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Arracheur

d’Hautel, 1808 : Il ment comme un arracheur de dents. C’est-à-dire audacieusement ; au-delà de toute expression ; parce que les gens qui exercent la profession de dentiste, se font une habitude d’amplifier, de dénaturer les choses les plus naturelles et les plus simples : leur exagération devient surtout insupportable, lorsqu’ils parlent de leur adresse surprenante, de l’efficacité de leurs remèdes, des cures miraculeuses qu’ils ont opérées.

Balanstiquer

Virmaître, 1894 : Jeter. C’est une amplification de balancer : se débarrasser de quelque chose qui gène, ou d’une personne dont on a assez (Argot des voleurs). N.

Rossignol, 1901 : Jeter, se débarrasser d’une chose dont on ne veut pas ou plus. On balanstique sa maîtresse ; on balanstique un vieux chapeau.

Hayard, 1907 : Chasser, jeter.

Dent

d’Hautel, 1808 : Une vieille sans-dents. Surnom injurieux que l’on donne à une vieille femme qui ne fait que radoter.
Avoir une dent de lait contre quelqu’un. Lui garder rancune.
Brèche dent. Mot railleur dont on se sert pour désigner un homme à qui il manque quelques dents sur le devant de la bouche.
Il n’en a pas pour sa dent creuse. Se dit en mauvaise part d’un dissipateur à qui on semble ne jamais donner assez ; et d’un ouvrier peu soigneux qui mène l’ouvrage grand train.
Rire du bout des dents. Sans en avoir envie ; malgré soi.
Ne pas desserrer les dents. Être de mauvaise humeur ; ne dire mot ; garder un morne silence.
Montrer les grosses dents. Faire menace ; prendre un ton dur et sévère.
Il n’a rien à mettre sous la dent. Pour, il est réduit à la mendicité ; il est dénué de toutes ressources.
Il ment comme un arracheur de dents. Voyez Arracheur.
Il n’en perd pas un coup de dents. Se dit de quelqu’un qui, quoique très occupé, ou indisposé, ne laisse pas que de bien manger.
Il n’en croquera que d’une dent. Pour, il ne viendra pas tout-à-fait à bout de ce qu’il désire.
Malgré lui, malgré ses dents. C’est-à-dire, quelqu’obstacle qu’il puisse mettre à cette affaire.
Tomber sur les dents. Être harassé de fatigue ; n’en pouvoir plus.
Il lui vient du bien quand il n’a plus de dents. Se dit d’une personne qui fait un héritage dans un âge très-avancé, où il ne lui est pas possible d’espérer d’en jouir long-temps.
Avoir la mort entre les dents. Être dangereusement malade ; être à l’agonie.
On dit, pour empêcher les enfans de toucher à un couteau ou à quelque chose de nuisible, que cela mord, que cela a des dents.
Prendre le mors aux dents.
Briser les freins de subordination ; commettre de grands excès. Se dit aussi pour, travailler avec une grande ardeur, après avoir fait des siennes.
Il y a long-temps qu’il n’a plus mal aux dents. Se dit d’un homme mort depuis long-temps, et dont on demande des nouvelles.
Le vin trouble ne casse point les dents. Maxime bachique, qui signifie que le vin, quelque médiocre qu’il soit, est toujours bon à boire.
Avoir les dents longues. Être réduit aux dernières ressources, et dans une indigence affreuse ; ou être à jeun.
Savant jusqu’aux dents. Amplification, pour dire un pédant érudit, un sot docteur.
Donner un coup de dent à quelqu’un. Le mettre en pièces dans ses propos ; tenir des discours satiriques, offensans sur son compte.
Pour empêcher les enfans de manger des bonbons, des sucreries, on leur dit que cela casse les dents.

Gosse

Clémens, 1840 / un détenu, 1846 : Enfant.

Delvau, 1866 : s. f. Bourde, menterie, attrape, — dans l’argot des écoliers et du peuple. Voilà encore un mot fort intéressant, à propos duquel la verve des étymologistes eût pu se donner carrière. On ne sait pas d’où il vient, et, dans le doute, on le fait descendre du verbe français se gausser, venu lui-même du verbe latin gaudere. On aurait pu le faire descendre de moins haut, me semble-t-il. Outre que Noël Du Fail a écrit gosseur et gosseuse, ce qui signifie bien quelque chose, jamais les Parisiens, inventeurs du mot, n’ont prononcé gausse. C’est une onomatopée purement et simplement, — le bruit d’une gousse ou d’une cosse.
Conter des gosses.
Mentir. Monter une gosse. Faire une arce.

