qui souvent ne l’est pas encore, fort appréciée par cela mème d’une nombreuse catégorie de messieurs.

Elle vendait à tempérament aux cocottes, prêtait sur gages, avançait les appointements aux artistes, fournissait des petites filles aux amateurs de fruits verts ; elle avait un stock de Chouards pour les Germinys, de gouvernantes discrètes pour les curés de province, une collection d’amies de pension pour dames seules ; bref, c’était une fenrrne universelle.

(Charles Virmaître, Paris oublié)

Afin d’exciter leur faiblesse,
À l’oreille des vieux pervers,
La pseudo-fleuriste, drôlesse,
Vient chantonner : fruits verts ! fruits verts !
Pomme du Nord, peau rose et blanche,
Orange et Citron du Midi,
Nous en avons, et sur la branche,
Les cueillera le plus hardi.
On traite à forfait (propre terme !),
Le plaisir se paie au comptant ;
Revenez et commandez ferme,
Monsieur, si vous êtes content.

(Pontsevrez)

Gandin

Delvau, 1864 : Imbécile bien mis qui paie les filles pour qu’elles se moquent de lui avec leurs amants de cœur. Il reste une consolation aux gandins qui grappillent dans les vignes amoureuses après ces maraudeurs de la première heure, c’est de se dire :

Qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse !

(A. Delvau)

Nous soupions au sortir du bal. Quelques gandins,
Portant des favoris découpés en jardin,
Faisaient assaut d’esprit avec des femmes rousses.

(Th. De Banville)

Larchey, 1865 : Dandy ridicule. Du nom d’un personnage de vaudeville.

L’œillet rouge à la boutonnière, Les cheveux soigneusement ramenés sur les tempes comme deux gâteaux de pommade, le faux-col, les entournures, le regard, les favoris, le menton, les bottes ; tout en lui indiquait le parfait gandin, tout, jusqu’à son mouchoir fortement imprégné d’essence d’idiotisme.

(Figaro, 1858)

Delvau, 1866 : s. m. Amorce, paroles fallaces, — dans l’argot des marchandes du Temple. Monter un gandin. Raccrocher une pratique, forcer un passant à entrer pour acheter.

Delvau, 1866 : s. m. Coup monté ou à monter, — dans l’argot des voleurs. Hisser un gandin à quelqu’un. Tromper.

Delvau, 1866 : s. m. Oisif riche qui passe son temps à se ruiner pour des drôlesses, — et qui n’y passe pas beaucoup de temps, ces demoiselles ayant un appétit d’enfer. Le mot n’a qu’une dizaine d’années. Je ne sais plus qui l’a créé. Peut-être est-il né tout seul, par allusion aux gants luxueux que ces messieurs donnent à ces demoiselles, ou au boulevard de Gand (des Italiens) sur lequel ils promènent leur oisiveté. On a dit gant-jaune précédemment.

Rigaud, 1881 : Dandy dégénéré. Homme à la mise recherchée, prétentieuse et ridicule. D’où vient-il ? Est-ce de gant ? Est-ce de l’ancien boulevard de Gand ? Est-ce du nom d’un des personnages — Paul Gandin — des Parisiens de la Décadence, de Th. Barrière ? Est-ce de gandin, attrape-nigaud, en retournant la signification : nigaud attrapé ? Est-ce de dandy, avec changement du D en G, addition d’un N et réintégration de l’Y en I ? Je ne sais. — Le gandin s’éteignit en 1867, en laissant sa succession au petit-crevé qui creva en 1873, en léguant son héritage au gommeux, qui le léguera à un autre, et ainsi de suite jusqu’à la consommation des siècles.

Rigaud, 1881 : Duperie, attrape-nigaud. Hisser un gandin à un gonse, tromper un individu. — Monter un gandin, — dans le jargon des revendeurs du Temple, signifie chauffer l’article, harceler le client pour lui faire acheter quelque chose.

Rigaud, 1881 : Fort, — dans le jargon des barrières. Il est rien gandin.

Fustier, 1889 : Honnête, convenable, gentil. Argot du peuple.

Autrefois on avait deux sous de remise par douzaine. À présent, on les prend (des pièces de cuivre) chez Touchin. Il ne donne rien, ce muffle-là. Vrai ! c’est pas gandin !

(Fournière, Sans métier)

La Rue, 1894 : Duperie. Coup monté. Riche oisif.

France, 1907 : Riche oisif, jeune fainéant dont le père a travaillé sa vie durant pour qu’il passe la sienne à ne rien faire, parasite social. C’est le successeur et l’imitateur des lions du temps de Louis-Philippe, qui succédèrent eux-mêmes aux dandys et aux fashionables de la Restauration, aux beaux de l’empire, engendrés par les incroyables et les muscadins du Directoire, fils des petits maîtres de la fin du règne de Louis XV, descendants des talons rouges et des roués de la Régence, neveux des marquis de Louis XIV. Le nom de gandin parait pour la première fois en 1854 dans une pièce de Théodore Barrière, Les Parisiens, porté par un élégant ridicule, mais il ne se répandit guère dans le publie avant 1858. Gandin vient-il du boulevard de Gand, devenu le boulevard des Italiens et qui était la promenade habituelle des jeunes et riches oisifs, ou, suivant quelques étymologistes, du patois beauceron gandin, dont les éleveurs de la Beauce désignent le jeune mouton ? La bêtise, la simplicité, la passivité du mouton adolescent qui suit pas à pas celui qui le précède, et les instincts moutonniers, l’épaisse imbécillité de ces jeunes abrutis qui se copient tous en habits, en langage et en gestes offrent quelque créance à la seconde version. Cependant le public parisien ignore le patois de la Beauce, gandin adolescent mouton est inconnu sur le boulevard, et pour cette raison nous nous en rapporterons à la première.

Cigare aux dents, lorgnon dans l’œil,
Chaussé par Fabre, habillé par Chevreuil,
Un de ces élégants dont l’esprit reste en friche,
Nommés gandins hier, cocodès aujourd’hui,
Et qui nonchalamment promènent leur ennui
Depuis la Maison d’Or jusques au Café Riche…

(J.-B. de Mirambeaux)

Adieu, gandins infects, drôlesses éhontées, vous tous, abrutis qui, depuis ma majorité, n’avez cessé de jeter un froid dans mon existence. Je vous lâche !

C’était à l’Ambigu, la jeune X… des Folies Dramatiques se pavanait dans une avant-scène en compagnie de plusieurs crétins, tous gandins, et plus bêtes les uns que les autres, par conséquent.

(Léon Rossignol, Lettres d’un Mauvais jeune homme à sa Nini)

On l’emploie adjectivement dans le sens de beau, élégant.

— Il est pourtant gandin, mon panier, insiste le gitane avec le plus pur accent du faubourg Antoine ; étrennez-moi, Monsieur, ça vaut une thune et à deux balles je vous le laisse.

(Jean Lorrain)

Gâteux

Delvau, 1866 : s. m. Journaliste sans esprit, sans style et sans honnêteté, — dans l’argot des gens de lettres, qui n’y vont pas de plume morte avec leurs confrères.

Rigaud, 1881 : Très sot, énormément bête.

France, 1907 : Imbécile.

J’ai reçu des volumes stupides avec dédicaces et sortant pour la plupart de l’usine Michel Lévy ; mes amis ont dit beaucoup de mal de moi, et quelques-uns de mes amis intimes quelque bien ; plusieurs cabotins m’ont demandé des réclames et plusieurs drôlesses des lettres, des recommandations : j’ai avalé des bocks frelatés, fumé des londrès douteux, lu des journaux idiots ; et enfin j’ai coudoyé une centaine de gâteux…

(Léon Rossignol)

Gigolette

Delvau, 1864 : Drôlesse de quinze à seize ans qui débute dans la vie en même temps que dans le vice et qui est du bois — pourri — dont on fait les putains.

