Aiglefin
Delvau, 1866 : s. m. Chevalier d’industrie, escroc du grand et du petit monde, vivant aux dépens de quiconque l’écoute.
C’est à dessein que je donne cette orthographe, qui est aussi véritable, — c’est-à-dire aussi problématique, — que l’orthographe officielle, aigrefin. Le peuple prononce le nom comme je l’écris : est-ce par euphonie, est-ce par tradition ? je l’ignore, et les savants n’en savent pas plus que moi là-dessus « Aigre faim, faim très vive (homme affamé) », dit Littré. Sans doute, mais il y a eu jadis une monnaie dite aiglefin, et les escrocs ne sont pas moins affamés d’argent que d’autre chose.
France, 1894 : Filou, chevalier d’industrie. Le peuple prononce ce mot tel qu’il doit être écrit, tandis que les puristes disent aigrefin, qui n’a aucune signification. L’orthographe populaire s’explique d’elle-même, escroc hardi et entreprenant, vivant comme l’aigle de hardies rapines. C’est aussi le nom d’une ancienne monnaie.
Arriver à ses fins
Delvau, 1864 : Finir par baiser une femme pour laquelle on bandait, — ce qui est la fin de tout roman d’amour.
Là ! tu en es arrivé à tes fins, petit cochon !
Watripon.
As-tu fini !
Rigaud, 1881 : C’est-à-dire : as-tu fini de faire des embarras, as-tu fini de nous ennuyer !
As-tu fini ? ou as-tu fini tes manières ?
France, 1894 : Expression populaire, signifiant : Vous avez beau faire, vous ne me tromperez pas.
Bête à deux fins
France, 1894 : Trique ou canne ; ce que les Arabes appellent Sidi Matraque, Monseigneur le Bâton, Privat d’Aiglemont explique cette dénomination : « Cet aimable époux prenait sa bête à deux fins (c’est ainsi qu’il nommait sa canne, parce qu’elle lui servait à faire taire et à faire crier sa femme). »
Biffin
Clémens, 1840 : Chiffonnier.
Rigaud, 1881 : Soldat d’infanterie de ligne, — dans le jargon des soldats des autres armes. — Son crochet à lui c’est son fusil.
La Rue, 1894 : Chiffonnier. Soldat d’infanterie.
Virmaître, 1894 : Chiffonnier. Ainsi dénommé par le peuple à cause de son crochet qui lui sert à deux fins : à se défendre et à travailler. Depuis 1818, on dit d’un chiffonnier qu’il est membre du comité de recherches. Allusion à ce qu’il fouille dans les tas d’ordures pour y trouver sa vie (Argot du peuple).
Rossignol, 1901 : Chiffonnier. On nomme aussi les soldats de la ligne des biffins.
Hayard, 1907 : Chiffonnier.
Biffin, biffine
Rigaud, 1881 : Chiffonnier, chiffonnière. Tout ce qui porte la hotte est connu dans la corporation des chiffonniers sous le nom de « biffin ».
France, 1894 : Chiffonnier, chiffonnière.
Dans un quartier purotin,
Polyte naquit un matin,
D’un biffin et d’une biffine.
(E. Blédort.)
Se dit aussi pour fantassin, à cause sans doute du sac qui se porte comme la hotte.
Biffin, bifin
Larchey, 1865 : Chiffonnier. — Ce n’est pas le chiffonnier pur-sang, c’est celui qui a déchu d’une position meilleure. De là sans doute le nom de biffin : goulu, donné par l’ancien chiffonnier au nouveau venu.
J’ vois deux bifins et leurs femelles.
Chansonnier, 1836.
Bifin
Delvau, 1866 : s. m. Chiffonnier, — dont le crochet sert à deux fins, à travailler et à se défendre.
Merlin, 1888 : Fantassin dont le sac est la hotte. Se dit aussi des prévôts d’arme dans la cavalerie.
Champagne (fine)
Larchey, 1865 : Eau-de-vie fine. — Du nom d’un village de la Charente-Inférieure.
Nous lui ferons prendre un bain de fine champagne.
Cochinat.
Coffin
Rigaud, 1881 : Table volante pour le travail, — dans le jargon des élèves de l’école polytechnique ; nom donné en souvenir du général Coffinières.
