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Faire

Faire

d’Hautel, 1808 : Pour tromper, duper, attraper, friponner ; filouter, voler.
Je suis fait. Pour dire attrapé, on m’a trompé.
Faire de l’eau. Pour dire uriner, pisser. Hors de ce cas, c’est un terme de marine qui signifie relâcher en quelqu’endroit pour faire provision d’eau.
Faire de nécessité vertu. Se conformer sans rien dire aux circonstances.
Faire et défaire, c’est toujours travailler. Se dit par ironie à celui qui a mal fait un ouvrage quelconque, et qu’on oblige à le recommencer.
Quand on fait ce qu’on peut, on fait ce qu’on doit. Signifie qu’il faut savoir gré à celui qui marque du zèle et de l’ardeur dans une affaire, lors même qu’elle vient à ne pas réussir.
Paris ne s’est pas fait en un jour. Signifie qu’il faut du temps à un petit établissement pour devenir considérable ; qu’il faut commencer par de petites affaires avant que d’en faire de grandes.
Allez vous faire faire. Pour allez au diable ; allez vous promener, vous m’impatientez. Ce mot couvre un jurement très-grossier.
Le bon oiseau se fait de lui-même. Signifie qu’un bon sujet fait son sort par lui-même.
Faire et dire sont deux. Signifie qu’il est différent de faire les choses en paroles et de les exécuter.
Il n’en fait qu’à sa tête. Se dit d’un homme entier, opiniâtre, qui se dirige absolument d’après sa volonté.
Qui fait le plus fait le moins. Pour dire qu’un homme qui s’adonne à faire de grandes choses, peut sans contredit exécuter les plus petites.
Faire ses orges. S’enrichir aux dépens des autres s’en donner à bride abattue.
Faire le diable à quatre. Signifie faire des siennes, faire des fredaines ; un bruit qui dégénère en tintamare.
Faire les yeux doux. Regarder avec des yeux tendres et passionnés.
Faire son paquet. S’en aller ; sortir précipitamment d’une maison où l’on étoit engagé.
Faire la vie. Mener une vie honteuse et débauchée.
Il en fait métier et marchandise. Se dit en mauvaise part, pour c’est son habitude ; il n’est pas autrement.
Faire la sauce, et plus communément donner une sauce, etc. Signifie faire de vifs reproches à quelqu’un.
Faire d’une mouche un éléphant. Exagérer un malheur ; faire un grand mystère de peu de chose.
L’occasion fait le larron. C’est-à-dire, que l’occasion suffit souvent pour égarer un honnête homme.
Ce qui est fait n’est pas à faire. Signifie que quand on peut faire une chose sur-le-champ, il ne faut pas la remettre au lendemain.
Allez vous faire paître. Pour allez vous promener.
Les première et seconde personnes du pluriel du présent de l’indicatif de ce verbe sont altérées dans le langage du peuple. À la première personne il dit, par une espèce de syncope, nous fons, au lieu de nous faisons ; et à la seconde, vous faisez, au lieu de vous faites.

Larchey, 1865 : Voler.

Nous sommes arrivés à faire les montres avec la plus grande facilité.

Bertall.

Son fils qui fait le foulard à ses moments perdus.

Commerson.

Larchey, 1865 : Risquer au jeu.

Nous faisions l’absinthe au piquet à trois.

Noriac.

Faire dans la quincaillerie, l’épicerie, la banque, etc. ; Faire des affaires dans la quincaillerie, etc.

Larchey, 1865 : Nouer une intrigue galante.

Est-ce qu’un homme qui a la main large peut prétendre à faire des femmes ?

Ed. Lemoine.

Dans une bouche féminine, le mot faire indique de plus une arrière-pensée de lucre. C’est l’amour uni au commerce.

Et toi, ma petite, où donc as-tu volé les boutons de diamant que tu as aux oreilles ? As-tu fait un prince indien ?

Balzac.

Tu as donc fait ton journaliste ? répondit Florine. — Non, ma chère, je l’aime, répliqua Coralie.

id.

Larchey, 1865 : Faire la place, commercialement parlant.

De tous les points de Paris, une fille de joie accourait faire son Palais-Royal.

Balzac.

Je suis heureux d’avoir pris ce jour-ci pour faire la vallée de l’Oise.

Id.

Delvau, 1866 : v. n. Travailler, être ceci ou cela, — dans l’argot des bourgeois. Faire dans l’épicerie. Être épicier. Faire dans la banque. Travailler chez un banquier.

Delvau, 1866 : v. n. Jouer, — dans l’argot des bohèmes. Faire son absinthe. Jouer son absinthe contre quelqu’un, afin de la boire sans la payer. On fait de même son dîner, son café, le billard, et le reste.

Delvau, 1866 : v. n. Cacare, — dans l’argot à moitié chaste des bourgeois. Faire dans ses bas. Se conduire en enfant, ou comme un vieillard en enfance ; ne plus savoir ce qu’on fait.

Delvau, 1866 : v. a. Voler, et même Tuer, — dans l’argot des prisons. Faire le foulard. Voler des mouchoirs de poche. Faire des poivrots ou des gavés. Voler des gens ivres. Faire une maison entière. En assassiner tous les habitants sans exception et y voler tout ce qui s’y trouve.

Delvau, 1866 : v. a. Visiter tel quartier commerçant, telle ville commerçante, pour y offrir des marchandises, — dans l’argot des commis voyageurs et des petits marchands.

Delvau, 1866 : v. a. Dépecer un animal, — dans l’argot des bouchers, qui font un veau, comme les vaudevillistes un ours.

Delvau, 1866 : s. m. Façon d’écrire ou de peindre, — dans l’argot des gens de lettres et des artistes.

Rigaud, 1881 : Vaincre, terrasser, — dans l’argot des lutteurs.

Il ajouta qu’en se glorifiant d’avoir fait le Crâne-des-Crânes, certains saltimbanques en avaient menti.

(Cladel, Ompdrailles, Le Tombeau des lutteurs.)

Rigaud, 1881 : Tuer, — dans le jargon des bouchers : faire un bœuf, tuer un bœuf et le dépecer.

Rigaud, 1881 : Séduire.

La puissante étreinte de la misère qui mordait au sang Valérie, le jour où, selon l’expression de Marneffe, elle avait fait Hulot.

(Balzac, La Cousine Bette.)

L’artiste qui, la veille, avait voulu faire madame Marneffe.

(Idem.)

Faire une femme, c’est mot à mot : faire la conquête d’une femme.

Le temps de faire deux bébés que nous ramènerons souper ; j’ai le sac.

(Jean Rousseau, Paris-Dansant.)

Quand une femme dit qu’elle a fait un homme, cela veut dire qu’elle fonde des espérances pécuniaires sur celui qu’elle a séduit, qu’elle a fait une affaire avec un homme. — Les bals publics sont des lieux où les femmes vont faire des hommes, mot à mot : le commerce des hommes.

Rigaud, 1881 : Parcourir un quartier au point de vue de la clientèle, — dans l’argot des filles. Elles font le Boulevard, le Bois, les Champs-Élysées, comme les placières font la place.

Rigaud, 1881 : Guillotiner, — dans le langage de l’exécuteur des hautes-œuvres.

M. Roch (le bourreau de Paris) se sert d’une expression très pittoresque pour définir son opération. Les criminels qu’il exécute, il les fait.

(Imbert.)

Rigaud, 1881 : Faire le commerce de ; être employé dans une branche quelconque du commerce. — Faire les huiles, les cafés, les cotons. Mot à mot : faire le commerce des huiles, des cotons, etc.

Rigaud, 1881 : Exploiter, duper. — Faire faire, trahir. Il m’a fait faire, — dans le jargon des voleurs.

Rigaud, 1881 : Distribuer les cartes, — dans le jargon des joueurs de whist. — Jouer des consommations, soit aux cartes, soit au billard. Faire le café en vingt points, — dans le jargon des piliers de café.

Rigaud, 1881 : Dérober. — Faire le mouchoir, faire la montre. L’expression date de loin. M. Ch. Nisard l’a relevée dans Apulée.

Vous êtes de ces discrets voleurs, bons pour les filouteries domestiques, qui se glissent dans les taudis des vieilles femmes pour faire quelque méchante loque. (Scutariam facitis)

Fustier, 1889 : Arrêter. Argot des voleurs. Être fait, être arrêté.

Le lendemain matin, il questionne la Lie-de-Vin… puis il part. Dans l’après-midi il était fait.

(Gil Blas, juin, 1886.)

La Rue, 1894 : Exploiter, duper. Arrêter. Jouer. Trahir. Séduire : faire une femme, faire un homme. Raccrocher. Dérober. Tuer. Vaincre, terrasser. Guillotiner.

Virmaître, 1894 : Les bouchers font un animal à l’abattoir. Faire : tuer, voler. Faire quelqu’un : le lever. Faire : synonyme de fabriquer (Argot du peuple et des voleurs).

France, 1907 : Voler.

Deux filous causent de la future Exposition :
— C’est une bonne affaire pour nous… Ça fournit des occupations…
— Qu’est-ce que tu y faisais en 1869 ?
— Les montres.

(Le Journal)

Il lançait de vastes affaires sur le marché, comme la Caisse d’Algérie, et il ne dédaignait pas de vulgaires filouteries. Ses opérations se trouvèrent ainsi embrasser tous les cercles de la vie de Paris. Il ne dédaignait aucun coup à tenter. Il faisait le million aux riches gogos et le porte-monnaie aux passants.

(Edmond Lepelletier)

Un monsieur, très pressé, court dans la rue.
Un quidam le rejoint, lui frappe sur l’épaule et lui demande impérieusement :
— Où allez-vous ?
— Qu’est-ce que ça peut vous faire ? répond le monsieur furieux.
— Ça me fait beaucoup… on vient de me voler !
— Et vous m’accusez ?
— Oui.
— C’est trop fort !
— N’essayez pas de m’en imposer.
— Mais fouillez-moi, espèce de crétin !
Le quidam fouille le monsieur, et se retire en présentant de plates excuses.
Quand Le monsieur se fouille à son tour, il s’aperçoit qu’on lui a fait sa montre et son porte-monnaie.

(Gil Blas)

À la correctionnelle :
— Alors, dit familièrement le président au prévenu, vous vous vantez de faire la montre aves une remarquable dextérité ?
— Aussi bien que personne ici !
Puis il ajoute courtoisement :
— Soit dit sans vous offenser.

France, 1907 : Exploiter.

Elles faisaient les bains de mer et les villes d’eaux, émigrant suivant la saison, comme les bohémiens, comme les hirondelles, des falaises grises de la Manche qu’un gazon plat encapuchonne aux côtes méditerranéennes où la blancheur luit dans l’azur.

(Paul Arène)

Faire (celle-là il ne faut pas me la)

Rigaud, 1881 : C’est-à-dire mot à mot : cette plaisanterie il ne faut pas me la faire.

Faire (la)

Rigaud, 1881 : S’applique à une infinité de choses, dans le sens de chercher à en imposer par une attitude, un sentiment, vouloir faire croire à tel sentiment. Ainsi, on la fait à la dignité, à l’insolence, à la vertu, à la modestie, à la tendresse, etc.

France, 1907 : Tromper, en imposer.

— La femme est toujours prête à dire qu’elle a des droits sur vous parce qu’on a été poli vis-à-vis d’elle, pensait-il, et lorsque c’est une femme mariée qui s’est lancée dans une intrigue parce qu’elle l’a bien voulu, elle vous rend responsable de s’être détournée de ses devoirs. Elle les a vite oubliés, ses devoirs, si elle a jamais su ce que c’était, si elle en a eu. Qu’est-ce que c’est que les devoirs de la femme mariée ? C’est d’aimer son mari, d’élever ses enfants, quand elle en a. Aimer son mari, c’est l’amour  tant qu’elle l’aime, elle observe naturellement ses devoirs ; quand elle ne l’aime pas, ou quand elle ne l’aime plus, il n’y a pas de devoirs ou il n’y en a plus. Un amant ne détourne donc jamais la femme de ses devoirs, puisqu’il n’y a plus de devoirs, et quant aux obligations qu’il se crée vis-à-vis de la femme, il ne faudrait pourtant pas nous la faire éternellement, celle-là.

(Edgar Monteil)

— Vas-tu t’taire, vas-tu t’taire,
Celle-là faudrait pas m’la faire,
As-tu fini tes façons ?
Celle-là, nous la connaissons.

Faire (le)

Delvau, 1864 : Faire l’amour — façon bégueule de parler d’une chose toute naturelle.

Le faire, ma mie, c’est décharger.

Henry Monnier.

Sexe charmant à qui l’on fait
Ce qu’il est si joli de faire,
Je voudrais vous avoir au fait
Pour vous montrer mon savoir-faire ;
Car avec vous quand on le fait,
On a tant de plaisir à faire,
Qu’on voudrait ne pas l’avoir fait
Pour pouvoir encor vous le faire.

(Parnasse satyrique.)

Delvau, 1866 : v. a. Réussir, — dans l’argot du peuple, qui emploie ordinairement ce verbe avec la négative, quand il veut défier ou se moquer. Ainsi : Tu ne peux pas le faire, signifie : Tu ne me supplanteras pas, — tu ne peux pas lutter de force et d’esprit avec moi, — tu ne te feras jamais aimer de ma femme, — tu ne deviendras jamais riche, ni beau, — etc., etc. Comme quelques autres du même argot, ce verbe, essentiellement parisien, est une selle à tous chevaux.

Faire (se)

Delvau, 1866 : Se bonifier, — dans l’argot des marchands de vin.

Delvau, 1866 : v. réfl. S’habituer, — dans l’argot des bourgeois. Se faire à quelque chose. Y prendre goût. Se faire à quelqu’un. Perdre de la répugnance qu’on avait eue d’abord à le voir.

Rigaud, 1881 : Sebonifier, en parlant du vin, de l’eau-de-vie. Le vin se fait en bouteille, l’eau-de-vie se fait en fût.

Faire à l’anguille (la)

France, 1907 : Frapper quelqu’un avec une peau d’anguille ou un mouchoir rempli de sable.

L’anguille… est cette arme terrible des rôdeurs de barrière, qui ne fournit aucune pièce de conviction, une fois qu’on s’en est servi. Elle consiste dans un mouchoir qu’on roule après l’avoir rempli de terre. En tenant cette sorte de fronde par un bout, tout le poids de la terre va à l’autre extrémité et forme une masse redoutable.

(A. Laurin, Le Million de l’ouvrière)

Faire à l’œil

Rossignol, 1901 : À crédit.

Faire à l’oseille (la)

Delvau, 1866 : v. a. Jouer un tour désagréable à quelqu’un, — dans l’argot des vaudevillistes. L’expression sort d’une petite gargote de cabotins de la rue de Malte, derrière le boulevard du Temple, et n’a que quelques années. La maîtresse de cette gargote servait souvent à ses habitués des œufs à l’oseille, où il y avait souvent plus d’oseille que d’œufs. Un jour elle servit une omelette… sans œufs. — « Ah ! cette fois, tu nous la fais trop à l’oseille, » s’écria un cabotin. Le mot circula dans l’établissement, puis dans le quartier ; il est aujourd’hui dans la circulation générale.

Rigaud, 1881 : Faire une plaisanterie de mauvais goût, une mauvaise charge, se moquer de quelqu’un.

D’abord les pions sont en vacances, et s’ils ne sont pas contents, on la leur fait à l’oseille.

(Bertall, Les Courses de la saison.)

D’après M. Jules Richard (Journal l’Époque, 1866, cité par M. L. Larchey), cette expression aurait vu le jour dans un gargot du boulevard du Temple, à la suite d’une contestation culinaire entre la patronne et un client. Ce dernier ne trouvant pas assez verte une omelette aux fines herbes, la nymphe du gargot s’écria : « Fallait-il pas vous la faire à l’oseille ? » Sans compter qu’il faut accueillir avec beaucoup de réserve les étymologies anecdotiques, l’expression « la faire à l’oseille » ne ferait-elle pas plutôt allusion à l’acidité de l’oseille qui, pour beaucoup de personnes, n’a rien d’agréable au goût.

France, 1907 : Jouer un tour désagréable à quelqu’un.
D’après Alfred Delvau, qui fait remonter cette expression à environ 1861, elle sortirait « d’une petite gargote de cabotins de la rue de Malte, derrière le boulevard du Temple… La maîtresse de cette gargote servait souvent à ses habitués des œufs à l’oseille où il y avait souvent plus d’oseille que d’œufs. Un jour, elle servit une omelette sans œufs : « Ah ! cette fois, tu nous la fais trop à l’oseille ! » s’écria un cabotin. Le mot circula dans l’établissement, puis dans le quartier : il est aujourd’hui dans la circulation générale. »
Charles Virmaître, dans son Dictionnaire d’argot fin de siècle, fait remonter cette expression à plus de cinquante ans, en donnant une variante à son origine :

Le petit père Vinet, mort il y a deux ans dans un taudis de la rue de Tourtille, à Belleville était, vers 1850, un chansonnier en vogue. Il avait été « sauvage » au Caveau des Aveugles, au Palais-Royal, avant le père Blondelet :il mangeait dans la gargote citée par Delvau. La gargote était non rue de Malte, mais rue de la Tour. Un jour, après déjeuner, il composa une chanson intitulée : Vous me la faites à l’oseille. Bouvard, l’« homme à la vessie », la chantait encore en 1848, place de la Bastille. En voici un couplet :

Comme papa j’suis resté garçon,
Pour bonne j’ai pris Gervaise,
Elle est maîtresse à la maison ;
Je la trouve mauvaise
De la cave au grenier
La danse du panier
Que c’est une merveille.
Elle mange à son goût
Mes meilleurs ragoûts…
Vous me la faites à l’oseille.

Faire à la blague (le)

France, 1907 : Ne pas prendre une chose au sérieux, plaisanter sur un sujet grave.

Faire à la dure

anon., 1907 : Attaque nocturne.

Faire à la fenêtre (la)

Rigaud, 1881 : Appeler les hommes par la fenêtre, — dans le monde des filles.

Faire à la main

Rigaud, 1881 : Pratiquer l’onanisme. Terme de métier des filles de joie.

Faire à la pose (la)

France, 1907 : Poser ; vouloir se faire passer pour plus qu’on ne vaut. C’est le fait des imbéciles ou des intrigants de la faire à la pose.

Brouh ! ça vous fout la frousse : parce que quelques salopiots d’enjuponnés voudront la faire à la pose, ils vont m’expédier au bagne ou, chose plus emmerdante, me faire couper le coup.

(Père Peinard)

J’antipathis’ les bourgeois qui nous r’prochent
D’fair’ turbiner nos femm’s, sœurs et bell’s-sœurs.
Tandis qu’nous ons les deux mains dans les poches
Pour honorer le glorieux nom d’sout’neurs.
Tous ces muff’s-là qui la font à la pose,
S’ils regardaient autour d’eux, je n’dout’ pas
Qu’ils r’connaîtraient qu’il n’y a guère aut’ chose
Que des sout’neurs ; y en a des tas, des tas !!

(Édouard Maubert)

Faire à la raideur (la)

Delvau, 1866 : Se montrer raide, exigeant, dédaigneux, — dans l’argot des petites dames. Elles disent de même : La faire à la dignité, ou à la bonhommie, ou à la méchanceté, etc.

Faire à la redresse

France, 1907 : Corriger quelqu’un.

Faire accrocher (se)

Delvau, 1866 : Se faire mettre à la salle de police, — dans l’argot des soldats.

Faire aller

Delvau, 1866 : v. a. Se moquer de quelqu’un, le berner, — dans l’argot du peuple.

Rigaud, 1881 : Se moquer, mystifier.

France, 1907 : Se moquer de quelqu’un, lui jouer un mauvais tour, soit en le bernant, soit en lui faisant faire des démarches inutiles.

Faire aller en rateau

Virmaître, 1894 : Trimballer quelqu’un et le remettre toujours au lendemain (Argot du peuple).

Faire aller…

France, 1907 : (sous-entendu : aux cabinets). Purger.

Dans la loge.
Mme Gibou. — Mon Dieu ! que c’est ennuyeux ! encore ma lampe qui ne va pas.
Mme Pochet. — Mettez-lui de l’huile de ricin…
Mme Gibou. — Pourquoi ?
Mme Pochet. — Dame ! Ça la fera aller.

Faire amende honorable

France, 1907 : Avouer sa faute, reconnaître ses torts, d’où s’amender.
Ce terme vient d’un vieil usage qui consistait à faire en public aveu d’un délit ou d’un crime. Le coupable ou plutôt le condamné — car combien de condamnés non coupables ! — paraissait nu-tête, nu-pieds, corde au cou et un cierge à la main. Pour les hérétiques et les sacrilèges, l’amende honorable se faisait devant une église ; à Paris, c’était devant le portail du Notre Dame. À la suite de l’amende, le condamné était généralement envoyé aux galères ou à l’échafaud. La Révolution de 1789 à supprimé les amendes honorables.