La gigolette est une adolescente, une muliérocule… qui tient le milieu entre la grisette et la gandine, — moitié ouvrière et moitié-fille.

(A. Delvau)

Delvau, 1866 : s. f. Jeune fille qui a jeté sa pudeur et son bonnet pardessus les moulins, et qui fait consister son bonheur à aller jouer des gigues dans les bals publics, — surtout les bals de barrière.
Je crois avoir été un des premiers, sinon le premier, à employer ce mot, fort en usage dans le peuple depuis une quinzaine d’années. J’en ai dit ailleurs (Les Cythères parisiennes) ; « La gigolette est une adolescente, une muliéricule. Elle tient le milieu entre la grisette et la gandine, — moitié ouvrière et moitié fille. Ignorante comme une carpe, elle n’est pas fâchée de pouvoir babiller tout à son aise avec. le gigolo, tout aussi ignorant qu’elle, sans redouter ses sourires et ses leçons. »

Rigaud, 1881 : Apprentie ouvrière doublée d’une danseuse de bals publics. Comme son mâle, le gigolo, type éteint, la gigolette est venue à l’époque du succès des Mystères de Paris. C’est Rigolette encanaillée, bastringueuse, avec changement de la première lettre.

Virmaître, 1894 : Fille des faubourgs qui, à l’âge ou les autres vont encore à l’école, a déjà jeté son bonnet par dessus la Tour Eiffel. La gigolette travaille pour l’amour de l’art. Comme elle fréquente les bals publics où elle gigotte avec frénésie, l’expression gigolette est indiquée (Argot du peuple).

Rossignol, 1901 : Femme légère, au point de vue mœurs.

France, 1907 : Grisette, coureuse de bals publics, maîtresse de souteneur.
D’après Jean Richepin, autorité en la matière, gigolette viendrait de gigue qui signifie non seulement en argot, mais en français, jambe. Une gigolette est donc une femme qui joue des jambes, c’est-à-dire qui danse. Mais dans le sens attaché à ce mot, une gigolelte n’est pas seulement une danseuse, c’est surtout une gourgandine, la maîtresse d’un gigolo, une raccrocheuse enfin. Nous trouvons alors son étymologie en anglais dans les mots giglot et gigglett signifiant tous deux coureuse, fille lascive, impudique, ce qui répond à notre cas. Giglot et gigglett dérivent du saxon geagl, folâtre, gai, bruyant, peu scrupuleux en matière de morale.
Cette origine nous semble plus naturelle que celle donnée par Berey, connu comme poète argotique sous le pseudonyme de Blédort :
« Ce mot, dit-il, avec l’acceptation actuelle, existe en argot depuis une quinzaine d’années. Dans le numéro 36 du Chat Noir (sept. 1882), on trouve ce vers :

… En f’sant masser ma gigolette.

Gigolo, dont c’est le féminin, vient des pronoms personnels moi, toi, soi ; en patois, mé, té, sé ; en argot, mézigo, tésigo, sézigo ou mézig, tésig, sézig. L’argot déforme les mots par addition ou suppression ; ainsi s’est formé le mot zig, devenu par altérations successives : zigoyo, gigoyo, et enfin gigolo. »
M. François Deloncle, qui se rallie à l’opinion de Jean Richepin, a trouvé dans différents textes du XVIIe et du XVIIIe siècle les mots gigole, gigolan et gigolard, danse, dansant et danseur. Gigolette, d’après lui, n’a paru qu’en 1836.
Tout cela ne fait que confirmer l’étymologie anglaise de giglot et gigglett, femme qui aime à lever la jambe.

Autrefois, femme de rapport,
D’un’ Terreur d’la Villette
J’étais l’unique et cher trésor ;
J’étais la gigolette
À Totor,
J’étais sa gigolette…

(L’Imagier : L. D)

Dire que pendant qu’à Nanterre
Les couples se roulent à terre,
Avec des gestes immoraux
À la Morgue les gigolettes,
En voyant nos tristes binettes,
Rigolent devant les carreaux !!!

(Georges Prud’homme)

Givier de bordel

Delvau, 1864 : Petite drôlesse qui fréquente avec les polissons de son âge, en attendant que les vieux polissons fréquentent avec elle, — ce qui la conduira fatalement au bordel.

Gouapeuse

Delvau, 1864 : Petite drôlesse qui préfère la rue à l’atelier, le vagabondage au travail, et qui s’amuse avac les quéquettes des polissons de son âge en attendant l’occasion d’amuser les pines des messieurs plus âgés.

Gouine

d’Hautel, 1808 : C’est une franche gouine. Nom injurieux que l’on donne à une femme qui s’adonne au vice, à la crapule ; à une prostituée.

Delvau, 1864 : Nom qu’on donne à toute fille ou femme de mœurs trop légères, et que le Pornographe fait venir de l’anglais queen, reine — de l’immoralité ; mais qui vient plutôt de Nelly Gwinn, célèbre actrice anglaise qui avait commencé par être bouquetière, et qui, d’amant en amant, est devenue la maîtresse favorite de Charles II.

Delvau, 1866 : s. f. Coureuse, — dans l’argot du peuple, qui a un arsenal d’injures à sa disposition pour foudroyer les drôlesses, ses filles. À qui a-t-il emprunté ce carreau ? A ses ennemis les Anglais, probablement. Il y a eu une Nell Gwynn, maîtresse de je ne sais plus quel Charles II. Il y a aussi la queen, qu’on respecte si fort de l’autre côté du détroit et si peu de ce côté-ci. Choisissez !

Rigaud, 1881 : Guenon. Méchante femme.

Rossignol, 1901 : Prostituée.

France, 1907 : Fille de mauvaises mœurs, prostituée de bas étage.
Ce mot, d’origine anglaise, vient-il de la fameuse maîtresse de Charles II, la jolie Nelly Gwin, dont la basse extraction lui attira les sarcasmes haineux des dames de la cour ? Vient-il de queen, reine ? ou de l’anglo-saxon cwen, femme ? Nous laissons à de plus érudits le soin de le décider.

Mais une fois qu’ils ont conquis la palme désirée, ils t’oublient, vieille nourrice dont le lait leur sortirait encore du nez si on le pressait ; ils oublient qu’ils sont tes enfants, et ils te crachent joyeusement au visage pour complaire à cette gouine de Paris qui leur a laissé retrousser sa jupe sale et baiser sa bouche aux puanteurs d’égout !…
Oui, oui, tu n’es qu’une gouine, Paris de malheur ! Et une antique gouine, qui n’a même jamais été que cela !

(Jean Richepin)

Gourgandiner

Delvau, 1864 : Hanter les mauvais lieux et les drôlesses qui les habitent.

Delvau, 1866 : v. n. Mener une vie libertine.

Rigaud, 1881 : Courir les bals, les soupers et les hommes. — Des drôlesses qui ne font que gourgandiner.

Gueuse

d’Hautel, 1808 : Guenipe, canaille, vile prostituée.
Courir la gueuse. S’adonner à la crapule ; à de sales débauches.

Delvau, 1864 : Femme de mœurs beaucoup trop légères, qui n’est pas la femelle du gueux, — au contraire.

Quand d’un air tout de franchise
Une gueuse m’aborda

(Piron)

Delvau, 1866 : s. f. Drôlesse qui exploite le plus pur, le plus exquis des sentiments humains, l’amour, et « s’en fait des tapis de pieds », — pour employer l’abominable expression que j’ai entendu un jour sortir, comme un crapaud visqueux, de la bouche de l’une d’elles. Courir les gueuses. Fréquenter le monde interlope de Breda-Street. En 1808 on disait : Courir la gueuse.

Rigaud, 1881 : Fille publique, maîtresse qui vous trompe avec tous vos amis et même avec vos ennemis.