Delvau, 1866 : s. m. Apprenti, — dans l’argot des typographes. Ils disent aussi Attrape-science et Môme.

Delvau, 1866 : s. m. Enfant, petit garçon, — dans l’argot du peuple.

Rigaud, 1881 : Enfant, — dans le jargon du peuple, qui dit tantôt le gosse, tantôt la gosse, selon le sexe. — Dans le jargon des voyous, une gosse, une gosseline, c’est une fillette de quinze à seize ans ; sert encore à désigner une amante. Il est à remarquer que mion de gonesse signifiait, autrefois, petit jeune homme. (V. Oudin, Cur. franc.) Gosse pourrait bien être un diminutif de mion de gonesse.

Rigaud, 1881 : Mensonge, plaisanterie, mauvaise farce.

Boutmy, 1883 : s. m. Gamin. Dans l’imprimerie, les gosses sont les apprentis ou les receveurs.

La Rue, 1894 : Femme. Enfant. Mensonge.

France, 1907 : Enfant, et par amplification, adolescent ou fillette.

Le ménage était déjà chargé d’un gosse de dix-huit mois et la victime trouvait que c’était assez de cette sale graine qui lui suçait le sang et lui disputait la pâture. Quand elle se vit de nouveau enceinte, avec 125 francs par mois pour nourrir la maisonnée, elle se dit qu’expulser ce fœtus incapable de souffrir n’était pas un crime, mais une délivrence ; qu’arracher de sa chair cette superfétation encombrante était un droit aussi légitime, aussi imprescriptible que le suicide, puisqu’elle ne violentait que son corps et courait seule les risques.

(Marie Huot, L’Endehors)

Dans le peuple, en général — je parle surtout d’autrefois — le souvenir du temps de régiment, dépouillé de ses amertumes, éveille un regain de bonhomie et de belle humeur. On était jeune ; on n’avait que soi à penser, ni femmes, ni gosses ; on se sentait bâti à chaux et à sable… et l’on s’imaginait que ça durerait toujours !

(Séverine)

On est gosse ; on n’a pas quinze ans,
On croit ses charmes séduisants
Et l’on s’aligne :
On lance des coups d’œil luisants
Et des sourires suffisants,
Le bec en guigne.

(Blédort)

— Oui, monte, monte.
— Pas chez elle ! chez moi.
— Non, cher moi.
— J’suis la plus gosse.
— J’suis la plus cochonne.
— J’me fends de deux louis.
— Moi aussi…

(Jean Richepin)

Jugeotte

Larchey, 1865 : Jugement, avis.

Dis-moi z’un peu franchement,
Là dessus ta petite jugeotte.

(Léonard, parodie, 1863)

Delvau, 1866 : s. f. Jugement, logique, raison, bon sens, — dans l’argot du peuple, pour qui cela remplace la judiciaire.

Rigaud, 1881 : Bon sens ; jugement sain.

Hayard, 1907 : Jugement, intelligence.

France, 1907 : Bon sens, jugement.

Comme beaucoup de gens à cette époque, il me semblait qu’une République fédérale était ce qui pouvait le mieux convenir à notre pays. Je m’étais dit, dans ma jugeotte de gamin de Paris, que les citoyens de Montmartre ne ressemblant en rien à des Bretons, il était criminel et inepte de vouloir faire vivre les uns et les autres sous les mêmes lois.

(Sutter-Laumann, Histoire d’un Trente sous)

Au lieu de dire, ce qui serait juste : « Un Tel est une canaille, quoique avocat ! » la simpliste jugeotte des foules englobe la collectivité tout entière dans l’abaissement d’un seul. Et les raffinés amplifient : « Un Tel, etc., parce que avocat ! » L’agréable chose, pour la très grande majorité d’honnêtes gens confondus ainsi avec les brebis galeuses !

(Séverine)

Notaire

d’Hautel, 1808 : C’est autant que si les notaires y avoient passé. Se dit d’un homme qui observe exactement la parole.

Delvau, 1866 : s. m. Comptoir du marchand de vin, — dans l’argot des faubouriens, qui y font beaucoup de transactions, honnêtes ou malhonnêtes, et un certain nombre de mariages à la détrempe.

France, 1907 : Boutiquier qui fait crédit. Il inscrit, note les achats.