France, 1894 : Sorte de pupitre mouvant dont se servent les polytechniciens. Abréviation de Coffinières, en souvenir du général qui a introduit ce meuble dans l’École. Singulière analogie, coffin, en anglais. signifie boîte, cercueil.
Coffiner
France, 1894 : Faire cuire lentement, mijoter.
Coffiner (se)
France, 1894 : Prendre ses aises, se dorloter.
Comte de Gigot-fin
Delvau, 1866 : s. m. Beau mangeur, — dans l’argot du peuple, qui ne craint pas de créer des types comme Molière et d’anoblir des vilains comme Napoléon.
Coup de poing de la fin
Delvau, 1866 : s. m. Mot ironique ou cruel, qu’on lance à la fin d’une conversation ou d’un article. Argot des gens de lettres.
France, 1894 : « Mot ironique ou cruel qu’on lance à la fin d’une conversation ou d’un article de journal. »
(Alf. Delvau)
Dauffe, Dauffin
Rigaud, 1881 : Pince, ciseau à froid, fausse clé, — dans l’ancien argot.
Dauphin ou Dos fin
Delvau, 1866 : s. m. Souteneur de filles ; homme-poisson ad usum Delphinæ, ou toute autre sainte de même farine ou de même charbon.
Enfin
d’Hautel, 1808 : C’est donc enfin fini. Exclamation dérisoire ; se dit lorsqu’un ouvrage, après avoir traîné pendant long-temps, vient d’être terminé.
Être en fine pégraine
Delvau, 1866 : v. n. Être à toute extrémité, — dans l’argot des prisons.
Virmaître, 1894 : Être sur le point de mourir.
— Le ratichon vient d’être epprené au castu, pour faire avaler le père la Tuile au frisé, il va tourner de l’œil (Argot des voleurs).
Faire une fin
Delvau, 1864 : Se marier. — Après avoir bien vécu, bien fait la noce, devenir épicier, maître de bordel et… cocu, comme X, Y et Z, que tout le monde connaît. — Ces dames font également une fin.
Quoique l’état ne manque pas
D’appas,
Foi de Margot, si ça ne reprend pas,
Je m’expatrie.
Ou bien je me marie ;
Il faut enfin
Que je fasse une fin.
F. Seré.
Delvau, 1866 : v. n. Se marier, — dans l’argot des viveurs, qui finissent par où les gens rangés commencent, et qui ont lieu de s’en repentir.
Fifine
Delvau, 1866 : Réduplication caressante de Joséphine.
Fin
d’Hautel, 1808 : C’est la fin finale. Manière de parier redondante et railleuse, pour dire qu’une chose, qu’une affaire entamée depuis long-temps est absolument terminée.
Plus fin que lui n’est pas bête. Voyez Bête.
Aimer le linge fin. Expression figurée qui signifie aimer les jolies femmes, être grand partisan du beau sexe.
Fin comme l’amble. Se dit d’un homme très-rusé en affaires.
Il est fin comme Gribouille qui se cache dans l’eau peur de la pluie. Phrase équivoque et piquante dont on se sert en parlant d’un nigaud, d’un homme inepte, dont la maladresse et la balourdise font connoître aisément les tours qu’il veut jouer aux autres.
C’est un fin merle, un fin matois, un fin renard, etc.
Fin contre fin n’est pas bon à faire doublure. Signifie qu’il ne faut rien entreprendre contre quelqu’un d’aussi fin que soi.
C’est un gros fin. Se dit par ironie d’un homme d’une grande simplesse. V. Dague.
Fin (faire une)
Larchey, 1865 : Se ranger, en finir avec la vie de jeune homme.
Cependant il faut absolument faire une fin. — Dame, le siècle est positif, et l’on trouve si difficilement à tailler un homme utile dans la peau d’un vieux lion.
Deriège.
Rigaud, 1881 : Se marier, en parlant d’un homme. C’est souvent une triste fin.
Fin de la soupe
Rigaud, 1881 : Guillotine.