Faire au cold-cream (le)

Rigaud, 1881 : Tromper, séduire quelqu’un en le flattant. (Jargon des filles.) Le mot a un autre sens trop intime pour que nous puissions le préciser.

Faire au même

Delvau, 1866 : v. a. Tromper, prendre sa revanche de quelque chose, — dans l’argot du peuple. Il dit aussi Refaire au même.

Rigaud, 1881 : Tromper. — Se faire baiser, se laisser tromper, se faire remettre à sa place.

La Rue, 1894 : Tromper.

Faire aux cabinets (la)

Rigaud, 1881 : Certaines habituées des bals publics, dans le but de réaliser une petite recette en dehors de celle que pourront leur procurer leurs charmes, vont de ! un à l’autre en demandant 50 centimes pour un besoin urgent. C’est ce qu’on appelle « la faire aux cabinets. » Il y en a qui récoltent ainsi leur pièce de cinq francs par soirée.

Faire aux cliquettes

France, 1907 : Donner un croc-en-jambe.

Faire baiser (se)

Delvau, 1866 : Se faire arrêter ou engueuler, — dans le même argot [du peuple]. On dit aussi Se faire choper.

Faire baiser ou choper (se)

France, 1907 : Se faire prendre.

Faire balai neuf

Delvau, 1866 : v. n. Montrer un zèle exagéré qui ne pourra pas se soutenir, — dans le même argot [du peuple].

Boutmy, 1883 : v. Changer de conduite… quand celle qu’on a laisse à désirer. Il est rare que le balai neuf soit bien solide.

Faire ballon

Rossignol, 1901 : Avoir faim.

Faire banque

France, 1907 : Tuer pour voler.

Faire banque blèche

France, 1907 : Ne pas recevoir de salaire ; argot des sodomites.

Faire belle (la)

Rigaud, 1881 : Être heureux ; avoir une bonne situation, à n’importe quel degré de l’échelle sociale on appartienne. D’un grec heureux, les grecs disent : Il la fait belle ; d’un souteneur qui nage dans de hautes eaux, les souteneurs disent : Il la fait belle. D’un ouvrier qui gagne de bonnes journées, ses camarades disent : Il la fait belle. C’est une des locutions les plus répandues pour le moment, et qui s’applique à n’importe qui réussit dans n’importe quoi.

France, 1907 : Mener joyeuse vie, être heureux.

Faire bonne figure

France, 1907 : Se bien tenir dans des circonstances difficiles.

Dans d’autres circonctances périlleuses, j’ai retrouvé cette tranquillité qui fait envisager le danger sur toutes ses faces et aide quelquefois à s’en préserver, tranquillité qui n’est, en quelque sorte, que de la résignation à haute dose, combinée avec l’amour-propre et le sentiment de la dignité personnelle, lesquels font faire bonne figure dans les cas embarrassants et accepter, sans faiblesse apparente, ce qu’on ne peut éviter.

(Sutter-Laumann, Histoire d’un Trente sous)

Faire boum

Rigaud, 1881 : Sacrifier à Vénus, — dans le jargon des ouvrières.

Il n’ignorait certainement pas comment se pratique cette agréable chose que les petites ouvrières appellent : « faire boum. »

(Huysmans, les Sœurs Vatard.)

Faire brûler Moscou

Delvau, 1866 : Faire un punch monstre, — dans l’argot des soldats, qui connaissent tous, par ouï-dire, les belles flammes qui s’échappaient, le 29 septembre 1812, de l’antique cité des czars, brûlée par Rostopchin.

France, 1907 : Allumer un punch.

Faire ça

France, 1907 : Faire la besogne amoureuse.

Le curé, profitant du tête-à-tête, entama ainsi la conversation : — Il est donc décidé, ma chère amie, que tu veux toujours me faire souffrir ? — Moi ! Et qu’est-ce que je vous fais ? — Tu ne me fait rien à la vérité, mais n’est-ce pas assez de m’empêcher de faire avec toi ce que je voudrais ? — Est-ce que les prêtres font ça ? — Sans doute, et mieux que les autres hommes. Pourquoi donc ne ferions-nous pas ça ? N’avons-nous pas tout ce qu’il faut pour cette besogne ? Nous y sommes même plus habiles que les autres, parce que nous le faisons plus rarement. Laisse-moi besoigner avec toi, je t’assure que tu l’en trouveras bien.

(Contes de Boccace)

Faire ça ou cela

Delvau, 1864 : Faire l’acte vénérien, — le péché dont on n’ose pas prononcer le nom et auquel on fait sans cesse allusion. Cela, c’est l’amour.

Que moyennant vingt écus à la rose
Je fis cela, que chacun bien suppose.

F. Villon.

Veux-tu donc me faire cela ?
Promptement me coucherai là.

Théophile.

Je crois bien qu’ils firent cela,
Puisque les amours qui les virent
Me dirent que le lit branla.

Grécourt.

C’est que les grandes dames font ça par poids et mesures, et que, nous autres, c’est cul par-dessus tête.

La Popelinière.

Tout le monde à peu près, putain et femme honnête,
Ministre ou chiffonier, marquise ou bien grisette,
Dit : faire ça.

Louis Protat.

Ah ! maman, maman, que c’est bon !… Comme tu fais bien ça, mon chéri.

Henry Monnier.

Ça n’t’empêchera pas de me faire ça, n’est ce pas ? Aux p’tits oignons, mon infante !

Lemercier de Neuville.

Faire cabriolet

Delvau, 1866 : Se traîner sur le cul, comme les chiens lorsqu’ils veulent se torcher. Argot du peuple.

France, 1907 : Se traîner sur le dernière, comme font les chiens lorsqu’ils veulent se l’essuyer.

Faire cascader la vertu

Delvau, 1866 : v. a. Obtenir d’une femme l’aveu de son amour et en abuser, — dans l’argot de Breda-Street, d’après la Belle Hélène.

Faire casser le ciboulotte (se)

France, 1907 : Se faire casser la tête. Voir Ciboulot.

— Pour en revenir à Panama, vous l’achetez et moi je l’entraîne et je le monte. Ça me connaît. De cette façon, je supprime l’entraîneur et le jockey, qui vous mettent toujours dedans. Voilà la part que j’apporte dans l’association.
— Tu ne débourses pas un centime. Qu’est-ce que tu risques ?
— Je peux me faire casser de ciboulot : à part ça, je ne risque rien.

(Maurice Donnay, Les Affaires)

Faire celui qui…

Delvau, 1866 : Faire semblant de faire une chose, — dans l’argot du peuple.

Faire chanter

France, 1907 : Voir Chanter.

Lorsque Antoine eut versé à Mme Stéphanoise Dubochet toutes les ivresses de son cœur généreux et tendre, il se rappela qu’il était fin de siècle, qu’il était assoiffé d’argent, et que, somme toute, l’heure avait sonné de faire chanter les deux singes.

(Marc Anfossi)

Faire chanter un Pété

Clémens, 1840 : Faire donner de l’argent d’autorité à un rivette.

Faire chapelle

Virmaître, 1894 : Il existe une catégorie d’individus certainement malades du cerveau, car leur passion idiote ne peut autrement s’expliquer. Ils s’arrêtent devant la devanture des magasins ou travaillent les jeunes filles, généralement des modistes, ils entr’ouvrent leur paletot, en tenant un pan de chaque main et font voir ce que contient leur culotte déboutonnée. Ces cochons opèrent également dans les jardins publics ou jouent les petites filles. Ce n’est pas la police correctionnelle qu’il leur faudrait mais bien un cabanon à Charenton. On les nomme aussi des exhibitionnistes, de ce qu’ils font une exhibition (Argot du peuple).

Virmaître, 1894 : Écarter les jambes et retrousser ses jupes pour se chauffer devant le feu. Une accouplée se chauffe de cette manière, l’autre qui la regarde lui dit :
— Fais-le assez cuire car je ne l’aime pas saignant (Argot des filles). N.

France, 1907 : « Il existe, dit Charles Virmaître, une catégorie d’individus certainement malades du cerveau, car leur passion idiote ne peut autrement s’expliquer. Ils s’arrêtent devant la devantures des magasins où travaillent les jeunes filles, généralement des modistes, ils entr’ouvrent leur paletot, en tenant un pan de chaque main et font voir ce que contient leur culotte déboutonnée. Ces cochons opèrent également dans les jardins publics où jouent les petites filles… On les nomme Aussi des exhibitionnistes, de ce qu’ils font une exhibition. » Cela s’appelle faire chapelle. Voir Chapelle.

Faire Charlemagne

Delvau, 1866 : Se retirer du jeu après y avoir gagné, sans vouloir donner de revanche, — dans l’argot des joueurs, qui savent ou ne savent pas leur histoire de France. « Charlemagne (dit Génin en ses Récréations philologiques) garda jusqu’à la fin toutes ses conquêtes, et quitta le jeu de la vie sans avoir rien rendu du fruit de ses victoires ; » le joueur qui se retire les mains pleines fait comme Charlemagne : il fait Charlemagne :
Se non è vero… Je ne demande pas mieux d’en croire Génin, mais jusqu’ici il m’avait semblé que Charlemagne n’avait pas autant fait Charlemagne que le dit le spirituel et regrettable érudit, et qu’il y avait, vers les dernières pages de son histoire, une certaine défaite de Roncevaux qui en avait été le Waterloo. Et puis… Mais le chevalier de Cailly avait raison !

France, 1907 : À l’explication donnée au mot Charlemagne il faut ajouter celle-ci :

C’est une allusion à Charlemagne qui sut garder toutes ses conquêtes et qui quitta le jeu des batailles sans en avoir perdu une seule. Voici pourquoi on dit du joueur qui se retire les mains pleines : Il a fait charlemagne, comme, si l’on disait : Il a fait comme Charlemagne on bien encore Il a fail le Charlemagne.

Faire chaud

France, 1907 : Se servir de couleurs brillantes ; peindre d’après le style de Rembrandt et des autres coloristes.

Faire chauffer de l’eau chaude

Boutmy, 1883 : Expression ironique que l’on adresse au compagnon qui, restant longtemps penché sur le marbre pour corriger une composition chargée, semble y être collé. Un frère charitable lui propose alors de faire chauffer de l’eau chaude. Le plâtre, déjà mécontent de sa situation, gobe alors un bœuf pyramidal. Ce montage manque rarement son but et devient quelquefois l’occasion d’attrapances plus ou moins vives ; la victime en effet réplique souvent : « Imbécile, comment veux-tu faire chauffer de l’eau chaude ? » À cette réponse prévue, les rires augmentent… et le bœuf s’accroît.

Faire chibis

Rigaud, 1881 : Se sauver de prison.

Virmaître, 1894 : S’enfuir d’une prison avec le concours d’un camarade, sans prévenir le gardien. C’est brûler la politesse au directeur (Argot des voleurs).

France, 1907 : S’échapper de prison.

À Biribi c’est en Afrique
Où que l’pus fort
Est obligé d’poser sa chique
Et d’fair’ le mort ;
Où que l’pus malin désespère
De fair’ chibi…

(Aristide Bruant)

Faire chibis, faire un peigne

La Rue, 1894 : Se sauver de prison. Faire des yeux de hareng. Crever les yeux.

Faire chou blanc

Delvau, 1864 : Rater une femme.

Faire comme le chien du jardinier

France, 1907 : Ne pouvoir ou ne vouloir pas se servir d’une chose et empêcher les autres d’en user, comme le chien du jardinier qui ne mange pas de choux et ne veut que personne en mange.
C’est un chien sur de l’orge,
disaient les anciens.

Sue de l’orge entassé, remarques bien ce dogue :
Sur de l’orge entassé, remarquez bien ce dogue :
Son instinct envieux et rogue
Défend, sans en manger, l’approche du cheval ;
Ainsi jaloux, l’avare enrage
Que du trésor dont il jouil si mal
Un autre fasse un meilleur usage.

Faire comme le pourceau de saint Antoine

France, 1907 : Se fourrer partout où l’on n’a que faire.

On dit que les pourceaux de Saint-Antoine de Viennois, qui est une grande abbaye dans le diocèse de Vienne en Dauphiné, entrent avec leur clochette au col, qui les fait reconnaître, dans toutes les maisons du lieu, où on leur donne à manger sans que personne les ose chasser, par respect du saint auquel ils sont voués. On applique ce dicton à ces parasites qui mangent partout hors de chez eux, et qui ont coutume, suivant le proverbe, de faire comme le pourceau de saint Antoine, de se fourrer partout.

(Fleury de Bellingen)

Faire compter les solives à une femme

Delvau, 1864 : La renverser sur le dos et la baiser vivement, — acte pendant lequel, tout en jouissant, elle regarde au plafond et non ailleurs.

Faire comptoir

Rigaud, 1881 : C’est, dans le jargon des saltimbanques, une forme nouvelle de : faire comtois.

Le soir ensuite vous avez « fait comptoir, » c’est-à-dire que vous entriez dans la loge foraine et en ressortiez encore pour « allumer » les spectateurs récalcitrants.

(Cours d’assises de la Seine, aud. du 29 août 1879, interrog. de M. le Prés, de Vienne.)

Faire corps neuf

Delvau, 1866 : v. a. Alvum deponere, — et le remplir ensuite de nouveaux aliments.

Faire coucou

Delvau, 1866 : Jouer à se cacher, — dans l’argot des enfants.

Faire couler un enfant

Delvau, 1866 : v. a. Prendre un médicament abortif, — dans l’argot des filles.

Faire couper

France, 1907 : Faire croire à un mensonge. Voir Couper.

Faire cric

France, 1907 : S’enfuir.

Faire cru

France, 1907 : Se servir de teintes crues en peinture, par exemple de bleu ou de rouge sans addition d’une autre couleur.

Faire cuire sa toile

Delvau, 1866 : v. a. Employer les tons rissolés, les grattages, les ponçages, — dans l’argot des critiques d’art, qui n’ont pas encore digéré la peinture de Decamps.

France, 1907 : Employer des teintes très chaudes en peintures.

Faire cuire son homard

Delvau, 1866 : v. a. Rougir d’émotion ou d’autre chose, — dans l’argot des faubouriens. On dit aussi Faire cuire son écrevisse.

Virmaître, 1894 : Rougir subitement. Synonyme de piquer son fard (Argot du peuple).

France, 1907 : Rougir.

Faire culotte

France, 1907 : Comparatif de faire chaud, dans l’argot des peintres.

Faire d’un diable deux

France, 1907 : Commettre deux fautes ou deux maladresses en voulant en corriger une.

Faire d’une buse un épervier

France, 1907 : Faire d’un ignorant un savant, d’un sot un homme d’importance, d’un laquais un financier, d’un apothicaire un général, d’un pion un ministre, d’un grippe-sou un chef d’État, d’un grimaud un conseiller du parlement, d’un méchant petit communard un ambasssadeur  !

Faire dans

France, 1907 : Être dans un genre de commerce ou d’industrie.

Je fais dans les cuirs, je fais dans les sucres, je fais dans l’épicerie.

Faire danser

Larchey, 1865 : Dissiper.

Et je me mets à faire danser mes 300 francs. Ça été mon grand tort.

Id.

Larchey, 1865 : Battre.

Tu vas me payer l’eau d’aff, ou je te fais danser sans violons.

E. Sue.

Faire danser l’anse du panier

Rossignol, 1901 : Une bonne qui compte 5 francs à ses maîtres ce qui lui coûte 4 fr. 50, fait danser l’anse du panier.

France, 1907 : Se dit des rapines d’une servante on d’une cuisinière. Suivant Alfred Delvau, « quand une cuisinière revenue du marché a vidé les provisions que contenait tout à l’heure son panier, elle prend celui-ci par l’anse et le secoue joyeusement pour faire sauter l’argent épargné à son profit et non à celui de sa maîtresse ». Je crois qu’elle ne fait pas tant de démonstrations et qu’elle a soin de mettre son argent dans sa poche avant de rentrer chez ses maîtres.

Faire danser la polka

Larchey, 1865 : Battre.

Ce grand empereur, On lui fera danser la polka.

Layale, Ch.

On a dit un moment à la polka, pour dire très-bien.

Faire danser un homme sur la pelle à feu

Delvau, 1866 : Exiger sans cesse de l’argent de lui, le ruiner, — dans l’argot des petites dames. On dit aussi Faire danser sur la poêle à frire.

Faire danser un homme sur une pelle à feu

France, 1907 : Se dit d’une femme qui gaspille l’argent de son amant ou de son mari.

Faire de cent sous quatre francs

Delvau, 1866 : v. a. Dépenser follement son argent, — dans l’argot des bourgeois, qui ajoutent quelquefois : Et de quatre francs rien.

France, 1907 : Gaspiller son argent.

Faire de l’eau

Delvau, 1866 : v. a. Meiere, — dans l’argot des bourgeois. Ils disent aussi Épancher de l’eau, Pencher de l’eau et Lâcher de l’eau.

Faire de l’épate

Boutmy, 1883 : v. Faire des embarras : affecter de grands airs de grandes prétentions. Cette expression fréquemment employée dans l’atelier typographique, vient sans doute du verbe épater, dans le sens de étonner, ébahir.

Faire de l’harmone

Virmaître, 1894 : Parler bruyamment dans un lieu public. Abréviation d’harmonie (Argot du peuple).

Hayard, 1907 : Faire du bruit.

France, 1907 : Parler fort, faire du bruit dans un lieu public.

J’viens d’rencontrer la femme à Pierre,
C’qu’a fait d’l’harmone ! Ah ! nom de d’là !
C’en est flaquant ! ben merde !… en v’là !

(Aristide Bruant, Dans la Rue)

Faire de l’œil

Delvau, 1864 : Provoquer un passant, par un coup d’œil, à monter tirer un coup de cul.

Aussi, je le dis sans orgueil,
Le beau sexe me fait de l’œil.

Jules Moineaux.

Rossignol, 1901 : On fait de l’œil à une femme pour tâcher de la posséder.

France, 1907 : Lancer des œillades provocatrices, regarder amoureusement quelqu’un.

D’ailleurs, à mesure qu’elle avance en âge, l’incertitude de sa vie l’inquiète ; toute son ambition serait d’avoir au moins quelques jolis costumes à mettre, et assez le paroles pour être remarquée des loges d’avant-scène : c’est là, en effet, que se tiennent les vieux généraux de l’empire, les banquiers célibataires, les Ulysses cosmopolites de l’hôtel des Princes, tous armés d’indiscrètes jumelles. Pour nous servir d’une expression consacrée dans le langage des coulisses, c’est en faisant bien l’œil de ce côté-là que la figurante parviendrait à retrouver toute l’existence dorée qu’elle a perdue après les beaux jours de sa jeunesse. Mais ce sont là autant de soupirs jetés dans les nuages.

(Philibert Audebrand)

La nuit venue, la scène changeait : à peine les réverbères étaient-ils allumés que la foule grossissante roulait à flots bruyants autour des galeries ; beaucoup de jeunes gens, une infinité de militaires, quelques vieux libertins, maints désœuvrés, un petit nombre d’observateurs force filous, des filles à moitié nues : c’était le moment où tous les vices se donnaient rendez-vous, se coudoyant, se heurtant, s’entremettant, où, tandis que les filles faisaient de l’œil, les escrocs jouaient des mains.

(Octave Uzanne, La Française du siècle)

Faire de l’or

Delvau, 1866 : Gagner beaucoup d’argent. Le peuple, lui, dit Chier de l’or.

Faire de la dentelle

France, 1907 : Expression des pédérastes expliquée dans le passage suivant :

Ils provoquent les assistants derrière eux, en faisant de la dentelle, c’est-à-dire en agitant les doigts croisés derrière leur dos, ou ceux qui sont devant à l’aide de la poussette, en leur faisant sentir un corps dur, le plus souvent un long bouchon qu’ils ont disposé dans leur pantalon, de manière à simuler ce que l’on devine et à exciter ainsi les sens de ceux qu’ils jugent capables de céder à leur appel.

(Ambroise Tardieu, Attentats aux mœurs)

Faire de la mousse

France, 1907 : Faire des manières, prendre de grands airs, faire l’important.

Le cocher. — C’est Blanche de Croissy qui m’a renseigné.
Le valet de pied. — Ah ! c’est vrai… tu as été cocher chez elle.
Le cocher, se rengorgeant. — Cocher et autre chose… La v’là… tiens… Blanche de Croissy !…
S’adressant à demi-voix à Blanche de Croissy qui passe en landau & huit ressorts :
— Oh ! là ! là !… Fais donc pas tant d’la mousse !… Tu sais ! Inutile avec moi, les magnes !… On n’monte pas l’coup à Bibi, mon petit chat.
Le valet de pied. — Oh ! elle a piqué un fard !
Le cocher. — Ben, elle m’a reconnu, quoi !