France, 1907 : C’est, pour les gens de la campagne, le synonyme d’homme d’esprit, de savant par excellence et aussi celui de l’homme menant une existence heureuse, confortable, bien au-dessus de celle du vulgaire. Savant comme un notaire, écrire comme un notaire, vivre comme un notaire sont des expressions courantes chez la plupart des paysans.
Il paraitrait cependant qu’il n’en a pas toujours été ainsi, du moins relativement au savoir des notaires qui, à une certaine époque, devait être bien médiocre, ainsi que le font observer MM. V. Lespy et P. Raymond, si l’on en juge par cette expression proverbiale usitée dans la vallée d’Ossau pour signifier qu’un jeune homme n’apprend pas grand’chose : Qu’en sabera prou ta sta noutari, il en saura assez pour être notaire. « Son père l’ayant fait instruire à écrire dans quelque ville voisine, en rendit enfin un beau notaire de village. »

(Montaigne, Essais)

Le notaire y a passé, il n’y a plus à y voir, on ne peut plus s’en dédire.

France, 1907 : Comptoir des marchands de vin : il reçoit l’argent ; et par ampliation, marchand de vin.

Orléans (glose d’)

France, 1907 : C’est la glose d’Orléans, elle est plus difficile que le texte. Ce dicton, qui est fort ancien, a excité nombre de commentaires. D’après Le Maire, auteur d’un livre sur les antiquités d’Orléans, il viendrait de l’esprit railleur des Orléanais, dont la manie était d’ajouter par des amplifications aux faits qu’ils rapportaient, détruisant ainsi le texte par la glose :

On dit volontiers que la glose
D’Orléans se destruit par le texte.

Pallas (faire)

Vidocq, 1837 : v. a. — Faire le grand seigneur, de l’embarras avec peu de chose. Terme des Camelots et saltimbanques.

Larchey, 1865 : Faire des façons, des embarras. — L’argot paraît s’être piqué là de certaines connaissances mythologiques, car Minerve faisait parfois la renchérie.

Au pré finira ton histoire, et là l’on n’y fait plus pallas.

(Vidocq)

Rigaud, 1881 : Faire des embarras, prendre de grands airs comme en prennent les saltimbanques en débitant leurs boniments.

France, 1907 : Faire des manières ; c’est-à-dire, par ampliation, vouloir imiter Minerve, déesse de la sagesse, par conséquent de la pruderie.

— Au pré finira ton histoire et là l’on n’y fait plus pallus.

(Mémoires de Vidocq)

Faut que j’te d’mande encor quèqu’chose,
Ça s’rait qu’t’aill’s voir un peu mes vieux,
Vas-y, dis, j’t’en pri’, ma p’tit’ Rose,
Malgré qu’t’es pas ben avec eux,
Je n’sais rien de c’qui leur arrive…
Vrai, c’est pas pour fair’ du pallas,
Mais j’voudrais ben qu’moman m’écrive
À Mazas.

(Aristide Bruant)

Popote

Larchey, 1865 : Table d’hôte, gâchis, ratatouille.

Delvau, 1866 : adj. Médiocre, — dans l’argot des gens de lettres et des artistes.

Delvau, 1866 : s. f. Cuisine, — dans l’argot des troupiers, qui ont trouvé là une onomatopée heureuse : le clapotement du bouillon dans le pot-au-feu, des sauces dans les casseroles, etc. Signifie aussi Table d’hôte.

Rigaud, 1881 : Cuisine de pauvre et pauvre cuisine. — Faire la popote, se réunir pour faire un maigre repas à frais communs.

Merlin, 1888 : Cuisine. — Faire la popote.

La Rue, 1894 : Cuisine. Table d’hôte. Être en popote. Être en ménage. Se dit aussi d’une réunion d’officiers qui font faire leurs repas par un soldat.

Rossignol, 1901 : Femme d’intérieur qui aime son chez soi et la vie de famille.

France, 1907 : Table particulière où des personnes de même profession se réunissent sans avoir recours à un restaurateur. « Faire popote. » Par amplification, on appelle popote les tables d’hôte.

Adieu la bohème, Monsieur ! Nous n’en sommes plus aux braves cabotins du boulevard du Temple qui s’établissaient en commun, faisaient la popote ensemble, formaient une smala de célibataires, se partageaient la direction de la communauté, l’un d’entre eux, par exemple, étant chargé de la cuisine et cela pour arriver à vivre avec économie, à mettre, comme on dit, les deux bouts. Les comédiens d’aujourd’hui, fichtre !… Quelques-uns sont de bons négociants et savent compter comme des inspecteurs des finances.

