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Monôme des X

France, 1907 : Monôme des candidats à l’École polytechnique.

Quand les compositions écrites sont terminées, les taupins, candidats des lycées et des écoles préparatoires, se réunissent sur la place du Panthéon. Ils s’organisent en longue file indienne… et partent processionnellement sous la conduite du premier taupin de France, le premier de ceux qui ont échoué l’année précédente. Ce gigantesque mille-pattes va, vient, serpente, frappant le sol en cadence, lançant dans les airs des chansons du caractère le plus profane ; il ne rappelle que de bien loin, dans ses tours et ses détours, le jeu auquel les Grecs se plaisaient à donner une forme orchestrique. Il se dirige d’abord vers la cour du Collège de France… puis il descend le boulevard au milieu de la foule ahurie, interceptant la circulation, suit les quais jusqu’au terre-plein du Pont-Neuf, et après une ronde échevelée autour de la statue de Henri IV, se rend chez la « mère Moreau », le fameux débit de prunes et de chinois.

(Albert Lévy et G. Pinet, L’Argot de l’X)

Qui gên’ la circulation,
Bouscul’ la population,
S’fait fich’ au bloc comme un seul homme ?
C’est le monôme !
Qui va de l’autre côté d’l’eau
Prendre un’ prun’ chez la mèr’ Moreau,
S’évanouit comme un fantôme ?
C’est le monôme !
Le lend’main, qui qu’a mal aux ch’veux,
Qui s’plaint d’avoir la tête en feux,
Et pendant l’cours pique un p’tit somme ?
C’est le monôme !

(Xanrof)

Monôme polytechnicoprotestant

France, 1907 : Entente spontanée de tous les protestants pour cacher les histoires scabreuses qui surgissent dans leur parti. L’on sait en effet que rien n’est plus moral que les protestants ; ce sont eux qui sont à la tête de toutes les sociétés pour l’extinction du vice ! Cependant c’est surtout dans les pays protestants, témoin l’Angleterre et l’Allemagne, qu’il semble fleurir le plus, mais il se cache… ce qui n’empêche pas les scandales comme ceux de la Pall Mall Gazette et celui des petits télégraphistes d’éclater quelquefois. Le pudibond Bérenger, le pasteur Dide, et le pieux Jules Simon, tous sénateurs, faisaient partie du monôme polytechnicoprotestant.

Toujours le monôme polytechnicoprotestant !… si… l’accident fût arrivé à… à la femme d’un officier catholique par exemple… ça n’eût pas fait tant d’histoires, et toute cette boue, — comme vous dites, — n’eût pas été remuée… mais ici il s’agit d’une protestante !… une protestante, songez donc ! est-ce qu’une protestante peut faillir ?… (il n’y a qu’à Mme de Staël que ça a été permis… et il y a si longtemps…) une protestante !… allons donc !… et tous les protestants, orthodoxes ou pas, se dressent comme un seul homme… on évoque l’ombre des illustrations du parti… tout le monde est fourré dans l’affaire, depuis Luther jusqu’à Guizot… en passant par Mélanchthon, Wolf, Leibniz, Schelling, Fichte, etc., etc…

(Gil Blas)

Ratissé

Rigaud, 1881 : Joueur qui a perdu son argent au jeu. Celui dont la poche a été ratissée par le râteau du croupier. Être ratissé jusqu’au dernier sou. La variante est : Ratiboisé.

Fustier, 1889 : Gandin, fashionable. Ç’a été le nom à la mode en 1885 pour désigner le continuateur du poisseux, du genreux.

Les jeunes ratissés (le terme est nouveau pour dire gommeux ou petit crevé), les ratissés ont couru et courent encore, comme un seul homme, lorgner, applaudir, rappeler La Goulue et Grille d’Égout… Pourquoi les ratissés ? Est-ce parce que le jeu, le baccarat, les petits-chevaux des bords de la mer ou les steeple-chases leur vident à la fois la bourse et la cervelle et les ratissent comme le râteau du croupier ? Est-ce au contraire parce que le coiffeur sue sang et eau à les épiler, les coiffer, les brosser et leur ratisse les favoris, la moustache et la chevelure (quand ils en ont), comme le jardinier ratisse les allées d’un jardin bien entretenu ?
Je n’en sais rien ; le fait est que les petits crevés sont devenus les ratissés.
Le ratissé a son féminin : la ratissée. Et je m’imagine qu’aussi bien que le croupier, la ratissée ratisse le ratissé. Le nouveau nom doit venir de là.

(Illustration, octobre 1885.)


Argot classique, le livreTelegram

Dictionnaire d’argot classique