(Gyp, Au Bois)

Faire de la musique

Delvau, 1866 : Se livrer à des conversations intempestives sur les coups. Argot des joueurs.

Rigaud, 1881 : Se gratter au point de se faire saigner, ce qui rend la chair assez semblable à une page de musique. (Argot des hôpitaux).

France, 1907 : Critiquer, crier, se plaindre, tempêter quand on a perdu au jeu.

Faire de la poussière

Delvau, 1866 : v. a. Faire des embarras, — dans l’argot des petites dames, qui recommandent toujours à leurs cochers d’aller grand train quand il s’agit de couper une rivale sur le boulevard, ou dans l’avenue des Champs-Élysées, ou dans les allées du bois de Boulogne.

France, 1907 : Faire des embarras.

Faire de la toile

Rigaud, 1881 : Perdre la mémoire, oublier le texte et improviser, en attendant le secours du souffleur, — dans le jargon des coulisses. Frédérick Lemaître faisait souvent de la toile, et il faut avouer que, presque toujours, sa version était préférable à celle de l’auteur. Un jour, à la répétition générale d’une pièce de Barrière, comme il faisait de la toile : « Faites attention, lui dit le collaborateur de madame de Prébois, vous marchez dans ma prose. » Frédérick s’arrête, le toise, et avec cette ampleur de geste qui le caractérisait : « On prétend, répond-il, que ça porte bonheur. »

Faire de vieux os (ne pas)

Delvau, 1866 : v. a. Ne pas demeurer longtemps dans un emploi, dans un logement, etc. Signifie aussi : N’être pas destiné à mourir de vieillesse, par suite de maladie héréditaire ou de santé débile.

Faire dégraisser (se)

Delvau, 1864 : Faire l’acte vénérien. Les bons coqs sont maigres, en effet.

Faire des affaires

Delvau, 1866 : v. a. Faire beaucoup de bruit pour rien, exagérer l’importance des gens et la gravité des choses, — dans l’argot du peuple, qui se gausse volontiers des M. Prudomme. On dit aussi Faire des affaires de rien.

Faire des affaires (se)

Delvau, 1866 : v. réfl. S’attirer des désagréments, des querelles, des embarras.

Faire des brioches

France, 1907 : Commettre des maladresses, faire des bévues. Cette locution date de la fondation de l’Opéra en 1440. Les musiciens avaient imaginé de mettre à l’amende ceux d’entre eux qui commettaient des fautes dans les partitions, et du produit des amendes on devait acheter une énorme brioche. Mais en dépit de l’amende les fautes ne diminuèrent pas, et les brioches se multiplièrent. Ils appelèrent dès lors toute erreur une brioche, et l’expression passa dans le public, qui la généralisa.

Faire des châteaux en Espagne

France, 1907 : Faire iles projets en l’air, se repaître de chimères, de rêveries sans corps et sans sujet, comme dit Montaigne (« Une resverie sans corps et sans sujet régente notre âme et l’agite ; que je me mette à faire les chasteaux en Espaigne, mon imagination m’y forge des commodités et des plaisirs desquels mon ame est réellement chatouillée et réjouie. »). C’est la grande ressource des malheureux.

Quel esprit ne bat la campagne ?
Qui ne fait châteaux en Espagne ?
Pichrocole, Pyrrhus, la laitière, enfin tous,
Autant les sages que les fous ;
Chacun songe en veillant, il n’est rien de plus doux,
Une flatteuse erreur emporte alors nos âmes :
Tout le bien du monde est à nous,
Tous les honneurs, toutes les femmes.

(La Fontaine, La Laitière et le Pot au lait)

Mais pourquoi cette expression châteaux en Espagne ? Est-ce parce que, comme le dit Pasquier, les châteaux sont rares en Espagne et qu’on n’y rencontre guère que quelques cassines ou maisonnettes fort distantes les unes des autres ? « Ceux qui rendent raison de cela, ajoute-t-il, estiment que ce fut pour empescher que les Maures ne surprissent quelques chasteaux de force ou d’emblée, où ils auraient eu moyen de faire une longue et sûre retraite. C’est pourquoi on a dit que celuy fait en son esprit des chasteaux en Espagne, quant il s’amuse de penser à part soy à chose qui n’estait faisable. » Cette explication, observe Leroux de Lincy, est aussi hasardée que celle de Fleury de Bellingen qui fait remonter au consul Cécilius Métellus l’origine de ce proverbe.
L’explication la plus plausible est celle donnée par Quitard qui croit que ce proverbe date de la seconde partie du XIe siècle, lorsque Henri de Bourgogne traversa les Pyrénées pour aller au secours d’Alphonse, roi de Castille, contre les Maures d’Espagne et qui, en récompense, obtint la main de Teresa, fille du roi, et le comté de Lusitania pour dot, lequel comité devint, sous son fils Alphonse Henriquez, royaume de Portugal. Les chevaliers qui avaient accompagné Henri de Bourgoin partagèrent naturellement sa fortune, et leurs succès ne manquèrent pas d’exciter l’émulation de tous les aventuriers et hommes de guerre qui ne rêvèrent plus que fiefs à gagner et châteaux à bâtir en Espagne. La Conquête de l’Angleterre par les Normands et les biens dont furent comblés tous les chevaliers qui suivirent Guillaume éveillèrent les mêmes convoitises et les mêmes rêves. L’on disait : faire des châteaux en Albanie (Albion) aussi bien que faire des châteaux en Espagne. Il est a remarquer, dit Walter Kelly, qu’avant le XIe siècle il y avait très peu de châteaux en Angleterre et en Espagne. Les aventuriers conquérants avaient à s’en bâtir pour eux-mêmes. Les Anglais disent : to build castles in the air (bâtir des châteaux en l’air).
Quoi qu’il en soit, il est très ancien, car on le trouve dans le Roman de la Rose, au XIIIe siècle :

Telle fois te sera advis
Que tu tiendras celle au cler vis (clair visage),
Du tout t’amie et ta compagne ;
Lors feras chasteaux en Espagne.

Voici, au sujet de ce proverbe, des vers de Collin d’Harleville. :

Chacun fait des châteaux en Espagne.
On en fait à la ville ainsi qu’à la campagne ;
On en fait en dormant, on en fait éveillé.
Le pauvre paysan, sur sa bêche appuyé,
Peut se croire un moment seigneur de son village.
Le vieillard, oubliant les glaces de son âge,
Croit avoir recouvré sa brillante santé,
Et sourit… son neveu sourit de son côté,
En songeant qu’un matin du bonhomme il hérite,
Un commis est ministre, un jeune abbé prélat ;
… Il n’est pas jusqu’au simple soldat
Qui ne se soit un jour cru maréchal de France ;
Et le pauvre lui-même est riche en espérance,
Et chacun redevient Gros-Jean comme devant.
Eh bien ! chacun du moins fut heureux en rêvant !
C’est quelque chose encor que de faire un beau rêve !
À nos chagrins réels c’est une utile trêve :
Nous en avons besoin ; nous sommes assiégés
De maux dont à la fin nous serions surchargés,
Sans ce délire heureux qui se glisse en nos veines.
Flatteuse illusion ! doux oubli de nos peines !
Oh ! qui pourrait compter les heureux que tu fais !

Délicieuse erreur ! tu nous donnes d’avance
Le bonheur que promet seulement l’espérance.

Quand je songe, je suis le plus heureux des hommes,
Et dès que nous croyons être heureux, nous le sommes.

Faire des choux et des raves

Delvau, 1866 : v. a. Faire n’importe quoi d’une chose, s’en soucier médiocrement, — dans l’argot des bourgeois.

Faire des cordes

Delvau, 1866 : v. a. Difficilimè excernere, — dans l’argot du peuple, qui emploie là une expression déjà vieille : Tu funem cacas ? dit à son camarade un personnage d’une comédie grecque traduite en latin.

Faire des cours

France, 1907 : Subir une condamnation ; argot de Saint-Lazare.

… Dans l’ignorance où elle était du règlement de la prison, Virginie interrogea ses compagnes : Pouvait-on écrire, au dehors, à ceux qu’on aimait, les faire venir au parloir pour échanger un regard avec eux, au travers des grilles ? Les filles, amusées de son innocence, lui rirent au visage :
— D’où sors-tu ? C’est donc la première fois que tu viens faire des cours ?… Toutes les lettres que t’écriras et qu’tu recevras seront décachetées, lues au greffe. On les mettra au panier si elles glissent à la roucoulade. Ta peux écrire à ta pipelette pour lui recommander ton chat, ton perroquet, mais pour d’la musique d’amour, n’en faut point. Ça n’passe pas à la grille !

(Hugues Le Roux, Les Larrons)

Faire des crêpes

Delvau, 1866 : v. a. S’amuser comme il est de tradition de le faire au Mardi-Gras, — dans l’argot des artistes, gouailleurs de leur nature. Se dit volontiers pour retenir quelqu’un : « Restez donc ; nous ferons des crêpes. »

France, 1907 : S’amuser. Allusion à la coutume du Mardi-Gras.

Faire des fonctions

Rigaud, 1881 : Aider à la mise en pages, — dans le jargon des typographes.

Faire des gaufres

Delvau, 1866 : S’embrasser entre grêlés, — dans l’argot du peuple.

Faire des grâces

Delvau, 1866 : v. a. Minauder ridiculement. Signifie aussi : S’étendre paresseusement au lieu de travailler.

Faire des heures en bois

Boutmy, 1883 : v. n. Faire des heures non rétribuées. Dis donc, compagnon est-ce que tu fais des heures en bois ? est une question que l’on adresse à un camarade qui s’attarde à l’atelier, quand l’heure du départ a sonné.

Faire des horreurs

Larchey, 1865 : En venir des paroles à l’action.

Puis, sur un lit je la jette, Et nous faisons des horreurs.

Les Amours de Mahieu, chanson, 1832.

Faire des magnes

France, 1907 : Prendre de grands airs, faire des façons, des manières.

Malgré leurs seins pareils à des breloques,
Leur taille épaisse et leur âg’ plus qu’ancien,
Ell’s font des magn’s, ell’s s’croient encor’ très bien.
Ell’s ont sûr’ment des mœurs très équivoques,
Les Probloques, les Probloques.

(Héros-Cellarius)

Ya des fois qu’i’s font du potin,
I’s japp’, i’s piss’, i’s font des magnes…
Dam’ ! les clebs i’s ont pas des pagnes
Pour plumer avec leur putain.

(Aristide Bruant, Les Quat’ pattes)

Faire des manières, des simagrées

Delvau, 1864 : Hésiter à prendre le cœur — et le membre — d’un homme ; refuser son bonheur.

Ça fait des manières, et ça a dansé dans les chœurs.

Gavarni.

Et comme elle se vantait d’être pucelle, elle croyait devoir encore faire quelques petites simagrées avant que de se rendre.

Boursault.

Faire des parades

Boutmy, 1883 : Voir postiche.

Faire des petits pains

Rigaud, 1881 : Courtiser avec attouchements, genre Tartuffe. — Qu’est-ce que tu faisais avec la bonne du capiston, tu faisais des petits pains ? — Probable.

Virmaître, 1894 : Faire des manières. Prendre des airs mystérieux pour causer avec quelqu’un, lui dire des riens et avoir l’air de lui parler de choses intéressantes. Faire la cour à une femme c’est faire des petits pains (Argot du peuple). N.

Rossignol, 1901 : Faire la cour à quelqu’un, c’est lui faire des petits pains.

France, 1907 : Paire des mamours, flatter. On dit aussi dans le même sens : faire du plat ou du boniment.

Faire des poivrots, des gavés

Rigaud, 1881 : Dévaliser des ivrognes. La variante est : La faire au père François. Les voleurs secouent l’ivrogne endormi sur un banc. Ils l’appellent « père François. » — « Hé ! père François, réveillez-vous. » Et tout en lui parlant, ils le dépouillent.

Faire des postiches

Boutmy, 1883 : Voir postiche.

Faire des pratiques (se)

France, 1907 : La déplorable habitude de certains ouvriers appelés à réparer un objet est, tout en exécutant les réparations voulues, de commettre des avaries nouvelles. On connait le traditionnel coup de tranchet des ouvriers cordonniers qui réparent une chaussure. Leurs confrères les couvreurs, chargés de réparer un toit, ne manquent jamais d’y faire des trous nouveaux ; c’est ce qui s’appelle : se faire des pratiques.

Faire des siennes

Delvau, 1866 : v. a. Faire des folies ou des sottises, — dans l’argot des bourgeois.

France, 1907 : Se conduire d’une façon déréglée, commettre des extravagances.

Comme un petit fripon
Qui de temps en temps fait des siennes.

(Imbert)

Il passait de la brune à la blonde, se frottait aux jupons, palpant les corsages, bref faisait des siennes.

(Les Propos du Commandeur)

Faire des traits

France, 1907 : Tromper sa femme, son mari, son amant ou sa maîtresse.

Tout ça vint d’vant l’tribunal
Où l’on arrangera très mal
Le monsieur vitriolé
Parc’ qu’il avait violé
Son serment d’aimer toujours,
Puis avait, au bout d’quèqu’s jours
Lâché la dam’ parce que
Ell’ lui avait fait des traits.

(L. Xanrof)

Faire des yeux de carpe frite

Rigaud, 1881 : Contourner les yeux à la manière des gens qui se pâment.

Faire des yeux de hareng

Delvau, 1866 : v. a. Crever les yeux à quelqu’un, — dans l’argot des voleurs.

Rigaud, 1881 : Crever les yeux à quelqu’un, — dans le jargon des voleurs.

France, 1907 : Crever les yeux de quelqu’un.

Faire des yeux de harengs

Virmaître, 1894 : Crever les yeux à quelqu’un au moyen d’un coup bien connu des voleurs. Allusion à l’œil vide du hareng quand il arrive des ports de mer sur nos marchés (Argot du peuple).

Faire descendre le polonais

Delvau, 1864 : Expression usitée dans les bordels, lorsque les hôtes momentanés, les michés, font trop de vacarme : au lieu de menacer les perturbateurs d’aller chercher la garde, on les menace de faire descendre le Polonais — qui n’est autre, souvent, qu’un pauvre diable sans feu ni lieu recueilli par charité et logé dans les combles de la maison, — et les perturbateurs se taisent, effrayés par cette mystérieuse menace, — par cette épée de Damoclès.

Faire dessous

France, 1907 : Tomber dans le gâtisme.

Faire dessous (se)

Rigaud, 1881 : Tomber en enfance, radoter. — Faire sous soi, même signification.

Faire dodo

Larchey, 1865 : Dormir.

France, 1907 : Dormir, coucher avec quelqu’un.

Tout à l’heure, au bas de l’avenue de la Grande-Armée, une jolie femme, une vraie Parisienne, a traversé le trottoir pour monter dans son coupé. Le beau gas a posé sa pioche. Il l’a regardée monter en voiture, partir… puis il a dit à son voisin : « Eh bien ! tu sais, leurs dîners, leurs hôtels, leurs larbins, leur Opéra, tout ça ne me fait pas envie… Mais ce qui me fait enrager, c’est que jamais de ma vie je ne ferai dodo avec une femme comme ça ! »

(Hugues Le Roux)

Faire du boudin

France, 1907 : Jeu de mot sur bouder.

Faire du bruit

Rossignol, 1901 : Faire des embarras.

Faire du carme

France, 1907 : Gagner de l’argent.

Allons !… au r’voir, mosieu l’gendarme,
Vous l’voyez ben, j’ai-z-un métier
Avec quoi que j’me fais du carme.

(Aristide Bruant)

Faire du clinc

France, 1907 : Même sens que faire de l’œil.

— Oui, vous rigolez, vous autres… Moi, me v’là dans le lac… Pas un rond, pas un pétard, pas un radis, pas un maravédis ! Alors, quoi ? Va falloir que je fasse du clinc (et elle faisait de l’œil) aux gens qu’a du pognon ! Eh ! la mère, passe-moi le voile de l’innocence !

(Jean Ajalbert)

Faire du foin

Rigaud, 1881 : Faire du bruit ; danser, — dans le jargon des voyous, qui ne sont pas précisément silencieux durant cet exercice.

France, 1907 : Faire du bruit, attirer l’attention.

I’s touss’, i’s crach’, i’s font du foin !
I’s éternuent : — Dieu vous bénisse !
Minc’ que vous en avez besoin,
Allez donc dir’ qu’on vous finisse !

(Aristide Bruant)

Faire du genou, faire du pied

Rigaud, 1881 : Frotter son genou, frotter son pied, contre le genou, contre le pied d’une femme. Petite polissonnerie innocente, quelque chose comme les bagatelles de la porte en espérant le lever du rideau.

Faire du gros

Rossignol, 1901 : Voir débourrer.

Faire du lard

Delvau, 1866 : v. a. Dormir ; se prélasser au lit, — dans l’argot du peuple, à qui les exigences du travail ne permettront jamais d’engraisser. Aller faire du lard. Aller se coucher.

France, 1907 : S’engraisser, faire la grasse matinée, « être, comme dit Rabelais, flegmatique des fesses ».

— Moi, je propose de voter un blâme à notre amphitryon. Nous sommes ici, non pour faire de l’art, mais pour faire du lard, ou du bon sang.

(Paul Pourot)

Faire du métier

Larchey, 1865 : Écrire, peindre ou sculpter dans le seul but de gagner de l’argent et non de la gloire.

Faire du papier marbré

Delvau, 1866 : v. a. Avoir la mauvaise habitude de se réchauffer les pieds avec un gueux, — dans l’argot du peuple, qui a eu maintes fois l’occasion de constater les inconvénients variqueux de cette habitude familière aux marchandes en plein vent, aux portières, et généralement à toutes les femmes trop pauvres pour pouvoir employer un autre mode de chauffage que celui-là.

Faire du pet

Rossignol, 1901 : Se plaindre.

Faire du petit

Rossignol, 1901 : Uriner.

Faire du plan de couillet

Rossignol, 1901 : De la prison pour rien ou pour un autre.

Faire du plat

Rossignol, 1901 : Voir Faire des petits pains.

Faire du potin

Virmaître, 1894 : Faire du bruit, du tapage (Argot du peuple).

France, 1907 : Faire du bruit, du tapage.

Faire du ragoût

France, 1907 : Parler imprudemment des actes d’un camarade et éveiller ainsi les soupçons de la police.

— Ne fais pas de ragoût sur ton dab.

(Balzac)

Faire du ressaut

Rossignol, 1901 : Faire de la résistance, se gendarmer, se fâcher. Le voleur que l’agent arrête, s’il se fâche ou résiste, fait du ressaut. Celui qui se fâche fait du ressaut. Celui qui dit à un créancier qu’il ne le payera jamais, le fait ressauter.

Faire du schproum veut aussi dire être en colère

Rossignol, 1901 : Crier, parler fort.

Faire du suif

Rigaud, 1881 : Tricher, — dans le jargon des grecs.

France, 1907 : Faire des profits illicites ; tricher.

Faire durer le plaisir

Delvau, 1864 : Branler savamment un homme, et, au moment où l’on devine à ses yeux tournés et à ses spasmes, que le sperme monte dans la colonne et qu’il va se jeter par-dessus le parapet, poser le doigt sur l’ouverture et ne le laisser s’échapper que par petits filets.

Faire éclater le péritoine (s’en)

Delvau, 1866 : Manger ou boire avec excès, — dans l’argot des étudiants.

France, 1907 : Manger et boire avec excès. On dit aussi : s’en faire péter la sous-ventrière.

Faire en levrette (le)

Delvau, 1864 : Baiser une femme par derrière, cul contre ventre au lieu de ventre contre ventre, à la façon des chiens et non à la façon des bons chrétiens. — Voir aussi Foutre en levrette.

Des baisers il vint aux attouchements et des attouchements à me mettre le vit au con, et me le fit encore une fois en lévrier, le con derrière.

Mililot.

Pour ne pas voir sa défaite,
Et se cacher au vainqueur,
Elle voulut qu’en levrette
Je lui fisse cet honneur.

Collé

J’ai, lui dit-il, avec un tendre objet
Depuis longtemps une intrigue secrète ;
Ce n’est là tout ; item je suis sujet…
— A quoi ? voyons. — À le faire en levrette.

Piron.

Faire enfiler (se)

France, 1907 : Être arrêté ; se soumettre à l’acte vénérien.

Faire ensemble

Delvau, 1866 : v. n. Jouer ou manger ensemble, — dans l’argot des écoliers, qui prêtent quelquefois cette expression aux grandes personnes.