Monsieur est encore ennuyé à cause de sa gueuse.

(G. Lafosse)

Courir la gueuse, courir les filles.

La Rue, 1894 : Fille publique. Drôlesse sans cœur.

Rossignol, 1901 : Voir chatte.

France, 1907 : Drôlesse, fille publique.

Dire que j’aime cette gueuse !…
Elle a seize ans, la malheureuse,
Et des yeux noirs comme l’enfer,
Deux yeux de froide charmeresse,
Où jamais pitié ni tendresse
N’allumeront le moindre éclair.

(André Gill)

Courir la gueuse, fréquenter des filles de mauvaise vie.

Jeanneton

Delvau, 1864 : Synonyme de Goton. Fille de la petite vertu, servante ou grisette, qui se laisse prendre volontiers le cul par les rouliers ou par les étudiants.

Partout on vous rencontre avec des Jeannetons.

(V. Hugo) (Ruy-Blas)

Larchey, 1865 : « Servante d’auberge, fille de moyenne vertu. » — 1808, d’Hautel.

Delvau, 1866 : s. f. Fille de moyenne vertu, — dans l’argot des bourgeois, qui connaissent leur La Fontaine.

Car il défend les jeannetons,
Chose très nécessaire à Rome.

France, 1907 : Paysanne, fille vulgaire et de mauvaises mœurs. Même sens que Gothon.

Sans vous brouiller avec les roses,
Évadez-vous des Jeannetons.
Enfuyez-vous de ces drôlesses,
Derrière ces bonheurs changeants
Se dressent de pâles vieillesses
Qui menacent les jeunes gens.

(Victor Hugo, La Légende des siècles)

Pourquoi ce diminutif de Jeanne est-il devenu terme méprisant ? Sans doute parce qu’il était commun dans les campagnes et porté par nombre de servantes. Une vielle bourrée limousine le rehaussait jadis :

Baissez-vous, montagnes !
Levez-vous, vallons !
M’empêchez de voir,
Ma mie Jeanneton…

Lionne

Larchey, 1865 : « C’étaient de petits êtres féminins, richement mariés, coquets, jolis, qui maniaient parfaitement le pistolet et la cravache, montaient à cheval comme des lanciers, prisaient fort la cigarette, et ne dédaignaient pas le champagne frappé. »

(F. Deriège)

Delvau, 1866 : s. f. Femme à la mode — il y a trente ans. C’était « un petit être coquet, joli, qui maniait parfaitement le pistolet et la cravache, montait à cheval comme un lancier, prisait fort la cigarette et ne dédaignait point le Champagne frappé. » Aujourd’hui, mariée ou non, grande dame ou petite dame, la lionne se confond souvent avec celle qu’on appelle drôlesse.

France, 1907 : Femme, fille, sœur où maîtresse du lion. « C’étaient, dit Deriège, cité par Lorédan Larchey, de petits êtres féminins, richement mariés, coquets, jolis, qui maniaient parfaitement le pistolet et la cravache, montaient à cheval, prisaient la cigarette. » Si le type n’est pas complètement disparu, le mot est dors d’usage.

Lancée par l’hymen dans une carrière brillante, elle fut bientôt citée parmi les divinités de la mode parisienne, et aujourd’hui elle figure avec avantage dans cette élite de merveilleuses que l’on rencontre à toutes les solennités élégantes ; infatigables amazones, dédaignant les paisibles récréations de leur sexe et abdiquant le doux empire des grâces discrètes pour suivre nos dandys à la course et se mêler aux grandes et aux petites manœuvres du Jockey-Club ; reines du monde cavalier, que l’on a surnommées les Lionnes, pour rendre hommage à la force, à l’intrépidité et à l’inépuisable ardeur dont elles donnent chaque jour tant de preuves.

(Eugène Guinot)

Loger rue du Croissant

Delvau, 1866 : v. n. Avoir pour femme une drôlesse qui donne dans le contrat autant de coups de canif qu’il y a de jours dans l’année.

Virmaître, 1894 : Si tous les maris cocus devaient rester rue du Croissant, il faudrait prolonger cette rue jusqu’à Vincennes (Argot du peuple). V. Joseph. N.

France, 1907 : Cohabiter avec une femme qui s’écrie en voyant les cornes du croissant de la lune ou celles d’un bœuf : « Ciel ! mon mari ! »

Lorette

Delvau, 1864 : Femme entretenue par Monseigneur Tout-le-Monde, et qui habite volontiers dans les environs de l’église de notre dame de Lorette. D’où son nom, qui lui a été donné par Nestor Roqueplan.

Je suis coquette
Je suis lorette
Reine du jour, reine sans feu ni lieu !
Eh bien ! J’espère
Quitter la terre
En mon Hotel… Peut-être en l’Hotel-Dieu

(G. Nadaud)

Larchey, 1865 : « C’est peut-être le plus jeune mot de la langue française ; il a cinq ans à l’heure qu’il est, ni plus ni moins, l’âge des constructions qui s’étendent derrière Notre-Dame-de-Lorette, depuis la rue Saint-Lazare jusqu’à la place Bréda, naguère encore à l’état de terrain vague, maintenant entourée de belles façades en pierres de taille, ornées de sculptures. Ces maisons, à peine achevées, furent louées à bas prix, souvent à la seule condition de garnir les fenêtres de rideaux, pour simuler la population qui manquait encore à ce quartier naissant, à de jeunes filles peu soucieuses de l’humidité des murailles, et comptant, pour les sécher, sur les flammes et les soupirs de galants de tout âge et de toute fortune. ces locataires d’un nouveau genre, calorifères économiques à l’usage des bâtisses, reçurent, dans l’origine, des propriétaires peu reconnaissants, le surnom disgracieux, mais énergique, d’essuyeuses de plâtres. l’appartement assaini, on donnait congé à la pauvre créature, qui peut-être y avait échangé sa fraîcheur contre des fraîcheurs. À force d’entendre répondre « rue Notre-Dame-de-Lorette » à la question « où demeurez-vous, où allons-nous ? » si naturelle à la fin d’un bal public, ou à la sortie d’un petit théâtre, l’idée est sans doute venue à quelque grand philosophe, sans prétention, de transporter, par un hypallage hardi, le nom du quartier à la personne, et le mot Lorette a été trouvé. Ce qu’il y a de certain, c’est qu’il a été lithographié pour la première fois par Gavarni, dans les légendes de ses charmants croquis, et imprimé par Nestor Roqueplan dans ses Nouvelles à la main. Ordinairement fille de portier, la Lorette a eu d’abord pour ambition d’être chanteuse, danseuse ou comédienne ; elle a dans son bas âge tapoté quelque peu de piano, épelé les premières pages de solfège, fait quelques pliés dans une classe de danse, et déclamé une scène de tragédie, avec sa mère, qui lui donnait la réplique, lunettes sur le nez. Quelques-unes ont été plus ou moins choristes, figurantes ou marcheuses à l’Opéra ; elles ont toutes manqué d’être premiers sujets. Cela a tenu, disent-elles, aux manœuvres d’un amant évincé ou rebuté ; mais elles s’en moquent. Pour chanter, il faudrait se priver de fumer des cigares Régalia et de boire du vin de Champagne dans des verres plus grands que nature, et l’on ne pourrait, le soir, faire vis-à-vis a la reine Pomaré au bal Mabile pour une polka, mazurka ou frotteska, si l’on avait fait dans la journée les deux mille battements nécessaires pour se tenir le cou-de-pied frais. La Lorette a souvent équipage, ou tout au moins voiture. — Parfois aussi elle n’a que des bottines suspectes, à semelles feuilletées qui sourient à l’asphalte avec une gaîté intempestive. Un jour elle nourrit son chien de blanc-manger ; l’autre, elle n’a pas de quoi avoir du pain, alors elle achète de la pâte d’amandes. Elle peut se passer du nécessaire, mais non du superflu. Plus capable de caprice que la femme entretenue, moins capable d’amour que la grisette, la Lorette a compris son temps, et l’amuse comme il veut l’être ; son esprit est un composé de l’argot du théâtre, du Jockey Club et de l’atelier. Gavarni lui a prêté beaucoup de mots, mais elle en a dit quelques-uns. Des moralistes, même peu sévères, la trouveraient corrompue, et pourtant, chose étrange ! elle a, si l’on peut s’exprimer ainsi, l’innocence du vice. Sa conduite lui semble la plus naturelle du monde ; elle trouve tout simple d’avoir une collection d’Arthurs et de tromper des protecteurs à crâne beurre frais, à gilet blanc. Elle les regarde comme une espèce faite pour solder les factures imaginaires et les lettres de change fantastiques : c’est ainsi qu’elle vit, insouciante, pleine de foi dans sa beauté, attendant une invasion de boyards, un débarquement de lords, bardés de roubles et de guinées. — Quelques-unes font porter, de temps à autre, par leur cuisinière, cent sous à la caisse d’épargne ; mais cela est traité généralement de petitesse et de précaution injurieuse à la Providence. » — Th. Gautier, 1845.

