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Addition

Larchey, 1865 : Carte à payer.

C’est l’addition même de l’un de ces repas-là.

(Delvau)

Ce néologisme fort juste s’explique de lui-même.

Delvau, 1866 : s. f. Ce que nos pères appelaient la carte à payer, ce que les paysans appellent le compte, et les savants en goguettes le quantum.

Rigaud, 1881 : Carte à payer chez le restaurateur, le total des objets de consommation.

Les gens qui suivent les modes disent l’addition.

(Eug. Wœstyn, Physiologie du dîneur)

On n’a jamais souffert que le mot addition fût prononcé au Café de Paris. C’est ce que les gens bien élevés appellent la carte.

(Nestor Roqueplan, Parisine)

Malgré l’indignation de Nestor Roqueplan, le mot addition a prévalu ; il est généralement employé par quatre-vingt-dix-neuf consommateurs sur cent.

Arbalète

d’Hautel, 1808 : Il est parti comme un trait d’arbalète. Pour dire que quelqu’un a disparu brusquement, et que sa sortie a été occasionnée par un mouvement d’humeur.
Il n’y a qu’un trait d’arbalète. Manière exagérée de dire qu’un lieu est très-peu éloigné d’un autre.

Vidocq, 1837 : s. f. — Croix que les femmes portent au col.

Delvau, 1864 : Le membre viril, probablement par jeu de mots, parce qu’on bande, — à moins qu’on ne dise bander que parce qu’on appelle la pine une arbalète destinée à blesser la femme au ventre.

Bandez votre arbalète, mon doux ami, et visez-moi dans le noir.

(E. Durand)

Larchey, 1865 : Croix de cou, bijou de femme (Vidocq). — Allusion à la ressemblance d’une arbalète détendue avec une croix.

Delvau, 1866 : s. f. Croix de femme, dite à la Jeannette. Argot des voleurs. Arbalète d’antonne. Croix d’église. Ils disent aussi Arbalète de chique, arbalète de priante.

Rigaud, 1881 : Croix à la Jeannette, qui est devenue plus tard la fameuse croix de ma mère dont les dramaturges ont fait une consommation effrayante. (V. les œuvres complètes de M. Dennery)

La Rue, 1894 : Croix de col.

France, 1907 : Croix de Jeannette, de priante.

Arroser

d’Hautel, 1808 : Arroser ses créanciers. Leur donner à chacun de petits à-comptes, afin de les rendre plus traitables et arrêter leurs poursuites.

Delvau, 1864 : Éjaculer dans la nature de la femme — un charmant petit jardin dont nous sommes les heureux jardiniers. Pluie ou sperme, quand cela tombe à propos, cela féconde.

Pourquoi ne voudraient-elles pas être arrosées ?

(Cyrano de Bergerac)

Rigaud, 1881 : Ajouter de l’argent à une somme engagée après un coup gagné à la ponte. — Risquer une nouvelle mise en banque après décavage, — dans le jargon des joueurs. Ordinairement, à la ponte, on arrose après le premier coup de gain. C’est mot à mot : arroser le tapis avec de l’argent tiré de la masse. À force d’arroser sans succès, on finit par être à sec.

Rigaud, 1881 : Donner un à-compte à un créancier.

À quoi bon arroser ces vilaines fleurs-là ?

(V. Hugo, Ruy-Blas)

Virmaître, 1894 : Donner un accompte sur une dette. Un huissier cesse les poursuites commencées quand le débiteur arrose. Donner de l’argent à un fonctionnaire pour obtenir un privilège, c’est l’arroser. Nos députés le furent largement par Arton pour l’affaire du Panama. Martingaler son enjeu c’est arroser le tapis (Argot du peuple). JV.

Rossignol, 1901 : À la suite d’un achat on va boire une consommation pour arroser l’objet acheté.

Hayard, 1907 : Payer, donner des acomptes.

France, 1907 : Faire des dépenses. Arroser le tapis, terme de joueur à la roulette pour couvrir le tapis d’argent. Arroser ses galons, terme militaire, payer sa bienvenue dans son nouveau grade. Arroser un créancier, lui donner des acomptes.

Article (porté sur l’)

Rigaud, 1881 : De complexion amoureuse. Mot à mot : porté sur l’article femme, dont le Parisien fait une si grande consommation.

Barre (compter à la, tenir sa comptabilité à la)

Rigaud, 1881 : Ce genre de comptabilité, encore en usage chez quelques marchands de vins, consiste à marquer chaque objet de consommation au moyen d’une barre faite à la craie sur une ardoise. Au noble jeu de tourniquet, l’ardoise marche un train d’enfer, et quelquefois, dans sa précipitation, le marchand de vin aligne quelques barres de plus.

Boire de l’encre

Rigaud, 1881 : Arriver lorsqu’une tournée a été déjà absorbée ou qu’il ne reste plus rien dans un litre. (Argot des typographes).

Boutmy, 1883 : C’est la situation fâcheuse à laquelle parait réduit un frère qui, invité à prendre sa part d’une consommation, arrive quand la fiole a été vidée rubis sur l’ongle. Dans son désappointement, il ne manque pas de s’écrier : Est-ce que vous croyez que je vais boire de l’encre ? Non, car on fait alors apporter aussitôt une autre fiole.

Caboulote

Rigaud, 1881 : Hébé de caboulot. La caboulote tient à la fois du garçon de café et de la fille de maison. Elle est chargée de verser à boire, de pousser à la consommation et le client à la porte, par les épaules, s’il fait trop de tapage.

Voici des actrices, des modèles, des caboulotes, des marchandes de bouquets et de plaisir.

(Ed. Robert, Petits mystères du quartier latin, 1860.)

Cadratins

Boutmy, 1883 : s. m. pl. Petits parallélépipèdes de même métal et de même force que les caractères d’imprimerie, mais moins hauts que les lettres de diverses sortes. Ils servent à renfoncer les lignes pour marquer les alinéas et portent sur une de leurs faces un, deux ou trois crans. Jeu des cadratins. On joue avec ces petits prismes rectangulaires à peu près comme avec les dés à jouer. Les compositeurs qui calent, et même ceux qui ne calent pas, s’amusent quelquefois à ce jeu sur le coin d’un marbre. Quand le joueur n’amène aucun point, on dit qu’il fait blèche. Il va sans dire que l’enjeu est toujours une chopine, un litre ou toute autre consommation. Les typographes appellent aussi cadratin le chapeau de haute forme, désigné dans l’argot parisien sous le nom si juste et si pittoresque de tuyau de poêle.

Cassés (des)

Rigaud, 1881 : Débris de marrons glacés, débris de pâtisserie. Les gamins font une grande consommation de cassés.

Cher comme poivre

France, 1907 : Ce dicton n’est plus guère usité, et a perdu toute signification. Napoléon Landais en donne une explication singulière : « Il ne peut se comprendre, dit-il, que pour signifier que le poivre est peu de chose en lui-même, et vaut toujours trop cher. » Si l’auteur du Dictionnaire des Dictionnaires eût consulté Voltaire, il eût trouvé une raison plus satisfaisante : « Cet ancien proverbe est trop bien fondé sur ce qu’en effet une livre de poivre valait au moins deux marcs d’argent avant les voyages des Portugais. »
Cette épice était donc autrefois d’une extrême cherté. Les seigneurs, et principalement les seigneurs ecclésiastiques, qui en faisaient une grande consommation, l’avaient compris dans l’un des tributs imposés à leurs vassaux.
Geoffroy, prieur du Vigeois, voulant exulter la magnificence de Guillaume, comte de Limoges, raconte qu’il en avait chez lui des tas énormes amoncelés comme si c’eût été du gland pour les porcs !
Les juifs de Provence étaient obligés d’en payer deux livres par an et par tête à l’archevêque d’Aix ! Quand Clotaire III fonda le monastère de Corbie, il imposa ses domaines de trente livres de poivre aux religieux. C’était déjà une véritable passion pour le clergé, et de là est venu le surnom donné depuis au poivre : avoine de curé, poudre qui excite à l’amour ceux et celles qui en font usage.

Chipoter

d’Hautel, 1808 : Lanterner, barguigner, faire quelque chose contre son gré, manger de mauvais cœur et sans appétit.

Delvau, 1866 : v. n. Faire des façons ; s’arrêter à des riens. Ce mot appartient à la langue romane. Signifie aussi : Manger du bout des dents.

Fustier, 1889 : Être regardant, liarder.

Il doit également ne jamais chipoter sur le prix des consommations.

(Frondeur, 1880)

Virmaître, 1894 : Marchander. Chipoter dans son assiette avant de manger (Argot du peuple). N.

France, 1907 : Bavarder, cancaner.

France, 1907 : Manger du bout des dents.

Cette fille, aux goûts de perruche, croquant des radis et des pralines, chipotant la viande et vidant des pots de confiture, avait des comptes de cinq mille francs par mois rien que pour la table. C’était, à l’office, un gaspillage effréné, un coulage féroce qui éventrait les barriques de vin, qui roulait des notes enflées pur trois ou quatre vols successifs.