Faire enturer (se)

France, 1907 : Être volé ; perdre son argent au jeu.

Faire éternuer son cyclope

Virmaître, 1894 : Inscrire cent sous sur son carnet de dépenses sous cette rubrique significative ; On n’est pas de bois ! (Argot du peuple). N.

France, 1907 : « Inscrire cent sous sur son carnet de dépenses sous cette rubrique significative : On est pas de bois ! »

(Ch. Virmaître, Dictionnaire d’argot fin de siècle)

Faire faire à quelqu’un blanc de sa bourse

France, 1907 : Vivre aux dépens d’autrui.

Faire faux bond

France, 1907 : Manquer à un rendez-vous. « C’est assez l’habitude des Parisiens de faire faux bond. »

Faire faux-bond à l’échéance

Virmaître, 1894 : Manquer à un rendez-vous, ne pas payer une traite (Argot du peuple).

Faire faux-col

Rigaud, 1881 : Laisser passer un bout du col de la chemise, — en terme de régiment.

Faire femme

Rigaud, 1881 : Au régiment, le troupier qui a l’habitude de sortir avec la même femme, celui qui, dans une maison de tolérance, consomme habituellement avec la même Dulcinée, « fait femme ». La variante est : Avoir une femme en consigne.

Faire feu

Delvau, 1866 : v. a. Boire, — dans l’argot des francs-maçons, qui ont des canons pour verres.

France, 1907 : Donner, dans l’argot des saltimbanques, une importance particulière à certaines expressions ; accentuer certains effets.

France, 1907 : Boire ; argot des francs-maçons.

Faire feu des dents

Rigaud, 1881 : Manger gloutonnement. (XVIIe siècle.) Une très pittoresque image dont on ne se sert plus aujourd’hui.

Faire fi

France, 1907 : Dédaigner, Dom Carpentier, cité par Charles Nisard, croit que l’expression fi, fi, par laquelle on exprime le dégoût ou le mépris qu’inspire une personne, vient de ficus ou figue. C’est très probable, ajoute l’auteur des Curiosités de l’étymologie française : mais ce qui est certain, c’est que les expressions je m’en fiche, pour je m’en moque, va te faire fiche, en viennent également. Voir Faire la figue.

Le programme des revendications me semble formel ! Plus d’ostracisme ! Étant assujetties au devoir envers les hommes, les dames réclament tous les droits.
Autrefois nous avions l’habitude de récompenser leurs complaisances et leurs gentillesses eu petits cadeaux et en sacrifices de toutes sortes, mais ce n’est plus de cette façon qu’elles l’entendent. Elles dédaigneront les diamants, mépriseront les toilettes et feront fi des chapeaux neufs. Ce qu’elles exigeront à partir du 1er janvier prochain est de devenir sénateurs, receveurs d’enregistrement, payeurs généraux et même plénipotentiaires… près la tribu des Amazones ou chargés d’affaires à Mytilène.

(Louis Daryl)

Faire fiasco

France, 1907 : Échouer complètement.
L’expression vient d’Italie, Ludovico Fiasco, que nous appelons Fiesque, était un gentilhomme de Gênes qui, en 1547, ourdit avec l’aide de la France et du pape Paul III une conspiration contre l’amiral Andreo Doria. Il parvint à l’aide de ses deux frères, à s’emparer des portes du port de Gênes, mais il se noya en montant sur son vaisseau, au moment peut-être de réussir.

En fait de chances déshonnêtes,
Nous comptions tout dernièrement
Sur Simon lisant les sornettes
Du grand pétitionnement ;
Mais, hélas ! cet Iscariote,
Ce politique à la Bosco,
Ce faux et louche patriote,
N’a fait qu’un immense fiasco !

(Julien Fauque, Ce que disent les Jésuites)

Les Allemands ont la même expression : Fiasco machen.

Faire flanelle

Rossignol, 1901 : Rester des heures dans un débit, devant la même consommation, c’est faire flanelle.

France, 1907 : Aller dans une maison de filles sans consommer la marchandise. Jeu de mot sur flâner.

La maquerelle a généralement en réserve, dans une pièce retirée, deux ou trois gros bouledogues aux crocs puissants pour imposer, au besoin, aux clients par trop tapageurs ou à ceux qui, ayant passé un quart d’heure à faire flanelle, c’est-à-dire à flâner dans les salons sans consommer ni monter avec une femme, refusent de s’en aller et s’entêtent à ne pas vouloir faire marcher le commerce de la maison.

(Léo Taxil, La Prostitution contemporaine)

L’expression s’emploie au figuré pour aller au hasard, errer dans les rues.

Un coin d’chambe, eun’ soupente, eun’ niche,
Eun’ machine oùs qu’on est chez soi,
Ousque quand i’ pleut, on s’en fiche,
Ousqu’on a chaud quand i’ fait froid ;
Quand j’étais p’tit ej’ me rappelle
Que c’était comm’ ça chez moman…
Aujord’hui, forcé d’faire flanelle…
V’là porquoi que j’cherche un log’ment.

(Aristide Bruant)

Faire flotter

Halbert, 1849 : Noyer.

Faire flotter un pante

France, 1907 : Le noyer.

Faire four

France, 1907 : Échouer dans une entreprise ; éprouver un insuccès. Cette expression vient de l’habitude qu’avaient autrefois les comédiens de certains théâtres de refuser de jouer quand la recette ne couvrait pas les frais. Ils renvoyaient les spectateurs et éteignaient les lumières, faisaient four, disaient-ils, c’est-à-dire rendaient la salle noire comme un four. Cette locution date du milieu du XVIIe siècle. Un acteur qui vent avertir un de ses camarades qu’il joue mal, ou va se faire siffler, dit : Monsieur Dufour ou le vicomte Dufour est dans la salle.

À force d’être roulé par les camaraderies, les camarillas, les partis pris de dénigrement ou de louange, le public a fini par en avoir assez, et s’est habitué à juger seul. Constatez donc, rien qu’en ces trois dernières années, les bévues des jugeurs de théâtre. Tel four de première est devenu un colossal succès, tel triomphe de compte rendu a échoué piteusement au bout d’une semaine.

(Séverine)

Le hasard, qui est beaucoup plus spirituel que la plupart des hommes (et il n’a pas grand’-peine pour cela), a voulu que la comédie de Nîmes fût représentée le même jour que le Tartarin sur les Alpes au théâtre de la Gaité. Les deux pièces ont, parait-il, fait four.

(Henry Maret, Le Radical)

— Tu as donc fait four ?
— Ne m’en parle pas, j’ai la guigne.
— Four complet ?

(Marc Mario et Louis Launay)

Faire gaffe

Clémens, 1840 : Faire le guet.

Faire gasfre

M.D., 1844 : Surveiller.

Faire Godard

Rigaud, 1881 : Crever de faim, — dans le jargon des voleurs. C’est la variante de s’enlever cher. Allusion au ballon Godard qui s’enlève dans l’air.

La Rue, 1894 : Mourir de faim. On dit aussi s’enlever (comme un ballon) parce que le corps, vide de nourriture, est léger.

France, 1907 : Être affamé, c’est-à-dire avoir un ventre vide comme un ballon. Allusion à l’aéronaute Godard, célèbre sous le second empire.

Faire grenouillard ou croustillant

France, 1907 : Peindre avec audace et brio.

Faire griffon

France, 1907 : Voler quelqu’un à plusieurs et partager.

Faire Jacques déloge

Delvau, 1866 : v. n. Partir précipitamment sans payer son terme ou sans prendre congé de la compagnie, — dans l’argot du peuple.

Rigaud, 1881 : S’enfuir. — Déménager en oubliant de payer son propriétaire. L’expression est démodée.

Faire Joseph

France, 1907 : Avoir commerce illicite avec une femme mariée, faire de son mari un Joseph, c’est-à-dire un sot comme l’était le saint de ce nom.

Faire l’amour

Delvau, 1864 : Accomplir le plus impérieux des devoirs et le plus sacré des besoins physiques et intellectuels.

Ferons-nous l’amour, cette nuit ?

Ch. Sorel.

Si tu veux, nous allons faire l’amour… c’est meilleur… Ôte ton pantalon.
Il faut s’aimer toujours
Et ne s’épouser guère ;
Il faut faire l’amour
Sans curé ni notaire.

Collé.

Faire l’âne pour avoir du son

France, 1907 : Faire le niais ou le fou pour attraper de l’argent ou de bons morceaux. « C’est, dit Philibert Le Roux, le proverbe de bien des gens, l’un élève jusqu’aux cieux les actions de tel seigneur qui n’en fit jamais, l’autre fait le plaisant et le diseur de bons mots, qui dans le fond n’est qu’un âne ; celui-ci ne promet pas moins dans ses vers que l’immortalité à son roi, celui-là loue les richesses, l’esprit et la dépense d’un tel prince ; et mille âneries de cette nature, dont le ridicule tombe moins sur ceux qui les commettent que sur ceux qui sont assez simples que de donner du son, c’est-à-dire des récompenses pour des sottises qu’on leur débite, et qui ne servent d’ordinaire qu’à mettre au jour leur peu de mérite.
On disait aussi : faire l’âne pour avoir du chardon.

Faire l’arçon

Clémens, 1840 : Avertir.

Faire l’article

Delvau, 1866 : v. a. Vanter sa marchandise, — dans l’argot des marchands. Parler de ses titres littéraires, — dans l’argot des gens de lettres. Faire étalage de ses vices, — dans l’argot des petites dames.

France, 1907 : Vanter une chose, faire ressortir ses qualités, à l’instar des marchands qui offrent un article dont ils veulent se défaire et qu’ils vantent d’autant plus qu’il est difficile à placer.

— Vous cherchiez à me séduire par l’espoir de joies libertines que le mariage ne connait point. Vous vous vantiez — oh ! de quelle discrète et spirituelle façon — de n’être pas un amant ordinaire, borné à ces grossières façons de contenter les femmes qui sont à la porté du moindre capitaine. Vous saviez (disiez-vous) les mystérieuses incantations par où l’amant envoûte le cerveau et l’âme même de l’aimée, lui fait vivre mille amours en un seul, et se transforme lui-même en mille amants. Si j’ose m’exprimer si bassement à propos de vos mérites, mon pauvre Pierre, vous faisiez l’article non sans adresse… Je suis convaincue, d’ailleurs, que la réclame n’était point mensongère, et que vous devez être effectivement ce que vous annoncez : un artiste de l’amour.

(Marcel Prévost, Le Journal)

Faire l’écureuil

Delvau, 1866 : Faire une besogne inutile, marcher sans avancer, — dans le même argot [du peuple].

France, 1907 : Se donner beaucoup de mal pour rien.

Faire l’égard

Delvau, 1866 : Détourner à son profit partie d’un vol. On disait autrefois Écarter, — ce qui est faire son écart.

Virmaître, 1894 : Garder la part d’un vol qui revient à un complice. Ce devrait être plutôt faire l’écart, à moins que ce ne soit pris dans le sens de manquer d’égard en ne partageant pas (Argot des voleurs).

France, 1907 : Garder pour soi seul le produit d’un vol.

Faire l’esque, l’esgard

Rigaud, 1881 : S’approprier la part de vol d’un complice. C’est manquer de délicatesse entre voleurs.

On disait autrefois escarter, dans le sens de s’approprier le bien d’autrui.

(F. Michel.)

Faire l’harmonie

Clémens, 1840 : Se fâcher.

Faire l’homme

Delvau, 1864 : « Parfois la femme aussi veux faire l’homme ; C’est un plaisir que l’on renomme ! Elle monte à cheval sur vous Pour tirer ses deux ou trois coups, Sa motte agit sur votre ventre ; Plus elle pousse, mieux ça rentre ; Et son foutre mouillant les draps, Elle se pâme entre vos bras. »

Marc-Constantin.

Faire l’œil de carpe

Delvau, 1864 : Jouer de la prunelle d’un air langoureux, pour allumer, soit les hommes quand on est femme, soit les femmes quand on est homme.

Un petit coup d’épée à porter en écharpe,
De quoi traîner la jambe et faire l’œil de carpe.

E. Augier.

Delvau, 1866 : Rouler les yeux de façon à n’en montrer que le blanc, — dans l’argot des petites dames, qui croient ainsi donner fort à penser aux hommes.

Faire la balle

France, 1907 : Suivre les instructions de quelqu’un.

Faire la balle élastique

Delvau, 1866 : Manquer de vivres, — dans l’argot des voleurs, que cela doit faire bondir.

France, 1907 : Être à jeun, avoir le ventre vide.

Faire la barbe

Delvau, 1866 : v. a. Se moquer de quelqu’un, lui jouer un vilain tour, — dans l’argot du peuple.

Rigaud, 1881 : Railler ; tromper.

Faire la barbe à quelqu’un

France, 1907 : Le railler, se moquer de lui, ou simplement l’ennuyer, le raser, « comme, dit Delvau, le font ordinairement les barbiers, qui se croient obligés, pour distraire leurs pratiques sur la sellette, de leur raconter des fariboles, des cancans, des histoires à dormir debout, des anas aussi vieux que Mathusalem.
L’individu à qui l’on fait la barbe se trouve momentanément à la merci de celui qui le rase.

Faire la belle

France, 1907 : Jouer la dernière partie, la décisive.
Cette expression date du temps de la chevalerie. Dans un tournoi, deux chevaliers vainqueurs dans plusieurs rencontres devaient lutter l’un contre l’autre. Cette épreuve se nommait la belle, parce que le vainqueur définitif recevait le prix de la main d’une dame désignée comme la plus belle de l’assistance.

Faire la bête

Delvau, 1866 : v. a. Faire des façons. On dit aussi Faire l’âne pour avoir du son.

France, 1907 : Terme du jeu de « rallye-paper ».

Le capitaine Lambert apporta tous ses soins au tracé du parcours du rallye-paper et annonça son intention de faire la bête.

(Oscar Méténier)

Faire la bourrique

France, 1907 : Dénoncer.

Faire la bride

France, 1907 : Voler les chaînes de montre.

Faire la cane

France, 1907 : Se dérober, disparaître au moment du danger.

Faire la carpe

Delvau, 1864 : S’évanouir sous l’homme, dans l’excès de la jouissance qu’il procure au moment de l’introït. Voir faire l’œil de carpe.

Faire la carte à l’œil

France, 1907 : Préparer une carte, de façon à la reconnaître facilement dans le jeu.

Faire la carte large

France, 1907 : Truc employé par les grecs, consistant à insérer dans le jeu une carte un jeu plus grande que les autres, et par conséquent facilement reconnaissable par le filou.

Faire la chambre

Rigaud, 1881 : Faire le compte-rendu des débats de la Chambre dans un journal.

Je fais la Chambre comme adjoint à un vieux rédacteur sténographe nommé Millot.

(Figaro du 8 janvier 1879.)

Faire la collecte

France, 1907 : Les chanteurs de cours, les culs-de-jatte, les épileptiques et autres mendiants de cette sorte ont souvent un compagnon qui les suit ou vient plusieurs fois dans la journée à un endroit désigné d’avance recueillir les aumônes reçues, pour les mettre en sûreté, afin qu’en cas d’arrestation on d’indiscrète curiosité de la police on ne trouve sur eux qu’une vingtaine de sous : c’est ce qui s’appelle faire la collecte. Maxime du Camp cite dans son Paris bienfaisant un cul-de-jatte qu’on vit longtemps sur le trottoir du boulevard Haussmann et qui avoua recueillir chaque jour plus de vingt francs, lorsqu’on l’arrêta pour avoir volé le porte-monnaie d’une dame.

Faire la console ou consolation

France, 1907 : Voir Consolation.

Faire la culbute

Rossignol, 1901 : Faire faillite. Un objet quelconque fait la culbute lorsqu’il est vendu le double de son prix d’achat.

Faire la débinette (se)

France, 1907 : Se sauver.

Faire la fenêtre

Rossignol, 1901 : Se dit d’une prostituée qui a son logement donnant sur la rue et qui toute la journée, est derrière le rideau entr’ouvert, faisant signe aux passants de monter chez elle.

Faire la fête

France, 1907 : Mener joyeuse vie.
C’est pour vous que l’on fait la fête ! se dit ironiquement et signifie : Vous n’avez rien à prétendre à cela.

Faire la figue

France, 1907 : Mettre le bout du pouce entre l’index et le médium, et le présenter ainsi à la personne qu’on veut insulter. Ce geste était fort commun chez les Romains, qui l’appliquaient aux pédérastes, et est encore une grave insulte en Italie : « Le père Jacob, écrit à ce sujet Charles Nisard, dit que cette expression tient de l’italien far la fica, et a son origine dans le châtiment ignominieux que l’empereur Frédéric infligea aux Milanais pour avoir chassé de leur ville l’impératrice, montée sur une mule le visage tourné vers la queue. Frédéric, ajoute-t-il, fit mettre une figue au fondement de la mule, et força quelques Milanais à arracher publiquement cette figue, puis à la remettre à sa place avec les dents, sans l’aide de leurs mains. Aussi la plus grande injure qu’on puisse faire aux Milanais est de leur faire la figue ; ce qui a lieu en leur montrant le bout du pouce serré entre les deux doigts voisins. C’est ce qu’on fait chez nous aux petits enfants quand on leur a, soi-disant, pris le nez. » Mais, sans révoquer en doute la vérité de cette anecdote, la conclusion en est contestable, puisque Juvénal et Martial en parlent dans leurs écrits.

… Papefigue se nomme
L’île et province où les gens d’autrefois
Firent la figue au portrait du saint-père.

(La Fontaine)

L’ung d’eulx, voyant le pourtrait papal, lui feit la figue, qui est en icelluy pays signe de contemnement et dérision manifeste.

(Rabelais)

Voir Faire la nique.

Faire la grande soulasse

Bras-de-Fer, 1829 : Assassiner.

Delvau, 1866 : v. a. Assassiner, — dans l’argot des voleurs.

Virmaître, 1894 : Assassiner tous les habitants d’une maison (Argot des voleurs).

Faire la grande soûlasse

Rigaud, 1881 : Assassiner par profession.

Faire la grande soulasse sur le trimard

France, 1907 : Assassiner sur les grandes routes.

Faire la grasse matinée

Delvau, 1866 : v. a. Rester longtemps au lit à dormir ou à rêvasser, — dans l’argot des bourgeois, à qui leurs moyens permettent ce luxe.

Faire la Grèce

France, 1907 : Attirer un voyageur dans un café où on le dépouille de son argent en le faisant jouer aux cartes.

Faire la jactance

France, 1907 : Bavarder, questionner.

Faire la jat-jat

France, 1907 : Prendre la fuite.

Faire la main (se)

France, 1907 : S’exercer, s’entraîner.

La jeunesse d’alors était autrement turbulente que celle d’aujourd’hui, malgré de régime impérial. Au quartier Latin, c’était comme une sorte de Renaissance. Dans les faubourgs, les jeunes s’agitaient sourdement. Nous, pour nous faire la main, nous préludions aux luttes civiles attendues, par des pugilats violents, dans tous les mauvais lieux de Montmartre.

(Sutter-Laumann, Histoire d’un Trente sous)

Faire la manche

Clémens, 1840 : Demander quelque chose.

Delvau, 1866 : v. a. Faire la quête, — dans l’argot des saltimbanques.

Rossignol, 1901 : Mendier, quêter, faire souscription.

France, 1907 : Faire la quête ; argot des saltimbanques.

Tandis qu’elle était occupée à faire la manche, un vieux monsieur la reluquait.

Faire la nique

Virmaître, 1894 : Se moquer de quelqu’un au moyen d’un geste familier aux voyous (Argot du peuple). V. Battre une basane.

France, 1907 : Se moquer de quelqu’un, soit en posant le pouce sur le bout du nez et en agitant les autres doigts, soit en tirant la langue. Nique vient du latin nictare ou nicere, d’où l’allemand necken, taquiner.

Mais quand vient le soir, pénitences et bonnets d’âne. Chapsal et Lhomond, Epitome et Selectæ, tout est oublié, les élèves sortent en essaims bourdonnants, font en passant la nique à l’épicier, lui volent ses pruneaux et crachent dans ses barils de sardines.

(Henri Rolland, L’Écolier)

Avec les garçons et les filles,
Tout p’tit, déjà, j’jouais aux billes ;
F’sant la nique à l’obus qui tombe,
J’ai ramassé des éclats d’bombe
Sur l’pavé.

(Aristide Bruant)

On disait autrefois faire le nicquet.

Perrin Cohen fist au suppliant, en soi mocquant de lui, le nicquet.

(Lettres de remission, 1458)

Faire la noce

France, 1907 : Mener joyeuse vie.