Delvau, 1866 : s. f. Fille ou femme qui ne vit pas pour aimer, mais au contraire, aime pour vivre. Le mot a une vingtaine d’années (1840), et il appartient à Nestor Roqueplan, qui a par un hypallage audacieux, ainsi baptisé ces drôlesses du nom de leur quartier de prédilection, — le quartier Notre-Dame-de-Lorette.

Rigaud, 1881 : Femme galante, femme entretenue. M. Prudhomme l’appelle « la moderne hétaïre ». Le mot a été créé en 1840 par Nestor Roqueplan.

Comme Vénus aphrodite de l’écume des flots, la lorette était née de la buée des plâtres malsains, là-haut, dans les quartiers bâtis en torchis élégants, la petite Pologne des femmes. Roqueplan s’était fait son parrain ; Balzac son historien ; Gavarni sa marchande de mots et de modes.

(Les Mémoires du bal Mabille)

Qu’est-ce que la lorette ? C’est la loi du divorce rétablie et, pour plus d’un mari, je le dis avec tristesse, la patience du mariage… La lorette n’est ni fille, ni femme, à proprement parler. C’est une profession c’est une boutique.

(Eug. Pelletan, La nouvelle Babylone)

Elle a un père à qui elle dit : Adieu papa ; tu viendras frotter chez moi dimanche. — Elle a une mère qui prend son café quotidien sur un poêle en fonte.

(Ed. et J. de Goncourt)

Il y a mille et une manières, en apparence de devenir lorette, mais au fond c’est la même. Une pauvre fille que l’on vend, une pauvre fille que l’on trompe.

(Paris-Lorette)

Une lorette, parlant d’un entreteneur pour lequel elle a du goût, dit : « Mon homme » ; l’entreteneur qu’elle considère et respecte est son monsieur ; quant à l’entreteneur pur et simple, quoi qu’il fasse, et quoi qu’il donne, il n’est jamais qu’un mufle.

(Idem)

Aujourd’hui les lorettes célèbres de 1840 ont vieilli. Elles comptent leur dépense avec leurs cuisinières, prennent l’omnibus quand il pleut, et élèvent des oiseaux. La lorette pure est maintenant un type évanoui, une race disparue.

(Paris à vol de canard.)

France, 1907 : Femme galante d’un certain luxe de tenue. Le mot a été mis à la mode par Nestor Roqueplan, vers 1840, à cause du nombre considérable de ces filles dans le quartier de Notre-Dame-de-Lorette. « L’ensemble des rues de ce quartier, écrivait-il, s’appelle le quartier des Lorettes, et, par extension, toutes ces demoiselles reçoivent dans le langage de la galanterie sans conséquence le nom de lorettes. » Le quartier est à peu près resté le même, mais le mot n’est plus guère employé que par les provinciaux.

Lorette, dit Balzac, est un mot décent inventé pour exprimer l’état d’une fille ou la fille d’un état difficile à nommer et que, dans sa pudeur, l’Académie a négligé de définir, vu l’âge de ses quarante membres. Quand un nom nouveau répond à un cas social qu’on ne pouvait pas dire sans périphrase, la fortune de ce mot est faite. Aussi la lorette passa-t-elle dans toutes les classes de la société, même dans celles où ne passera jamais une lorette.

Les lorettes habitent invariablement rue Notre-Dame-de-Lorette, rue Bréda, rue du Helder, rue Taitbout, rue Neuve-des-Mathurins ou rue Richer. Elles ne traversent jamais la Seine et s’écartent peu de la zone des boulevards. Elles savent Barême par cœur, jouent à la Bourse, roulent équipage, éclaboussent ceux qui vont à pied, et m’admettent dans leur salon que les hommes du meilleur monde… Elles ont les hommes en profond mépris et m’estiment que les coupons de la Banque de France.

(Ces Dames. — Physionomies parisiennes)

L’autre jour, j’ai entendu faire la définition suivante d’une lorette par la petite fille d’une portière de la place Vintimille :
— Une lorette, a-t-elle dit, c’est une dame qu’a une chemise sale, emprunte dix sous à mon papa, porte des jupons bariolés comme des drapeaux, ses bijoux au clou quand elle en a, et des plumes à son chapeau. À quarante ans, elle est ouvreuse aux Délassements-Comiques.
J’ai interrogé l’enfant terrible dans le but de savoir de qui elle tenait des renseignements aussi exacts.
— Monsieur, m’a-t-elle répondu naïvement, je le sais mieux que vous, puisque c’est arrivé à ma sœur.

(Léon Rossignol, Lettres d’un Mauvais Jeune homme à sa Nini)

Enfin, dans la catégorie des clandestines, c’est-à-dire parmi des filles dont l’insoumission à la police des mœurs est continuelle, toutes, depuis la riche lorette jusqu’à la pierreuse, sont dans la nécessité de se faire protéger. On conçoit alors que la position sociale des souteneurs doit varier autant que celle dans laquelle les filles se sont elles-mêmes placées.

(Léo Taxil, La Prostitution contemporaine)

Loupeur, loupeuse

Rigaud, 1881 : Vaurien, drôlesse ; bambocheur, bambocheuse.

France, 1907 : Fainéants, débauchés.

La salle Colbus a une physionomie toute particulière parmi les bals de Paris. Sa clientèle est étrange et redoutable. Escarpes et souteneurs s’y rencontrent avec les bohèmes de la Villette, les loupeurs des fortifs, les rôdeurs du boulevard dit extérieur.

(Edmond Lepelletier)

— C’est drôle que ça fasse toujours plaisir de parler du temps où l’on était malheureux. Nom d’un chien ! je suis contente de me retrouver avec toi, tout de même ! Tu te souviens à l’école, chez les sœurs, tu faisais mes devoirs. J’étais rien loupeuse ! Et puis les pommes vertes que j’apportais et que nous allions manger dans les lieux…

(L.-V. Meunier, Chair à plaisir)

Rôdeurs, loupeurs, souteneurs, filles se pressaient autour des tables, retentissantes du choc des verres et du tumulte des conversations. Toutefois, dans cette cohue patibulaire, pas une blouse, pas un prolétaire. Tous gens comme il faut, portant le vêtement de drap bourgeois. Telle est la sévère étiquette du lieu (le caveau des halles).

(Louis Barron, Paris étrange)

Manière

d’Hautel, 1808 : Cela frise un peu la manière. Pour, est trop affecté.
Il a été étrillé de la bonne manière. Pour, il a été bien maltraité ; il a beaucoup perdu dans cette entreprise.
Par manière d’acquit. Négligemment ; sans avoir l’air d’y toucher.