Fin-de-siècle
Virmaître, 1894 : Cette expression nouvelle veut dire bien des choses. Un chapeau excentrique est fin-de-siècle. Une chanteuse comme Yvette, une danseuse comme la Goulue, un livre ou une pièce où les expressions sont ce qu’il y a de plus réaliste, tout cela est fin-de-siècle (Argots divers). N.
Finalement
d’Hautel, 1808 : Finalement enfin. Expression qui se dit à une personne dont la conversation impatiente, dont les histoires ne finissent pas, et pour la faire venir au résultat.
Finance
d’Hautel, 1808 : Il est mal dans ses finances. Se dit en plaisantant d’un homme dont les affaires sont dérangées, ou de celui qui a dissipé sa fortune.
Delvau, 1866 : s. f. Argent, — dans l’argot du peuple.
Financer
d’Hautel, 1808 : Il faut financer. Pour dire il faut payer ; il faut dépenser de l’argent.
Financer aux appointemens. Fournir de l’argent à quelqu’un.
Delvau, 1866 : v. n. Payer.
Rigaud, 1881 : Payer, payer pour un autre. — l’entreteneur finance.
Finasser
d’Hautel, 1808 : Agir avec petitesse, être minutieux, surprendre la bonne foi de quelqu’un par de petits subterfuges indignes d’un homme franc et loyal.
Delvau, 1866 : v. n. Ruser, niaiser.
Finasserie
d’Hautel, 1808 : Mauvaise finesse, défaut de loyauté dans une affaire, petitesse.
Delvau, 1866 : s. f. Finesse grossière, procédé de mauvaise foi.
Finasseur
d’Hautel, 1808 : Qui use de petits moyens, qui agit avec petitesse, avec mauvaise foi.
Delvau, 1866 : s. m. Homme méticuleux, qui épilogue sur des riens. On dit plutôt Finassier.
Finasseuse
Delvau, 1866 : s. f. Femme rusée, qui sait faire jouer les fils du pantin-homme.
Finaud
Delvau, 1866 : adj. et s. Homme trop malin et pas assez loyal.
Fine
d’Hautel, 1808 : De la plus fine. Pour dire à mot couvers de la matière fécale.
Le peuple dit habituellement de la pufine.
Larchey, 1865 : Excrément. — Allusion a la fine moutarde.
Un vidangeur de mes amis Nous a chanté la plus fine.
Aubry, Chanson. 1836.
Rigaud, 1881 : Fine Champagne, par abréviation. — Un verre de fine.
Fine pégrenne (être en)
Rigaud, 1881 : Être au plus mal, — être perdu sans ressources, dans le jargon des voleurs.
Fine-galette
Rigaud, 1881 : Élève sans galons, — dans le jargon des Saint-Cyriens.
Fine-lame
Delvau, 1866 : s. f. Homme habile à l’escrime, — dans l’argot des salles d’armes.
Fine-mouche
Delvau, 1866 : s. f. Femme rusée, experte ; homme « malin », — dans l’argot des bourgeois.
Finesse
d’Hautel, 1808 : Des finesses cousues de fil blanc. Ruse maladroite dont il est aisé de s’apercevoir.
Il n’y entend point finesse. Se dit en mauvaise part d’un homme borné et peu habile dans son état ; et en bonne part d’un homme simple et loyal, qui met de la bonhomie dans ses discours et de la droiture dans ses actions.
Finesses cousues de fil blanc
Delvau, 1866 : s. f. pl. Finesses grossières, farces qui sont facilement devinées, trahisons qui sont facilement éventées.
Fini
Delvau, 1866 : adj. Qui atteint le plus haut degré en bien ou en mal. Troupier fini. Soldat parfait. Coquin fini. Drôle fieffé.
Fini (homme)
Rigaud, 1881 : Homme ruiné, perdu moralement ou matériellement.
Moi fini et pleuré de vos beaux yeux, l’ermite, mon père, pourrait bien vous réclamer.
(Maynard de Queilhe, Outre-Mer, 1835.)
Fini, au féminin finie
d’Hautel, 1808 : Le peuple dit finite, ce barbarisme est très-fréquent.
Finir
d’Hautel, 1808 : C’est à ne jamais, à n’en plus finir. Se dit d’un ouvrage qui traîne en longueur ; de quelque chose dont les difficultés vont toujours croissant.
