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Vie

Vie

d’Hautel, 1808 : Il n’a pas pour deux liards de vie. Signifie, il est d’une très foible complexion ; il est continuellement malade, valétudinaire, cacochyme.
Faire une belle vie ; une vie d’enragé. Criarder, quereller continuellement ; vivre ensemble comme chien et chat.
Vie de cochon, courte et bonne. C’est-à-dire vie débauchée et crapuleuse, dont on abrège les momens par ses dérèglemens.
Une vie de Bohême. Vie de misérable ; de bandit, de réprouvé.
Il me fait enrager ma vie. Pour, il me contrarie, m’impatiente, m’excède.
Cacher sa vie. Avoir une conduite secrète et mystérieuse.
Faire la petite vie. Se livrer au libertinage, à la débauche.
Être de grande vie. Pour être d’une grande dépense ; vivre dans le luxe et l’éclat.
Faire vie qui dure. Mener joyeuse vie, ne pas penser aux maux à venir.

Vie (faire la)

Delvau, 1866 : S’amuser plus que la morale et la santé ne le permettent ; se débaucher, les femmes avec les hommes, les hommes avec les femmes.

France, 1907 : Se livrer à la débauche, chanter en action Vive le vin, l’amour et le tabac !

Elles causèrent, elles parlèrent de Suzanne… mise dans un atelier de couture, et qui, au bout de six mois, s’était envolée, pour faire la vie… Faire La vie, c’étaient des orgies de sirop de groseille et d’eau de Seltz, au milieu d’une débandade d’hommes, des douzaines vous passant à la file sur le corps, dans des arrière-boutiques de marchande de vin.
— Oui, ma chère, c’est comme ça !

(Émile Zola, La Terre)

Vie (faire une)

Larchey, 1865 : Faire tapage. — Faire la vie :

Mener une vie débauchée.

d’Hautel.

Vie de bâtons de chaise

France, 1907 : Vie désordonnée, conduite scandaleuse ; allusion aux excès des gens ivres qui cassent tout et brisent les chaises dans leur folie bachique. On dit aussi noce de bâtons de chaises.

— Une farceuse, vous savez, Mme Wasly. Elle nous la fait à la pose et à la vertu et elle mène une vie de bâtons de chaise. Oui, oui, en cachette de sa belle-mère chez qui elle habite.

(Albert Cim, Demoiselles à marier)

Vie de chien

Delvau, 1866 : s. f. Conduite déréglée, crapuleuse. Faire ou Mener une vie de chien. Vivre dans le désordre et le vagabondage. Les Anglais ont la même expression, dans le même sens : to lead a dog’s life. On dit aussi Faire une vie de polichinelle.

France, 1907 : Conduite déréglée, licencieuse. Mener une vie de chien, vivre dans le désordre. Le chien a passé de tous temps comme un exemple d’impudicité et de cynisme. Les anciens disaient : œil de chien, pour indiquer l’effronterie, et le cynisme du regard ; c’est ainsi qu’Achille, furieux de l’enlèvement de la belle Briséïs, appelle Agamemnon.

Vie de patachon

Virmaître, 1894 : Mettre les petits plats dans les grands. Mener la vie à grandes guides. Faire une vie de bâtons de chaises. Mot à mot : faire une vie de chien, comme si la vie n’avait pas de lendemain (Argot du peuple). N.

Vie de polichinelle

France, 1907 : Vie désordonnée, conduite sans frein. Synonyme de vie de patachon ou de bâtons de chaise.

C’était une bourgeoise fort appétissante, blonde, blanche, dodue, beaucoup de malice bonne enfant, dans l’œil très vif et dans le sourire qui découvrait de fort jolies dents. Elle manquait assurément de race, mais était néanmoins charmante dans son bel épanouissement de jeunesse et de santé. Putois la négligeait, d’ailleurs, pour mille raisons dont la plus effective était qu’il avait mené, en son temps, une vie de polichinelle et était médiocrement conservé.