(Émile Zola, Nana)

France, 1907 : Rogner, rapiner.

La baronne ne parlait que de cinquante louis, de champagne frappé, de faisans truffés, elle n’allait qu’aux premières, dans sa loge ou dans celle de l’Empereur, tandis que Mlle Balandard chipotait un sou à sa bonne sur une botte de navets ; elle ne buvait que du cidre, n’aimait que l’oie aux marrons, parce qu’avec la graisse on pouvait faire la soupe toute une semaine : elle n’allait jamais au spectacle qu’avec les billets de faveur que lui donnait uns ouvreuse de ses amies.

(Ch. Virmaître, Paris oublié)

Comestaux

Rigaud, 1881 : Comestibles. Tout ce qui se vend à la cantine des prisons est connu sous le nom de comestaux, le fromage aussi bien que le saucisson. Se pousser deux ou trois comestaux, manger deux ou trois objets de consommation. Il y a des comestaux depuis un jusqu’à trois pétards.

France, 1907 : Comestibles.

Consomm

Larchey, 1865 : Rafraîchissement. — Abrév. de consommation.

Ces dames doivent être altérées par la danse, ce dont elles ne disconviennent pas. Partant de là, il les supplie d’accepter une consomm.

(Mornand)

France, 1907 : Apocope de consommation.

Consomme

Delvau, 1866 : s. f. Apocope de consommation, — dans l’argot des faubouriens.

Rigaud, 1881 : Consommation.

Contre

d’Hautel, 1808 : Aller contre vent et marée. S’engager dans une affaire, malgré toutes les contrariétés qui s’opposent à son succès.
Si vous voulez prendre cette peine, je n’ai rien contre. Signifie, je ne m’oppose point à ce que vous preniez cette peine ; j’accède volontiers à votre désir.
Faire contre fortune bon cœur. Voy. Cœur.

Delvau, 1866 : s. m. Consommation personnelle, au café, que l’on joue avec une autre personne contre sa consommation.

France, 1907 : Complice d’un filou.

Le directeur d’un journal de sport a annoncé à ses lecteurs une prime de cinq cents francs pour celui qui donnerait au journal les meilleurs pronostics, c’est-à-dire qui désignerait à l’avance les gagnants d’une journée de courses d’Auteuil, de Longchamps où de tout autre hippodrome.
Or, nous le faisons remarquer aux naïfs, les cinq cents francs seront toujours gagnés par des amis du journal, autrement dit : par des complices ou contres.

(Hogier-Grison, Le Monde où l’on flibuste)

France, 1907 : Consommation jouée au café.

Cran

Boutmy, 1883 : s. m. Entaillure faite à la lettre pour en distinguer le sens. Au figuré, avoir son cran, c’est Avoir son bœuf ou sa chèvre, mais à un degré moindre.

France, 1907 : Consommation.

Cric

Delvau, 1866 : s. m., ou crique s. f. Eau-de-vie de qualité inférieure, — dans l’argot des faubouriens.

Merlin, 1888 : Voyez Schnick.

La Rue, 1894 : Eau-de-vie. Être remonté, comme l’outil du même nom. Un cran est une consommation.

Rossignol, 1901 : Mauvaise eau-de-vie.

France, 1907 : Eau-de-vie.

Daim

d’Hautel, 1808 : Puer comme un daim. Exhaler une odeur fétide, comme il arrive à celui qui est sujet à lâcher de mauvais vents.

Clémens, 1840 : Niais, Niaise.

Delvau, 1864 : Le monsieur qui paie les filles pour être trompé par elles avec leurs amants de cœur ; le mâle naturel de la biche.

Des daims ! J’ôte jamais mes frusques, moi.

(Lemercier de Neuville)

Larchey, 1865 : Niais, dupe.

L’une des grandes finesses des garçons de restaurant, quand ils servent un homme et une femme dans un cabinet, est de pousser à la consommation… persuadés que le daim n’osera refuser aucune dépense en présence de celle à qui il veut plaire.

(La Fizelière)

V. cocodès. — Il est possible que Daim soit une abréviation de dindon. V. ce mot.

Delvau, 1866 : s. m. Monsieur bien mis, et garni d’un porte-monnaie mieux mis encore, qui se fait gloire et plaisir d’être le mâle de la biche, — dans l’argot des faubouriens, dont la ménagerie s’augmente tous les jours d’une bête curieuse. Daim huppé. Daim tout à fait riche. Signifie aussi : imbécile, nigaud.

Rigaud, 1881 : Personnage dont le rôle, dans la comédie humaine, consiste à jouer les grandes premières dupes auprès des femmes. Le daim est généralement riche, bien mis et stupide.

Virmaître, 1894 : Imbécile (Argot du peuple). V. Couillon.

Rossignol, 1901 : Synonyme de pante. Daim veut aussi dire bête, imbécile.

France, 1907 : Niais, imbécile qui se laisse facilement duper. C’est aussi le synonyme de gommeux. Daim huppé, riche imbécile.

— Pourquoi, dit le mari, mettez-vous sur votre tête les cheveux d’une autre femme ?
— Pourquoi, répond sa douce moitié, portes-tu sur la main la peau d’un autre daim ?
 
Ça s’appell’ des genss’ à son aise,
Mais c’est pas eux qu’est les malins ;
Si c’est toujour’ eux qu’a la braise,
C’est toujour’ eux qui s’ra les daims.

(Aristide Bruant)

Danser de

Larchey, 1865 : Se mettre en frais de…

Je dansais pour c’te reine d’un joli châle tartan.

(A. Cahen, Chansons)

Rigaud, 1881 : Payer ; généralement employé dans le sens de payer pour un autre. — Danser d’une demi-douzaine de consommes au cafemar, payer une demi-douzaine de consommations au café.

Député de buvette

France, 1907 : Représentant de la nation qui n’est bon à rien, si ce n’est à voter, et dont la principale occupation est de se faire servir des consommations à la buvette de la Chambre ; argot des coulisses parlementaires.

— Voyons, chère petite, vous n’êtes plus dans votre province, n’est-ce pas ? Vous êtes à Paris et votre mari est député. Vous appartenez au monde officiel. Avez-vous un mari dans le genre de Lebossard, une manière d’ivrogne qui ne deviendra jamais que ce qu’on appelle, dans notre langage, des députés de buvette ou des « machines à voter » ? Non, vous avez un mari qui à déjà la réputation d’être intelligent et travailleur et sur lequel on fonde des espérances. Donc, vous n’êtes pas un zéro dans le monde officiel, vous êtes un chiffre, vous vous additionnez, et vous n’aurez qu’une chose contre vous, chose qui est plus utile dans le monde officiel que dans n’importe quel monde : vous n’avez pas d’argent.

(Edgar Monteil, Le Monde officiel)

Devant la glace (passer)

France, 1907 : Annoncer ses consommations au comptoir sans les payer. Derrière chaque comptoir se trouve, en effet, une glace.

Écot

d’Hautel, 1808 : Allez parler à votre écot. Pour, allez parler à votre compagnie, et ne vous mêlez pas des affaires de la nôtre. Se dit par réprimande à ceux qui viennent prendre part à un entretien qui leur est étranger.
Il a beau se taire de l’écot, qui rien n’en paye. Pour dire qu’un homme ne doit point mal parler d’un plaisir qui ne lui coûte rien.

Delvau, 1866 : s. m. Part de chacun dans un repas. Argot du peuple. Être à son écot. Payer ce qu’on consomme. Être à l’écot de quelqu’un. Dîner à ses dépens.

France, 1907 : Part de consommation que chacun doit payer. Payer son écot, payer sa part.

Emporteur à la côtelette

Rigaud, 1881 : Escroc qui fréquente les cafés pour y faire des dupes en proposant des parties de cartes. Il gagne d’abord une consommation, ensuite le déjeuner, et, de partie en partie, de revanche en revanche, il arrive au dépouillement complet de sa victime.

France, 1907 : Grec qui opère dans les restaurants.

Épingle à son col (avoir une)

Delvau, 1866 : Avoir un verre de vin, payé d’avance par un camarade, à boire sur le comptoir voisin de l’atelier. Argot des ouvriers. On dit aussi Avoir un factionnaire à relever.

France, 1907 : Avoir une consommation, payée d’avance par un camarade, qui vous attend sur le comptoir du marchand de vins.