Après avoir repoussé avec indignation l’idée de faire la noce, elle s’étonnait à présent, de bonne foi, de n’y avoir pas pensé plus tôt, considérant qu’après tout c’était la façon la plus rapide et la plus sûre d’arriver à la fortune.

(Oscar Méténier, Madame La Boule

Faire la paire

Rigaud, 1881 : Se sauver, — dans l’argot du peuple. Mot à mot : faire la paire de jambes. — Faire la paire en fringue, se sauver d’une maison de tolérance en emportant les hardes prêtées par la matrone.

Rossignol, 1901 : S’en aller, se sauver.

Hayard, 1907 : Se sauver.

France, 1907 : Courir, se sauver.

Un matin, un bougre assez bien nippé entrait dans un gargot du boulevard et, après s’être enfilé une bleue, se calait les joues d’un déjeuner copieux. Quand vint le moment de passer à la caisse, n’ayant pas un pelo en poche, le type tenta de se faire la paire. Il se fit indiquer les chiottes, s’enfila par une porte dérobée et gagna le boulevard.

(La Sociale)

Faire la paire (se)

La Rue, 1894 : Se sauver.

Virmaître, 1894 : Se sauver à toutes jambes. Ou dit aussi : se tirer des deux (Argot du peuple).

Faire la partie

Rossignol, 1901 : Se battre.

Faire la place

France, 1907 : ou simplement faire, se dit dans le langage commercial pour exploiter dans un endroit quelconque une branche de commerce. Faire la place pour l’épicerie, la mercerie, les vins ; faire une localité, un département, pour une industrie, et aussi pour cette industrie elle-même : faire les huiles, les dentelles, les draps, etc.

Alle avait pus ses dix-huit ans,
All’ ’tait pus jeune d’puis longtemps,
Mais a faisait encor’ la place.

(Aristide Bruant)

Faire la place pour les pavés à ressort

France, 1907 : Chercher de l’ouvrage et prier le bon Dieu de ne pas en trouver.

Faire la place pour les pavés à ressorts

Delvau, 1866 : Faire semblant de chercher de l’ouvrage et prier le bon Dieu de ne pas en trouver, — dans l’argot des ouvriers, ennemis-nés des paresseux.

Faire la planche

France, 1907 : Se tenir dans l’eau sur le dos et immobile.

Plusieurs paysannes revenant du marché s’étaient arrêtées sur le pont de Sèvres et, penchées sur le parapet, elles regardaient la Seine.
— Que regardent donc ces femmes ? demandai-je à un paysan.
— C’est un individu qui nage.
— Je ne vois pas qu’il y ait là tant de quoi exciter leur curiosité.
— Ah ! j’vas vous dire, m’sieur, c’est que l’najeu fait la planche et qu’il n’a point le caleçon.

(Gil Blas)

Faire la pluie et le beau temps

Delvau, 1866 : Être le maître quelque part ; avoir une grande influence dans une compagnie, dans un atelier. Argot des bourgeois.

Faire la poussette

France, 1907 : Voir Faire de la dentelle.

Faire la queue de cervelas

Rossignol, 1901 : Le condamné a plus d’une année de prison subit sa peine dans une maison centrale, où pendant les heures de promenade il lui est défendu de s’asseoir et de parler. Ils se suivent à la queue leu leu faisant le tour de la cour : c’est ce qu’ils appellent faire la queue de cervelas.

Faire la retape

Delvau, 1864 : Aller se promener sur les boulevards, pour y raccrocher des hommes et les amener baiser au bordel.

Delvau, 1866 : v. a. Aller se promener sur le trottoir des rues ou des boulevards, en toilette tapageuse et voyante, bien retapée en un mot, pour y faire la chasse à l’homme. Argot des filles et des souteneurs.

Faire la retourne des baguenaudes

France, 1907 : Vider les poches

Faire la révision

Rossignol, 1901 : Tous les brocanteurs, ou autres marchands, dans les ventes par autorité de justice ou du mont-de-piété, font la révision ; il y en a qui ne font absolument que cela et qui gagnent de l’argent sans avoir de marchandises. Ils sont par groupes de cinq ou six, jamais ils ne poussent les enchères et achètent pour leur compte personnel. Ils sont tellement connus par les commissaires-priseurs que lorsqu’un lot est adjugé à l’un d’eux on ne lui demande pas son nom pour le transcrire sur le procès verbal, La vente terminée, on fait la révision et la marchandise reste au plus enchérisseur d’entre eux ; le surplus qu’a produit la surenchère est à partager entre le groupe. Dans les monts-de-piété, notamment dans la salle de vente des bijoux, il y a plusieurs groupes qui sont toujours les mêmes marchands, qui ont une place attitrée ; chacun prend note de l’objet acheté, du prix et de la valeur approximative. La révision se fait ensuite le plus souvent d’une autre façon que les brocanteurs ; chacun inscrit en cachette, sur un morceau de papier qu’il plie, ce qu’il offre de tout le lot ; chacun dépose son papier, on en fait le dépouillement et le lot reste au plus enchérisseur, et alors chacun touche au prorata de ce qu’il a offert. Cela se passe rarement en présence des commissaires-priseurs qui n’interviennent pas, quoique cela constitue une escroquerie.

Faire la riboule

Rossignol, 1901 : Vendre a l’époque de la conscription et du conseil de révision des rubans et numéros pour conscrits. Voir Riboulet.

Faire la salle

Rigaud, 1881 : Chercher, un soir de première représentation, à se rendre le public favorable en semant des billets de faveur au ban et à l’arrière-ban de ses amis et connaissances, de ses fournisseurs, de ses créanciers ; chercher à composer une salle d’amis et de gens bienveillants. Il y a encore des auteurs assez naïfs pour compter sur l’enthousiasme des camarades. Il n’y a encore rien de tel que le zèle et la conviction et l’enthousiasme des créanciers. L’auteur qui pourrait en bonder une salle obtiendrait un rude succès… le premier soir.

Faire la serre

La Rue, 1894 : Faire le guet.

France, 1907 : Guetter.

Faire la simone

Rossignol, 1901 : Quêtes faites à l’époque du jour de l’an chez les particuliers par des individus se disant vidangeurs, et qui ne travaillent que rarement ; il y a escroquerie.

Faire la souris

Delvau, 1866 : v. n. Enlever délicatement et sans bruit son argent à un homme au moment où il doit y penser le moins, — dans l’argot des petites dames qui ne craignent pas d’ajouter le vol au vice.

Rigaud, 1881 : Dévaliser un client dans le feu de la conversation, — dans le jargon des filles.

Virmaître, 1894 : Fille qui vole son client pendant qu’il dort (Argot des filles). Albert Glatigny a dit à ce sujet :

En robes plus ou moins pompeuses,
Elles vont comme des souris.
Ce sont les jeunes retapeuses
Qui font la gloire de Paris.

France, 1907 : Voler adroitement.Le voyant tout feu tout flamme et bien en point, elle s’assit sur ses genoux, et tandis qu’un de ses bras lui enserrait le cou, de sa main restée libre elle faisait la souris et lui vidait rapidement le gousset.

(Les Propos du Commandeur)

Faire la tire

France, 1907 : Vider les poches, généralement au moyen d’une paire de ciseaux ou d’un canif.

Faire la tire à la chicane

France, 1907 : Voler en tournant le dos à la personne qu’on dépouille.

Faire la tortue

Halbert, 1849 : Jeûner.

Larchey, 1865 : Jeûner (Vidocq). — On connaît la sobriété de la tortue.

Delvau, 1866 : Jeûner, — dans l’argot des voleurs et des faubouriens, qui font allusion à l’abstinence volontaire ou forcée à laquelle l’intéressant testudo est astreint pendant des mois entiers.

Rigaud, 1881 : Jeûner ; imiter, contraint et forcé, la sobriété de la tortue.

Virmaître, 1894 : Ne rien manger. Jeûner volontairement ou par la force des choses (Argot des voleurs). N.

France, 1907 : Jeûner. Allusion à la tortue qui passe tous les mois de l’hiver sans manger.

Faire la vie

Delvau, 1864 : Mener une vie débauchée, coucher tous les jours avec un nouvel amant lorsqu’on est femme, avec une nouvelle maîtresse lorsqu’on est homme.

Delvau, 1866 : v. n. Se débaucher, courir les gueuses, ou avoir de nombreux amants, selon le sexe, — dans l’argot des bourgeois, qui pensent peut-être que c’est plutôt défaire sa vie.

Rigaud, 1881 : Faire de la vie une noce perpétuelle. Racine a dit pour exprimer la même idée :

De fleurs en fleurs, de plaisirs en plaisirs,
Promenons nos désirs.

Faire lanterne

France, 1907 : Exagérer en peinture le clair-obscur.

Faire le balancier

Rigaud, 1881 : Aller et venir sur un trottoir en attendant quelqu’un.

Faire le barbot dans une cambriole

France, 1907 : Dévaliser une chambre.

Faire le benjamin

M.D., 1844 : Substituer une chose à une autre.

Faire le bobe

France, 1907 : Voler les montres.

Faire le bon fourrier

Delvau, 1866 : v. n. C’est, dans un repas, servir ou découper de façon à ne pas s’oublier soi-même. Faire le mauvais fourrier. Servir ou découper de façon à contenter tout le monde excepté soi-même.

Rigaud, 1881 : Faire les portions égales, dans un repas.

Faire le boulevard

Delvau, 1864 : Se promener sur le boulevard des Italiens, ou sur le boulevard Montmartre, à l’heure où les hommes abondent, pour en raccrocher un ou plusieurs. — Se dit des lorettes, dans l’intervalle d’un entreteneur à l’autre.

Delvau, 1866 : v. n. Se promener, en toilette provocante et en tournure exagérée, sur les boulevards élégants, — dans l’argot de Breda-Street, qui est l’écurie d’où sortent chaque soir, vers quatre heures, de si jolis pur-sang, miss Arabella, miss Love, etc. On dit aussi Faire la rue ou Faire le trottoir.

Faire le cas

Delvau, 1864 : Se masturber.

Lorsque j’y pense, et même encore ici,
Je fais le cas. — Pardieu, lui dit le moine,
Je le crois bien, car je le fais aussi.

Piron.

Faire le chapeau du commissaire

Delvau, 1864 : Faire jouir un homme en lui suçant la pine et, en même temps, en lui pelotant doucement les couilles.

Tu me f’ras l’chapeau du commissaire ?

Lemercier de Neuville.

En même temps elle peut faire
Aussi chapeau du commissaire.
Ce doux jeux qu’inventa l’amour
Est aussi simple que bonjour !
Tant que sa petite menotte
Avec adresse vous pelote,
Sa bouche vous suce le dard
Pour en obtenir le nectar…

Marc-Constantin.

Faire le con cocu

Delvau, 1864 : Enculer une femme, ou un homme.

Il déconne et s’adresse au cul,
Puis zeste !… il fait le con cocu,
En et avant merde et foire.

(Parnasse satyrique.)

Faire le cul de poule

Delvau, 1866 : v. n. Faire la moue en avançant les lèvres et en les pressant, — dans l’argot du peuple.

Faire le dessus

Delvau, 1864 : Se placer dessus dans le duo amoureux, avec la femme dessous. Quelquefois, c’est la femme qui fait le dessus et l’homme le dessous. Voir la Diligence de Lyon.

Mais cette fille trop pensante
Qu’amour d’innover consumait,
Prit le dessus, tant elle aimait
La philosophie agissante.

Béranger.

Faire le diable à quatre

France, 1907 : Faire beaucoup de bruit.
Cette locution nous vient des mystères, pièces à dévotion et à effet que l’on représentait au moyen âge pendant certaines fêtes de l’année, surtout à Noël, à Pâques et à l’Épiphanie. Dieu le père et le fils, la Vierge, les apôtres, les saints paraissaient successivement sur la scène et naturellement les diables aussi. Afin d’impressionner davantage l’assistance et d’effrayer les pécheurs endurcis, ils faisaient un bruit affreux, poussaient des hurlements, en brandissant des torches enflammées et courant dans tous les sens. Mais comme cela exigeait une certaine dépense de soufre, d’étoupe et de masques, on les ménageait, c’est-à-dire que d’ordinaire il ne paraissait qu’un diable ou deux au plus sur la scène ; mais aux jours de grandes représentations on poussait le luxe jusqu’à quatre diables. C’était la grande diablerie et le tumulte et le tapage étaient tels que la chose devint proverbiale. On disait : Il fait du bruit comme dans une pièce à quatre diables, une diablerie à quatre, puis enfin diable à quatre.

Faire le filage

France, 1907 : Substituer une carte à une autre.

Faire le gaffe

France, 1907 : Guetter.

— Conte-moi donc ça, car pour entrer dans l’affaire, il faut que je la connaisse.
— Que t’es sinve (simple), c’est pas nécessaire pour faire le gaffe.
— Oh ! si ce n’est que ça, je suis ton homme.

(Marc Mario)

Faire le garçon, faire la fille (pour)

Rigaud, 1881 : Avoir de l’argent mignon pour s’amuser.

Faire le grand

Delvau, 1866 : v. a. Alvum deponere, — dans l’argot des pensionnaires. Elles disent aussi Faire le grand tour.

Faire le gros

Rigaud, 1881 : Faire ses nécessités. — Faire le petit, uriner.

Faire le Jacques

Rigaud, 1881 : Faire l’imbécile, faire quelque chose d’humiliant, de pénible, — dans le jargon du régiment. Jacques exprime la même idée que l’ancien Jeannot. As-tu fini de faire le Jacques ? Pendant trois heures nous avons fait les Jacques dans la cour, nous avons fait l’exercice ; expression surtout employée par les cavaliers pour les classes à pied.

Virmaître, 1894 : Faire l’imbécile. On fait le Jacques auprès d’une femme pendant qu’elle est la maîtresse d’un autre (Argot du peuple). N.

Rossignol, 1901 : Faire l’imbécile.

Hayard, 1907 : Faire l’imbécile.

France, 1907 : Jouer le rôle d’amoureux transi près d’une femme en possession d’amant.

Depuis que j’suis dans c’te putain d’Afrique
À faire l’Jacques avec un sac su’ l’dos,
Mon vieux frangin, j’suis sec comme un coup d’trique,
J’ai bentôt pus que d’la peau su’ les os.

(Aristide Bruant, Dans la rue)

Faire le jaja

Rossignol, 1901 : S’en aller, se sauver.

Faire le lézard

Delvau, 1866 : v. n. S’étendre au soleil et y dormir ou y rêver, — dans l’argot des bohèmes et du peuple.

Virmaître, 1894 : Battre sa flemme sur l’herbe, le ventre au soleil. On dit aussi : manger une soupe à l’herbe (Argot du peuple). V. Loupeur.

Rossignol, 1901 : Se coucher sur l’herbe au soleil.

France, 1907 : S’étendre an soleil. On dit dans le même sens : prendre un bain de lézard.

France, 1907 : Décamper.

Faire le métier

Delvau, 1864 : Sous-entendu de putain.

Qu’ils sont jolis tes tétons ! qu’ils sont ronds et fermes ! je vois bien qu’il n’y a pas longtemps que tu fais le métier.

La Popelinière.

Faire le monôme

Rigaud, 1881 : Marcher dans les rues à la queue-leu-leu et aller prendre des prunes chez la mère Moreau, à l’issue d’un des examens d’admission à l’École polytechnique, — dans le jargon des candidats à cette école.

Hier, à une heure de l’après-midi, a eu lieu la promenade annuelle, le monôme traditionnel, des candidats de l’École polytechnique.

(Petit Journal du 2 juillet 1880.)

La variante est : File indienne.

Faire le monsieur

Larchey, 1865 : Trancher du maître, du fashionable.

Sa suffisance le fait haïr, il fait le monsieur.

Hilpert.

Faire le morlingue

France, 1907 : Voler des porte-monnaie.

Faire le mouchoir

Delvau, 1866 : v. a. Voler une idée de drame, de vaudeville ou de roman, — dans l’argot des gens de lettres.

Rigaud, 1881 : Voler l’idée d’une pièce de théâtre, d’une œuvre littéraire, sorte de vol trop pratiqué par les gens de lettres sans aucune espèce de scrupule.

Faire le pante ou pantre

France, 1907 : Faire l’imbécile.

Faire le patatro

France, 1907 : S’enfuir.

Faire le paysan

France, 1907 : Jouer au naïf et au rustique pour mieux tromper ses partenaires dans les parties de cartes, au cabaret.

Faire le persil

France, 1907 : Se promener le long du trottoir ou dans les rues pour racoler les hommes.

Point n’est besoin de vous expliquer ce que c’est que faire le persil. Un collégien de quatrième sait ça beaucoup mieux qu’il ne connait les Capitulaires de Charlemagne. Mais si tout le monde sait ce que c’est que le « persil » en général, bien peu de gens savent ce que c’est que le « persil au salé », par exemple, le « persil à la quitourne », le « persil évangélique », etc.

(Un ancien Inspecteur, La Prostitution à Paris)

Voir Persil.

À Mabille, il y avait deux catégories de femmes : les femmes chics, qui faisaient leur persil, et celles que l’administration engageait pour danser ; elles ne se mêlaient pas. Celles qui ne dansaient pas se promenaient dans les allées.

(Ch. Virmaître, Paris oublié)

Tout cela ne dit pas d’où vient l’expression ; heureusement Lorédan Larchey, dans l’avant-propos de son Nouveau Supplément, nous en donne l’explication :

Sans un long séjour sur les bords de la Méditerranée, je ne me serais jamais douté que le mot persil en était venu pour faire le tour du bois de Boulogne après avoir fait celui de la prostitution parisienne. Dans les Alpes-Maritimes comme dans les Pyrénées-Orientales, on dit persil pour argent. Faire du persil, c’est donc par le fait chercher un gain d’argent.

Faire le pet

Clémens, 1840 : Donner l’alerte.

Rossignol, 1901 : Faire le guet. Pendant qu’un vol se commet, le complice qui regarde s’il ne voit venir personne fait le pet.

Faire le petit

Delvau, 1866 : v. a. Meiere ; — dans l’argot des pensionnaires. Blés disent aussi Faire le petit tour.

Faire le pied de grue

France, 1907 : Attendre longtemps, à l’instar des grues qui restent des journées entières postes sur un pied.

Elle ne se rendait pas compte, dans sa naïveté, de l’impossibilité où se trouve un homme du monde, comme celui dont elle rêvait la conquête, de se lever à sept heures du matin pour aller faire le pied de grue, dans un faubourg, sous les fenêtres d’une petite modiste, rencontrée par hasard la veille en flânant dans les rues.

(Edmond Lepelletier)

Pour être policier, on n’en est pas moins homme et on a soif comme le commun des mortels. Souvent on est entraîné loin de son domicile, on ne peut pas abandonner un poursuite pour rentrer chez soi. Il faut dîner dehors. Si « le gibier » s’installe dans un café, on ne peut pas rester à faire de pied de grue à la porte.

(Mémoires d’un inspecteur de la Sûreté)

Faire le plongeon

Delvau, 1866 : v. a. Se confesser in extremis — dans l’argot du peuple, qui a horreur de l’eau. C’est le mot de Condorcet parlant des derniers moments d’Alembert : « Sans moi, dit-il, il faisait le plongeon. »

Rigaud, 1881 : Faire faillite. — Renier ses principes, se parjurer.

France, 1907 : Se ruiner ou bien se confesser lorsqu’on est à l’article de la mort.

Faire le poil

Larchey, 1865 : Surpasser. — Mot à mot : raser.

Personne n’a fait le poil à Gaudissart.

Balzac.

Il n’y a pas moyen de me faire le poil.

Vidal, 1833.

Faire le poireau

Virmaître, 1894 : Attendre longtemps quelqu’un, si la personne ne vient pas, celui qui attend est planté là pour reverdir. On dit aussi : poiroter. Synonyme de : Attends-moi sous l’orme (Argot du peuple).

Rossignol, 1901 : Attendre.

Hayard, 1907 : Attendre.

France, 1907 : Attendre longtemps en vain à un rendez-vous.

Après m’avoir fait faire le poireau tous les soirs pendant plus d’une semaine, la gosseline se décida enfin à rappliquer au ralliement.

(Les Gaietés du régiment)

Faire le pont

France, 1907 : Imprimer à une carte ou à plusieurs cartes une légère courbure, de façon à la reconnaître.

France, 1907 : C’est, dans l’argot des lutteurs, se tenir arc-bouté, d’un côté sur la nuque, de l’autre sur les pieds, de façon que les épaules ne touchent pas le sol.