(Armand Silvestre)

Vie de polichinelle (faire une)

Virmaître, 1894 : Avoir une conduite déréglée, se saouler, courir la gueuse, se battre ; en un mot, mener une vie désordonnée. On sait que le polichinelle du guignol lyonnais est le type parfait du bambocheur (Argot du peuple). N.

Viédase

d’Hautel, 1808 : Terme injurieux et grossier, qui signifie poltron, vaurien, ignorant. Ce mot dans l’origine signifioit figure d’âne.

Viedaser

France, 1907 : Lanterner, traîner dans son travail ; vieil argot.

Viédaser

d’Hautel, 1808 : Ne faire rien qui vaille, se battre les flancs, s’amuser à la moutarde.

Rigaud, 1881 : Faire traîner un ouvrage en longueur, travailler avec nonchalance. (XVIIe et XVIIIe siècles.)

Viédaze !

France, 1907 : Exclamation méridionale signifiant littéralement membre d’âne ; on la retrouve en Lorraine sous la forme vieudace, en picard viez d’az. Rabelais écrivait vietdaze.

Je connais des patelins — les Landes, le Gers, par exemple — où la dime existe encore de fait, sinon de droit, et est restée ancrée dans les usages locaux. Dans l’Armagnac, des ratichons de campluche se font des deux et trois pièces d’eau-de-vie — de quoi téter une rude goutte, dirait l’évêque Soulard.
Mais ces vieilles coutumes se perdent de jour en jour, heureusement, viédaze !

(Le Père Peinard)

Vieille

Larchey, 1865 : Vieille eau-de-vie. — Vieux de la vieille :

Vieux soldat de la vieille garde ; le vieux de la vieille comme on dit.

Balzac.

Ma vieille : Mon vieil ami.

Eh bien ! Raoul, ma vieille, comment que ça va.

Jaime.

L’emploi de ce féminin a sans doute paru plus tendre. On dit aussi vieux. V. Ému, Cocarde. — Vieux : Amant d’un âge mûr. V. Monsieur.

Delvau, 1866 : s. f. Eau-de-vie qui devrait avoir cent sept ans et qui n’a que quelques mois.

Rigaud, 1881 : Mère, — dans l’argot du peuple.

Rigaud, 1881 : Eau-de-vie vieille, vieux cognac.

Vieille (elle est)

Rigaud, 1881 : La plaisanterie, l’histoire est vieille, connue.

On me dit : madame est au bain. Je dis : elle est trop vieille celle-là !

(Th. Barrière et Lambert Thiboust, Les Jouisses de l’amour.)

Vieille (ma)

Delvau, 1866 : s. f. Expression de tendresse banale employée entre hommes, — je me trompe, entre cabotins.

Rigaud, 1881 : Terme d’amitié. C’est-à-dire vieux de la vieille garde, ancien camarade, — dans le jargon des cabotins. — Un vieux pilier de café m’a assuré que le mot était employé par allusion à la vieille eau-de-vie, que les habitués aiment beaucoup ; d’où quelqu’un pour qui on a de l’affection ou simplement de la sympathie devient « votre vieille ».

Apollon, Épicure et le sultan Belboula se succèdent en s’appelant ma vieille.

(Monselet, Acteurs et actrices.)

Bientôt le café fut plein… il y avait des renommées, même des gloires… hommes et femmes s’appelaient ma vieille, ma petite vieille. C’est courant, et il y a longtemps que cela dure.

(L. Veuillot, Les Odeurs de Paris.)

Vieille barbe

France, 1907 : Sobriquet donné aux hommes qui ont pris part à la révolution de 1848 et qui furent en grande partie condamnés à la déportation par la haute cour de justice de Bourges et amnistiés en 1859. Avec Albert Martin, connu sous le nom de « l’ouvrier Albert », mort à Mello (Oise) en mai 1895, à l’âge de quatre-vingts ans, disparut la dernière vieille barbe de 48.