Faire

d’Hautel, 1808 : Pour tromper, duper, attraper, friponner ; filouter, voler.
Je suis fait. Pour dire attrapé, on m’a trompé.
Faire de l’eau. Pour dire uriner, pisser. Hors de ce cas, c’est un terme de marine qui signifie relâcher en quelqu’endroit pour faire provision d’eau.
Faire de nécessité vertu. Se conformer sans rien dire aux circonstances.
Faire et défaire, c’est toujours travailler. Se dit par ironie à celui qui a mal fait un ouvrage quelconque, et qu’on oblige à le recommencer.
Quand on fait ce qu’on peut, on fait ce qu’on doit. Signifie qu’il faut savoir gré à celui qui marque du zèle et de l’ardeur dans une affaire, lors même qu’elle vient à ne pas réussir.
Paris ne s’est pas fait en un jour. Signifie qu’il faut du temps à un petit établissement pour devenir considérable ; qu’il faut commencer par de petites affaires avant que d’en faire de grandes.
Allez vous faire faire. Pour allez au diable ; allez vous promener, vous m’impatientez. Ce mot couvre un jurement très-grossier.
Le bon oiseau se fait de lui-même. Signifie qu’un bon sujet fait son sort par lui-même.
Faire et dire sont deux. Signifie qu’il est différent de faire les choses en paroles et de les exécuter.
Il n’en fait qu’à sa tête. Se dit d’un homme entier, opiniâtre, qui se dirige absolument d’après sa volonté.
Qui fait le plus fait le moins. Pour dire qu’un homme qui s’adonne à faire de grandes choses, peut sans contredit exécuter les plus petites.
Faire ses orges. S’enrichir aux dépens des autres s’en donner à bride abattue.
Faire le diable à quatre. Signifie faire des siennes, faire des fredaines ; un bruit qui dégénère en tintamare.
Faire les yeux doux. Regarder avec des yeux tendres et passionnés.
Faire son paquet. S’en aller ; sortir précipitamment d’une maison où l’on étoit engagé.
Faire la vie. Mener une vie honteuse et débauchée.
Il en fait métier et marchandise. Se dit en mauvaise part, pour c’est son habitude ; il n’est pas autrement.
Faire la sauce, et plus communément donner une sauce, etc. Signifie faire de vifs reproches à quelqu’un.
Faire d’une mouche un éléphant. Exagérer un malheur ; faire un grand mystère de peu de chose.
L’occasion fait le larron. C’est-à-dire, que l’occasion suffit souvent pour égarer un honnête homme.
Ce qui est fait n’est pas à faire. Signifie que quand on peut faire une chose sur-le-champ, il ne faut pas la remettre au lendemain.
Allez vous faire paître. Pour allez vous promener.
Les première et seconde personnes du pluriel du présent de l’indicatif de ce verbe sont altérées dans le langage du peuple. À la première personne il dit, par une espèce de syncope, nous fons, au lieu de nous faisons ; et à la seconde, vous faisez, au lieu de vous faites.

Larchey, 1865 : Faire la place, commercialement parlant.

De tous les points de Paris, une fille de joie accourait faire son Palais-Royal.

(Balzac)

Je suis heureux d’avoir pris ce jour-ci pour faire la vallée de l’Oise.

(Id.)

Larchey, 1865 : Nouer une intrigue galante.

Est-ce qu’un homme qui a la main large peut prétendre à faire des femmes ?

(Ed. Lemoine)

Dans une bouche féminine, le mot faire indique de plus une arrière-pensée de lucre. C’est l’amour uni au commerce.

Et toi, ma petite, où donc as-tu volé les boutons de diamant que tu as aux oreilles ? As-tu fait un prince indien ?

(Balzac)

Tu as donc fait ton journaliste ? répondit Florine. — Non, ma chère, je l’aime, répliqua Coralie.

(id.)

Larchey, 1865 : Risquer au jeu.

Nous faisions l’absinthe au piquet à trois.

(Noriac)

Faire dans la quincaillerie, l’épicerie, la banque, etc. ; Faire des affaires dans la quincaillerie, etc.

Larchey, 1865 : Voler.

Nous sommes arrivés à faire les montres avec la plus grande facilité.

(Bertall)

Son fils qui fait le foulard à ses moments perdus.

(Commerson)

Delvau, 1866 : s. m. Façon d’écrire ou de peindre, — dans l’argot des gens de lettres et des artistes.

Delvau, 1866 : v. a. Dépecer un animal, — dans l’argot des bouchers, qui font un veau, comme les vaudevillistes un ours.

Delvau, 1866 : v. a. Visiter tel quartier commerçant, telle ville commerçante, pour y offrir des marchandises, — dans l’argot des commis voyageurs et des petits marchands.

Delvau, 1866 : v. a. Voler, et même Tuer, — dans l’argot des prisons. Faire le foulard. Voler des mouchoirs de poche. Faire des poivrots ou des gavés. Voler des gens ivres. Faire une maison entière. En assassiner tous les habitants sans exception et y voler tout ce qui s’y trouve.

Delvau, 1866 : v. n. Cacare, — dans l’argot à moitié chaste des bourgeois. Faire dans ses bas. Se conduire en enfant, ou comme un vieillard en enfance ; ne plus savoir ce qu’on fait.

Delvau, 1866 : v. n. Jouer, — dans l’argot des bohèmes. Faire son absinthe. Jouer son absinthe contre quelqu’un, afin de la boire sans la payer. On fait de même son dîner, son café, le billard, et le reste.

Delvau, 1866 : v. n. Travailler, être ceci ou cela, — dans l’argot des bourgeois. Faire dans l’épicerie. Être épicier. Faire dans la banque. Travailler chez un banquier.

Rigaud, 1881 : Dérober. — Faire le mouchoir, faire la montre. L’expression date de loin. M. Ch. Nisard l’a relevée dans Apulée.

Vous êtes de ces discrets voleurs, bons pour les filouteries domestiques, qui se glissent dans les taudis des vieilles femmes pour faire quelque méchante loque. (Scutariam facitis)

Rigaud, 1881 : Distribuer les cartes, — dans le jargon des joueurs de whist. — Jouer des consommations, soit aux cartes, soit au billard. Faire le café en vingt points, — dans le jargon des piliers de café.

Rigaud, 1881 : Exploiter, duper. — Faire faire, trahir. Il m’a fait faire, — dans le jargon des voleurs.

Rigaud, 1881 : Faire le commerce de ; être employé dans une branche quelconque du commerce. — Faire les huiles, les cafés, les cotons. Mot à mot : faire le commerce des huiles, des cotons, etc.

Rigaud, 1881 : Guillotiner, — dans le langage de l’exécuteur des hautes-œuvres.

M. Roch (le bourreau de Paris) se sert d’une expression très pittoresque pour définir son opération. Les criminels qu’il exécute, il les fait.

(Imbert.)

Rigaud, 1881 : Parcourir un quartier au point de vue de la clientèle, — dans l’argot des filles. Elles font le Boulevard, le Bois, les Champs-Élysées, comme les placières font la place.

Rigaud, 1881 : Séduire.

La puissante étreinte de la misère qui mordait au sang Valérie, le jour où, selon l’expression de Marneffe, elle avait fait Hulot.

(Balzac, La Cousine Bette)

L’artiste qui, la veille, avait voulu faire madame Marneffe.

(Idem)

Faire une femme, c’est mot à mot : faire la conquête d’une femme.

Le temps de faire deux bébés que nous ramènerons souper ; j’ai le sac.

(Jean Rousseau, Paris-Dansant)

Quand une femme dit qu’elle a fait un homme, cela veut dire qu’elle fonde des espérances pécuniaires sur celui qu’elle a séduit, qu’elle a fait une affaire avec un homme. — Les bals publics sont des lieux où les femmes vont faire des hommes, mot à mot : le commerce des hommes.

Rigaud, 1881 : Tuer, — dans le jargon des bouchers : faire un bœuf, tuer un bœuf et le dépecer.

Rigaud, 1881 : Vaincre, terrasser, — dans l’argot des lutteurs.

Il ajouta qu’en se glorifiant d’avoir fait le Crâne-des-Crânes, certains saltimbanques en avaient menti.

(Cladel, Ompdrailles, Le Tombeau des lutteurs.)

Fustier, 1889 : Arrêter. Argot des voleurs. Être fait, être arrêté.

Le lendemain matin, il questionne la Lie-de-Vin… puis il part. Dans l’après-midi il était fait.

(Gil Blas, juin, 1886.)

La Rue, 1894 : Exploiter, duper. Arrêter. Jouer. Trahir. Séduire : faire une femme, faire un homme. Raccrocher. Dérober. Tuer. Vaincre, terrasser. Guillotiner.

Virmaître, 1894 : Les bouchers font un animal à l’abattoir. Faire : tuer, voler. Faire quelqu’un : le lever. Faire : synonyme de fabriquer (Argot du peuple et des voleurs).

France, 1907 : Exploiter.

Elles faisaient les bains de mer et les villes d’eaux, émigrant suivant la saison, comme les bohémiens, comme les hirondelles, des falaises grises de la Manche qu’un gazon plat encapuchonne aux côtes méditerranéennes où la blancheur luit dans l’azur.

(Paul Arène)

France, 1907 : Voler.

Deux filous causent de la future Exposition :
— C’est une bonne affaire pour nous… Ça fournit des occupations…
— Qu’est-ce que tu y faisais en 1869 ?
— Les montres.