Surpris de cette attaque imprévue, le lutteur résistait à la touche des épaules. Il faisait le pont. Arc-bouté des talons à la nuque, il soulevait son corps d’un mouvement désespéré come une arche. Alors l’Italien usa d’un subterfuge extrême. Et, soulevant la tête de son adversaire, il la sonna sur le sol, à coups préssés, comme un marteau.

(Hugues Le Roux, Les Larrons)

Faire le proute

Clémens, 1840 : Avertir la police, crier à la garde.

Faire le quart

Rossignol, 1901 : On dit qu’un mac est un entier dont la moitié fait le quart. Ce mot quart vient de ce que les filles des maisons de tolérance de province font, à tour de rôle, une faction d’un quart d’heure à une porte à claire-voie, pour appeler les clients.

France, 1907 : Battre le trottoir à la recherche de l’homme.

I’s ont des Louis
Qu’a beaucoup d’louis
Sans beaucoup d’peine,
Car, à l’écart
A font leur quart
À la Mad’leine.

(Aristide Bruant)

Faire le rade

Rossignol, 1901 : Voler de l’argent dans le tiroir-caisse d’un comptoir.

Faire le rendème ou rendémi

France, 1907 : Voler un boutiquier en lui demandant la monnaie d’une pièce, que l’on ramasse avec sa monnaie.

Faire le saint Jean

France, 1907 : Tousser et cracher pour donner un signal convenu. Se dit aussi pour jouer à l’imbécile.

L’invitation acceptée, l’amorceur fait le saint Jean, c’est-à-dire qu’atteint d’une toux subite, il se détourne pour expectorer bruyamment. À ce signal, deux complices se hâtent de se rendre à l’endroit convenu d’avance.

(Pierre Delcourt, Paris voleur)

Faire le saut

Delvau, 1864 : Se dit d’une femme que l’insistance passionnée d’un homme oblige à se laisser baiser par lui.

De ces brebis à peine la première
A fait le saut, qu’il suit une autre sœur.

La Fontaine.

France, 1907 : Partir sans payer.

Faire le serrurier

Delvau, 1864 : Frotter longtemps son membre contre les parois du vagin d’une femme sans parvenir à éjaculer. Voir limer.

Faire le sert, le serre

Rigaud, 1881 : Faire le guet. En argot de voleur, sert veut dire « signal. » C’est une abréviation, sans doute, de service. Faire le sert ou le serre, c’est donc faire le service, surveiller.

Faire le singe

Clémens, 1840 : Attendre.

Faire le tape

Clémens, 1840 : Être exposé sur l’échafaud.

Faire le trottoir

Delvau, 1864 : Sa promener, décolletée, dans les rues, à la nuit tombante, en remuant habilement les fesses, pour allumer les hommes et les engager à venir au bordel voisin.

Mon cher, j’descends dans la rue ; a y était qui f’sait l’trottoir.

Henry Monnier.

Commèr’ vaut compère :
Il fait le mouchoir,
Elle le trottoir.

(Chanson anonyme moderne.)

France, 1907 : Faire les cent pas dans la rue pour racoler un homme.

Près de la Porte Maillot, on ramasse une vieille femme de soixante-trois ans ; elle n’a jamais couché dans un lit depuis vingt ans ; le Bois est à elle, et, à son âge, elle y fait le trottoir : pire encore, elle a des clients !

(Gil Blas)

Amanda et Fifine ont lu dans le journal qu’on verrait, pendant l’Exposition de 1900, des trottoirs roulants à Paris.
— Ça facilitera joliment le travail, dit l’une.
— Et la concurrence aussi, reprend l’autre ; quand il y aura un trottoir roulant, on ne voudra plus faire celui-là…

On dit aussi faire le truc :

— Depuis combien de temps mènes-tu cette vie-là ?
— Y a bientôt deux ans que j’fais le truc.
— Tu n’as donc plus ni père ni mère ?
— J’ai pas connu ma mère, parait qu’c’était une chouette roulure ; quant à mon p’pa, il aimait trop les bons coups, ça fait qu’il est à l’hôpital des fous.
— Mais enfin comment vis-tu, où loges-tu ?
— Chez mon bon ami.
— Qui ça, ton bon ami ?
— Mon bon ami Mimile, c’était un copain à p’pa qui m’a prise chez lui avec plusieurs petites gosselines comme moi. Oh ! je l’aime bien, Mimile, il m’a empêchée d’aller à la prison des enfants trouvés, il m’a montré à travailler et j’y rapporte toute ma galette.
— Quel âge as-tu ?
— Douze ans.

(Henry Bauer, Écho de Paris)

Faire les cabinets

Rigaud, 1881 : Aller de cabinet en cabinet particulier à la recherche du client, — dans le jargon des soupeuses.

Ça m’amuse ensuite de faire les cabinets.

(Ces Petites dames, 1862.)

Faire les cent coups

France, 1907 : Se livrer à toutes sortes d’excès ou de folies ; jeter sa gourme.

— Nous sommes des honnêtes gens, ici. Oui, comparativement à lui, nous sommes des honnêtes gens. Et parce qu’il vient, dans ta boutique à toi, et dans mon hôtel à moi des voyous, des escarpes et des bourgeois en redingote, des fourrures au cou, qui font du mal à des petites filles dont les mères ont faim, je dis tout de même que c’est plus honnête ici que chez lui ! Il que doit trois cent mille francs, qu’il m’a volés ! et il ne croyait pas un mot des choses dont je le payais pour qu’il les dit ! et il trouvait drôle d’être un menteur, un voleur et une crapule ! Vraiment, c’est bien, qu’une fille comme moi, qu’une garce comme moi, qu’une rouleuse comme moi, qui a fait les cent coups, qui n’a jamais rien aimé de beau, ni de bien, — ah ! je me connais, allez ! je sais ce que je vaux ! — puisse dire ça à cet ignoble journaliste, qui n’a rien à y répondre !

(Catulle Mendès, Gog)

On dit aussi dans le même sens : faire les cent dix-neuf coups :

Faites le diable à quatre, faites les cent dix-neuf coups… vous aurez de l’argent, et l’argent, dans notre siècle, il n’y a que ça !… On s’en fiche de la vertu ; la pauvreté, on la méprise…

(J. Patrice)

Faire les cours

Rigaud, 1881 : Être parquées par catégories dans des quartiers séparés avec défense de communiquer, — dans le jargon des détenues de Saint-Lazare.

Faire les poches

Hayard, 1907 : Fouiller quelqu’un.

Faire les yeux en coulisse

Rossignol, 1901 : Regarder une femme amoureusement comme pour lui dire : Veux-tu ?

Faire lesse (se)

M.D., 1844 : Se tromper.

Faire Lisette

France, 1907 : Faire l’amour. Allusion à la Lisette chantée par Béranger (ne pas confondre avec le sénateur).

Le sénateur Bérenger, licencié ès rues, qui a porté la plainte que l’on sait, aurait mieux fait de se taire.
Notre brave population parisienne s’est tout entière mise du côté des prévenus. Ce Bérenger qui n’aime pas qu’on fasse un brin Lisette, n’est pas pour nous satisfaire et combien nous lui préférons celui dont la grand’mère regrettait sa jambe bien faite et le temps perdu !

(Maurice Donnay)

Faire loucher

France, 1907 : Tenter.

Il était là pour faux, un billet de complaisance qu’il avait signé pour faire plaisir à une femme.
C’est lui, la Boule, qui ne se flanquerait jamais une bêtise comme ça sur la conscience ! Mais il avait néanmoins profité de l’expérience de son codétenu, qui, par parenthèse, était entretenu très chiquement par sa maîtresse, une dame du beau monde, et c’était cette expérience qui allait lui permettre de se créer sans risques une petite existence qui ferait loucher bougrement les gens.

(Oscar Méténier)

La cycliste porte en général des bas de laine quadrillés, écossais, montant jusqu’à mi-jambe, et laissant à découvert, près du genou, un coin de chair rose qui fait loucher les messieurs.

(Fin de Siècle)

Faire mal

Delvau, 1866 : Faire pitié, — dans l’argot des faubouriens et des filles, qui disent cela avec le plus grand mépris possible. Ah ! tu me fais mal ! est d’une éloquence à nulle autre pareille : on a tout dit quand on a dit cela.

France, 1907 : Exciter une pitié méprisante. « Tiens, tu me fais mal, vieux salaud ! »

Faire mettre (se le)

Delvau, 1864 : Sous-entendu : le membre viril dans le vagin ou dans le cul.

Le Florentin lui dit :
Ne m’en fais pas reproche,
Car dans une bamboche
Tu te l’ fais mettre aussi.

Joachim Duflot.

Faire minette

France, 1907 : Imiter un chat qui lèche.

Fait-il, ce bourgeois honnête,
Bien minette,
Et le sauras-tu garder !

(A. Glatigny, Joyeusetés galantes)

Faire minon minette

Delvau, 1864 : Branler une femme avec la langue.

— Comment, ma mie, ça s’appelle quand on branle avec sa langue ? — Faire minon-minette.

Henry Monnier.

Elle vous fait minette
Et puis avale tout.

Joachim Duflot.

Faire mouche

Larchey, 1865 : Tirer assez juste pour que la balle s’aplatisse sur un point noir (mouche), au centre de la cible.

Elles font mouche à tout coup et tuent les hirondelles au vol.

Second.

Faire mouiller la fesse (se)

Delvau, 1864 : Se faire baiser, — parce que dans l’averse de sperme qui tombe tout à coup sur elle, la femme n’a pas le temps d’ouvrir son parapluie et de préserver son ventre et ses fesses de l’inondation.

Par un député ce mac
A fait repasser sa nièce,
Qui s’est fait mouiller la fesse
Pour un bureau de tabac.

Dumoulin.

Faire mourir (s’en)

Delvau, 1866 : Désirer ardemment une chose, — dans l’argot du peuple. S’emploie d’ordinaire comme formule de refus à une demande indiscrète ou exagérée : Ah ! tu t’en ferais mourir ! C’est le refrain d’une chanson récente qui a fait son tour de Paris comme le drapeau rouge, et qui est en train de faire son tour du monde comme le drapeau tricolore.

Faire mousser

Larchey, 1865 : Louer immodérément.

Celui-ci commande de longs articles dans lesquels il faut faire mousser les modistes en dix lignes.

Roqueplan.

Mousser : Écumer de rage.

Ne moussez donc pas comme ça.

Labiche.

Mousseux : Faisant de l’effet redondant.

J’estime et j’honore celui qui est un peu mousseux dans sa façon de parler.

La Bédollière.

Faire nonne

Delvau, 1866 : Prêter la main à un vol, — dans l’argot des prisons.

Rigaud, 1881 : Être complice d’un vol, faciliter un vol.

La Rue, 1894 : Être complice d’un vol.

Virmaître, 1894 : Se rendre le complice d’un vol préparé de longue main par le nonneur lui-même (Argot des voleurs).

France, 1907 : Se grouper de façon à faciliter le vol d’un complice.

Faire note

France, 1907 : Superlatif de faire chaud dans l’argot des peintres.

Faire pallas

Rossignol, 1901 : Faire des manières, faire du genre.

Faire pan pan

Delvau, 1864 : Baiser une femme, imiter avec la queue dans le vagin le bruit sourd du marteau de cordonnier frappant pour l’assouplir sur un morceau de cuir.

Si du paon dépend
Mon plaisir, c’est qu’un paon,
Cet animal pimpant,
À Vénus fit pan pan !

J. Du Boys.

Faire papa et maman

France, 1907 : Imiter ce que l’on a vu faire au lit par des parents imprudents.

C’était sa petite femme, ils essayaient ensemble, dans les coins noirs, l’amour qu’ils entendaient et qu’ils voyaient chez eux, derrière les cloisons, par les fentes des portes. Ils savaient tout, mais ils ne pouvaient guère, trop jeunes, tâtonnant, jouant, pendant des heures, à des jeux de petits chiens vicieux. Lui appelait ça faire papa et maman ; et, quand il l’emmenait, elle galopait, elle se laissait prendre avec le tremblement délicieux de l’instinct, souvent fâchée, mais cédant toujours dans l’attente de quelque chose qui ne venait point.

(Émile Zola, Germinal)

Faire papa, maman

Rigaud, 1881 : Apprendre à battre du tambour, — dans le jargon des élèves-tambours. Onomatopée des baguettes frappant à tour de rôle la caisse.

Faire passer le goût du pain

Larchey, 1865 : Tuer. On trouve Perdre le goût du pain (Mourir) dans le Dictionnaire comique de Leroux. V. Claquer.

Tous les jean-f…… qui voulaient faire perdre le goût du pain aux braves montagnards.

1793, Hébert.

V’là la guillotine qui se met à jouer. On enlève le goût du pain au monde.

H. Monnier.

Delvau, 1866 : Tuer quelqu’un, — dans l’argot du peuple. On dit aussi Perdre le goût du pain, pour Mourir.

France, 1907 : Tuer.

Faire patatro

Rossignol, 1901 : Se sauver, s’en aller.

Faire patrouille

Delvau, 1866 : Se débaucher de compagnie, courir les rues après minuit avec des libertins et des ivrognes.

Faire peau neuve

Delvau, 1866 : S’habiller à neuf.

France, 1907 : Acheter des vêtements neufs. S’amender, changer de caractère.

Faire péter le cylindre (s’en)

Delvau, 1866 : Se dit, dans l’argot des faubouriens, de toute chose faite avec excès, comme de manger, de boire, etc., et qui pourrait faire éclater un homme, — c’est-à-dire le tuer. On dit aussi S’en faire péter la sous-ventrière.

Faire petite chapelle

Delvau, 1866 : v. n. Se chauffer comme ont la pernicieuse habitude de le faire les femmes du peuple, qui s’exposent ainsi à des maladies variqueuses.

Faire pieds neufs

Delvau, 1866 : v. a. Accoucher d’un enfant, — dans l’argot du peuple, qui se souvient, sans l’avoir lu, du livre Ier, chap. VI, de Gargantua.

France, 1907 : Accoucher.
L’expression est vieille, on la trouve dans Rabelais :

Eulx tenants ces menus propos de buverie, Gargamelle commença se porter mal du bas, d’ond Grandgousier se leva de sus l’herbe, et la reconfortoit honestement, pensant que ce fust mal d’enfant, et lui disant qu’elle s’estoit là herbée soubs la saulsaie, et qu’en bref elle feroit pieds neufs : par ce lui convenoit prendre courage nouveau au nouvel advénement de son poupon.

Faire piler du poivre

Larchey, 1865 : Terrasser quelqu’un plusieurs fois en le laissant retomber aussi lourdement qu’un pilon. — Poivre indique la cuisson qu’en ressent la partie contuse.

Faire pincer (se)

France, 1907 : Se faire prendre.

Le gros juif vous exposait ses théories. Il est très beau quand il parle de la pourriture ouvrière. C’est lui qui s’est fait pincer, il y a trois semaines, chez une dame complaisante, avec des jeunes personnes qui n’avaient pas tout à fait treize ans.

(Maurice Donnay)

Faire pisser des lames de rasoir en travers

Larchey, 1865 : Ennuyer.

Faire plaisir

Delvau, 1864 : Faire jouir, soit en branlant, soit en baisant une personne.

Ah ! petite bougresse ! que tu me fais de plaisir !… Ah ! ah ! je décharge ! je décharge !…

La Popelinière.

C’est un homme qui trop s’ingère
À faire plaisir aux femmes.

(Farces et moralités.)

S’ils font plaisir à nos commères,
Ils aiment ainsi les maris.

F. Villon.

Faire pleurer son aveugle

Delvau, 1866 : Meiere, — dans l’argot des faubouriens.

Rigaud, 1881 : Uriner.

France, 1907 : Urine ou se masturber.

J’entrais à l’improviste dans le cabinet et je surpris le galopin fiévreusement occupé à faire pleurer son aveugle.

(Les Propos du Commandeur)

Faire pleurer un simple

Clémens, 1840 : Escroquer, voler, ou gagner quelqu’un.

Faire poser

France, 1907 : Faire attendre quelqu’un ; le jouer, se moquer de lui.

Ces jeunes filles du commerce parisien, élégantes, sachant s’habiller, marcher et parler, avec une pointe de provocation dans l’allure et une fleur d’honnêteté sur le visage, forment aujourd’hui ce qu’on pourrait appeler l’époque de transition de la galanterie française. Comme la cocotte, elles aiment le luxe, les toilettes, et ont en horreur la pauvreté laborieuse, un mari, un ménage, les enfants. Elles allumeraient un réchaud chargé de charbon s’il leur fallait épouser un ouvrier, un employé, un petit commerçant. Quelques-unes s’y résignent pourtant. Ce sont les plus sages et les moins jolies. Elles aiment être adulées, courtisées, et, pour employer une locution familière, elles adorent faire poser.

(Edmond Lepelletier)

Faire postillon

Delvau, 1864 : Introduire son doigt dans le cul d’un homme, lorsqu’il vous baise, afin de le faire jouir plus vite.

Avec mon nez, bien qu’il soit long,
Je ne puis me fair’ postillon.
Et voilà ce qui me chagrine :
Avant ma mort j’aurais voulu
Foutre mon nez dans l’ trou d’ mon cul.

Dumoulin.

— Rendre le même servira à la femme, lorsqu’elle fait le dessus et vous le dessous, dans le duo vénérien.

L’homme, de sa main droite, ou lui fait postillon,
Ou la glisse en dessous et lui branle le con.

L. Protat.

Faire pouf

France, 1907 : Quitter son logement sans payer. Même sens que déménager à la cloche de bois. Pouf, suivant Lorédan Larchey, est une onomatopée imitant la chute d’un paquet de vêtements lancé par la fenêtre dans la rue.

Faire prier (se)

Delvau, 1864 : Se dit d’une femme qui refuse, ou fait semblant de refuser l’offre qu’un homme lui fait de son membre, — ce qui est refuser son bonheur.

Dans le siècle où les dames
Ne se font pas prier,
Avoir toutes les femmes
Afin de varier.

Collé.

Faire quatre chiffres

Fustier, 1889 : Argot de théâtre. Faire une recette d’au moins mille francs.

On se frottait les mains au théâtre, le soir, quand, par hasard, on avait atteint ce qu’on appelait les quatre chiffres. Les quatre chiffres cabalistiques, c’était mille francs.

(F. Sarcey : Temps, 1882.)

Faire ramasser (se)

Delvau, 1864 : Se faire arrêter par les agents de police pour avoir excité les passants à la débauche ; après onze heures du soir.

Si bien qu’eune nuit, c’était hors barrière, on m’ramasse… De là, au dépôt… Quand j’ai sorti, j’étais putain…

Henry Monnier.

Delvau, 1866 : Se faire arrêter, — dans l’argot des voleurs et des filles.

Faire relâche

Delvau, 1864 : Se refuser à toute conjonction, par maladie mensuelle ou par fantaisie pure, — ce qui est assez rare, qui a bu voulant toujours boire.

Il faut que tous les mois l’artiste se repose…
Une affiche à la porte, affiche de couleur,
Sur laquelle en travers, une bande s’attache,
Avertit le public qu’ici l’on fait relâche.

Aug. Roussel.

Faire remplir (se)

Delvau, 1864 : Se faire faire un enfant.

L’un me remplit, l’autre me bourre…
Que puis-je désirer de plus ?

Marcillac.

Faire ripaille

France, 1907 : Mener joyeuse vie. Boire et manger outre mesure, s’adonner aux plaisirs de la table.
On raconte au sujet de cette expression une histoire du dernier et huitième comte et premier duc de Savoie, Amédée le Pacifique, connu comme antipape sous le nom de Félix V. Il prit le monde en dégoût à la mort de sa femme et céda ses États à son fils aîné (1439), pour se retirer, à l’âge de 56 ans, sur les bords du lac de Genève, dans le Chablais, en un château dépendant d’un prieuré de l’ordre de Saint-Maurice, fondé par l’un de ses prédécesseurs, et qu’il avait fait remettre à neuf. Le château se nommant Ripaglia.
Amédée prit l’habit de moine, ainsi que quelques seigneurs qui l’avaient suivi dans sa retraite pour renoncer, comme lui, au monde, aux pompes et aux œuvres de Satan. Mais ils n’avaient, parait-il, nullement renoncé à la bonne chère, car l’ermitage de Ripaglia devient le théâtre d’agapes homériques. On dit bientôt : faire grande chère comme à Ripaglia, par contraction Ripaille, et enfin faire ripaille. Les Italiens disent : audare a Ripaglia.
Dans une de ses épîtres, Voltaire s’exprime ainsi :

Ripaille, je te vois ! Ô bizarre Amédée !
Est-il vrai que dans ces beaux lieux,
Des soins et des grandeurs écartant toute idée,
Tu vécus en vrai sage, en vrai voluptueux,
Et que, lassé bientôt de ton doux ermitage,
Tu voulus être pape et cessas d’être sage !
Lieux sacrés du repos, je n’en ferais pas tant ;
Et malgré les deux clefs dons la vertu nous frappe,
Si j’étais ainsi pénitent,
Je ne voudrais point être pape.