Cette histoire si proche de nous a été la plus fausse, la plus dénaturée, la plus absurdement interprétée par tous les poux de la vieille barbe. Et ce qu’il y a de plus écœurant, c’est que la vieille barbe n’était pas sincère. Elle convoitait tout bonnement, cette vieille barbe, la succession des « tyrans » et des « sbires ». Elle maudissait et dénonçait les hommes d’argent parce qu’elle avait à son tour un vif besoin d’argent et le désir de faire des affaires.

(Léon Daudet, Les deux Frances)

Les illustrations du passé qu’on appelait dans l’intimité les vieilles barbes, les vieux bonzes et même les vieilles bêtes…

(Hector France, Mes petits papiers)

Vieille branche

France, 1907 : Vieux camarade, ami sur lequel on s’appuie comme sur une branche, hélas ! souvent pourrie.

Pardon, encor’, ma vieille branche,
Tu dis que ce mot de revanche
A disparu de nos discours ?
Vois-tu, le mot n’est pas la chose :
On ne le dit pas, et pour cause,
Pourtant on y pense toujours.

(Raoul Ponchon)

Vieille canne

France, 1907 : Repris de justice.

Vieille culotte de peau

Delvau, 1866 : s. f. Général en retraite, — dans l’argot des troupiers.

Rigaud, 1881 : Officier en retraite. Officier émérite qui a conservé dans la vie civile les habitudes militaires.

Vieille femme et jeune garçon, mariage de démon

France, 1907 : Vieux dicton indiquant qu’un jeune homme et une vieille femme font un ménage d’enfer, car par sa jalousie la vieille joue dans l’intérieur le rôle du diable.

Vieille garde

Rigaud, 1881 : Vieille courtisane. (H. Meilhac.) Celle-là se rend et ne meurt pas.

La Rue, 1894 : Femme galante âgée.

France, 1907 : Courtisane vieille, prostituée hors d’âge.

Il pouvait citer tel et tel, des noms, des gentilshommes de sang plus bleu que le sien aujourd’hui collés légitimement et très satisfaits, et pas reniés du tout, avec de vraies roulures, avec des vieilles gardes !

(Jean Richepin, La Glu)

L’allée de droite était appelée : l’Allée du Commerce, celle de gauche, à peine éclairée à cause de la galerie qui surplombait, avait été baptisée : Allée de la Grande Armée ; cette dénomination était admirablement justifiée ; tout ce que Paris comptait de vieilles gardes s’y rencontraient chaque soir. Rien n’était plus horrible à voir que cet assemblage de ruines, paraissant encore quelque chose grâce à des artifices de tous genres, vêtues comme si elles avaient vingt ans, maquillées d’une façon épouvantable, se tenant à peine sur leurs vieilles jambes, souriantes malgré cela, agaçant les jeunes gens. Ah ! c’étaient de rudes travailleuses ! Mais quelle devait être la désillusion des malheureux qui se laissaient entraîner par elles quand ils s éveillaient le lendemain : ils s’étaient couchés avec une jeune fille, ils se réveillaient avec une grand’mère, plus horrible cent fois que la plus horrible des sorcières.

(Ch. Virmaître, Paris oublié)

Vieille médaille

Delvau, 1866 : s. f. Vieille femme usée par le frottement de la vie. Argot des faubouriens.

Vieille moustache

France, 1907 : Vieux soldat.

Je me rappelle notre arrivée au quartier. Le major, une vieille moustache grise, nous rassembla et, du milieu du cercle que nous formions, félicita le détachement de sa tenue pendant le voyage : « Ni pochards, ni mauvaises têtes, c’est pas de la blague (sic) ; il y a longtemps que je n’avais vu cela ! Je suis satisfait de vous. »
L’excellent homme qui haranguait ainsi des réservistes eût fait d’eux ce qu’il aurait voulu. Il n’y avait qu’à les regarder pour s’en convaincre.