Delvau, 1864 : Se dit du faire particulier aux femmes galantes qui, souvent, ont autant de manières que les plus illustres artistes, — première manière, seconde manière, etc.

Changer de masque, c’est fort mal
Quand on n’est plus dans l’ carnaval,
P’t-être aussi qu’ vous changez d’ manière
Et qu’aux femmes vous voulez plaire ;
Ce s’rait deux bons goûts à la fois.
J’ vous crois fait’ pour en avoir trois.

(Béranger)

Delvau, 1866 : s. f. Façon de se conduire avec les hommes, — dans l’argot des drôlesses habiles, qui ont ainsi comme les grands artistes, leur première, leur seconde, leur troisième manière. Le cynisme en paroles et en actions peut être la première manière d’une courtisane, et la pudicité, voire l’honnêteté, sa troisième manière, — la plus remarquable et la plus dangereuse.

Mère d’occasion

Delvau, 1866 : s. f. Chaperon que se choisit une actrice jeune qui veut se faire respecter — des gens pauvres. C’est ordinairement une vieille drôlesse chevronnée par le vice.

Dont le menton fleurit et dont le nez trognonne,

et dont la principale fonction consiste à conclure les marchés avec les nobles étrangers attirés autour de sa fille — adoptive — comme les papillons autour d’une lampe.

Virmaître, 1894 : Les mendiantes louent à des industriels du quartier Mouffetard des petits enfants qu’elles traînent dans les rues pour exciter la charité publique. Ces enfants changent chaque jour de mère ; de là mère d’occasion ou de rencontre (Argot du peuple). N.

France, 1907 : Mendiante qui loue de petits enfants pour les traîner avec elle dans les rues afin d’exciter la pitié.

Miroir aux alouettes

Delvau, 1864 : Pièce d’or que l’on fait briller dans un bal et sur laquelle les drôlesses tombent toutes rôties — par le désir.

Monteuse de coups

Delvau, 1866 : s. f. Drôlesse qui joue du sentiment avec plus ou moins d’habileté et s’en fait plus ou moins de revenus.

Rigaud, 1881 : Comédienne en chambre, femme capable de faire voir à ses amants la lune en plein midi ; femme qui joue la comédie de l’amour.

Mourir (tu t’en ferais) !

Rigaud, 1881 : Tu ne le voudrais pas. Cela est au-dessus de tes forces. — Expression dont le peuple a abusé comme : de tant d’autres et qu’il mettait : à toutes sauces. — Voulez-vous m’embrasser ? demandait un jeune homme timide à une drôlesse. — Tu t’en ferais mourir. — Voulez-vous m’accompagner jusqu’à la Bastille à pied ? — Tu t’en ferais mourir.

Musardine

Delvau, 1864 : Drôlesse qui hante les Concerts-Musard, où le miché donne plus qu’ailleurs.

On dit une musardine, comme jadis on disait une lorette.

(Albéric Second)

Larchey, 1865 : Habitué femelle des Concerts-Musards, de 1858 à 1860.

On dit une musardine, comme jadis on disait une lorette.

(A. Second)

Delvau, 1866 : s. f. Habituée des Concerts-Musard, — où n’allait pas précisément la fine fleur de l’aristocratie féminine. Le mot a été créé par Albéric Second en 1858.

France, 1907 : Habituée des bals Musard. Albéric Second mit en circulation vers 1858 ce mot qui remplaça pendant quelque temps lorette dans le langage boulevardier.

Nichonnette

Delvau, 1866 : s. f. Drôlesse à la mode, coiffée à la chien. Argot de gens de lettres.

Noce

d’Hautel, 1808 : Servez-moi aujourd’hui, je vous servirai le jour de vos noces. Se dit en plaisantant, et amicalement, pour engager quelqu’un à vous rendre un petit service.
Voyage de maître, noces de valets. Signifie que c’est alors que les valets font bonne chère.
Il est arrivé comme tabourin à noces. Pour dire, fort à propos.
Il y va comme à des noces. Se dit d’un homme qui s’acquitte gaiement d’un travail rude et pénible ; d’un soldat qui va de bon cœur au combat.
Jamais noces sans lendemain.

Larchey, 1865 : Débauche. — Allusion aux excès qui accompagnent les noces de campagne.

V’là deux jours que je fais la noce.

(H. Monnier)

Pour y refaire leur santé délabrée par la noce.

(De Lynol)

Delvau, 1866 : s. f. Débauche de cabaret, — dans l’argot du peuple. Faire la noce. S’amuser, dépenser son argent avec des camarades ou avec des drôlesses. N’être pas à la noce. Être dans une position critique ; s’ennuyer.

Rigaud, 1881 : Amusements ; débauche. — Faire la noce, faire une noce, nocer, s’amuser, courir les femmes, les cabarets, souvent au détriment du travail.

France, 1907 : Amusement, festin, ripailles. Faire la noce, mener joyeuse vie. « Les jeunes gens qui arrivent du fond de leur provines à Paris commencent par y faire la noce. C’est le début de toute carrière. Les plus graves magistrats ont passé par là. »

La noce ?… Eh bien ! la voilà, la noce, avec ces quatre ou cinq malheureuses qui ne mangent pas à leur faim et boivent plus qu’à leur soif, avec ces robes voyantes et dépenaillées qui cachent le manque de linge, avec ces petits souliers dont les talons se décollent et où l’eau entre, avec la mangeaille à crédit, la parfumerie au rabais, l’huissier qui guette, le « clou » qui attend, la phitisie qui empoigne, — et la condamnation à l’homme à perpétuité !

(Séverine)

Au claque le jour de la noce,
Flanque-t’en une rude bosse.

(Hogier-Grison)

Noceuse

Delvau, 1864 : Fille qui a jeté son bonnet par-dessus les moulins de Montmartre et qui l’a remplacé par un bouchon de paille signifiant clairement, même pour les aveugles ; qu’elle est à vendre — et pas du tout à louer.

Ce sont là nos dignes femelles !
Ce sont nos sœurs,
Et l’on nous méprise autant qu’elles :
Aux noceuses vont les noceurs !

(Parnasse satyrique)

Delvau, 1866 : s. f. Drôlesse de n’importe quel quartier, qui fuit toutes les occasions de travail et recherche tous les prétextes à plaisir.

Paillasson

Delvau, 1864 : Homme trop porté sur son membre ; libertin à qui la qualité importe peu, pourvu qu’il ait la quantité.

J’ pine à l’œil et j’ m’en fais gloire,
C’est mon gout d’êtr’ paillasson.

(Chanson anonyme moderne)

Delvau, 1866 : s. m. Libertin, — dans l’argot du peuple. Signifie aussi souteneur de filles. Mais le premier sens est le plus usité, et depuis plus longtemps, comme en témoigne ce passage d’une chanson qui avait, sous la Restauration, la vogue qu’a aujourd’hui la chanson de l’Assommoir :

Chaque soir sur le boulevard
Ma petit’ femm’ fait son trimar,
Mais si elle s’port’ sus l’paillasson,
J’lui coup’ la respiration :
Je suis poisson !

Rigaud, 1881 : Homme aimé un moment pour lui-même, — dans le jargon des filles.

Celui avec lequel elle passe un caprice, auquel ce se donne sans lui demander de l’argent, un paillasson.

(Paris-vivant, La Fille. 1858)

Rigaud, 1881 : Libertin qui ne craint pas de se frotter à toutes les paillasses des drôlesses.

Paillasson, quoi ! cœur d’artichaut. C’est mon genre : un’ feuill’ pour tout l’monde. Au jour d’aujourd’hui, j’gob’ la blonde ; Après-d’main, c’estlabrun’qu’im’faut.

(La Muse à Bibi, Le Paillasson)

La Rue, 1894 : Libertin. Amant de cœur.