Dans l’épître 64, il dit au roi de Prusse :

Lorsque deux rois s’entendent bien,
Quand chacun d’eux défend son bien
Et du bien d’autrui font ripaille…

Mais en dépit de Voltaire et des étymologistes qui ont trouvé cette fable, elle est controuvée. Ripaille vient tout simplement du vieux français ripuaille, dérivé lui-même de ripue, bonne chère.

Si bien que vers minuit, on cause, on fait ripaille,
Puis la discussion dégénère en bataille ;
Lors, laissant au défunt l’un d’eux pour le veiller,
Les autres titubants regagnent leur foyer.

(Alfred L. Marquiset, Rasure et Ramandous)

Faire river son clou

Delvau, 1864 : Employé dans un sens obscène pour faire l’acte vénérien.

La petite savequière
Qui demeure en ce carquié,
Va faire river son clou
Tous les dimanches à Saint-Cloud.

(La Comédie des Chansons.)

Faire sa balle

Delvau, 1866 : v. a. Suivre les instructions ou les conseils de quelqu’un, — dans l’argot des prisons.

Faire sa dame

Rigaud, 1881 : L’expression était fort en usage parmi le peuple au commencement du XVIIIe siècle, et signifiait comme aujourd’hui : prendre du bon temps, se prélasser, s’amuser.

Faire sa gueule

Virmaître, 1894 : Faire une figure renfrognée. Être mécontent sans en rien dire (Argot du peuple). N.

France, 1907 : Montrer de la mauvaise humeur ou une fierté intempestive.

J’sais ben pourquoi tu fais ta gueule,
C’est paç’ que j’suis qu’un pauv’ charretier.
Madame aim’ mieux s’ballader seule
Qu’sortir avec un ouverrier.

(Fulbert Mayrat)

Faire sa merde

Delvau, 1864 : Faire des façons, des cérémonies — en parlant d’une femme qui ne veut pas être baisée.

Mais tu ne l’aimes pas. Avec moi tu veux faire
Ta merde, voilà tout…

Louis Protat.

Virmaître, 1894 : Faiseur d’embarras. Les gascons ont ce privilège (Argot du peuple).

France, 1907 : Affecter des airs de fierté déplacés ou intempestifs. Les gens polis disent : faire son cambronne.

Quand ça jou’, qu’ça gagne ou qu’ça perde,
Ça s’en fout… et ça fait un foin !…
Deux gonzess’s aussi fait sa merde,
Ah ! si j’en t’nais eun’ dan’ un coin !…

(Aristide Bruant)

Faire sa nouveauté

Rigaud, 1881 : C’est, dans le jargon des filles, se produire sur un nouveau trottoir, montrer un nouveau visage aux dilettanti de la prostitution.

Faire sa poire

Delvau, 1864 : Faire des façons, — en parlant d’une femme qui hésite à se laisser baiser.

Larchey, 1865 : Sa tête, sa Sophie, son Joseph, son étroite, ses embarras, faire suisse. V. ces mots.

Virmaître, 1894 : Ne jamais rien trouver de bien ; s’imaginer être au-dessus de tout et de tous (Argot du peuple). N.

Hayard, 1907 : Être difficile.

France, 1907 : Prendre de grands airs, affecter un dédain intempestif.

Faire sa Sophie

Delvau, 1864 : Se dit de toute femme qui fait la sage quand il ne le faut pas.

À quoi ça m’aurait avancé de faire ma Sophie ?

Charles Monselet.

Delvau, 1866 : v. n. Se scandaliser à propos d’une conversation un peu libre, montrer plus de sagesse qu’il ne convient. On dit aussi Faire sa poire, Faire sa merde, et Faire son étroite, — dans l’argot des voyous.

Virmaître, 1894 : Faire le dégoûté, à table ne manger que du bout des lèvres. Mot à mot : faire des manières. Synonyme de chipie (Argot du peuple). N.

France, 1907 : Prendre des airs pincée, afficher une vertu intempestive.

La petite pensionnaire, qui en sait aussi long que papa et maman, se croit obligée de faire sa Sophie.

On dit aussi : faire sa Lucie.

— Car tu ne vas pas faire ta Sophie,
Lili,
Et je t’apprendrai la philosophie,
Au lit.

(Montoya)

D’abord ej’ comprends pas qu’on s’gêne.
Ej’ suis ami d’la liberté,
J’fais pas ma Sophie, mon Ugène,
Quand ej’ pète, ej’ dis : J’ai pété.
Et pis nous sommes en République,
On n’est pus su’ l’pavé du roi ;
Va, va, mon vieux, va, pouss’ ta chique,
T’es dans la ru’, va, t’es chez toi.

(Aristide Bruant)

Faire sa tata

France, 1907 : Se dit d’une fille ou d’une petite fille qui prend des airs d’importance ou veut jouer à la dame.

Faire sa tête

France, 1907 : Se maquiller, en argot théâtral.

L’autre soir, étant monté dans la loge de Baron, aux Variétés, je trouvai l’artiste debout et penché sur une petite glace, en train de faire sa tête.

(Paul Alexis)

France, 1907 : Même sens que faire sa gueule.

Faire sa toilette

Delvau, 1864 : Se laver après le coït, le cul lorsqu’on est femme, la queue quand on est homme, pour éviter les dangers qui résulteraient infailliblement d’une accumulation de sperme — et par amour de propreté, lorsqu’on s’est habitué dès l’enfance à être propre.

N’entre pas, mon chéri ; attends que j’aie fini ma toilette.

Lemercier de Neuville.

Faire saigner

Rossignol, 1901 : Faire de la peine à quelqu’un.

Faire saluer le polichinelle

Delvau, 1866 : Réussir, faire mieux que les autres, — dans l’argot des faubouriens. C’est une allusion aux tirs à l’arbalète des fêtes publiques, où, quand on met dans le mille, on voit sortir et saluer une tête de Turc quelconque.

France, 1907 : Réussir, dépasser les autres ou faire mieux qu’eux. Allusion à certains jeux de foire où celui qui gagne fait sortir un polichinelle ou une tête de guignol quelconque.

Faire sauter la coupe

Larchey, 1865 : Battre à l’écarté de façon à retourner le roi, en neutralisant la coupe.

Delvau, 1866 : Battre les cartes de façon à toujours amener le roi, — dans l’argot des grecs.

France, 1907 : Placer, à l’aide d’une manipulation habile, la carte coupée au-dessus ou au-dessous du paquet.

Faire sauter le bouchon

Delvau, 1864 : Branler un homme, ou baiser avec lui, — ce qui, naturellement, provoque l’éjaculation du sperme.

Il se sent déjà des velléités pour cette friponne de Célestine, dont il est voisin, et qui joue avec lui de la prunelle à faire sauter le bouchon.

A. de Nerciat.

Vous êtes gai comme un sermon,
L’abbé, le diable vous conseille ;
Faites sauter votre bouchon
Sans ma bouteille.

H. Cantel.

Faire sauter le système (se)

Delvau, 1866 : v. réfl. Se brûler la cervelle, — dans l’argot des faubouriens.

Faire ses choux gras de quelque chose

Delvau, 1866 : En faire ses délices, s’en arranger, — dans l’argot des bourgeois.

Faire ses frais

Delvau, 1866 : v. a. Réussir à plaire à une jolie femme un peu légère, — dans l’argot des libertins, qui sèmeraient en vain leur esprit et leur amabilité s’ils ne semaient en même temps quelques gouttes de « boue jaune ».

Delvau, 1866 : v. a. Emmener un homme du Casino, — dans l’argot des petites dames, à qui leur toilette de combat coûterait bien cher si elles étaient forcées de la payer.

Faire ses orges

Delvau, 1866 : v. a. Faire des profits illicites, — dans l’argot du peuple.

Virmaître, 1894 : Gratter. Faire danser l’anse du panier. Engraisser ses poches aux dépens de celles des autres (Argot du peuple).

France, 1907 : Voler ; détourner des marchandises ou des denrées ; s’engraisser du bien d’autrui.

Faire ses petites affaires

Delvau, 1864 : Employé dans un sens obscène pour faire l’acte vénérien.

Ils se firent allumer du feu dans une chambre où ils firent leurs petites affaires.

Tallemant des Réaux.

Faire ses petits paquets

Delvau, 1866 : v. a. Être à l’agonie, — dans l’argot des infirmiers, qui ont remarqué que les malades ramassent leurs draps, les ramènent vers eux instinctivement, à mesure que le froid de la mort les gagne.

France, 1907 : Mourir.

Faire siphon

Fustier, 1889 : Argot des voyous. Vomir.

Faire soixante-neuf

Delvau, 1864 : Gamahucher une femme pendant qu’elle vous suce la pine, — ce qui ne peut se faire qu’en intervertissant mutuellement la position ordinaire au coït, c’est-à-dire en faisant d’un 6 un 9. et d’un 9 un 6 : 69.

Soixante-neuf et son vit se redresse !
Soixante-neuf ferait bander un mort !

(Chanson anonyme moderne.)

Faire son beurre

Virmaître, 1894 : à la même signification. V. Faire ses orges.

Rossignol, 1901 : Gagner de l’argent. Un domestique fait aussi son beurre lorsqu’il fait danser l’anse du panier.

France, 1907 : Réaliser des bénéfices, faire des profits.

— Et si ton monsieur est bien nippé, demande-lui un vieux paletot, j’en ferai mon beurre.

(Émile Zola, L’Assommoir)

Faire son Cambronne

Delvau, 1866 : Cacare, — dans l’argot dédaigneux des duchesses du faubourg Saint-Germain, qui disent cela depuis l’apparition des Misérables de Victor Hugo.

France, 1907 : Euphémisme pour faire sa merde.

Faire son cheval de corbillard

Fustier, 1889 : Faire le malin. Poser.

France, 1907 : Faire ses embarras. Allusion aux panaches dont la vanité des vivants orne les chevaux qui portent les morts en terre.

Faire son deuil

Larchey, 1865 : Se passer.

Tu vas faire ton deuil de me voir avant deux ou trois heures.

L. Reybaud.

Faire son deuil d’une chose

Delvau, 1866 : La considérer comme perdue, s’en passer, — dans l’argot du peuple.

Faire son devoir

Delvau, 1864 : Employé dans un sens obscène pour faire l’acte vénérien.

Et si l’époux avait fait son devoir.

Cl. Marot.

Il y vint tout apprêté en chemise pour faire son devoir.

Brantôme.

Quand le mari fut couché et qu’il eut fait son devoir.

Tallemant des Réaux.

Faire son étroite

Delvau, 1864 : Faire la dégoûtée, en parlant d’une femme à qui un homme propose de la baiser.

…Homme de qui la femme…
Fait l’étroite avec lui, même lorsqu’elle est large.

L. Protat.

Faire son fendant

France, 1907 : Faire l’important, le rodomont, le tranche-montagne, toujours prêt à fendre les crânes suivant l’usage des Gascons. Aussi disait-on autrefois fendant de Gascogne.

Sans faire cependant le fendant de Gascogne,
Si j’eusse eu la mia spada di Catalogne,
Je croi qu’ils n’en auroient croqué que d’une dent ;
Mais elle se rompit, ô cruel accident !
Je sentis un frisson se couler dans mes veines.

(Nicolas R. de Grandval, Le Vice puni)

Faire son gaz

Larchey, 1865 : Aller à la garde-robe (Dict. d’Argot, 1827).

Faire son joseph

Delvau, 1864 : Résister aux avances d’une femme, comme le fils aîné de Jacob à madame Putiphar.

Faire son michaud

Delvau, 1866 : v. a. Dormir, — dans le même argot [du peuple].

Faire son palais-royal

Delvau, 1864 : Se promener dans les galeries du Palais-Royal pour y raccrocher des hommes, — ce qui avait lieu surtout lorsque le Palais-Royal était un immense bordel où se donnaient rendez-vous, pour jouir, les membres virils des cinq parties du monde.

De tous les points de Paris une fille de joie accourait faire son Palais-Royal.

H. De Balzac.

Faire son temps

Delvau, 1866 : v. a. Rester en prison ou au bagne pendant un nombre déterminé de mois ou d’années, à l’expiration duquel on est libre. — Se dit aussi du Service militaire auquel on est astreint lorsqu’on est tombé à la conscription.

France, 1907 : Subir entièrement sa peine d’emprisonnement ou de bagne.

France, 1907 : Accomplir son service militaire.

Faire son trou

France, 1907 : Se faire une place dans la société.

Il prenait la résolution de parvenir, de prendre la fortune n’importe où, comme une fille qui se moque, se révoltant contre le sort inclément, il se jurait de sortir de l’ombre où la vie l’avait jeté dès la naissance, et il se donnait sa parole de mettre tout en œuvre pour être quelqu’un pour faire, lui aussi, son trou. Expression familière et pitoyable. Faire son trou, nous le faisons tous chaque jour, comme les trappistes, la tombe.

(Félicien Champsaur, Le Mandarin)

Faire suer

Bras-de-Fer, 1829 : Tuer.

Delvau, 1866 : v. a. Tuer. — dans l’argot des escarpes, qui d’un coup de surin, procurent immédiatement à un homme des sueurs de sang. — Faire suer un chêne. Tuer un homme.

Virmaître, 1894 : Faire suer une affaire, lui faire rendre l’impossible. Faire suer, expression employée par les cuisiniers pour faire revenir certaines viandes très légèrement dans la casserole. Dire à quelqu’un : Vous me faites suer, signifie : Vous m’embêtez (Argot du peuple).

France, 1907 : Tirer le plus d’argent possible d’un procès on d’une affaire.

Il introduit le plus d’incidents qu’il peut dans la même cause ; il entasse instances sur instances, il tente procès sur procès. Il ne fait pas seulement les actes nécessaires au procès, il commet tous ceux que la loi autorise directement ou indirectement. Bref, son talent consiste à faire suer (c’est le mot) à une cause tout ce qu’il est légalement possible d’en extraire en la pressurant.

(Altaroche, L’Avoué)

France, 1907 : Faire revenir légèrement de la viande dans une casserole.

France, 1907 : Ennuyer, importuner.

— Ainsi, leur politique extérieure, vrai ! ça fait suer depuis quelque temps.

(Émile Zola, L’Assommoir)

Faire suer le chêne

Bras-de-Fer, 1829 : Assassiner.

Virmaître, 1894 : Tuer un homme (Argot des voleurs).

Hayard, 1907 : Tuer quelqu’un.

Faire suer un chêne

Clémens, 1840 : Assassiner un homme.

M.D., 1844 : Assassiner un homme.

France, 1907 : Tuer un homme.

Faire suisse

Virmaître, 1894 : Ouvrier qui boit seul et ne fraternise jamais avec ses camarades (Argot du peuple). V. Ours.

Rossignol, 1901 : Boire seul.

Hayard, 1907 : Boire seul.

France, 1907 : Boire ou manger seul, dépenser son argent en égoïste sans inviter un camarade. Ce délit de lèse-camaraderie était sévèrement puni dans l’ancienne armée, — je parle de celle où l’on faisait sept ans de service. Généralement, quand le coupable était surpris, on lui enlevait son verre qu’on vidait à sa santé ; la seconde fois, on lui en jetait le contenu au visage, et, s’il y avait récidive, on faisait sauter le lascar en couverte.

— Ah ! vous n’en savez rien ? continua Hurluret ; eh bien, moi, je m’en vais vous le dire. Ça signifie purement et simplement que vous êtes un goinfre et un porc, qui cachez vos provisions dans un lit qui n’est même pas le vôtre, pour les dévorer sournoisement, à l’insu de vos camarades !
À ces mots, un murmure s’éleva :
— Hou ! Hou ! Il fait suisse !l Il fait suisse !
— Parfaitement, reprit Hurluret, vous vous conduisez d’une façon ignoble, et si vos camarades vous passaient en couverte, ce n’est fichtre pas moi qui les en empêcherais.

(G. Courteline, Les Gaietés de l’escadron)

Dans son Dictionnaire d’argot, Lorédan Larchey fait dériver cette expression de boire avec son suisse. S’appuyant sur une citation extraite de Vidal : « Le soldat a le point d’honneur de ne jamais manger ou boire seul. Cette loi est tellement sacrée que celui qui passerait pour la violer serait rejeté de la société militaire ; on dirait de lui : « Il boit avec son suisse », et le mot est une proscription. » Le soldat, dit Lorédan Larchey, ne peut boire avec son suisse (concierge) puisqu’il n’en a pas : donc il boit seul. Ironie inventée pour rappeler quelque engagé d’opulente famille aux règles de la fraternité. » Je ne partage pas l’avis de l’auteur précité quant à l’origine de cette expression. On ne dit pas d’ailleurs boire avec son suisse, mais faire suisse, c’est-à-dire faire comme un Suisse. Il faut se rappeler que les Suisses ont eu de tous temps une réputation de lésinerie et d’avarice que l’avidité de leurs aubergistes n’a pas contribué à détruire : « Il était Suisse de nation, empoisonneur de profession et voleur par habitude. » Cette épigramme du marquis de Grammont dans ses Mémoires a été appliquée bien souvent aux Suisses, et, il faut l’avouer, avec quelque raison.
L’expression viendrait de la coutume des soldats des anciens régiments suisses de tirer chacun de leur côté et d’aller boire seuls.

— Allons, descends, j’aim’ pas fair’ suisse,
T’as l’temps… Y n’est qu’ménuit un quart
Et pis tu m’plais… T’as l’air jocrisse…
Les femm’s faut pas qu’ça soit roublard…

(Fulbert Mayrat)

Faire sur l’orgue

France, 1907 : Dénoncer.

Faire tapisserie

France, 1907 : Garnir les banquettes ou les sièges d’une salle de bal sans jamais être invitée à danser ; à la grande joie des petites amies plus favorisées, la pauvre fille délaissée semble, en effet, tapisser les murailles.

Madame se prépare à partir pour le bal.
La petite l,ina, cinq ans, la regarde un instant, puis tout à coup :
— Tu ne prends pas ton ouvrage, maman ?
— Mais on ne travaille pas en soirée, ma chérie.
— Alors… pourquoi papa dit-il que tu fais toujours tapisserie ?

Faire tête-bêche

Delvau, 1864 : Se placer mutuellement de façon que la pine de l’homme soit à la hauteur de la bouche de la femme qui la suce, et que le con de la femme soit à la hauteur de la langue de l’homme qui s’y introduit. De même, naturellement, entre tribades qui veulent jouir ensemble.

À leurs côtés j’entends
Des cris intermittents ;
Géraudon et Tautin
Font tête-bêche un repas clandestin.

J. Duflot.

Mais, parfois, quand il trouve une motte bien fraîche,
Ce qu’il aime avant tout, c’est faire tête-bêche.

L. Protat.

Faire tomber le rouge

Delvau, 1866 : Avoir l’inconvénient de la bouche — dans l’argot des comédiens, à qui l’émotion inséparable donne souvent cette infirmité passagère.

Faire tout

Delvau, 1864 : Ce qu’une fille qui raccroche un homme dans la rue lui promet de faire quand ils seront seuls dans une chambre du bordel ; cela consiste à se mettre nue, à le branler, à le sucer, etc., etc.

J’te collerai cent sous… Mais tu m’f’ras tout !

Lemercier de Neuville.

France, 1907 : Vider son ventre.

Est allé à la rencontre
De Marlborough, ce dit-on,
Quand il fut en sa présence,
Il entendit le canon.
Il eust si grand peur aux fesses
Qu’il fit tout sur ses talons.

(Chanson contre le maréchal de Villeroi)

Faire transparent

France, 1907 : Employer, en peinture, des teintes très claires.

Faire trente et un

France, 1907 : Avoir des palpitations de cœur ; être essoufflé.

Faire trêve du cul

Delvau, 1864 : S’arrêter dans l’acte vénérien.

Pourquoi fais-tu, dit la garce affolée,
Trêve du cul ?

Régnier.

La garce après maintes secousses,
Lui dit : Faisons trêve du cu.

Théophile.

Faire tunnel

France, 1907 : Passer la nuit à jouer aux cartes ; argot ecclésiastique.

— Toi, mon cher, reprend l’abbé, tu n’as pas eu besoin de passer au collège romain pour être docteur ès cartes. Et si j’avais autant de milliers de francs que de fois tu as fait tunnel, je serais aussi riche que notre vieux Crésus d’aumônier, et je pourrais tranquillement me retirer sur mes terres et cultiver mes choux.