Vieille mule, frein doré (à)

France, 1907 : Il faut parer une marchandise de rebut pour s’en défaire.

Vieille peau

Virmaître, 1894 : Expression méprisante employée dans le peuple, même vis-à-vis d’une personne jeune. On dit d’un vieillard qui se donne des allures juvéniles :
— C’est un jeune homme dans une vieille peau.
Vieille peau
signifie aussi : vieille putain (Argot du peuple).

France, 1907 : Vieille putain ; expression populaire.

Parmi les ouailles les plus ferventes, se faisait remarquer une ancienne rôtisseuse de balai, qui, après avoir fait les quatre cents coups, s’était retirée du monde de la noce en voyant fuir les amoureux, et, comme toutes les vieilles peaux, se jetait dans les bras du bon Dieu.

(Hector France)

Vieille roche

France, 1907 : Vieille noblesse.

On voit des marquis d’la vieill’ roche
Qui n’ont plus un sou dans leur poche…
On voit des filous, bons apôtres,
Qui s’engraiss’nt aux dépens des autres…
On voit des pickpockets habiles
Qui dévalis’nt les imbéciles…
Et parmi ces escrocs d’la gomme
On voit quèqu’fois un honnête homme,
Sur l’Boul’vard.

(Aristide Bruant)

Vieillerie

d’Hautel, 1808 : Pour dire des guenilles ; des idées usées et rebattues, des lieux communs.

Vieilles (foire aux)

France, 1907 : Nom donné aux environs de La Châtre à certaines foires qui ont lieu pendant le carême ; on les appelle aussi foires maigres. Les foires grasses dans les mêmes localités sont celles où l’on vend du bétail gras, et les foires aux femmes grosses, celles où il vient peu de monde, où les femmes enceintes peuvent circuler librement sans crainte des heurts.

Vieillesse

d’Hautel, 1808 : Ce sera mon bâton de vieillesse. C’est-à-dire, c’est lui qui me soutiendra dans ma vieillesse, qui me consolera dans mes afflictions, qui me soulagera dans mes infirmités.

Vieillesse qui dort, jeunesse qui veille, signe de mort

France, 1907 : Vieux dicton qui s’explique de lui-même.

Vieillisseur

France, 1907 : Marchand ou ouvrier qui donne aux meubles neufs un aspect de vétusté ; qui vend ou fabrique du faux vieux.

Vieillisseuse

Fustier, 1889 : « J’ai fait la connaissance d’une vieille femme qui exerce aujourd’hui la profession de vieillisseuse… nos boulevards, vous le savez, sont sillonnés de petites marchandes d’amour que leur extrême jeunesse expose souvent aux indiscrétions de la police… A l’aide de certains onguents, elle (la vieillisseuse) parvient à donner aux traits trop tendres des gamines l’expression d’un visage de 18 à 25 ans. »

(Figaro.)

France, 1907 : Proxénète qui attire et maquille les jeunes filles mineures de façon à les faire paraître majeures, à cause non des clients, mais de la police.

— Tante Pascaline a pris la suite des affaires et les recettes d’une vieille amie à elle qui lui voulait du bien. Elle est vieillisseuse. Ça ne vous dit rien, cette profession-là ? Je vais vous l’expliquer… Grâce à elle, à ses drogues, à ses maquillages, les petites précoces et vicieuses, les premières communiantes d’amour que les vieux prudents renvoient si souvent à l’école, peuvent tenter le coup, se lancer, trouver chaussure à leur pied… Elle les métamorphose en un mois, éteint le rose trop violent de leurs joues, cerne leurs yeux, leur donne une apparence de lassitude, pétrit si bien leur doux visages de fillettes qu’on leur donnerait au moins dix-sept ans… Et les libertins qu’affriande a chair à peine nubile, mais qui redoutent comme la peste les chantages, les descentes de police, les surprises, les toiles d’araignées d’où l’on ne sait comment s’évader, s’y laissent piper, se figurent que ces bouquetières qui leur épinglent un œillet à la boutonnière en se haussant sur la pointe des bottines, que ces faux trottins dont ils emboitent le pas dans les rues désertes, le soir, et dans les passages lointains ; que ces primeurs que leur vendent les proxénètes ont presque l’âge réglementaire, ne sauraient leur attirer aucun désagrément.
— Et cela lui rapporte, ce métier bizarre ?
— Dans les quinze mille par an…