(Le Journal)

Il lançait de vastes affaires sur le marché, comme la Caisse d’Algérie, et il ne dédaignait pas de vulgaires filouteries. Ses opérations se trouvèrent ainsi embrasser tous les cercles de la vie de Paris. Il ne dédaignait aucun coup à tenter. Il faisait le million aux riches gogos et le porte-monnaie aux passants.

(Edmond Lepelletier)

Un monsieur, très pressé, court dans la rue.
Un quidam le rejoint, lui frappe sur l’épaule et lui demande impérieusement :
— Où allez-vous ?
— Qu’est-ce que ça peut vous faire ? répond le monsieur furieux.
— Ça me fait beaucoup… on vient de me voler !
— Et vous m’accusez ?
— Oui.
— C’est trop fort !
— N’essayez pas de m’en imposer.
— Mais fouillez-moi, espèce de crétin !
Le quidam fouille le monsieur, et se retire en présentant de plates excuses.
Quand Le monsieur se fouille à son tour, il s’aperçoit qu’on lui a fait sa montre et son porte-monnaie.

(Gil Blas)

À la correctionnelle :
— Alors, dit familièrement le président au prévenu, vous vous vantez de faire la montre aves une remarquable dextérité ?
— Aussi bien que personne ici !
Puis il ajoute courtoisement :
— Soit dit sans vous offenser.

Faire flanelle

Rossignol, 1901 : Rester des heures dans un débit, devant la même consommation, c’est faire flanelle.

France, 1907 : Aller dans une maison de filles sans consommer la marchandise. Jeu de mot sur flâner.

La maquerelle a généralement en réserve, dans une pièce retirée, deux ou trois gros bouledogues aux crocs puissants pour imposer, au besoin, aux clients par trop tapageurs ou à ceux qui, ayant passé un quart d’heure à faire flanelle, c’est-à-dire à flâner dans les salons sans consommer ni monter avec une femme, refusent de s’en aller et s’entêtent à ne pas vouloir faire marcher le commerce de la maison.

(Léo Taxil, La Prostitution contemporaine)

L’expression s’emploie au figuré pour aller au hasard, errer dans les rues.

Un coin d’chambe, eun’ soupente, eun’ niche,
Eun’ machine oùs qu’on est chez soi,
Ousque quand i’ pleut, on s’en fiche,
Ousqu’on a chaud quand i’ fait froid ;
Quand j’étais p’tit ej’ me rappelle
Que c’était comm’ ça chez moman…
Aujord’hui, forcé d’faire flanelle…
V’là porquoi que j’cherche un log’ment.

(Aristide Bruant)

Gandin

Delvau, 1864 : Imbécile bien mis qui paie les filles pour qu’elles se moquent de lui avec leurs amants de cœur. Il reste une consolation aux gandins qui grappillent dans les vignes amoureuses après ces maraudeurs de la première heure, c’est de se dire :

Qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse !

(A. Delvau)

Nous soupions au sortir du bal. Quelques gandins,
Portant des favoris découpés en jardin,
Faisaient assaut d’esprit avec des femmes rousses.

(Th. De Banville)

Larchey, 1865 : Dandy ridicule. Du nom d’un personnage de vaudeville.

L’œillet rouge à la boutonnière, Les cheveux soigneusement ramenés sur les tempes comme deux gâteaux de pommade, le faux-col, les entournures, le regard, les favoris, le menton, les bottes ; tout en lui indiquait le parfait gandin, tout, jusqu’à son mouchoir fortement imprégné d’essence d’idiotisme.

(Figaro, 1858)

Delvau, 1866 : s. m. Amorce, paroles fallaces, — dans l’argot des marchandes du Temple. Monter un gandin. Raccrocher une pratique, forcer un passant à entrer pour acheter.

Delvau, 1866 : s. m. Coup monté ou à monter, — dans l’argot des voleurs. Hisser un gandin à quelqu’un. Tromper.

Delvau, 1866 : s. m. Oisif riche qui passe son temps à se ruiner pour des drôlesses, — et qui n’y passe pas beaucoup de temps, ces demoiselles ayant un appétit d’enfer. Le mot n’a qu’une dizaine d’années. Je ne sais plus qui l’a créé. Peut-être est-il né tout seul, par allusion aux gants luxueux que ces messieurs donnent à ces demoiselles, ou au boulevard de Gand (des Italiens) sur lequel ils promènent leur oisiveté. On a dit gant-jaune précédemment.

Rigaud, 1881 : Dandy dégénéré. Homme à la mise recherchée, prétentieuse et ridicule. D’où vient-il ? Est-ce de gant ? Est-ce de l’ancien boulevard de Gand ? Est-ce du nom d’un des personnages — Paul Gandin — des Parisiens de la Décadence, de Th. Barrière ? Est-ce de gandin, attrape-nigaud, en retournant la signification : nigaud attrapé ? Est-ce de dandy, avec changement du D en G, addition d’un N et réintégration de l’Y en I ? Je ne sais. — Le gandin s’éteignit en 1867, en laissant sa succession au petit-crevé qui creva en 1873, en léguant son héritage au gommeux, qui le léguera à un autre, et ainsi de suite jusqu’à la consommation des siècles.

Rigaud, 1881 : Duperie, attrape-nigaud. Hisser un gandin à un gonse, tromper un individu. — Monter un gandin, — dans le jargon des revendeurs du Temple, signifie chauffer l’article, harceler le client pour lui faire acheter quelque chose.

Rigaud, 1881 : Fort, — dans le jargon des barrières. Il est rien gandin.

Fustier, 1889 : Honnête, convenable, gentil. Argot du peuple.

Autrefois on avait deux sous de remise par douzaine. À présent, on les prend (des pièces de cuivre) chez Touchin. Il ne donne rien, ce muffle-là. Vrai ! c’est pas gandin !

(Fournière, Sans métier)

La Rue, 1894 : Duperie. Coup monté. Riche oisif.

France, 1907 : Riche oisif, jeune fainéant dont le père a travaillé sa vie durant pour qu’il passe la sienne à ne rien faire, parasite social. C’est le successeur et l’imitateur des lions du temps de Louis-Philippe, qui succédèrent eux-mêmes aux dandys et aux fashionables de la Restauration, aux beaux de l’empire, engendrés par les incroyables et les muscadins du Directoire, fils des petits maîtres de la fin du règne de Louis XV, descendants des talons rouges et des roués de la Régence, neveux des marquis de Louis XIV. Le nom de gandin parait pour la première fois en 1854 dans une pièce de Théodore Barrière, Les Parisiens, porté par un élégant ridicule, mais il ne se répandit guère dans le publie avant 1858. Gandin vient-il du boulevard de Gand, devenu le boulevard des Italiens et qui était la promenade habituelle des jeunes et riches oisifs, ou, suivant quelques étymologistes, du patois beauceron gandin, dont les éleveurs de la Beauce désignent le jeune mouton ? La bêtise, la simplicité, la passivité du mouton adolescent qui suit pas à pas celui qui le précède, et les instincts moutonniers, l’épaisse imbécillité de ces jeunes abrutis qui se copient tous en habits, en langage et en gestes offrent quelque créance à la seconde version. Cependant le public parisien ignore le patois de la Beauce, gandin adolescent mouton est inconnu sur le boulevard, et pour cette raison nous nous en rapporterons à la première.

Cigare aux dents, lorgnon dans l’œil,
Chaussé par Fabre, habillé par Chevreuil,
Un de ces élégants dont l’esprit reste en friche,
Nommés gandins hier, cocodès aujourd’hui,
Et qui nonchalamment promènent leur ennui
Depuis la Maison d’Or jusques au Café Riche…

(J.-B. de Mirambeaux)

Adieu, gandins infects, drôlesses éhontées, vous tous, abrutis qui, depuis ma majorité, n’avez cessé de jeter un froid dans mon existence. Je vous lâche !

C’était à l’Ambigu, la jeune X… des Folies Dramatiques se pavanait dans une avant-scène en compagnie de plusieurs crétins, tous gandins, et plus bêtes les uns que les autres, par conséquent.

(Léon Rossignol, Lettres d’un Mauvais jeune homme à sa Nini)

On l’emploie adjectivement dans le sens de beau, élégant.

— Il est pourtant gandin, mon panier, insiste le gitane avec le plus pur accent du faubourg Antoine ; étrennez-moi, Monsieur, ça vaut une thune et à deux balles je vous le laisse.

(Jean Lorrain)

Glace (passer devant la)

Rigaud, 1881 : Perdre au jeu des consommations dans un café. Autrefois on annonçait les consommations et on payait soi-même au comptoir. Allusion à la glace qui est derrière la dame de comptoir, et devant laquelle le consommateur était forcé de passer. — C’est à tort, je crois, que dans la Fille Elisa, M. E. de Goncourt a donné à l’expression le sens contraire. D’après lui, passer devant la glace, c’est « une expression qui désigne l’entrée de faveur accordée, par la maîtresse d’une maison, à l’amant d’une fille. » Personne n’ignore que ces demoiselles corrompent bien des choses, mais cette expression n’a pas été corrompue jusqu’ici, même en passant par leur bouche.