(Charles Romain, Le Prêtre Ambroise)

Faire un as de cœur

France, 1907 : « Qnelquefois les clients, principalement les étudiants, les jeunes ouvriers et les commis de magasin, se cotisent pour former la somme destinée au paiement d’une seule fille. On réunit le prix de la passe, la sous-maîtresse arrive avec un jeu de cartes, les visiteurs se rangent autour d’une table, et, après avoir battu le jeu et fait couper, la sous-maîtresse distribue les cartes. Celui à qui le hasard décerne l’as de cœur choisit une dame et monte. Cet usage est très courant ; on appelle cela : faire un as de cœur. Les trois quarts du temps, le plus malin de la bande a eu soin, en entrant, de glisser à la dérobée une pièce de vingt sous à la sous-maîtresse ; il peut être certain que c’est à lui que tombera l’as de cœur, et les camarades n’y auront vu que du feu. »

(Léo Taxil, La Prostitution contemporaine)

Faire un bœuf

France, 1907 : Guillotiner.

Faire un caillou

France, 1907 : Faire payer à quelqu’un un objet bien au-dessus de sa valeur. Voir Caillou.

Faire un coucher

France, 1907 : C’est, dans l’argot des prostituées, garder un homme pour la nuit.

Il n’est pas rare qu’un homme passe la nuit entière avec une fille : cela s’appelle faire un coucher. Des fois, un client vient sur les huit heures, prend un verre de chartreuse avec les lemmes, fixe son choix et retient pour la nuit la fille qui lui plait ; puis il va se promener en ville et revient entre une heure et deux heures du matin. On dit alors de la fille ainsi retenue ; « Une telle a son coucher. »

(Léo Taxil, La Prostitution contemporaine)

Faire un coup

France, 1907 : Commettre un délit ou un crime.

Le passant. — J’ai pas été heureux, aujourd’hui ; j’aurais mieux fait de rien faire.
La fille. — Comment ça ?
Le passant. — J’croyais faire un bon coup, qui m’semblait marcher tout seul.
La fille. — T’as été surpris ?
Le passant. — Ben mieux ; j’ai peur d’avoir tué un homme !…
La fille. — En v’là de l’ouvrage !… Eh ben, est-y mort ?
Le passant. — J’en sais rien… j’ai pas éyu l’temps d’y d’mander.

(Henry Monnier)

Faire un coup d’étal

France, 1907 : Voler des marchandises sur un comptoir où à l’étalage.

Faire un coup de fourchette

France, 1907 : Voler dans une poche en introduisant délicatement deux doigts.

Faire un coup de roulotte

France, 1907 : Voler dans une voiture.

Faire un cran

Larchey, 1865 : Tenir bonne note d’une chose.

Faire un dieu de son ventre

Delvau, 1866 : v. a. Ne songer qu’à bien manger et à bien boire, — dans l’argot des bourgeois.

Faire un fromage

France, 1907 : S’accroupir de façon à faire un rond avec sa robe.

Et, gamine, elle s’amusait à tournoyer au milieu de la pièce, si étroite que tous les meubles s’y cognaient, puis faisant : « Hou ! » de toute sa voix, elle s’accroupissait sur le carreau qu’elle couvrait de sa robe claire étalée en un magnifique fromage.

(Gilbert Brevannes, Mère et fils)

Faire un homme

Delvau, 1864 : Jeter son hameçon dans une foule masculine, au Casino ou ailleurs, et le retirer avec un goujon au bout.

Les lorettes ne vont pas dans les réunions publiques pour autre chose que pour faire des hommes.

Seigneurgens.

Delvau, 1866 : v. n. Se faire emmener du bal par un noble inconnu, coiffeur ou banquier. Argot des petites dames.

Virmaître, 1894 : Action de lever au bal ou ailleurs un individu à la recherche d’une bonne ou d’une mauvaise fortune, à l’heure, à la course ou à la nuit (Argot des filles).

Rossignol, 1901 : Une prostituée fait un homme lorsqu’elle va avec lui quelques minutes, soit chez elle, soit en hôtel.

France, 1907 : Se dit d’une fille publique qui raccroche un client.

Aux vétérans de la débauche,
Avec les roses qu’elle vend
Elle offre d’un air triste et gauche
Son pauvre petit corps d’enfant.
Car il faut qu’elle fasse un homme,
Qu’elle apporte un louis au moins,
Sinon son « bon père » l’assomme
De ses inexorables poings.

(Paul Nagour, La Petite Bouquetière)

Dors sous l’arche du vieux pont,
Au bruit de l’onde qui pleure.
Ta mère, d’un œil fripon,
Fait les passants à cette heure,
Et l’alphonse, son amant
La guette cyniquement.
Fais dodo, mon petit ange ;
Je suis ta mère la Fange.

(Paul Nagour, Rimes rouges et noires)

Faire un loup

Rossignol, 1901 : Un ouvrier qui a mal débité son bois pour fabriquer un meuble a fait un loup.

Faire un malheur

France, 1907 : Tuer quelqu’un.

— Voyez-vous ces bois et ces mâquis, dit-il à Orso au moment de se séparer : un homme qui aurait fait un malheur y vivrait dix ans en paix sans que gendarmes ou voltigeurs vinssent le chercher. Ces bois touchent à la forêt de Vizzavona ; et, lorsqu’on a des amis à Bocognano ou aux environs, on n’y manque de rien. Vous avez là un beau fusil, il doit porter loin. Sang de la Madone ! quel calibre ! On peut tuer avec cela mieux que des sangliers.

(Prosper Mérimée, Colomba)

Faire un miche

Halbert, 1849 : Attraper un simple.

Faire un nez, une tête

France, 1907 : « Faire un nez appartient depuis longtemps, comme faire une tête, à l’argot courant, pour exprimer la stupéfaction ou la déception. » C’est ce que dit l’Intermédiaire des chercheurs et Curieux, qui oublie que faire un nez ou une tête exprime aussi la mauvaise humeur.

Faire un peigne, faire le peigne

Rigaud, 1881 : Prendre la clef des champs, — dans l’ancien jargon du peuple. Peigne ou pigne, signifie clef.

Faire un pli (ne pas)

Delvau, 1866 : Aller tout seul, — dans l’argot du peuple.

Faire un poivrot

France, 1907 : Fouiller et voler un homme ivre.

Faire un poulain

Rigaud, 1881 : Tomber de cheval, — dans le jargon des régiments de cavalerie ; jeu de mot hippique ; c’est-à-dire : mettre bas son cavalier.

Faire un rancart

France, 1907 : Donner des informations à la police.

Faire un revers

Rigaud, 1881 : Tricher entre grecs, faute de mieux. La lutte s’engage, ordinairement, dans les villes d’eaux entre grecs du Midi et grecs du Nord qui se détestent et se font une grande concurrence. Naturellement l’un d’eux, le plus souvent un grec de première année, ignore à qui il a affaire. Au lieu d’une dupe facile à plumer, il trouve son maître, un vieux professeur aussi rompu aux tricheries que Mithridate aux poisons.

Faire un rigolo

Virmaître, 1894 : Vol identique à celui que l’on nomme l’embrassade. L’homme volé n’a guère envie de rigoler et ne trouve pas rigolo le vol dont il est victime (Argot des voleurs).

France, 1907 : Se précipiter sur un inconnu sous le prétexte de l’embrasser en le prenant pour un parent ou un ami, et lui voler en même temps sa montre ou son porte-monnaie. Le volé, tout ahuri de l’accolade, fait, en effet, un visage rigolo.

Faire un serpent

Rigaud, 1881 : Courir dans la cour de récréation en se tenant à la queue leu-leu, — dans le jargon des collégiens. (L. Larchey)

Faire un sort à une fille

France, 1907 : La mettre dans ses meubles.

Avec celui-là, il n’est nullement question de mariage ; mais il promet à Mariette de lui faire un sort, elle cède aux vœux du philanthrope de Paris ; et elle s’aperçoit bientôt que ce que les philanthropes appellent un sort, consiste en une chambre à un troisième étage de la rue Tique-tonne, une commode, un lit, un canapé fané, et quatre lithographies colorées représentant l’Europe, l’Asie, l’Afrique et l’Amérique.

(Taxile Delord, La Femme sans nom)

Faire un tassement

Delvau, 1866 : v. a. Boire un verre de cognac ou de madère au milieu d’un repas, — dans l’argot des bohèmes. On dit aussi Faire un trou.

France, 1907 : Voir Faire un trou.

Faire un trou

Larchey, 1865 : Prendre un verre d’eau-de-vie au milieu du repas, pour précipiter la digestion, faire un trou destiné à l’ingestion de nouveaux aliments.

France, 1907 : Boire un verre d’eau-de-vie, au milieu d’un copieux repas, pour faciliter la digestion, ce qui s’appelle le trou du Normand. On dit aussi : faire un tassement.

Faire un trou à la lune

Larchey, 1865 : Décamper par un trou à la clarté de la lune.

Mazarin a fait un trou à la lune, comme font ordinairement les larrons.

Le Ministre fugitif, Paris, 1651.

Delvau, 1866 : Faire faillite, enlever la caisse de son patron et se réfugier en Belgique. Argot du peuple.

Faire un trou dans la lune

Virmaître, 1894 : Faire banqueroute (Argot du peuple).

Faire un trou dans la lune ou à la lune

France, 1907 : Se sauver avec la caisse.
On disait autrefois : faire un trou à la nuit, métaphore prise des lieux clos, fermés de murailles, d’où l’on ne pouvait s’esquiver qu’en pratiquant un trou dans la porte ou dans le mur. On ouvrait ainsi une trouée à la nuit.
Didier Loubens donne de ce dicton une explication plus probante : « Autrefois le terme des contrats et des paiements était ordinairement fixé à la lune qui précède et détermine la fête de Pâques avec laquelle commençait l’année, sous la troisième race de nos rois jusqu’au reigne de Charles IX. C’est pour ce motif que les débiteurs qui ne payaient pas plus à l’échéance de la pleine lune que s’il n’eût pas été pleine lune, furent supposés faire une brèche ou un trou à la lune. »

Faire une affaire

Clémens, 1840 : Commettre un vol.

Faire une belle jambe

Delvau, 1866 : Ne servir à rien, — dans l’argot du peuple, qui emploie cette expression ironiquement et à propos de n’importe quoi. Ça lui fait une belle jambe ! La « Belle Heaulmière » de François Villon disait dans le même sens : J’en suis bien plus grasse !

Faire une cavalcade

Delvau, 1864 : La femme sur le dos et le vit dans le con, l’homme, au lieu de rester entre les cuisses de la dame, les serre l’une contre l’autre afin de jouir davantage et passe ses genoux par-dessus elle, comme s’il allait à cheval.

Ça fait des manières, un porte-maillot comme ça !… et qui en a vu, des cavalcades !

Gavarni.

Faire une commission

Delvau, 1866 : v. a. Levare ventris onus, — dans l’argot des bourgeoises.

Faire une conquête

Delvau, 1864 : Débaucher une femme, une fille ; l’emmener coucher.

Faire une coquille de Bergerac

Delvau, 1866 : v. a. Se dit, — dans l’argot des tailleurs, quand un ouvrier a fait une pièce dont les pointes de collet ou de revers, au lieu de se courber en dessous, relèvent le nez en l’air et poignardent le ciel. C’est une plaisanterie de Gascon, maintenant parisienne.

Faire une cote mal taillée

France, 1907 : Concessions mutuelles que se font le créancier et le débiteur dans un compte accepté en gros sans entrer dans les détails. Cote est pour coche. Cette expression proverbiale vient de l’ancien usage, existant encore dans nombre de provinces, de marquer, par des entailles ou coches faites sur deux planchettes de bois coupées d’un seul morceau, la quantité de pain prise à un boulanger. Pour chaque pain, il fait une entaille qui coupe à la fois les deux planchettes jointes, et chacun, vendeur et acheteur, garde la sienne. Le nom de coche fut, par synecdoque, donné au morceau de bois. Au règlement de compte, si les entailles ne concordaient pas, on disait que c’était une cote mal taillée, et l’erreur était partagée entre le boulanger et son client.

Faire une croix

France, 1907 : C’est une chose extraordinaire, il faut faire une croix. Allusion à la coutume des paysans de jadis qui, ne sachant pas écrire, marquent leur cheminée d’une croix pour se rappeler les événements remarquables ou les choses qui les intéressaient.

Faire une entrée de ballet

Delvau, 1866 : v. a. Entrer quelque part sans saluer, — dans l’argot des bourgeois, amis des bienséances.

France, 1907 : Entrer quelque part sans saluer.

Faire une fausse couche

Delvau, 1864 : Éjaculer en dormant, soit parce qu’on est couché sur le dos et que cette position vous met toujours en érection, soit parce qu’on a un songe libertin dans lequel on croit foutre réellement une femme.

… Je bandais, et si fort, sur ma couche étendue,
Que j’en fis une fausse…

Louis Protat.

Faire une femme

Delvau, 1864 : Distinguer parmi la foule, au bal ou au théâtre, une femme quelconque, qui vous porte à la peau, et l’emmener coucher.

En attendant, il a fait une femme superbe, dit un autre en voyant Rodolphe s’enfuir avec la danseuse.

Henry Murger.

— On dit aussi dans le même sens : Lever une femme.

Delvau, 1866 : v. n. Nouer une intrigue amoureuse avec elle, — dans l’argot des étudiants.

France, 1907 : Faire une conquête amoureuse.

Les époux Félamour, en voyage de noces à Paris, prennent le café sur la terrasse.
Un pauvre diable de dessinateur s’approche avec son album à portraits, et très humble :
— Je ne vous demande que cinq minutes pour faire madame…
— Dites donc, artiste !… riposte Félamour scandalisé.

(Gil Blas)

On ne s’imagine pas ce qu’il y a de rieuses pour un petit nombre de sentimentales. Dans un théâtre, le comique fait plus de femmes que le jeune premier. Colbrun, Lassagne et Gil Pérès ont été plus aimés que Bocage, Delaunay et Fechter.

(Aurélien Scholl)

Faire une fin

Delvau, 1864 : Se marier. — Après avoir bien vécu, bien fait la noce, devenir épicier, maître de bordel et… cocu, comme X, Y et Z, que tout le monde connaît. — Ces dames font également une fin.

Quoique l’état ne manque pas
D’appas,
Foi de Margot, si ça ne reprend pas,
Je m’expatrie.
Ou bien je me marie ;
Il faut enfin
Que je fasse une fin.

F. Seré.

Delvau, 1866 : v. n. Se marier, — dans l’argot des viveurs, qui finissent par où les gens rangés commencent, et qui ont lieu de s’en repentir.

France, 1907 : Se marier.

… La maîtresse, celle qui vit en concubinage et qui, sans être épouse, jouit de tous les avantages de la situation. D’habitude elle n’est point malheureuse ; on la rencontre partout. Parfois quelques vertus, le plus souvent beaucoup de vices. Marchant inconsciente dans la vie, elle finit la plupart du temps par faire une fin. L’amant, bête comme une oie et qu’elle a soigné pendant une maladie, se laissant prendre à ce faux dévouement et à la glu de l’habitude, épouse ! Ces ménages en détrempe sont une spécialité de la grande ville. Prostitution : article Paris !

(Louis Daryl)

Faire une grosse dépense

Delvau, 1864 : Faire de suite un grand nombre de fois l’acte vénérien.

Le duc de Saux avait fait la nuit une grosse dépense avec Louise d’Arquien, fameuse courtisane.

(La France galante.)

Faire une heure

Rigaud, 1881 : Dormir une heure, — dans le jargon du régiment. Mot à mot : faire une heure de sommeil. — Faire une sacrée heure, dormir longtemps.

Faire une maison entière

Rigaud, 1881 : Assassiner tous les habitants d’une maison, et faire main basse sur tout ce qui s’y trouve, — dans le jargon des voleurs.

Faire une moulure

Delvau, 1866 : v. a. Levare ventris onus, — dans l’argot des menuisiers.

Faire une passe

France, 1907 : S’accoupler avec un passant payant.

À droite, également peinte sur le mur, se trouve une fille de débauche, plantureuse Vénus, dans le costume d’Ève. Elle vient de faire une passe et, souriante (le miché a dû être généreux), elle s’avance vers son souteneur qui, non moins souriant qu’elle, lui tend gracieusement une cuvette pleine d’eau. Et pour qu’on ne se trompe puis sur le rôle de « l’homme poisson », un superbe maquereau sert de piédestal à la femme.

(G. Macé, Un Joli Monde)

Faire une pince au bonnet de grenadier

Delvau, 1864 : Se dit des femmes qui, lorsqu’on les baise, se placent de façon à rendre l’introduction du membre moins facile et à faire supposer — aux imbéciles — qu’elles sont étroites.

V’là pourtant qu’un jeune vélite,
Malgré sa taille tout’ petite,
Un soir voulut en essayer.
À ses désirs je m’ prête
Mais je n’ perds pas la tête :
Pour qu’il n’y entr’ pas tout entier,
Je fis un’ pince — au bonnet d’ guernadier.

Henri Simon.

Faire une queue

Rossignol, 1901 : Faire une infidélité à sa femme ou à sa maîtresse est lui faire une queue.

Faire une saucisse

France, 1907 : Passer la langue dans la bouche d’une femme.

Faire une scène, un air

Rigaud, 1881 : Faire réussir, souligner par des applaudissements un air, une scène, en terme de théâtre.

On peut faire tous les airs et presque tous les duos des Huguenots.

(Ch. de Boigne.)

Faire une tête (se)

Delvau, 1866 : Se grimer d’une manière caractéristique, suivant le type du personnage à représenter. Argot des coulisses. Got, Mounet-Sully, Paulin Ménier excellent dans cet art difficile.

Faire une tête dans la filasse

Halbert, 1849 : Aller se coucher.

Faire valser

Larchey, 1865 : Accabler de coups.

Nous ferons valser les Prussiens.

Henry, Ch., 1838.

Faire venir l’eau à la bouche

Delvau, 1864 : Donner soif de fouterie à une vierge où à un puceau, en faisant devant eux un tableau éloquent des béatitudes amoureuses.

Elle lui sait si bien représenter les douceurs de l’amour, avec des instructions et des naïvetés si plaidantes, qu’elle lui en fait venir l’eau à la bouche.

Mililot.

Faire venir le foutre à la bouche

Delvau, 1864 : Mettre une femme ou un homme en appétit d’amour, en patinant l’une ou en polissonnant avec l’autre.

T’es bien monté… mâtin ! Ça vous fait venir la foutre à la bouche.

Lemercier de Neuville.

Faire vit qui dure

Delvau, 1864 : Être avare de son sperme, ne le dépenser qu’à bon escient, avec sa propre femme ou avec celles des autres, mais sans furie, sans extravagance, en homme qui tient à jouir jusqu’aux confins extrêmes de l’âge mûr.

Puis sentant le bouillon monter
Et voulant fair’ vit qui dure,
Je me retrouve en posture,
Un’ chandelle où vous savez.

(Parnasse satyrique.)

Faire voir la feuille à l’envers

Delvau, 1864 : Baiser une femme dans les bois, parce qu’étant sur le dos et levant les yeux au ciel elle ne peut apercevoir que le dessous des feuilles d’arbre.

Bientôt, par un doux badinage,
Il la jette sur le gazon.
— Ne fais pas, dit-il, la sauvage,
Jouis de la belle saison…
Ne faut-il pas, dans le bel âge
Voir un peu la feuille à l’envers ?

Rétif de la Bretonne.

Faire voir la lune

Delvau, 1864 : Montrer son cul.

Parlez-moi d’une planète
Qu’on examine à l’œil nu
Chaque soir, me dit ma brune,
Si tu veux être discret,
Je te ferai voir la lune
À dada sur mon bidet.

A. Jacquemart.

Faire zague, zague

Delvau, 1864 : Branler un homme.

Comtesse, empoigne-le par le milieu… La ! là !… à merveille ! Promène ta main d’un bout à l’autre, et serre-le-moi fort, de peur qu’il n’échappe… Fais zague, zague… Ah !…

La Popelinière.

Faire zizi, panpan

Delvau, 1864 : Faire l’acte vénérien — si plein d’onomatopées.

Près d’Ève, Satan déguisé,
Avec deux mots fit sa conquête ;
En les prononçant, le rusé
Brandillait la queue et la tête.
Voici les deux mots du serpent :
Zizi, panpan.

Louis Festeau.

Faire, refaire au même

Larchey, 1865 : Tromper.

Je me suis engagé tantôt, et les racoleurs qui croient m’avoir fait me retiennent.

Garde-moi le secret, brûle ma lettre ; je veux faire ces drôles-ci…

Rétif, 1776.

Les soldats s’imaginent toujours que les sergents majors les refont au même.

La Bédollière.


Argot classique, le livreTelegram

Dictionnaire d’argot classique