France, 1907 : Amant d’une fille publique, d’une paillasse.

C’est d’nature, on a ça dans l’sang :
J’suis paillasson ! c’est pas d’ma faute,
Je m’fais pas plus marioll’ qu’un aut’e,
Mon pèr l’était ; l’Emp’reur autant !

(André Gill, La Muse à Bibi)

France, 1907 : Chevelure. N’avoir plus de paillasson à la porte, être chauve.

— Eh ben ! en v’là un vieux gâteux avec son crâne à l’encaustique ! S’il avait des cheveux, il serait encore assez réussi. Mais il n’a plus de fil sur la bobine, plus de crin sur la brosse, plus de gazon sur le pré ; il a le caillou déplumé, quoi ! Enfin, n’y a plus de paillasson à la porte.

(Baumaine et Blondelet)

France, 1907 : Petite pièce en un acte donnée avant une grande, autrement dit : lever de rideau.

Pailletée

Delvau, 1866 : s. f. Drôlesse du boulevard, — dans l’argot des voyous, qui sont souvent les premiers a fixer dans la langue une mode ou un ridicule. Pour les curieux de 1886, cette expression voudra dire qu’en 1866 les femmes du monde interlope portaient des paillettes d’or partout, sur leurs voilettes, dans leurs cheveux, sur leurs corsages, etc. Elle a été employée pour la première fois en littérature par M. Jules Claretie. J’ai entendu aussi un voyou s’écrier, en voyant passer dans le faubourg Montmartre une de ces effrontées drôlesses qui ne savent comment dépenser l’or qu’elles ne gagnent pas : Ohé ! la Dantzick.

France, 1907 : On appelait ainsi vers 1866 les filles et femmes de mœurs légères qui portaient des paillettes d’or ou de clinquant sur leur voilette, leur corsage, et jusque dans leurs cheveux. Ce mot, d’après Alfred Delvau, aurait été employé la première fois en littérature par Jules Claretie.

Pas grand’chose

Larchey, 1865 : Personne de médiocre vertu.

Tu as filé avec ta pas grand’chose.

(P. de Kock)

Delvau, 1866 : s. f. Drôlesse, bastringueuse, vaurienne.

Delvau, 1866 : s. m. Fainéant ; homme sans moralité et sans courage, vaurien.

Pêche à quinze sous

Delvau, 1866 : s. f. Lorette de premier choix, — dans l’argot des cens de lettres, qui consacrent ainsi le souvenir du demi-Monde d’Alexandre Dumas fils.

Rigaud, 1881 : Pécheresse du dessus du panier… de la prostitution. — Métaphore du cru Dumas fils, tonneau du Demi-Monde.

Je sais bien qu’on n’a encore aujourd’hui qu’une médiocre estime pour le panier des pêches à quinze sous.

(Ed. Texier, Les Choses du temps présent)

N’étaient-elles pas plus sympathiques, ces filles de Paris… que toutes ces drôlesses, pêches à quinze sous de Dumas fils ?

(Maxime Rude)

France, 1907 : Prostituée de premier choix ; la fleur du panier de Vénus.
Cette expression appartient à Alexandre Dumas fils.

C’était à la Comédie-Française, le soir de la reprise du Derni-Monde. On voyait là tout le champ familier des nobles et purs castors et même une jolie variété de pêches à quinze sous.

(Dubut de Laforest)

Petite chatte

Delvau, 1866 : s. f. Drôlesse qui joue avec le cœur des hommes comme une véritable chatte avec une véritable souris, — dans l’argot de M. Henri de Kock, romancier, élève et successeur de son père.

Pieuvre

Delvau, 1866 : s. f. Petite dame, femme entretenue, — dans l’argot des gens de lettres, qui disent cela depuis l’apparition des Travailleurs de la mer, où V. Hugo décrit si magistralement le combat de Giliatt contre un poulpe monstrueux. L’analogie est heureuse : jamais les drôlesses n’ont été plus énergiquement caractérisées.

Rigaud, 1881 : Femme galante. Ainsi désignée en 1866, en souvenir de la pieuvre des Travailleurs de la mer de V. Hugo.

Pouffiasser

Delvau, 1866 : v. n. Mener une conduite déréglée — quand on est femme. Fréquenter avec les drôlesses — quand on est homme.

Pré-Catelanière

Delvau, 1866 : s. f. Petite dame, drôlesse, habituée de bals publics, du pré Catelan et de Mabille. Hors d’usage.

Protecteur

Delvau, 1864 : Monsieur bien mis qui consent à mettre une fille dans ses meubles et à oublier tout les mois, dans le tiroir de l’un d’eux, quelques billets de banque destinés à l’entretien de cette fille — de de son amant de cœur.

Ces belles drôlesses… qui viennent de la rive droite de la Seine, du pays où les protecteurs fleurissent.

(A. Delvau)

Delvau, 1866 : s. m. Galant homme qui entretient une femme galante. On dit aussi Milord protecteur. Les actrices disent Bienfaiteur.

France, 1907 : Amant payant d’une fille entretenue.

France, 1907 : Personnage en vue grâce à l’influence duquel on obtient l’ouverture d’un cercle, qui le protège quand il est menacé et pare quand il le peut les tuiles qui pourraient s’y abattre.

… Dans une ville comme Paris, tous les paresseux, tous les ratés, tous les déclassés, tous les révoqués et tous les défroqués savent s’arranger pour vivre des cercles… Le protecteur est un personnage officiel ou officieux. Il est sénateur, député, conseiller municipal, général, préfet, magistrat, homme de lettres, journaliste, académicien, etc., etc. Il touche pour ses… voitures une somme ronde, une redevance mensuelle et reçoit des actions libérées du cercle. Il existe à Paris un grand nombre de ces protecteurs, et, s’il nous était permis d’en publier les noms, il y aurait de grandes surprises !…

(Hogier-Grison, Pigeons et Vautours)

Punaise

d’Hautel, 1808 : Plat comme une punaise. Se dit de celui qui a le ventre creux ; et d’un lâche, d’un poltron, d’un homme bas, flatteur et rampant.

Vidocq, 1837 : s. f. — Femme de mauvais ton, fille publique du dernier rang.

Delvau, 1864 : Femme de mauvaise vie. — J’aurais cru ce mot moderne dans cette acception : je l’ai retrouvé dans une épigramme de Sygognes :

Lise, cette insigne punaise,
Me fait montre de ses ducats,
Et c’est afin que je là baise :
Mais qu’elle ne l’espère pas.

Une cocotte arrête une voiture, monte dedans, et dit au cocher d’une voix de duchesse : « Cocher, au bois ! » — « Au bois de lit, punaise ! » crie un voyou !

(A. Delvau)

Delvau, 1866 : s. f. Femme hargneuse, acariâtre, puante de méchanceté, — dans l’argot du peuple, qui ne se doute pas qu’il se sert là de l’expression même employée par le prince des poètes latins : Cimex, dit Horace.

Delvau, 1866 : s. f. Fille ou femme de mauvaises mœurs, — dans l’argot des gens de lettres. Encore une punaise dans le beurre ! Encore une drôlesse qui du trottoir passe sur les planches d’un petit théâtre pour y faire des hommes plus respectables, — comme argent.
Cette expression sort du théâtre du Petit Lazari. On jouait une pièce à poudre (une pièce à poudre à Lazari !). La soubrette entre en scène, va droit à une armoire, l’ouvre et recule en s’écriant : « Madame la marquise ! encore une punaise dans le beurre ! » L’auteur de la pièce, qui n’avait pas écrit cette phrase, fut très étonné ; mais le public, habitué aux choses abracadabrantes, ne fut pas étonné du tout. C’était une interpolation soufflée dans la coulisse par Pelletier, un acteur affectionné des titis.

Delvau, 1866 : s. f. Fleur de lit, — dans l’argot des voyous, qui ne sont pas précisément légitimistes.