La Rue, 1894 : Passer devant le tribunal. Perdre au jeu dos consommations. Partir sans payer une fille parce qu’on est son amant de cœur.

France, 1907 : Passer au comptoir pour payer des consommations perdues au jeu ; sortir d’un lupanar sans payer, parce qu’on est l’amant de cœur d’une fille.

Glacis ou glace

Rossignol, 1901 : Le contenu d’un verre. Prendre une consommation est sucer un glacis.

Juge de paix

Ansiaume, 1821 : Bâton.

Il faut ébobir le cabot avec le juge de paix.

Delvau, 1866 : s. m. Bâton, — parce qu’il est destiné à mettre le holà. Cette expression fait partie de l’argot des voleurs et de celui des faubouriens.

Delvau, 1866 : s. m. Tourniquet de marchand de vin, qui condamne à payer une tournée celui qui perd en amenant le plus petit nombre. Argot des ouvriers.

Rigaud, 1881 : Bâton. — Tourniquet de marchand de vin où se jouent les consommations.

La Rue, 1894 : Bâton. Tourniquet de marchand de vin. Balances.

Virmaître, 1894 : Le lit. Dans le peuple, on trouve qu’après une dispute et même une bataille, le lit est un instrument de raccommodement. Cette expression vient d’une enseigne d’un marchand de meubles établi boulevard de Belleville. L’enseigne figurait un lit complet, et sur l’oreiller placé au milieu, il y avait cette inscription : Au Juge de Paix. (Argot du peuple). N.

Virmaître, 1894 : Un cornet contenant trois dés, la partie qui se nomme Zanzibar se joue sur le comptoir du marchand de vins. Ce jeu est ainsi appelé parce qu’il met les joueurs d’accord (Argot du peuple). N.

Rossignol, 1901 : Jeu qui se compose d’un cornet et de trois dés, qui se trouve sur le comptoir des marchands de vin et qui est surnommé zanzibar ; il sert à trancher la question de qui payera la consommation ; de là, juge de paix.

France, 1907 : Balances.

France, 1907 : Bâton. Ce que les Arabes appellent Sidi matraque.

France, 1907 : Le lit. C’est dans le lit, en effet, que mari et femme, amant et maîtresse, en désaccord, se réconcilient.

France, 1907 : Tourniquet de marchand de vin.

Jus de chapeau, jus de chique

France, 1907 : Mauvais café. On dit aussi roupie de singe.

Ce n’est pas que les consommations y étaient de premier choix, la bière était de la lavasse, le cognac du vitriol et le café du jus de chique, mais nous trouvions tout cela délicieux à cause des yeux de la jolie fille qui nous servait.

(Les Propos du Commandeur)

Lâcher de (se)

Rigaud, 1881 : Faire de la dépense, faire acte de générosité, offrir quelque chose. Je me lâche de deux consommations. — Je me lâche de cinq francs.

Manger le nez (se)

Delvau, 1866 : Se battre avec acharnement, — dans l’argot des faubouriens, qui jouent parfois des dents d’une manière cruelle. Par bonheur, ils jouent plus souvent de la langue, et, dans leurs « engueulements », — qui rappellent beaucoup ceux des héros d’Homère, — s’il leur arrive de dire, en manière de début : « Je vais te manger le nez ! » ils se contentent de se moucher.

France, 1907 : Se battre. Cette expression n’est pas seulement symbolique, elle exprime une réalité, et, dans les disputes et les batailles des souteneurs et des voyous de barrière, il arrive souvent que l’un des adversaires coupe d’un coup de dents le nez de l’autre.

Puisque ce rêve de paix universelle est traité d’utopie par ceux-là mêmes qui auraient le plus d’intérêt à le propager : puisque, à les en croire, l’humanité se mangera le nez et les tripes jusqu’à la consommation des siècles, pourquoi laisser place à la confusion, pourquoi ne pas préciser le mode de meurtre qui conciliera à son auteur le plus d’indulgence — et, parfois, de sympathie ?

(Séverine)

Manger le pâté de castor

France, 1907 : Se donner des stimulants d’amour. Ce dicton provençal viendrait d’un monastère des environs d’Avignon, le prieuré de Belles-Ombres, autrefois célèbre pour ses pâtés de castor. Les castors abondaient jadis dans le Rhône ; mais, venant à diminuer à cause de la grande consommation que les riverains en faisaient, les moines le remplacèrent par du lièvre, le vendant toujours sous l’étiquette de castor, comme les gargotiers donnent du chat sous le nom de lapins. Or nul n’ignore que le lièvre jouit de propriétés aphrodisiaques dont les effets furent tels chez les Avignonais, s’il faut s’en rapporter à Paul Arène, que le prieuré fut mis en interdit par les édiles. D’où le conseil donné proverbialement aux jeunes gens des deux sexes qui, par timidité ou candeur, manquaient de fougue amoureuse, d’aller au prieuré de Belles-Ombres manger le pâté de castor.

Marquer à la fourchette

Virmaître, 1894 : Marchand de vin qui majore ses notes. Allusion aux quatre dents de la fourchette ; il fait quatre raies à la fois (Argot du peuple).

France, 1907 : Système employé par les cafetiers et les restaurateurs chez qui l’on a crédit et qui marquent deux ou trois consommations quand vous n’en avez qu’une. Ils se rattrapent ainsi sur les clients qui payent des pertes que leur font subir ceux qui ne payent pas.

Mortification

France, 1907 : Argot de l’art culinaire. C’est l’action décomposante qui s’exerce dans la chair des animaux depuis le moment où ceux-ci ont été abattus, jusqu’à celui où ces chairs, ayant subi l’action reposante, on atteint leur apogée et peuvent être livrées à la consommation.

Nouer l’aiguillette

Delvau, 1864 : Empêcher un mari ou un amant de consommer l’agréable sacrifice, non pas en lui jetant un sort, comme on le croyait autrefois, mais en épuisant complètement son stock de foutre, de sorte qu’on peut le laisser courir un peu dans la ville sans crainte d’infidélité.

Il avait peut-être l’aiguillette nouée.

(Moyen de parvenir)

Lequel ayant eu l’aiguillette nouée la première nuit de ses noces.

(Brantôme)

Ami lecteur, vous avez quelquefois
Ouï conter qu’on nouait l’aiguillette.

(Voltaire)

France, 1907 : Empêcher par un maléfice la consommation du mariage. La croyance populaire attribuait aux sorciers le pouvoir de nouer l’aiguillette aux nouveaux mariés et de les empêcher d’accomplir ce que l’Église appelle l’œuvre de chair. On désignait ces sorciers sous le nom de noueux d’aiguillettes.

Il presse sa jeune épouse, mais soit l’émotion, soit l’excès d’amour,
Trop d’amour peut nuire à l’amour même,
il s’aperçoit avec terreur qu’il à l’aiguillette nouée.

(Les Propos du Commandeur)

Et vous qui présidez aux mystères funèbres,
Esprits noirs et malins, Habitans des Ténèbres,
Qui pour suivre mes Loix êtes toûjours sur piés,
Qui nouez l’aiguillette aux nouveaux mariés,
Qui prodiguez aux miens, d’une main bienfaisante,
Talisman, Trefle à quatre et Pistole volante ;
Vous, que j’ai pour mon Art employés tant de fois,
Farfadets et Lutins, accourez à ma voix.

(Nicolas R. de Grandval, Le Vice puni)

Œil (avoir de l’)

Rigaud, 1881 : Avoir bonne apparence, en parlant des choses ou des objets de consommation. — Cette étoffe a de l’œil. — Ce faisan rôti a de l’œil.

France, 1907 : Avoir un bon aspect, se bien présenter. Se dit en parlant d’une chose, « Cette robe à de l’œil. »

Pelot

France, 1907 : Paletot. En patois béarnais, pelot, diminutif de pele, est un vêtement léger ou en mauvais état.

— Eh bien ! frangin, il s’agit de travailler dans les pelots… retiens ton battant et suis bien la losèchem… nous ralégons (entrons) dans un laféquem, un beau cafmar, car nous ne la relevons que dans le riche (nous ne cherchons que dans les endroits élégants)… faut conobler la manière de s’en servir… J’ai un lardussépem (pardessus)… j’entre le premier, je l’accroche à une patère où il y a déjà un beau pelot… je m’assieds et je commande une consommation, je prends un faffe (journal) et je lis… Tu entres, tu t’assois loin de moi, tu siffles un bock, tu aboules ta monnaie, puis, pendant que le garçon a le dos tourné, moi je casse un verre : tout le monde se retourne… vite tu décroches le pardessus que tu as remarqué, le plus cossu n’est pas toujours le plus rupin, il faut grincher celui où il y aurait des papiers, un portefeuille, des objets bourrant les poches… tu files à la douce pendant que tout le monde regarde de mon côté, tu portes le pelot sur ton bras… et l’affaire est gerbée…

(Edmond Lepelletier, Les Secrets de Paris)

Pétroleur

Rigaud, 1881 : Marchand de vin, — dans le jargon des ouvriers qui ont à se plaindre des consommations ou à qui le marchand de vin réclame avec acharnement de l’argent.