(Champaubert)

Vieillot

France, 1907 : Fauteuil ; argot faubourien. C’est le siège ordinaire des vieillards.

Vielle

d’Hautel, 1808 : Long comme une vielle. Pour lambin, longis, traînard, paresseux, musard, homme excessivement nonchalant.

Vielle (long comme une)

France, 1907 : Se dit dans les campagnes du Centre d’une personne lente, qui n’en finit pas de faire quelque chose, qui est toujours en retard. Allusion aux sons trainants de la vielle, surtout dans les préludes du musicien attendant que les danseurs soient tous en place, ou bien lorsqu’il ralentit malicieusement son rythme pour les inviter à s’embrasser à un signal donné par l’instrument.

Viellot, vieillotte

d’Hautel, 1808 : Cet adjectif est plus usité au féminin qu’au masculin ; il se dit particulièrement d’une femme petite et ramassée, dont les traits annoncent la vieillesse et un âge avancé.

Vierge

Delvau, 1864 : Fille qui n’est pas encore devenue femme, c’est à-dire dont le vagin n’a pas encore été habité par un membre viril, — mais dont l’imagination a été hantée par mille visions lubriques.

Non, je n’appelle pas vierge une jeune fille
Qui donne des cheveux à son petit cousin,
Ou qui, chaque matin, se rencontre et babille
Avec un écolier dans le fond du jardin.

Alph. Karr.

Je veux mourir, si je me souviens d’avoir jamais été vierge ! dit Quartilla à Encolpe, — et beaucoup de femmes pourraient en dire autant.

Vierge (demi-)

France, 1907 : Jeune personne à qui rien de l’amour n’est étranger, excepté le ça de la complaisante petite bourgeoise de Pot-bouille.

Le journalisme est, bien plus que le roman, le grand lanceur des néologismes. Si Alphonse Daudet a fait la fortune du vocable estradiers (pour ne citer que celui-là) qui rend bien l’idée de politiciens pérorant sur une estrade ; si, en une satire retentissante, son fils Léon a fait adopter le sobriquet cruel de morticoles appliqué aux médecins ; si un livre de M. Marcel Prévost a doté la langue de l’appellation demi-vierges ; si dix ou vingt autres mots ont de même leur date de naissance inscrite sur la couverture de quelque volume très lu, c’est par centaines que se chiffrent les locutions nouvelles nées des fantaisies de la chronique.

(Pontarmé)

Un autre, avant Marcel Prévost, employa cette expression ou du moins son synonyme.

C’était un amant évincé de la Clairon, Gérard de la Bataille, qui écrivit contre la célèbre actrice un libelle ayant pour titre : « Frétillon, ou Mémoires de Mlle Cronel » — 1740 — dans lequel nous relevons cette phrase : « Je n’étais pas moins malgré cela proposée comme exemple à mes compagnes : Une actrice est une demi-vestale quand elle n’a qu’un adorateur.

Citons maintenant l’auteur de ce néologisme.

