Larchey, 1865 : Élégance.
Vous serez ficelé dans le chic.
Montépin.
L’officier qui a du chic est celui qui serre son ceinturon de manière à ressembler à une gourde.
Noriac.
À l’École de Saint-Cyr, sous le premier Empire, chic était déjà synonyme d’Élégance militaire. Une esquisse qui a du chic a un bon cachet artistique.
Il lui révéla le sens intime de l’argot en usage cette semaine-là, il lui dit ce que c’était que chic, galbe.
Th. Gautier, 1838.
Une tête faite de chic, tout au contraire, n’a rien de sérieusement étudié. ici, chic est à l’art ce que ponsif est à la littérature.
C’étaient là de fameux peintres. comme ils soignaient la ligne et les contours ! comme ils calculaient les proportions ! ils ne faisaient rien de chic ou d’après le mannequin.
La Bédollière.
Chic, quelquefois, veut dire mauvais genre, genre trop accusé.
C’était ce chic que le tripol colle à l’épiderme des gens et qui résiste à toute lessive comme le masque des ramoneurs.
P. Féval.
Chic est, on le voit, un mot d’acceptions fort diverses et fort répandues dans toutes les classes. — Vient du vieux mot Chic : finesse, subtilité. V. Roquefort. — C’est donc, mot à mot, le fin du fin en tout genre, et les exemples les plus anciens confirment cette étymologie, car ils prennent tous chic en ce sens.
Delvau, 1866 : s. m. Habileté de main, ou plutôt de patte, — dans l’argot des artistes, qui ont emprunté ce mot au XVIIe siècle. Faire de chic. Dessiner ou peindre sans modèle, d’imagination, de souvenir.
Delvau, 1866 : s. m. Goût, façon pittoresque de s’habiller ou d’arranger les choses, — dans l’argot des petites dames et des gandins. Avoir du chic. Être arrangé avec une originalité de bon — ou de mauvais — goût. Avoir le chic. Posséder une habileté particulière pour faire une chose.
La Rue, 1894 : Distinction, élégance, cachet. Facilité banale ou bon goût en art. Signifie aussi mauvais genre en art.
Virmaître, 1894 : Il a du chic, il est bien.
C’est une femme chic, un beau porte-manteau, sa toilette est bien accrochée. L’origine de cette expression n’est pas éloignée. Un ministre de l’Empire, habitué des coulisses de l’Opéra, envoya deux danseuses du corps de ballet souper à ses frais chez le restaurateur Maire. Très modestes, elles ne dépensèrent à elles deux que quinze francs. Quand le ministre demanda la note, il lit la moue. Le soir même il leur en lit le reproche et leur dit : Vous manquez de chic, pas de chic. Quelques jours plus tard il renvoya deux autres danseuses souper au même restaurant. Elles dépensèrent cinq cents francs. Quand il paya il lit une grimace sérieuse : Trop de chic, trop de chic, fit-il. Le mot fit fortune dans les coulisses et est resté (Argot des filles).
France, 1894 : Goût, certaine façon de faire, de s’habiller, qui sort de la banalité. Ce mot, d’ailleurs, a des acceptions fort diverses et n’est pas moderne, comme on le croit généralement. Dans le patois béarnais, chic signifie petit et, dans la langue romane, subtilité, finesse, dont on a fait chicane. D’autre part, certains étymologistes le font venir du mot allemand schick, aphérèse de geschick (tournure, talent).
« Comme nous usions du mot chic, dans l’armée, sous le premier Empire, dit Lorédan Larchey, ce serait un mot qui aurait repassé le Rhin avec elle. »
Cependant, un poète satirique du XVIe siècle, du Lorens, qui était en même temps magistrat. écrit :
J’espère avec le temps que j’entendrai le chic.
Plus tard, Fougeret de Monbron écrit dans sa Henriade travestie :
La discorde, qui sait le chic,
En fait faire un décret public.
Lorédan Larchey donne à ce mot cinq acceptions différentes : distinction : élégance de toilette ou d’ameublement ; cachet artistique, originalité : facilité banale n’ayant rien de sérieusement étudié, le contraire, par conséquent, de la signification précédente, et enfin mauvais genre, qui contredit sa première acception. C’est-à-dire que ce mot s’emploie un peu à tort et à travers.
Ce n’est certes point l’Académie française qui a inventé le mot chic, dit Jeanne d’Antilly. Sait-on seulement qui l’a lancé ? Or, il a si bien fait son chemin que force nous a été de le reconnaître et de lui donner asile Laissons donc les gens créer leur langage. Ne sanctionnons que ce qui sera digne de l’être. Voilà toute notre tâche.
Quelques exemples seront préférables à toutes les définitions.
Mais Mathilde rit de si bon cœur que toutes l’entourent ; elle raconte comment elle se mettait une grosse natte de faux cheveux, et comme quoi la poudre de riz lui donnait une teinte de pêche : cela lui allait bien aussi, les lèvres avivées de carmin et les yeux noircis jusqu’aux tempes, même qu’un jour son oncle lui avait dit : « Tu es très chic, tu as l’air d’une cocotte », et il s’y connaissait diablement, son oncle.
(Jeanne Thilda)
Oh !… je sais qu’il est beaucoup plus chic de pousser des cris de paon, de grogner, de protester contre l’envahissement toujours croissant du naturalisme au théâtre, de parler avec enthousiasme des « procédés » de M. Scribe, et d’appeler M. de Saint-Georges avec des larmes dans la voix… je sais ça !.. mais comme je me suis pas un homme chic, je me fiche un peu de ce qui est chic ou pas chic… je dis ce que je pense !… et voilà !…
(Scamp, Gil Blas)
On dit : faire de chic, écrire de chic, peindre de chic.
La tête est suffisamment solide, bien en pâte ; mais c’est fait de chic, avouez-le.
(Clovis Hugues)
Une page d’observation sincère est certainement préférable à ces énormes ouvrages faits de chic, et presque toujours pour le besoin d’une cause, pour la défense d’un système.
(E. Montenaux)
Être pourri de chic se dit plaisamment comme superlatif.
Pourri de ce chic qu’on lui dénia,
Le plastron fleuri du gardénia,
Ganté, parfumé, craquant des bottines,
L’œil rond vitré du monocle carré…
(Émile Bergerat)
L’expression homme chic, femme chic s’emploie souvent :
Seule, la conviction d’agir comme les duchesses, toutes les femmes chic, avait pu la vouer à l’adultère. Maintenant, elle doutait un peu si le fait de retirer sa chemise illégalement suffisait à la rendre aussi grande dame que telles et telles citées pour leurs frasques armoriées.
(Paul Adam)
Sulpice éprouvait, comme toujours, dans ce milieu où tout était sacrifié au chic, cette sensation pénible de l’homme en continuelle représentation. Il n’allait pas dîner en ville sans se heurter au même menu, à la même timbale et à la même conversation.
(Jules Claretie, Monsieur le Ministre)