Pièce forcée (vol à la)

France, 1907 : Ce genre de vol nécessite deux complices dont le premier fait dans une boutique ou sur le comptoir d’un marchand de vin un achat ou une consommation quelconque qu’il paye généralement d’une pièce d’or, pièce préalablement marquée d’un signe quelconque. Quand on lui a rendu la monnaie, son complice entre, achète ou consomme à son tour et sans avoir rien payé réclame sa monnaie au marchand indigné, il soutient qu’il a payé avec telle pièce dont il donne l’exacte description, et que le marchand trouve en effet dans son comptoir, puisqu’il vient de la recevoir du premier filou.

Pisser à l’anglaise

Delvau, 1866 : v. n. Disparaître sournoisement au moment décisif.

Virmaître, 1894 : S’en aller subrepticement sans payer son écot. Pisser à l’anglaise : quitter un salon sans saluer les maîtres de la maison pour ne pas jeter le trouble dans la réunion… ou parce que l’on s’embête à quarante francs par tête (Argot du peuple).

France, 1907 : S’esquiver sans payer. Ne pas confondre avec filer à l’anglaise, qui signifie quitter une compagnie sans prendre congé (Voir Filer). L’individu qui pisse à l’anglaise fait semblant de se rendre au water-closet, et de là s’esquive sans payer sa consommation ou son écot.

Rat (courir le)

Ansiaume, 1821 : Voler à tâtons la nuit dans un lieu habité.

J’ai couru le rat dans sa turne, je n’ai eu qu’un bogue en orient.

Vidocq, 1837 : v. a. — Voler la nuit dans l’intérieur d’une auberge ou maison garnie.
Ce genre de vol se commet ordinairement dans les auberges où logent les marchands forains et les rouliers, et de préférence les jours de marché et de foire.
Les Rats sont habituellement deux et quelquefois trois. Ils exercent ostensiblement la profession de marchand forain ; leurs papiers sont toujours parfaitement en règle, ils peuvent donc exhiber, à la première réquisition, passeport, factures, patente, etc. Ils sont sobres, et leur politesse est extrême.
Les Rats logent plusieurs fois dans une auberge avant d’y commettre un vol. Ils arrivent toujours séparément et d’un lieu opposé, et s’arrangent de manière à ne point coucher dans la même chambre.
On sait qu’il y a toujours cinq ou six lits dans chacune des chambres d’auberges où logent habituellement les rouliers et marchands forains. Les Rats se couchent toujours les premiers, et lorsque ceux qui doivent partager avec eux la chambre qu’ils occupent arrivent, ils paraissent profondément endormis ; mais, comme les chats, ils ne dorment que d’un œil, et ils ont soin d’allumer celui qui place sous son traversin, ou sa ceinture ou sa culotte.
À l’heure convenue entre eux, ils se lèvent chacun de leur côté, ils se retrouvent et se rendent mutuellement compte de leurs observations. La position des lits occupés par ceux qu’ils veulent dévaliser est exactement indiquée, et chacun d’eux alors opère dans la chambre de son camarade, les ceintures et les culottes sont enlevées, et, après avoir placé le chopin en lieu de sûreté, chaque Rat retourne à son lit.
Les Rats n’emportent jamais avec eux ce qu’ils ont volé, ce n’est que quelques jours après la consommation du vol, et en revenant prendre gîte, qu’ils enlèvent leur butin.
Quelques Rats ont un complice au dehors auquel ils remettent instantanément l’objet volé. Il est très-rare que ces voleurs soient pris sur le fait. Aussi, les marchands forains et les rouliers qui boivent sec, et qui, par conséquent, n’ont pas le sommeil léger, devraient placer ce qu’ils possèdent sous leurs matelas, et non pas sous leur traversin. Ce serait le seul moyen de ne pas craindre la visite des Rats.
J’étais, le 5 novembre dernier, occupé à rédiger cet article, lorsque je reçus la visite d’un propriétaire de Charonne près Paris, qui venait d’être la victime d’un Rat.
Le voleur s’était introduit furtivement dans la maison où logeait le propriétaire, et s’était caché sous un lit placé dans la chambre voisine de celle qu’il occupait. Lorsque le voleur eut acquis la certitude que le propriétaire était profondément endormi, il s’introduisit dans sa chambre, enleva sa ceinture, qui contenait 24,000 francs en billets de banque, et se sauva en escaladant les murs de la maison. Je mis de suite en campagne une partie des agens attachés à mon établissement, et, à six heures du soir, le Rat fut saisi encore nanti de la somme volée, qui fut de suite restituée à son propriétaire.

Rigaud, 1881 : Voler la nuit, dans les maisons meublées, dans les hôtels garnis.

Virmaître, 1894 : Voler la nuit. Allusion au chat qui ne sort que la nuit pour chasser le rat, excepté qu’ici il faut retourner le fait, c’est le rat qui chasse le chat — le passant (Argot des voleurs). N.

Ratiboiseur de landau à baleines

Virmaître, 1894 : Voleur de parapluies. On les nomme aussi des ratiboiseurs à l’échange. Le voleur entre dans un grand café, il a un mauvais parapluie à la main, il le place au porte-parapluie, au milieu des autres. Il s’assied à côté pour guigner de l’œil le plus beau, il paye sa consommation, se lève sans affectation en emportant le parapluie sur qui il a jeté son dévolu. Si l’on s’aperçoit de l’échange, il s’excuse de s’être trompé, puis s’en va tranquillement. Il est rare que ce vol ne réussisse pas (Argot du peuple). N.

Régaler son cochon

Rigaud, 1881 : S’offrir à soi-même une consommation, se payer un bon dîner.

France, 1907 : Faire un bon repas.

Régaler son suisse

Delvau, 1866 : v. a. C’est, quand on joue à deux, à un jeu quelconque, une consommation, ne perdre ni gagner, être chacun pour son écot.

Rigaud, 1881 : Ne perdre ni ne gagner une consommation jouée.

France, 1907 : Payer chacun son écot.

Régler l’ardoise

France, 1907 : Passer chez le marchand de vin ; allusion à l’ardoise sur laquelle d’aucuns marquent les consommations des clients.

— Tu sais, petite crotte chérie, ça m’agace à la fin que tu règles toujours l’ardoise ; la prochaine fois, ce sera ma tournée.

(René Maizeroy)

Renouvellement

Fustier, 1889 : Argot de café-concert. Dans ces établissements, le prix de la place occupée donne droit à une « consommation » gratuite. Si vous désirez prendre de nouvelles consommations vous les pavez suivant le tarif des cafés ordinaires. Ce sont ces nouvelles consommations qui prennent le nom de renouvellement.

Au dedans, la salle était comble… les garçons ne savaient où donner de la tête ; les renouvellements pleuvaient. Les bocks et les flacons vides s’amoncelaient sur les comptoirs…

(Gaulois, 1882)

Repiquer

Larchey, 1865 : Recommencer, reprendre le dessus, se tirer d’une mauvaise passe.

On repique son chaste cancan.

(1846, Privat d’Anglemont)

Delvau, 1866 : v. n. Reprendre courage, se tirer d’embarras. Signifie aussi : Revenir à la charge ; retourner à une chose. Repiquer sur le rôti. En demander une nouvelle tranche.

Rigaud, 1881 : Redoubler. — Repiquer sur le rôti ; renouveler une consommation. — Nous avons bu trois bocks : si nous repiquions ? — Redoubler d’ardeur à l’ouvrage après un moment de repos. — Rétablir ses affaires, recouvrer la santé.

Rigaud, 1881 : Se rendormir. C’est-à-dire piquer de nouveau son chien.

La Rue, 1894 : Revenir à la charge. Reprendre son travail. Se rendormir. Reprendre faveur.

Virmaître, 1894 : Deux joueurs font une partie ; l’un joue pique, l’autre répond : repique. Repiquer de riffe : rappliquer d’autorité (Argot du peuple).

Rossignol, 1901 : Recommencer.

Je t’ai défendu de faire telle chose, tâche de ne pas repiquer.

Hayard, 1907 : Recommencer.

France, 1907 : Recommencer, se rengager.

On le vit pendant ses sept premières années toujours maugréant, rechignant et tempêtant, mais, en définitive, faisant assez bien son service tout en disant chaque jour : Chien de métier  ! Quand mon congé viendra-t-il ? Mais le dernier jour de la septième année, il repiqua pour trois ans, à la grande déception des brigadiers de son escadron qui comptaient sur ses galons de maréchal des logis.

(Hector France, L’Homme qui tue)

France, 1907 : Répondre.