Finir en queue de poisson
Delvau, 1866 : v. n. Finir désagréablement, fâcheusement, tristement, platement, bêtement, — dans l’argot du peuple, qui cependant ne connaît pas le desinat in piscem d’Horace.
Virmaître, 1894 : Chose qui commence bien et finit mal ou pas du tout. Un livre qui commence en empoignant ses lecteurs et se termine bêtement, c’est finir en queue de poisson (Argot du peuple).
Finir en queue de rat
Delvau, 1866 : v. n. finir fâcheusement, tristement, bêtement, — dans l’argot des ouvriers qui ont servi dans l’infanterie de marine.
Finition
Rigaud, 1881 : Achèvement. — Finition du Louvre. (Balzac.)
Finot
d’Hautel, 1808 : Homme rusé, minutieux, d’un intérêt sordide ; fripon adroit qui tire parti de toute chose, sans se compromettre en rien.
Graffin
Delvau, 1866 : s. m. Chiffonnier.
Grafin
Rigaud, 1881 : Chiffonnier ; par allusion au crochet qui agrafe les épaves échouées le long des trottoirs.
Grofin
La Rue, 1894 : Chiffonnier.
Gueule fine
Delvau, 1866 : s. f. Gourmet.
Jaffin
Halbert, 1849 : Jardinier.
Delvau, 1866 : s. m. Jardinier.
France, 1894 : Jardinier ; argot des voleurs.
Mot de la fin
Delvau, 1866 : La nouvelle à la main, souvent cruelle pour quelqu’un, par laquelle un chroniqueur doit terminer sa chronique.
N, i, ni, c’est fini !
Delvau, 1866 : Formule qu’on emploie — dans l’argot des grisettes et du peuple — pour faire mieux comprendre l’irrévocabilité d’une rupture, l’irrémédiabilité d’un dénouement, en amour, en amitié ou en affaires.
Nini, c’est fini
Larchey, 1865 : Formule négative, dont on épelle pour ainsi dire le premier mot.
Ne me parlez plus de rien…, n, i, ni, fini.
Rousseliana, 1805.
N, i, n, i, c’est fini, plus de Malvina.
L. Reybaud.
Par ma fine !
d’Hautel, 1808 : Interjection usitée parmi les paysans, et qui équivaut à, par ma foi !
Piffin (Biffin)
un détenu, 1846 : Chiffonnier.
Plus fine
La Rue, 1894 : Excréments.
Plus-fine
Delvau, 1866 : s. f. Le stercus humain séché et pulvérisé. L’expression est vieille — comme toutes les plaisanteries fécales.
Et dit-on que de la plus fine
Son brun visage fut lavé ?…
(Cabinet satyrique.)
Rigaud, 1881 : Guano de provenance humaine.
Queue de poisson (finir en)
France, 1894 : Finir mal, d’une façon insignifiante ou maladroite. Certains articles bons au début se terminent en queue de poisson. C’est aussi un morceau de musique se terminant trop brusquement.
Sœur de charité, Surfine
Rigaud, 1881 : Voleuse qui exploite les nécessiteux sous prétexte de leur procurer des secours.
Sucer la fine côtelette
Delvau, 1866 : v. a. Déjeuner à la fourchette. — dans l’argot des faubouriens.
Surfine
Rigaud, 1881 : Sœur de charité.
Fustier, 1889 : Femme qui s’introduit chez les personnes âgées et les vole sous prétexte de quêter en faveur des pauvres.
La Rue, 1894 : Sœur de charité. Voleuse qui s’introduit dans les maisons sous le prétexte de quêter.
Virmaître, 1894 : Sœur de charité (Argot des voleurs). N.
Usure aux fines herbes
Rigaud, 1881 : On désigne ainsi les prélèvements de la cagnotte ou dessous du chandelier dans les tripots, tables d’hôte tenues par des femmes qui ont eu des malheurs.
Les flibustiers des deux sexes qui vivent de cette malhonnête industrie, déguisée en table d’hôte, ont le mot pour rire, et l’appellent, dans leur argot, l’usure aux fines herbes.
(Adrien Paul, Floueurs et Floués.)
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