(Jules Claretie, Brichanteau)

On mange dix à la gamelle
Lorsqu’on fait la popote au camp ;
Mais la faut avoir d’la prunelle
Pour absorber son contingent.
Dumanet pour la boustifaille
Mang’ bien deux cuillers à la fois ;
Aussi, pour que moins vite il aille,
il reçoit des coups d’louch’ sur les doigts.

(Griolet)

Rasoir

d’Hautel, 1808 : Il coupe comme un rasoir. Se dit d’un instrument tranchant qui est habile à la coupe.

Delvau, 1866 : s. m. Homme ennuyeux. Rasoir anglais. Le plus ennuyeux, — les rasoirs qui viennent de Londres ayant la réputation d’être les plus coupants du monde. On dit aussi Raseur.

France, 1907 : Chose ennuyeuse ; par amplification, se dit des personnes.

Bébé s’approche d’un Monsieur qu’on vient d’introduire dans le salon.
— Tu viens voir mon papa ?
— Oui, mon petit ami.
— Tu es le perruquier, dis ?
— Pourquoi me demandes-tu cela ?
— Parce que papa vient de dire à maman, quand la bonne t’a annoncé : Allons, bon ! Voilà le rasoir.

Rentifer

Rigaud, 1881 : Entrer, — dans l’argot des voleurs. C’est « entrer » par amplification argotique de « rif », désinence arbitraire, si commune chez MM. les escarpes.

Riflard

Vidocq, 1837 : s. m. — Riche.

Larchey, 1865 : Parapluie. — D’une pièce de Picard, la Petite Ville (1801), où l’acteur chargé du rôle de Riflard paraît armé d’un énorme parapluie.

Il pleuvait à verse ; elle était sous son riflard.

(Lubize)

Rigaud, 1881 : Parapluie. — D’après M. Lorédan Larchey, le nom serait dû à une pièce de Picard, la Petite Ville (1801), où l’acteur chargé du rôle de Riflard portait un énorme parapluie. Le nom de Riflard, dit M. Fr. Michel, approprié à divers personnages comiques, dans plusieurs mystères des XVe et XVIe siècles, était à lui seul une charge comique, et avait, à ce qu’il paraît, auprès du public d’alors, un succès des plus marqués.

Rigaud, 1881 : Riche. — Bourgeois, — dans l’argot des voleurs de 1830.

Rossignol, 1901 : Parapluie. On dit aussi Jaluzot.

France, 1907 : Parapluie. Ce nom devenu populaire vient d’un vaudeville de Picard, la Petite Ville, où l’un des personnages, Riflard, portait un énorme parapluie.

Lorsque je fis sa connaissance,
Il me souvient, c’était le soir ;
Elle attendait quelqu’un, je pense,
Car elle était sur le trottoir.
Le ciel était noir comm’ la suie,
Y avait d’la crotte, il tombait d’l’eau.
La p’tit’, n’ayant pas d’parapluie,
Risquait d’s’enrhumer du cerveau.
Rêvant une douce conquête,
Je m’avançai d’un air gaillard,
Disant : Acceptez, ma poulette,
Une place sous mon riflard.

(E. Héros-Keraval)

France, 1907 : Vieux soulier et, par amplification, vieux bourgeois encroûté, dénommé aussi vieille savate. Dupe. Argot faubourien.

Tricoter

d’Hautel, 1808 : Tricoter quelqu’un. Lui donner la bastonnade ; l’étriller d’une rude manière.
Tricoter. Marcher précipitamment et à petits pas.

Larchey, 1865 : Battre. — Du vieux mot Tricote : gros bâton. V. Roquefort.

Prends vite un bâton ; Tricote cet homme sans cœur.

(Chanson carnavalesque, 1851, impr. Chassaignon)

Larchey, 1865 : Danser. — Comparaison du jeu des jambes à celui des aiguilles.

Delvau, 1866 : v. a. Battre. On dit aussi Tricoter les côtes.

Delvau, 1866 : v. n. Danser.

France, 1907 : Marcher d’un pas mal assuré, comme un homme ivre ; et par ampliation faire des zigzags, aller d’un côté du trottoir à l’autre.

Qu’il fasse la rue en tricotant, c’est-à-dire en allant successivement des numéros pairs aux numéros impairs, ou qu’il la desserve en impasse, ce qui s’entend d’une distribution commencée par un côté et terminée par l’autre, il ne peut tarder à trouver un obstacle.

(J. Hilpert, Le Facteur de la poste aux lettres)


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