Chacun a reconnu l’existence de la demi-vierge. La demi-vierge existe dans le monde aristocratique comme dans celui de la haute bourgeoisie, qui, d’ailleurs, fréquente à peu près les mêmes salons, comme aussi dans celui des fonctionnaires ; elle existe en province comme à Paris. À ceux qui contestent la vérité de mes observations, je dirai que j’ai longtemps vécu en province, et que j’ai vu de très près le monde des fonctionnaires et de la haute bourgeoisie.
La demi-vierge, en effet, devient chaque jour plus nombreuse, parce qu’elle est du genre contagieux : telles sont contagieuses les mauvaises habitudes chez les collégiens. Il suffit d’une demi-vierge pour contaminer toute une ville. La demi-vierge gagne du terrain absolument comme le phylloxera apparaissant dans un vignoble a vite fait de tout détruire en peu de temps.

(Marcel Prévost)

Vierge (fuseau de la)

France, 1907 : Bélemnite ; expression du Centre. Allusion à la forme allongée de cette coquille fossile.

Vierge de comptoir

Delvau, 1866 : s. f. Demoiselle de caboulot, — dans l’argot ironique du peuple, qui ne se doute pas qu’il a emprunté ce mot à John Bull : Bar-maids, disent les Anglais à propos des mêmes Hébés.

Vierge fait la lessive (la)

France, 1907 : Dicton angevin employé quand il pleut et qu’en même temps le soleil brille ; il répond à celui-ci : Le diable bat sa femme. Dans le Nord on dit : Kermesse en enfer.

Vierge Marie se montre aux fous (la)

France, 1907 : Vieux dicton du XVIe siècle dont devraient se souvenir les pèlerins de Notre-Dame de la Salette et ceux de Lourdes, si jamais idiots avaient de la mémoire.

Vieux

d’Hautel, 1808 : C’est un jeune homme avec un vieux visage. Se dit par moquerie pour faire entendre qu’un homme est plus âgé qu’il ne veut le paroître.
J’en suis las comme d’une vieille morue. Voy. Morue.
Se faire vieux. Parvenir à un âge avancé, vieillir.
Vieux comme Hérode, comme les rues. C’est-à-dire connu depuis nombre de siècles, depuis temps immémorial. Se dit aussi pour se railler d’un homme très-avancé en âge.
C’est de la vieille drogue ; de la vieille mercerie. Se dit pour abaisser la valeur de quelque chose.
Des contes de vieilles. C’est-à-dire des récits qui ne méritent aucune croyance.
C’est du vieux jeu. Pour ces contes, ces tours sont connus, on n’y croit plus, on ne s’y laisse plus attraper.

Delvau, 1866 : s. m. Amant en cheveux blancs ou gris, et même sans cheveux, — dans l’argot des petites dames. Avoir son vieux. Être entretenue.

Rigaud, 1881 : Père, — dans le jargon des ouvriers. — Le vieux se décatit joliment.

Rigaud, 1881 : Amant sérieux, à lunettes, ventru, riche, et frisant la cinquantaine.

Vieux ! (c’est)

Merlin, 1888 : Réponse à celui qui cherche à vous monter le coup, et qui peut se traduire de cette façon : À d’autres ! je la connais ! Elle est verte signifie encore : c’est raide, épatant, incroyable.

Vieux (se faire)

Delvau, 1866 : S’ennuyer, attendre plus qu’il ne faudrait ; rester longtemps quelque part. Argot du peuple.

Rigaud, 1881 : Attendre quelqu’un avec impatience ; se tourmenter. Les variantes sont : Se faire viocque, se faire antique.

C’est rasant… C’est que je me fais vieux.

(La Vie moderne, 2 août 1879.)

Merlin, 1888 : S’ennuyer, trouver le temps long.

La Rue, 1894 : Se tourmenter, s’ennuyer.

Vieux beau

France, 1907 : Galantin.

Cette révolte contre la nature, les hommes ne sont pas seuls à la connaitre. Les femmes en éprouvent aussi la désespérance, plus profonde encore que celle des hommes qui, en somme, prolongent plus aisément l’âge d’aimer. Quand je vois passer les vieux beaux, soupçonnant la ceinture hygiénique sur leur ventre rebelle, redressant leur taille, portant une main inquiète sur la barbe noircie ; et aussi quand je vois défiler celles qui furent belles, les cheveux teints, la joue fardée, la gorge s’évadant de la prison insuffisante du corset, une grande pitié me prend.