Rigaud, 1881 : Sale femme ; sale fille publique.

La Rue, 1894 : Femme acariâtre. Basse prostituée. Lentille.

Virmaître, 1894 : Cette expression date de 1862 ; elle est due à un voyou. Sur le boulevard Montmartre, une fille hèle un cocher.
— Au Bois, lui dit-elle.
— Au bois de lit, punaise, fait le gamin.
Le mot est resté (Argot du peuple).

Rossignol, 1901 : Méchante femme.

Hayard, 1907 : Femme publique.

France, 1907 : Femme hargneuse, sale et méchante ; argot populaire.

France, 1907 : Fille ou femme de mauvaise vie. « Punaise dans le beurre. » Se dit d’une fille qui de l’asphalte monte sur les planches.

Cette expression, dit Alfred Delvau, sort du théâtre du Petit Lazari. On jouait une pièce à poudre ; la soubrette entre en scène, va droit à une armoire, l’ouvre et recule en s’écriant : « Madame la marquise ! encore une punaise dans le beurre ! » L’auteur de la pièce, qui n’avait pas écrit cette phrase, fut très étonné : mais de public, habituée aux choses abracadabrantes, ne fut pas étonné du tout. C’était une interpolation soufflée dans la coulisse par Pelletier, un acteur affectionné des titis.

France, 1907 : Nom que les républicains et bonapartistes donnaient à fleur de lis emblème royaliste et que le roi Louis XVIII avait rapportée de Gand avec la charte et mise partout jusque sur les boutons des collégiens.

Reporter à femmes

France, 1907 : Journaliste chargé spécialement de renseigner les lecteurs sur les faits et gestes des courtisanes à la mode.

Terminons cette variété… par ce grand diable de reporter à femmes, fournisseur breveté des feuilles pornographiques… Les drôlesses friandes de scandales le tutoient et lui offrent à souper en échange de quelques lignes ou d’une biographie.

(A. Sirven)

Rossaille

Rigaud, 1881 : Rosse, mauvais cheval, — dans le jargon des maquignons.

France, 1907 : Rosse, drôlesse.

— Dieu merci ! on ne peut pas me reprocher d’avoir des idées étroites, et je comprends très bien que mon fils ne veuille pas faire ce que je fais… Moi-même, je n’ai jamais voulu prendre le métier de mon père… Il était dans les huiles, je suis dans les tissus, ça ne se ressemble pas. J’admets très bien qu’on puisse avoir des goûts spéciaux, des aptitudes, en un mot, une vocation. Mais c’est lui-même qui a demandé à être avocat ; alors, qu’il nous laisse tranquilles. Non, vois-tu, je vais te dire ce qu’il y a au fond de tout cela : il y a encore quelque drôlesse, quelque rossaille…

(Maurice Donnay)

Rupine

anon., 1827 : Dame.

Raban et Saint-Hilaire, 1829 : Dame comme il faut.

Bras-de-Fer, 1829 : Dame.

Halbert, 1849 : Dame bien mise.

Delvau, 1866 : s. f. Drôlesse, fille à grands tralalas de toilette et de manières.

Sangsurer

Delvau, 1866 : v. a. Faire de nombreuses saignées à la bourse de quelqu’un, — dans l’argot des ouvriers, pour qui les parasites sont des sangsues. Se sangsurer. Se ruiner pour élever un enfant ou pour entretenir une drôlesse.

Sauteuse

Raban et Saint-Hilaire, 1829 / Halbert, 1849 : Puce.

Delvau, 1866 : s. f. Drôlesse.

Rigaud, 1881 : Drôlesse, voleuse.

La Rue, 1894 : Puce.

Virmaître, 1894 : Puce. Elle saute, en effet, sans cesse (Argot du peuple).

France, 1907 : Prostituée, fille de mœurs équivoques.

Tireuse de vinaigre

Delvau, 1866 : s. f. Femme de mauvaises mœurs ; drôlesse, — dans l’argot du peuple.

La Rue, 1894 : Prostituée.

France, 1907 : Prostituée. Cette expression que donne Le Roux dans son Dictionnaire, est tombée en désuétude.

Tocandine

Delvau, 1866 : s. f. Femme entretenue ; drôlesse à la mode, — toquée. Le mot date de 1856-57.

France, 1907 : Vieille coquette s’attifant comme une jeune ; vieille femme galante et excentrique. Ce mot qu’Alfred Delvau traduit par femme entretenue, drôlesse à la mode, date de 1856-57. Argot populaire.

Toquadeuse

Delvau, 1866 : s. f. Drôlesse qui s’amuse à la moutarde du sentiment au lieu de songer aux protecteurs sérieux.

Toupie

d’Hautel, 1808 : Au propre, jouet d’enfant. Au figuré, terme de mépris, qui sert à désigner une femme tombée dans la plus vile prostitution.

Halbert, 1849 : Femme sans mœurs.

Delvau, 1864 : Femme de mauvaise vie, mais de bonne volonté, qu’on fait tourner comme l’on veut — en y mettant le prix.

Misère et corde ! c’est déjà des histoires pour des toupies.

(Gavarni)

Larchey, 1865 : Femme de peu, tournant en toutes mains, comme une toupie. — Usité dès 1808.

L’insolent traite sa grande sœur de toupie.

Colmance.

Delvau, 1866 : s. f. Fille ou femme de mauvaise vie, qui tourne au gré du premier venu, — dans l’argot du peuple, cruel pour les drôlesses, ses filles. Les voyous anglais emploient la même expression (gig) à propos des mêmes créatures.

Delvau, 1866 : s. f. La tête, — dans l’argot des faubouriens. Avoir du vice dans la toupie. Être très malin, savoir se tirer d’affaire.

Rigaud, 1881 : Femme de mauvaise vie. — Elle tourne comme une toupie dans les bras de tous les hommes.

Fustier, 1889 : Dame d’un jeu de cartes.

La Rue, 1894 : La tête. Femme méchante ou de mauvaises mœurs.

Hayard, 1907 : Femme.

France, 1907 : Femme ou fille de mœurs légères ; elle tourne et est livrée aux coups comme une toupie.

Mais le No 1 n’est pas tout seul. Il y a le No 2, il y a le No 3 et il y a le No 4, et il y a le No 5, car ces toupies de femmes, dès que vous n’écrabouillez pas sous leur nez leur premier Roméo, lui trouvent immédiatement des légions de cousins. La mienne, à vrai dire, s’est contentée d’en récolter six, soit sept bonshommes dans le même bonnet, ou la même capote, si cette plaisanterie ne vous parait pas trop déplacée.

(P. Fournier, Don Juan)

France, 1907 : Tête, allusion de forme ; argot faubourien. Avoir du vice dans la toupie, être rusé.

À peine âgée de douze ans, elle faisait déjà voir le tour à père et mère, nous montrant quel vice elle avait dans la toupie.

(Les Joyeusetés du régiment)

Toupiller

Delvau, 1866 : v. n. Aller et venir, tourner comme une toupie. Beaumarchais l’a employé dans le Barbier de Séville. On dit aussi Toupier.

France, 1907 : Tourner.

Le Rouchat avait très bien connu le mari de la vieille drôlesse, un brave cœur, mais pas de poigne du tout, qu’elle faisait toupiller sur son petit doigt, la carogne.

(Camille Lemonnier, Happe-Chair)

Tremper une soupe

Rossignol, 1901 : Battre quelqu’un.

Il m’a fait des sottises ; lorsque je le rencontrerai, je me charge de lui tremper une soupe.

France, 1907 : Battre : expression populaire.

Un beau voyou, tout ce qu’il y a de plus réussi, les regardait passer ainsi que moi : — Tiens, s’est-il écrié en apercevant une drôlesse, couverte de velours et de soie, ma sœur Nastasie ! En v’là une à laquelle papa tremperait une jolie soupe si elle venait à lui demander à becqueter demain.