— Des gens chouettes, t’en connais, toi, des gens chouettes ? Regarde un peu à Saint-Eustache, c’était ouvert dès le matin et on pouvait aller s’y chauffer en sortant d’ici. Ben maintenant, on nous fiche à la porte. Même que, jeudi, j’étais sur le calorifère, le sacristain rapplique. « Qu’est-ce que vous faites ? — Je me chauffe. — C’est pas un chauffoir ici, c’est la maison du bon Dieu, faut vous en aller. — Mon vieux, que j’y réponds, vous saurez qu’au moyen âge les églises étaient des lieux d’asile. » Il en est resté bleu ! « Mâtin ! qu’y repique, vous avez de l’instruction, vous ! — Sûr ! que je réponds, c’est pas parce que j’ai froid que j’ai pas été à l’école. »

(Guy Tomel, Le Bas du pavé parisien)

Rester en plan

Delvau, 1866 : v. n. Rester comme otage quelque part, lorsqu’on n’a pas d’argent pour payer sa consommation.

France, 1907 : Être laissé comme otage dans un cabaret ou une auberge, en attendant que les camarades rapportent de quoi payer les consommations.

Saladier

Delvau, 1866 : s. m. Bol de vin sucré, — dans l’argot des ouvriers.

Rigaud, 1881 : Vin chaud sucré servi dans un saladier. C’est le vin à la Française dont on fait une grande consommation dans les bals de barrière.

France, 1907 : Vin sucré servi dans un saladier.

Saletés (dire des)

Delvau, 1864 : Tenir des propos de « haulte gresse » et de grande salacité, pour provoquer, les idées libertines et pousser à la consommation de la femme par l’homme et de l’homme par la femme. — Faire des saletés. Peloter une femme ou un homme, sucer ou gamahucher, branler ou faire postillon, etc., etc., — toutes les choses aimables de la fouterie.

Tu me disais alors que pour te plaire,
Une femme devait et dire et savoir faire
Toutes tes saletés et toutes les horreurs.

(L. Protat)

Sauter

d’Hautel, 1808 : Faire sauter les miettes. Manger avec un grand appétit, avec avidité, mettre les morceaux doubles.
Reculer pour mieux sauter. Temporiser, éviter momentanément un malheur qu’on ne peut fuir, et dont tôt ou tard on doit être victime.
Cela le fera sauter au plancher, le fera sauter comme un crapaud. Pour exprimer le mécontentement que quelqu’un manifestera, en apprenant une nouvelle.
Faire sauter quelqu’un. Pour dire le supplanter, lui ravir son emploi, ou le bénéfice qu’il attendoit ; son salaire.

anon., 1827 : v. a. Voler.

anon., 1827 : v. n. Puer.

Bras-de-Fer, 1829 : v. a. Voler.

Bras-de-Fer, 1829 : v. n. Puer.

Vidocq, 1837 : v. a. — Cacher à ses camarades une partie du vol qui vient d’être commis. Lorsque les voleurs se disposent à commettre un vol d’une certaine importance, ceux d’entre eux qui doivent rester en gafe, c’est-à-dire veiller, afin que ceux qui opèrent ne soient pas inquiétés, doivent craindre que ceux qui entolent (qui entrent), ne gardent pour eux la plus grande partie des objets précieux ; aussi ils se fouillent mutuellement après la consommation du vol, quelquefois cependant des billets de banque, des pierres précieuses, cachés dans le collet d’un habit ou dans quelqu’autre lieu secret, échappent aux plus minutieuses recherches ; c’est ce que les voleurs appellent faire le Saut.
Un vol, indiqué par la femme de chambre, devait être commis dans une maison sise place des Italiens. ; les voleurs convinrent entre eux que pour que l’esgard ne fût pas fait, les vêtemens de tous les opérateurs seraient brûlés aussitôt après la consommation du vol, ce qui fut exécuté ; cependant un individu nommé Dubois, ancien marinier, esgara vingt billets de 1,000 francs, en les cachant dans sa queue.
On a vu souvent des Tireurs voler une montre d’or et ne passer au Coqueur qu’une montre de crisocal.

Halbert, 1849 : v. a. Voler.

Halbert, 1849 : v. n. Puer.

Larchey, 1865 : Cacher un produit de vol à ses complices. — Sauter à la capahut : Assassiner un complice pour enlever sa part (Vidocq). V. Capahuter, Pas.
Sauterelle : Puce (id.). — Ses sauts sont connus.

Delvau, 1866 : v. n. Cacher le produit d’un vol à ses complices, — dans l’argot des prisons. Sauter à la capahut. Assassiner un complice pour lui enlever son fade.

Rigaud, 1881 : Sentir mauvais.

France, 1907 : Coïter.

France, 1907 : Sentir mauvais, augmentatif de danser.

Scène de l’absinthe (faire la)

Delvau, 1866 : Jouer son verre d’absinthe avec un camarade, ou lui en offrir un. Argot des coulisses. On dit de même, à propos de toutes les consommations : Faire ou jouer la scène du cigare, du café, de la canette, etc.

Sous-maîtresse

Rigaud, 1881 : Femme de confiance dans une maison de tolérance. — Elle surveille la consommation et il lui est défendu de consommer.

Tout client, pour pénétrer dans les chambres, donne à la sous-maîtresse 1 franc.

(F. d’Urville, Les Ordures de Paris)

France, 1907 : Prostituée dont les charmes sont partis et qui reste comme surveillante dans la maison où elle les a vus se flétrir.

Suçon

Delvau, 1864 : Empreinte que laissent les lèvres d’un amant sur le cou, les joues ou la bouche de sa maîtresse, de façon a l’empêcher, pendant quelques jours, de se montrer aux regards malins du public, qui connaît parfaitement ce petit timbra bien accusateur.

Larchey, 1865 : « Faire une consommation fanatique de croquets et de sucres d’orge, dits suçons. »

(Rolland)

On les suce très-longtemps.
Suçon : Trace rouge laissée sur la peau par la succion des lèvres.

Delvau, 1866 : s. m. Baiser-ventouse, — dans l’argot des grisettes.

Delvau, 1866 : s. m. Pince faite à même le drap pour obtenir un bombage, — dans l’argot des tailleurs.

Delvau, 1866 : s. m. Sucre d’orge, — dans l’argot des petites dames, habituées des Délass Com, et du théâtre Déjazet.

Virmaître, 1894 : Faire une consommation fantastique de sucres d’orge. L. L. Suçon : en faire un sur l’épaule ou sur la gorge d’une jolie femme, ce n’est pas précisément sucer du sucre d’orge, c’est lui faire venir le sang à la peau. Ce qui a donné naissance à cette expression : ce n’est pas de l’amour, c’est de la rage, pour ceux qui embrassent de cette manière (Argot du peuple). N.

Surfine, ou sœur de charité

Vidocq, 1837 : Les voleurs donnent ce nom à des voleuses qui procèdent à-peu-près de cette manière :
L’âge de la Sœur de Charité est raisonnable, sa mise décente, même quelque peu monastique, elle fréquente les églises, assiste à toutes les messes, fait l’aumône, fait allumer des cierges, se confesse et communie au besoin ; après avoir quelque temps fréquenté une église et s’y être fait remarquer par sa piété et son exactitude, la Sœur de Charité cause avec les employés de l’église et les prie de lui indiquer quelques nécessiteux dignes d’intérêt, car elle est, dit-elle, chargée de distribuer les aumônes d’une riche veuve ; l’un des employés, soit la loueuse de chaises ou tout autre, lui indique aussitôt quelques pauvres auxquels elle donne immédiatement deux ou trois francs, et elle se retire après avoir pris leur adresse et leur avoir promis des secours plus considérables.
Quelques jours après la Sœur de Charité rend chez un des pauvres qu’elle a assisté, et lui dit qu’elle est heureuse de pouvoir lui annoncer que madame la marquise ou madame la comtesse veut bien prendre sa position en considération, et lui accorder quelques secours ; mais, ajoute-t-elle, madame, qui ne veut point que ses bienfaits servent à satisfaire des passions mauvaises, ne donne jamais d’argent. Vous allez me dire ce qui vous manque, et vous l’obtiendrez en nature ; elle examine alors les effets de son protégé, fouille partout, car elle veut acquérir la certitude qu’on ne simule pas des besoins que l’on n’éprouve point.
Les pauvres honteux possèdent presque toujours, quelques débris de leur fortune passée, qui servent à leur rappeler des temps plus heureux ; pendant qu’elle fouille dans les tiroirs, la Sœur de Charité sait s’emparer adroitement de ces objets ; cela fait, elle fait sortir le pauvre diable pour le mener de suite chez la noble dame qui veut bien s’intéresser à lui, mais avant d’être arrivés à la destination indiquée elle a trouvé le moyen de s’en débarrasser.
Dans le courant de l’année 1814, deux Romamichelles, la mère Caron et la Duchène, dévalisèrent, en procédant ainsi, un grand nombre de malheureux ; elles avaient, à la même époque, commis un vol très-considérable au préjudice du brave curé de Saint-Gervais ; ces deux femmes, découvertes et arrêtées par moi, furent condamnées deux mois après la consommation de ce dernier vol.