(Colomba, Écho de Paris)

Vieux cabas

France, 1907 : Vieille femme avare.

Vieux chien

France, 1907 : Il n’est chasse que de vieux chiens.

Vieux comme Hérode

France, 1907 : C’est Hérodote qu’il faudrait dire. Vieux comme Hérode n’a aucun sens. On disait autrefois vieux comme Hérodote par allusion aux radotages de cet historien fort crédule et grand ami du merveilleux.
On dit aussi : vieux comme le Pont-Neuf, allusion à l’ancienneté de ce pout, Le plus vieux de Paris. En Normandie : Vieux comme le pont de Rouen, à cause de l’ancien pont de pierre construit au XIIe siècle par Mathilde, veuve d’Henri V, empereur d’Allemagne, et remariée au comte d’Anjou Geoffroy Plantagenet. Les ruines de ce pont se voyaient encore il y a quelques années au-dessus des basses eaux ; vieux comme les rues ou comme Mathieu-Salé, pour Mathusalem, qui, selon le roman biblique, vécut mille ans !

Vieux comme les rues

Delvau, 1866 : adj. Extrêmement vieux. On dit aussi Vieux comme Mathieu-salé, — par corruption de Mathusalem, un patriarche.

Vieux de la vieille

France, 1907 : Les anciens de la vieille garde. Types depuis longtemps disparus et qui n’existent plus, écrivait déjà, en 1840, Émile Marco de Saint-Hilaire, que dans les dessins de Charlet, les tableaux de Bellangé et les vignettes de Raffet.

Les vieux de la vieille ! les soldats du grand empereur !… Ils étaient si superbes, ces Diomède et ces Idoménée de l’Iliade moderne, que tous ceux qui en ont parlé, qui les ont réunis d’après nature, en ont reçu comme un coup de génie, comme un souffle d’épopée. Voyez plutôt, dans le seul Balzac, toutes ces belles figures militaires : Hulot, devenu sourd à force d’entendre le canon. Chabert le spectre, montrant la cicatrice de son crâne, et ce formidable truand de Philippe Bridau, avec son regard bleu d’acier « qui plombe les imbéciles. »

(François Coppée)

Vieux jeu

Delvau, 1866 : s. m. Méthode classique, procédé d’autrefois pour faire des chansons, des vaudevilles, des romans. Argot des gens de lettres.

France, 1907 : Vieille façon, vieille manière d’agir ou de penser ; terme populaire.

C’était un notaire de la vieille école, un notaire vieux jeu, fier de ses panonceaux, d’une probité qu’aucun soupçon n’avait jamais effleurée, de la délicatesse la plus scrupuleuse, d’une exquise courtoisie, et non moins renommé pour sa prudence, son tact et ses sages conseils.

(Albert Cim, Jeunes amours)

Dans la rue né jamais offrir le bras ; on aurait l’air vieux jeu, rococo, 1830, si l’on agissait autrement. Il faut avouer, du reste, qu’avec les préoccupations des relevages de traîne, avec les embarras du manchon, du parapluie ou de l’ombrelle, la nouvelle habitude est infiniment plus pratique pour les dames.

(H. Barthélémy, La Vie élégante)

Vieux marcheur

France, 1907 : Vieux débauché, homme mûr qui court après les jupes courtes.

