Amuser à la moutarde (s’)
Delvau, 1866 : v. réfl. Se laisser distraire de son devoir ou de sa besogne par des niaiseries, des frivolités — dans l’argot du peuple, qui trouve sans doute que la vie pourrait se passer de ces condiments.
Rigaud, 1881 : Perdre son temps à des bêtises.
Grande colère du père Duchêne de voir les sans-culottes s’amuser à la moutarde.
(Le Père Duchêne)
Baril de moutarde
Rigaud, 1881 : Derrière.
France, 1907 : Culotte ou derrière, c’est-à-dire la partie de notre corps qui change de nom à la suite des reins. « Fi ! quel sale cul, quel baril de moutarde ! »
Croire le premier moutardier du pape (se)
Delvau, 1866 : Se donner des airs d’importance, faire le suffisant, l’entendu, — dans l’argot du peuple, qui a ouï parler du cas que les papes, notamment Clément VII, faisaient de leurs fabricants de moutarde, justement enorgueillis.
France, 1907 : Se donner et se croire beaucoup d’importance ; montrer une suffisance que rien ne justifie. Ce dicton populaire vient de ce que le pape Clément VIII éleva a des postes importants dans ses cuisines trois marmitons qui excellaient à préparer la moutarde.
Emmoutarder
France, 1907 : Euphémisme pour emmerder.
Guerre sans feu ne vaut pas mieux qu’andouille sans moutarde
France, 1907 : Mot prêté à Henri V, roi d’Angleterre, à la suite de la bataille d’Azincourt (1415), ses troupes se répandirent en France, pillant et ravageant tout. Les habitants de Paris lui envoyèrent une députation pour le prier d’empêcher les brigandages et les incendies, Henri V les renvoya en disant : « C’est l’usage de la guerre. Guerre sans feu ne vaut pas mieux qu’andouille sans moutarde. »
Moutard
anon., 1827 : Enfant.
Raban et Saint-Hilaire, 1829 : Enfant.
Bras-de-Fer, 1829 : Enfant.
Delvau, 1866 : s. m. Gamin, enfant, apprenti, — dans l’argot du peuple, qui, n’en déplaise à P. J. Leroux et à Francisque Michel, n’a eu qu’à regarder la chemise du premier polisson venu pour trouver cette expression.
France, 1907 : Petit garçon.
Au reste, si l’insolence envers la roture peut être admise comme preuve de noblesse, cette aristocratie de l’enfance en est possédée au plus haut degré, et l’égalité tant vantée du collège n’existe pas réellement. Ces patriciens superbes comprennent toute la plèbe qui les entoure sous la dénomination injurieuse de moutards ou de mômes et se livrent à leur égard à des extorsions et à des abus de pouvoir qui caractérisent un despotisme effréné.
(Henri Rolland, L’Écolier)
Moutarde
d’Hautel, 1808 : Rêver à la moutarde. Faire le pensif ; prendre sans sujet un air rêveur et mélancolique.
C’est de la moutarde après dîner. Se dit de quelque chose nécessaire à une affaire, qui arrive long-temps après qu’on y a supplée.
La moutarde lui monte au nez. Se dit de quelqu’un qui commence à s’impatienter, à s’échauffer ; à se mettre en colère.
S’amuser à la moutarde. Pour dire, à des bagatelles, à des frivolités.
Il n’appartient pas à tout vinaigrier de faire de bonne moutarde. Signifie qu’il n’est pas donné à tous les auteurs de faire de bons ouvrages.
Il est fin comme moutarde. Se dit d’une personne très-rusée.
Sucrer la moutarde. Adoucir son chagrin ; modérer son ressentiment ; reprendre quelqu’un d’une manière piquante, sans cependant le choquer.
Delvau, 1866 : s. f. Le stercus humain.
La Rue, 1894 : Excrément. Moutardier, derrière.
France, 1907 : Excrément. Baril à moutarde, le derrière.
En le lançant, il dit : Prends garde,
Je vise au baril de moutarde.
(La Suite du Virgile travesti)
Moutarde (s’amuser à la)
France, 1907 : Lambiner :s’arrêter à des bagatelles qu’on trouve sur son chemin. Ce dicton s’emploie surtout en parlant des domestiques ou des enfants qui s’attardent quand on leur envoie faire des commissions.
Moutarde (sucrer la)
France, 1907 : Adoucir un reproche un peu mordant. On dit de quelqu’un qui commence á se fâcher que la moutarde lui monte au nez.
Moutarde après dîner
Rigaud, 1881 : Trop tard, chose inutile, qui n’est pas venue au moment opportun.
France, 1907 : Chose désirée qui arrive quand on n’en a plus besoin.
Moutardier
d’Hautel, 1808 : Il se croit le premier moutardier du pape. Se dit d’un homme qui marque du dédain, de la fierté et de la hauteur envers ses semblables.
Delvau, 1866 : s. m. Le podex. On disait autrefois Baril à la moutarde, et Réservoir à moutarde.
Delvau, 1866 : s. m. Goldfinder. On dit aussi Parfumeur.
Rigaud, 1881 : Derrière.
France, 1907 : Le derrière, maitre Luc.
— En face ! Je n’ai pas besoin de renifler ton moutardier.
(Émile Zola)
Moutardier du pape
Delvau, 1866 : s. m. Homme qui s’en fait accroire, imbécile vaniteux. On dit qu’il se croit le premier moutardier du pape.
La Rue, 1894 : Vaniteux.
France, 1907 : Vaniteux.
Un pape — on ne dit pas lequel, mais c’est du temps que les papes habitaient Avignon — était harcelé par un Dijonnais qui se prétendait son neveu et demandait, à ce titre, quelque faveur spéciale. Sa Sainteté, lassée de ces importunités, dit à son secrétaire :
— Ce gaillard ne me laissera pas en paix. Il se peut qu’il soit mon parent. À quel emploi pourrais-je le nommer ?
— Saint-Père, répondit le secrétaire, j’ai pris déjà des informations ; il existe, en effet, quelque parenté lointaine, mais le postulant ne me paraît avoir besoin de rien, du moins pécuniairement. C’est un riche fabricant de moutarde.
— Voilà notre affaire, dit en riant le pape. Écrivez-lui de m’envoyer quelques pots de moutardes, et faites-lui savoir que je le nomme mon premier moutardier.
Le Dijonnais, — dit Ch. Ferrand — heureux de cette réponse, proclama partout sa bonne fortune, et se para en toute circonstance du titre original qui lui était conféré. Ses voisins ne manquèrent pas d’en rire, et depuis lors le dicton s’est acclimaté avec le sens que tout le monde connaît.
Moutardier du pape (premier)
Rigaud, 1881 : Sot orgueilleux.
Pot à moutarde
Rossignol, 1901 : Le derrière.
Valoir son pesant de moutarde
Rigaud, 1881 : Expression employée pour apprécier, en riant, un propos idiot, une excentricité, line chose ridicule, une personne grotesque. — Il vaut son pesant de moutarde. Les gens tout à fait sans façon disent : Valoir son pesant de merde.
France, 1907 : Ne rien valoir.
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