Torchonner

d’Hautel, 1808 : Chiffonner ; fripper.
Un habit, une robe torchonnée. C’est-à-dire, faits sans goût, ou frippés.
On dit aussi d’une personne mal vêtue, ou trop surchargée d’ornemens, qu’Elle est torchonnée.

France, 1907 : Battre.

France, 1907 : Essuyer avec un torchon.

Des piles de soucoupes se dressaient, d’une blancheur d’albâtre, sur l’éclat miroitant des marbres : des femmes passaient, vêtues d’une jupe de flanelle à plis qui tuyautait jusqu’au milieu du mollet et d’une camisole lâche de satinette où sursautait un triple rang de fausses perles plus grosses que des noisettes. Elles passaient des bocks, torchonnaient un coin de table, virvoltaient lourdement, avec des tournures hommasses et des coups de reins de lutteuses de foire, sous leurs jupes blanches qui bombaient comme des culottes ou comme des corsage de la dame du comptoir ; puis, entre deux tournées, elles venaient s’abattre auprès des clients pour allumer une cigarette et pousser à la consommation.

(Camille Le Senne, Cher Maître)

France, 1907 : Travailler mal et salement.

Tournée

Larchey, 1865 : Pile, correction faisant tourner et retourner la victime.

Après, je donne une tournée à la Chouette. Je tiens à ca.

(E. Sue)

Danse et Walse offrent la même image.

Larchey, 1865 : Rasade offerte à l’assistance devant le comptoir du marchand de vins. — La tournée est une rasade qui fait le tour de la compagnie assemblée. On a voulu y voir une allusion à la petite roue qui offre aux buveurs le moyen de jouer leur consommation sans quitter le comptoir du marchand de vins. mais alors le terme offrir ou payer une prochaine tournée, qui est fort usité, serait un non sens. ce qui se joue ne peut s’offrir.

il offre une tournée au café Robert.

(Monselet)

Delvau, 1866 : s. f. Coups reçus ou donnés. Payer une tournée. Battre.

Delvau, 1866 : s. f. Rasade offerte sur le comptoir du marchand de vin, — dans l’argot du peuple. Offrir une tournée. Payer à boire.

Rigaud, 1881 : Politesse à coups de canon sur le comptoir du marchand de vin. Chaque camarade offre, à son tour, à la société, la consommation ; c’est ce qui constitue le tour ou tournée ; puis la tournée recommence. D’autres fois elle se joue au tourniquet. Certaines tournées du lundi, inaugurées à neuf heures du matin, ne sont pas terminées à une heure. — Tournée du mastroquet, le moment où le mastroquet s’exécute à son tour.

France, 1907 : Consommation offerte à plusieurs.

Oui… elle attend tout le monde : aux arrivants elle sourit, avec l’espoir qu’on lui offrira une tournée de la liqueur dorée qui miroite dans les flacons étagés au-dessus du comptoir. Si on lui parle, elle essaie de fixer son regard hébété sur son interlocuteur : ses lèvres ébauchent un sourire qu’elle veut rendre gracieux, et de sa voix trainante, enrouée et presque éteinte, elle murmure la même phrase stéréotypée dans sa bouche : « T’es bien gentil, paie-moi un verre de cognac. »

(G. Macé, Un Joli Monde)

France, 1907 : Raclée.

Un jour, exaspéré, Jean, voyant que le calme et la douceur n’amenaient aucun résultat, flanqua très carrément une gifle à sa femme, puis, comme elle s’obstinait, il réédita et, finalement, lui servit ce qu’en langage vulgaire on nomme une tournée.

(Henri Germain)

Train de charcuterie

Rigaud, 1881 : Train omnibus, — dans le jargon des employés des chemins de fer.

Parce que les voyageurs de secondes et de troisièmes en ont toujours dans leurs paniers, soit pour leur consommation en route, soit pour cadeaux apportés à leurs familles.

(Aymar de Flagv, Paris-Journal, du 24 mai 1878)

France, 1907 : Train composé de wagons de troisième classe, généralement destiné à l’écrabouillement des voyageurs ; expression populaire.

Tripes de Saint-Denis

France, 1907 : Elles jouissaient autrefois de la réputation qu’ont aujourd’hui celles à la mode de Caen. Le peuple et aussi les princes — nous en avons la preuve dans le repas de Gargamelle à la naissance de Gargantua — faisaient grande consommation de tripes : on allait en bande en manger à Saint-Denis. Dans une pièce de vers du XVe siècle, les Souhaits du monde, un gueux demande :

Pour tout chevet, une grosse royllarde
Pleine de vin pour resjouir le gueux,
Grosses tripes à force de moutarde.

Mais comme il arrive toujours, le succès gâta les marchands ; certains de la vente et de la clientèle, ils finirent par se négliger ; c’est ainsi qu’un proverbe du XVIe siècle le déclare :

Les bons patez sont à Paris,
Ordes trippes à Saint-Denis.

Trombone (faire)

Rigaud, 1881 : Mettre la main au gousset et la retirer à plusieurs reprises sans en sortir de l’argent. Faire semblant d’avoir envie de payer. Les doigts qui vont et viennent dans la poche du gilet simulent le mouvement du trombone, — dans le jargon des troupiers.

France, 1907 : Mettre la main à sa poche pour feindre de vouloir payer les consommations et attendre qu’un camarade se charge de ce soin ; expression militaire faisant allusion au mouvement du trombone.

Vache enragée (manger de la)

France, 1907 : Éprouver de grandes privations, tomber dans la misère, manquer du strict nécessaire, n’avoir à manger que des rogatons. Il est défendu, dit Charles Rozan, de manger de la chair des animaux atteints d’épizootie ou mordus par un chien enragé. Les pauvres, privés de tout, ne tiennent pas toujours compte de cette défense, et, pour manger de la viande, ils mangent même de la vache enragée. Il est bon, il est nécessaire que les jeunes gens mangent de la vache enragée, surtout ceux qui ont été choyés, gâtés, adulés dans leur famille.

Si vous interrogiez l’histoire gastronomique des hommes célèbres de notre époque, vous seriez étonnés de la consommation effrayante que ces illustres personnages ont faite de ce bétail privilégié.
Un vieux professeur disait qu’un homme que n’avait pas mangé de la vache enragée n’était qu’une poule mouillée… C’est assez mauvais comme style, mais comme pensée c’est bien profond.

(Mme Émile de Girardin)

Vache enragée, vache enragée qui m’as causé tant de tiraillements et de maux d’estomac, tu es peut-être le condiment de la vie d’artiste. Quand on t’a mâchée et remâchée, la moindre tartine de beurre prend ensuite des succulences d’ambroisie !

(Jules Claretie, Brichanteau, comédien)

Viande à canon

Rigaud, 1881 : Soldat. — En temps de guerre le canon en fait une grande consommation. Sous le premier Empire, alors que la gloire coûtait à la France des monceaux de cadavres entassés sur les champs de bataille, on appelait les soldats : de la chair à canon.

Vitrioleuse

France, 1907 : Émule des veuves Gras, Belligaud et tutti quanti depuis la déplorable facilité avec laquelle on acquitte ces gredines.

D’immondes coquines, ayant fait périr dans d’atroces souffrances de malheureux jeunes gens par lesquels elles se prétendaient séduites, furent acquittées par ces bons bourgeois qu’on appelle des jurés d’assises et l’on vit la justice rendre à la société de vulgaires criminelles qui n’avaient eu d’autres titres à cette excessive bonté nue d’avoir employé, pour détériorer leur homme, une arme plus lâche que le poignard ou le revolver.
Bien mieux ! on vit une foule en délire applaudir à l’acquittement de ces ignobles drôlesses et leur payer des consommations variées, à la sortie du Palais de Justice.
Plusieurs de ces Agnès de pacotille furent même épousées par des Anglais fantasques, tandis que les autres trouvaient également une position sociale, soit comme gouvernante d’un vieil imbécile, soit comme nourrice sèche dans une riche famille bourgeoise.
Le revolver à paru un jeu d’enfant à Catin vengeresse. Aussitôt elle a innové le coup traîtreux, lâche, ignoble du vitriol qui dévore les yeux et déchiquette les chairs du visage. Croiriez-vous que d’atroces femmes ont encore été épargnées par les jurés après ce crime abominable ? Dès lors une nouvelle industrie était fondée pour les catins sans emploi qui pullulent sur le pavé : le chantage au vitriol. Tout homme a dans son passé une amourette ou une peccadille. Voici que le péché d’antan revenait menaçant, avec l’exigence d’un nouveau salaire. Gare au vitriol ! Qui n’aurait pas tremblé… et payé ? S’il est besoin de quelque énergie pour le coup de feu, il suffit de cinquante centimes et d’un pot de terre à l’immonde et lâche gredine.

(Henry Bauër, La Ville et le Théâtre)

Zinc (tomber un)

Rigaud, 1881 : Prendre un verre de vin ou de liqueur sur le comptoir du marchand de vin. Mot à mot : avoir raison d’une consommation servie sur le comptoir de zinc.


Argot classique, le livreTelegram

Dictionnaire d’argot classique