Les Roméos de notre temps ne sont pas trop aimants. On cite de quelques-uns des traits affreux, des mots épouvantables. « J’aime mieux les femmes que je paie, disait l’un d’eux, fier de son imbécile cynisme : ça vous dispense des égards. » Le vieux marcheur, au contraire, ne se dispensera pas des égards, où il met ses joies, même envers la femme qu’il paie. Les femmes savent très bien ces choses, beaucoup, assez vite, arrivent à estimer que, comme il est rare qu’on puisse tout avoir en ce monde, ce qui est doux et durable vaut encore mieux que ce qui est violent et passager. Et c’est ainsi que, très enviable parfois, le vieux marcheur peut encore cueillir une rose dans le jardin où l’inattentive jeunesse passe trop vite, dévastatrice, parfois, comme Attila, mais ignorant la douce et forte joie des amours qui sont faites, un peu mélancoliques, mais exquises, de la dernière tendresse guérissant ou faisant oublier les blessures de la vie.

(Colomba)

Vieux meuble

Delvau, 1866 : s. m. Vieillard, personne impotente, bonne à mettre au rancart de la vie.

France, 1907 : Vieillard impotent.

Vieux monsieur (le)

Delvau, 1864 : L’homme qui entretient une femme, pour le distinguer du jeune — ou des jeunes — qu’elle entretient elle-même.

C’était par un temps pluvieux,
Nos bell’s n’avaient pas leurs vieux.

A. Watripon

Celle-là, sur un lit nonchalamment couchée,
Par un vieux cupidon était gamahuchée.

L. Protat.

À son âge, on n’a plus d’amour…
— Oui mais on a plus d’un caprice.
Quand mon fils est par trop méchant,
Tu sais comment je le corrige,
— Eh ! mais c’est ainsi, justement
Que j’entretiens le sentiment
De ce vieux monsieur qui m’oblige.

(Chanson anonyme moderne.)

Toinette, fraîche dondon,
Chantait ainsi son martyre,
Pensant à son vieux satyre…
Tout en plumant un dindon.

J. Poincloud.

Vieux plumeau

France, 1907 : Viel imbécile ; argot populaire.

Ell’ dit : Il ne sent pas bon !
— Pas bon ?… Espèce de vieille cruche !
Dit la marchand’, vieux plumeau !
T’en mang’rais plus que d’merluche !…
Va donc, eh ! fourneau !

(A. Queyreaux)

Vieux pompon

France, 1907 : Même sens que vieux plumeau.

Vieux style

Delvau, 1866 : s. m. Se dit de toute chose démodée, de tout procédé tombé en désuétude, de toute idée arriérée, etc.

Vieux tison

Delvau, 1866 : s. m. Galantin, vieillard amoureux.

France, 1907 : Vieillard amoureux.

Vieux-aux-trottins

France, 1907 : Vieillard qui suit les fillettes.

Échelonnés par deux, par trois, par quatre à droite et à gauche de la rue bruyante, sous les larges portes cochères, devant les magasins, à côté des kiosques, aux abords de la place où si haute, entourée d’hôtels muets, s’élance la Colonne, telle en l’obscurité qu’une étrange borne phallique dominant les luxures déchainées, les vieux-aux-trottins passent et repassent, attendant celles qui ont tiré l’aiguille tout le jour dans les ateliers empuantis.

(René Maizeroy)

Vieux-bahut

France, 1907 : Nom donné par les saint-cyriens à l’École spéciale militaire, et au Prytanée par les élèves de l’École de la Flèche.

Nous retrouvons les camarades du Vieux-Bahut dans un de ces diners joyeux où les rires sonnent des fanfares, où les verres se choquent, où l’on croit encore avoir vingt ans et son premier galon, où l’on se reconnait si vite malgré les jours enfuis, où l’on évoque tant de souvenirs demeurés intacts au fond du cœur.

(René Maizeroy)

J’ai gardé bien des souvenirs du Vieux Bahut de la Flèche, quelques-uns agréables, un plus grand nombre mêlés d’amertume et d’étonnement sur la singulière façon dont on comprenait l’éducation de la jeunesse militaire.

(Hector France, Souvenirs du Bahut)


Argot classique, le livreTelegram

Dictionnaire d’argot classique