(Léon Rossignol)

Trottoir

d’Hautel, 1808 : Cette fille est sur le trottoir. C’est-à-dire, est à marier. On le dit aussi d’une femme qui est en vogue, et dont on parle beaucoup.

Delvau, 1866 : s. m. Répertoire, — dans l’argot des coulisses. Grand trottoir. Répertoire classique. Petit trottoir. Répertoire courant, drames et vaudevilles. Grand trottoir se dit aussi de la Haute-Bicherie, et Petit trottoir du fretin des drôlesses.

Virmaître, 1894 : S’entend de deux façons. Faire le trottoir, raccrocher. Il n’est pas nécessaire pour faire le trottoir d’être sur le trottoir. Le trottoir est partout où la femme lève l’homme. Pendant l’Exposition de 1889, le trottoir de ces dames était le pont de l’Alma. À ce sujet, on avait fait ce calembourg :
— Les putains préfèrent le pont pour voir le velum (Argot des filles). N.

Vadrouille

Delvau, 1866 : s. f. Drôlesse ; fille ou femme de peu.

La Rue, 1894 : Basse prostituée. Aller en vadrouille, aller raccrocher dans la rue.

Virmaître, 1894 : Cette expression dans la marine signifie : brosse à plancher. Elle s’applique aux filles qui traînent dans les ports de mer (Argot des souteneurs).

Virmaître, 1894 : Faire une vadrouille, en pousser une. Vadrouiller : se déranger de ses habitudes, rôder dans des milieux auxquels on n’est pas habitué (Argot du peuple).

France, 1907 : Prostituée de la dernière catégorie, racoleuse des boulevards extérieurs. Charles Virmaître, dans Paris oublié, donne la gamme de la prostitution : « Vingt sous, dit-il, c’est une fille publique, une vadrouille, une pierreuse, cent sous, une fille de lupanar ; vingt francs, une boulevardière, de Montmartre à la Madeleine ; cinq louis, une horizontale, et enfin cinq cents francs, une femme qu’on salue et que certains imbéciles épousent. »
Le mot s’emploie adjectivement :

Blanche Rebus, qui l’avait à moitié timbré pendant cinq ou six semaines, qu’il avait regrettée plus que toutes les camarades, qui lui avait laissé dans toute la peau la brûlure de ses baisers savants et luxurieux. Il la revoyait si vadrouille, si excitante avec ses hanches rondes, sa croupe frissonnante, sa nuque blanche où l’on avait envie de mordre comme en un fruit mûr et son air effronté de moineau parisien, la bouche gourmande, les prunelles rieuses, le nez relevé comme d’une imperceptible chiquenaude…

(Mora, Gil Blas)

Veinarde

Delvau, 1866 : adj. et s. Drôlesse qui a du succès en hommes sérieux. Argot de Breda-Street.

Virmaître, 1894 : Fille qui a la main heureuse et tombe sur des michés qui se fendent généreusement (Argot des filles).

Vendangeuse d’amour

Delvau, 1864 : Fille ou femme qui a pour unique occupation de vendanger l’amour et de tirer de la meule de son pressoir assez d’argent pour ne pas être obligée de faire autre chose ; sa grappe est sans cesse écrasée à coups de pine, et le jus qui en sort nous grise.

Ces femmes…….
Sont des vendangeuses d’amour.
Lorsque des vignes de Cythère
On revient, c’est au petit jour,
À pas pressé, avec mystère.

(A. Delvau)

Mets à profit sa négligence,
Et sans alarmes jusqu’au jour,
Viens vendanger en son absence
Des fruits de plaisir et d’amour.

(Parny)

Delvau, 1866 : s. f. Drôlesse — bacchante moderne — qu’on rencontre souvent ivre dans les Vignes de Cythère. J’ai créé l’expression il y a quelques années : elle est aujourd’hui dans la circulation.

France, 1907 : Prostituée ; néologisme créé par Alfred Delvau.

Vitrioleuse

France, 1907 : Émule des veuves Gras, Belligaud et tutti quanti depuis la déplorable facilité avec laquelle on acquitte ces gredines.

D’immondes coquines, ayant fait périr dans d’atroces souffrances de malheureux jeunes gens par lesquels elles se prétendaient séduites, furent acquittées par ces bons bourgeois qu’on appelle des jurés d’assises et l’on vit la justice rendre à la société de vulgaires criminelles qui n’avaient eu d’autres titres à cette excessive bonté nue d’avoir employé, pour détériorer leur homme, une arme plus lâche que le poignard ou le revolver.
Bien mieux ! on vit une foule en délire applaudir à l’acquittement de ces ignobles drôlesses et leur payer des consommations variées, à la sortie du Palais de Justice.
Plusieurs de ces Agnès de pacotille furent même épousées par des Anglais fantasques, tandis que les autres trouvaient également une position sociale, soit comme gouvernante d’un vieil imbécile, soit comme nourrice sèche dans une riche famille bourgeoise.
Le revolver à paru un jeu d’enfant à Catin vengeresse. Aussitôt elle a innové le coup traîtreux, lâche, ignoble du vitriol qui dévore les yeux et déchiquette les chairs du visage. Croiriez-vous que d’atroces femmes ont encore été épargnées par les jurés après ce crime abominable ? Dès lors une nouvelle industrie était fondée pour les catins sans emploi qui pullulent sur le pavé : le chantage au vitriol. Tout homme a dans son passé une amourette ou une peccadille. Voici que le péché d’antan revenait menaçant, avec l’exigence d’un nouveau salaire. Gare au vitriol ! Qui n’aurait pas tremblé… et payé ? S’il est besoin de quelque énergie pour le coup de feu, il suffit de cinquante centimes et d’un pot de terre à l’immonde et lâche gredine.

(Henry Bauër, La Ville et le Théâtre)

Volaille

d’Hautel, 1808 : Une volaille. Terme populaire et injurieux, dont on se sert pour désigner une femme de mauvaise vie.

Delvau, 1864 : Femme plus que légère, et même un peu putain.

…. Eh bien, canaille !
Va donc la retrouver ; et que cette volaille
(C’est mon plus cher désir) cède à ta passion.

(L. Protat)

Ma danseus’ m’a traité d’ pochard,
Moi j’ l’ai traité d’volaille.

(J. Moinaux)

Delvau, 1866 : s. f. Femme ou fille débauchée, — dans l’argot du peuple, qui sait que la plupart des drôlesses sont bêtes comme des oies.

Delvau, 1866 : s. f. Homme sans consistance ; aimable sceptique qui ne croit qu’à lui. Argot des gens de lettres.

Fustier, 1889 : Terme de mépris à l’adresse d’une femme quelconque. — Étudiant, dans le jargon des écoles.

Des collégiens et quelques étudiants ; des volailles, comme on dit sur la montagne Sainte-Geneviève.

(XIXe siècle)

France, 1907 : Nouveau au Prytanée militaire de la Flèche. Aspirant à l’École militaire de Saint-Cyr.

France, 1907 : Prostituée qui vole le client. Jeu de mot.

Voyoute

Delvau, 1866 : s. f. Petite drôlesse qui s’accouple avec le voyou avant l’âge de la nubilité, — afin de n’en pas laisser perdre la graine. Fleur fanée qui ne se nouera jamais en fruit, — fille qui ne sera jamais que fille.
J’ai créé le mot il y a quelques années : il est maintenant dans la circulation.

Virmaître, 1894 : La femelle du voyou, seulement, en plus, elle est putain à l’âge où l’on va encore à l’école. À douze ans, la voyoute est déjà une petite marmite qui gagne du pognon à son voyou-souteneur (Argot du peuple).


Argot classique, le livreTelegram

Dictionnaire d’argot classique